Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2022 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2203235 du 28 février 2023, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 27 mars 2023, sous le n° 23MA00746, M. A..., représenté par Me Bochnakian, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 28 février 2023 du tribunal administratif de Toulon ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Var, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, pendant cet examen, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans le même délai et la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il ne ressort pas des termes de l'arrêté contesté que le préfet aurait sollicité l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française ;
- l'arrêté en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il n'est pas désigné par l'administration comme représentant une menace à l'ordre public faisant obstacle à l'obtention d'un titre de séjour ;
- il viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988, modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marchessaux,
- et les observations de Me Albertini, substituant Me Bochnakian, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité tunisienne, né le 10 novembre 2003, serait entré en France le 10 janvier 2019, à l'âge de 15 ans. Le 27 février 2019, il est confié à l'aide sociale à l'enfance (ASE). Le 26 octobre 2021, il a sollicité une carte de séjour mention " vie privée et familiale ". Par un arrêté du 13 octobre 2022, le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement attaqué par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 13 octobre 2022.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur son insertion dans la société française ".
3. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé, appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le juge de l'excès de pouvoir exerce sur cette appréciation un entier contrôle.
4. En l'espèce, l'arrêté contesté mentionne que le rapport d'insertion établi le 13 octobre 2021 par la structure ADEPEI située à La Seyne-sur-Mer, indique que l'intéressé est motivé et sérieux. Toutefois, en première instance, le préfet du Var a produit un rapport d'insertion du 8 septembre 2021 en vue de l'obtention par M. A... d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " lequel conclut que le requérant " a démontré sa volonté de s'intégrer dans la société française ". Si le préfet a fait valoir en première instance qu'il n'est pas fait mention explicite du rapport d'insertion du 8 septembre 2021, celui-ci a été pris en compte dans l'édiction de l'arrêté contesté. La circonstance que ce rapport du 8 septembre 2021 n'ait pas été demandé par le préfet mais établi un mois avant la demande de titre de séjour et à l'appui de celle-ci est sans incidence dès lors que les dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impose pas une telle condition. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige serait illégal en raison d'un vice de procédure tiré de l'absence de consultation de la structure d'insertion et de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., né le 10 novembre 2003, a été confié au service de l'ASE du Var le 27 février 2019, à l'âge de 15 ans, par une ordonnance de placement provisoire du 27 février 2019 du tribunal judiciaire de Toulon, son placement auprès de l'ASE ayant été maintenu jusqu'au 30 octobre 2020, par un jugement en assistance éducative du 11 juillet 2019. Il a été scolarisé au collège Django à la fin de l'année 2019 puis dans une classe de 3ème UPEAA au lycée professionnel Cisson pendant six mois. M. A... a effectué plusieurs stages de plaquiste du 16 mars 2020 au 27 mars 2020 et du 22 juin 2020 au 3 juillet 2020, de peintre du 5 au 9 octobre 2020, et en maçonnerie du 26 au 30 octobre 2020, du 24 novembre 2020 au 11 décembre 2020. Il a ensuite signé un contrat d'apprentissage de carreleur avec la SARL AGK BTP, du 1er février 2021 au 22 avril 2021, puis le 7 juin 2021 avec la société Carrelage des Deux Frères, ainsi que le 24 mars 2022, avec la société l'Artista Déco pour suivre une formation de certificat d'aptitude professionnelle (CAP) de " carreleur mosaïste ". L'attestation du chef d'entreprise de cette société mentionne que M. A... est ponctuel, courageux et très motivé. Par ailleurs, selon le rapport d'insertion du 8 septembre 2021 rédigé par l'ADAPEI Var-Méditerranée, le requérant a participé à des actions citoyennes tels que des ateliers de nettoyage, de soutien aux habitants de Saint-Martin de Vésubie ou de l'association " Coup de Pouce " pour la distribution de repas et de colis alimentaire aux étudiants en situation de précarité. Ce rapport conclut que, depuis son arrivée en France, M. A... a démontré sa volonté de s'intégrer dans la société française. Toutefois, ses bulletins de notes au cours de l'année 2021-2022 relèvent de nombreuses absences injustifiées de l'ordre de 65 heures pour le premier semestre et 52 heures pour le second semestre, ainsi que des résultats insuffisants avec une moyenne générale respective de 5,90/20 et de 6,53/20 alors même qu'il aurait obtenu une moyenne de 10/20 dans la matière " atelier ". De même, le relevé des absences sur la période du 4 avril au 8 avril 2022 fait état de 25 heures d'absences non justifiées au cours de la formation au CAP " carreleur mosaïste ". Ainsi, tant l'instabilité des différentes formations pratiquées que l'insuffisance des notes obtenues et le nombre important d'absences injustifiées ne permettent pas d'établir le caractère réel et sérieux de sa formation. L'arrêté en litige précise aussi que M. A... est défavorablement connu des services de police pour vol à l'étalage le 18 juin 2020, ce qui démontre une insertion insuffisante du requérant au sein de la société française alors même qu'il ne représenterait pas une menace à l'ordre public. En outre, il a conservé de fortes attaches familiales dans son pays d'origine où vivent ses parents, ainsi que ses frères et sa sœur. Par suite, le préfet du Var a pu sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, regarder la nature des liens familiaux conservés au pays d'origine et la faiblesse des résultats obtenus comme devant l'emporter sur les autres éléments du bilan de la présence en France de M. A....
6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
7. M. A... déclare être entré irrégulièrement en France le 10 janvier 2019 sans l'établir. Sa durée de séjour d'un peu moins de 4 ans est brève à la date de l'arrêté contesté. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant, célibataire et sans enfant, serait dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 15 ans et où résident ses parents ainsi que sa fratrie comme le mentionne sa demande de titre de séjour. Dans ses conditions, l'arrêté contesté n'a pas porté une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2022.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
9. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par le requérant.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 22 septembre 2023, où siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Vincent, présidente assesseure,
- Mme Marchessaux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 octobre 2023.
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N° 23MA00746
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