La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/10/2023 | FRANCE | N°22MA01788

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 03 octobre 2023, 22MA01788


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. AH... AT... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2020 par lequel la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône a établi le tableau d'avancement au grade d'adjoint technique principal de deuxième classe au titre de l'année 2020.

Par un jugement n° 2002387 du 27 avril 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. AT....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 juin 2022, M. AT.

.., représenté par Me Pelgrin, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. AH... AT... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2020 par lequel la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône a établi le tableau d'avancement au grade d'adjoint technique principal de deuxième classe au titre de l'année 2020.

Par un jugement n° 2002387 du 27 avril 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. AT....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 juin 2022, M. AT..., représenté par Me Pelgrin, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 27 avril 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2020 par lequel la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône a établi le tableau d'avancement au grade d'adjoint technique principal de deuxième classe au titre de l'année 2020 ;

3°) d'enjoindre à la présidente du conseil départemental de procéder au réexamen de sa situation administrative et de l'inscrire sur ce tableau d'avancement ;

4°) de mettre à la charge du département des Bouches-du-Rhône la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation voire d'une erreur de droit dès lors que les premiers juges ont inversé la charge de la preuve ;

- la décision contestée est entachée d'un vice de procédure dès lors que le compte-rendu de son entretien professionnel ne lui a pas été communiqué, de sorte qu'il n'a pas été en mesure de saisir la commission administrative paritaire d'une requête tendant à ce qu'il soit demandé à son chef de service la révision de sa notation ;

- elle est entachée d'erreur de droit dès lors que l'autorité territoriale ne s'est pas exclusivement fondée sur l'appréciation de ses mérites professionnels pour établir le tableau en litige, en méconnaissance de l'article 79 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que ses mérites professionnels sont au moins équivalents à ceux des agents dont les noms figurent sur le tableau d'avancement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 février 2023, le département des Bouches-du-Rhône, représenté par la SELARL Jean-Pierre et Walgenwitz avocats associés, agissant par Me Jean-Pierre, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. AT... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la demande de première instance était irrecevable en raison de sa tardiveté et du défaut de production de la décision attaquée ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Un courrier du 17 mars 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code.

Par une ordonnance du 5 avril 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 2014-1526 du 16 décembre 2014 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Martin,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- et les observations de Me Pelgrin, représentant M. AT....

Considérant ce qui suit :

1. M. AT..., adjoint technique territorial du département des Bouches-du-Rhône, affecté depuis le 1er juillet 2019 au service du courrier en qualité d'agent de traitement du courrier, relève appel du jugement du 27 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 8 janvier 2020 par lequel la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône, après avis de la commission administrative paritaire du 17 décembre 2019, a établi le tableau d'avancement au grade d'adjoint technique principal de deuxième classe au titre de l'année 2020.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, M. AT... ne peut utilement soutenir que le tribunal a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit pour demander l'annulation du jugement attaqué.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 39 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable au litige : " En vue de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent une proportion de postes susceptibles d'être proposés au personnel appartenant déjà à l'administration ou à une organisation internationale intergouvernementale, non seulement par voie de concours, selon les modalités définies au 2° de l'article 36, mais aussi par la nomination de fonctionnaires ou de fonctionnaires internationaux, suivant l'une des modalités ci-après : 1° Inscription sur une liste d'aptitude après examen professionnel ; 2° Inscription sur une liste d'aptitude établie après avis de la commission administrative paritaire compétente, par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des agents. (...) Le nombre d'agents inscrits sur une liste d'aptitude ne peut être supérieur au nombre d'emplois pouvant être effectivement pourvus. Les listes d'aptitude ont une valeur nationale. ".

4. Il résulte de ces dispositions que les commissions administratives paritaires fonctionnent comme des commissions d'avancement lorsqu'elles sont saisies pour avis des tableaux d'avancement préparés par l'administration. Il leur appartient, dès lors, de procéder à un examen approfondi de la valeur professionnelle des agents, compte tenu principalement des notes ou comptes rendus d'évaluation obtenus par chacun d'eux et des propositions motivées formulées par les chefs de service. Cet examen ne permet aux commissions d'apprécier la valeur professionnelle des intéressés que si ces derniers ont pu utilement saisir ces commissions de requêtes tendant à ce qu'il soit demandé, le cas échéant, aux chefs de service compétents pour les noter ou les évaluer, la révision de leur notation ou de leur évaluation. Les fonctionnaires ne sont en mesure d'user du droit qui leur est ainsi reconnu que si les notes chiffrées ou les évaluations qui leur ont été attribuées ont été portées à leur connaissance.

5. Il est constant que M. AT..., victime le 5 juillet 2017 d'un accident reconnu imputable au service, a été placé en congé de maladie jusqu'au 22 mars 2019, date de sa reprise d'activité dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique, ce qui correspond à une période d'absence de 183 jours en 2017 et pendant l'intégralité de l'année 2018. Ce faisant, l'intéressé, qui ne conteste pas l'affirmation du département selon laquelle sa durée de présence a été insuffisante pour que soit appréciée sa valeur professionnelle au titre des années 2017 et 2018, raison pour laquelle il n'a pas bénéficié d'un entretien professionnel, ne peut utilement soutenir que le tableau d'avancement au grade d'adjoint technique principal de deuxième classe au titre de l'année 2020 aurait été établi au terme d'une procédure irrégulière résultant de ce qu'il n'aurait " jamais eu connaissance de son entretien professionnel " avant l'avis de la commission administrative paritaire du 17 décembre 2019. Au surplus, il ressort de la lettre du 30 janvier 2020 que, pour apprécier la valeur professionnelle de l'intéressé, l'administration s'est fondée sur les évaluations réalisées au titre des années 2015 et 2016, dont il n'est pas établi ni même allégué qu'elles n'auraient pas été communiquées à M. AT... avant la commission administrative paritaire. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 79 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " L'avancement de grade a lieu de façon continue d'un grade au grade immédiatement supérieur. Il peut être dérogé à cette règle dans les cas où l'avancement est subordonné à une sélection professionnelle. / Il a lieu suivant l'une ou plusieurs des modalités ci-après : / 1° Soit au choix par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement, établi après avis de la commission administrative paritaire, par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des agents ; (...) ". Aux termes de l'article 80 de cette même loi : " Le tableau annuel d'avancement mentionné au 1° (...) de l'article 79 est arrêté par l'autorité territoriale dans les conditions fixées par chaque statut particulier. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 8 du décret du 16 décembre 2014 relatif à l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires territoriaux : " Pour l'établissement du tableau d'avancement prévu à l'article 80 de la loi du 26 janvier 1984 (...) il est procédé à une appréciation de la valeur professionnelle du fonctionnaire, compte tenu notamment : /

1° Des comptes rendus d'entretiens professionnels ; / 2° Des propositions motivées formulées par le chef de service (...) Les fonctionnaires sont inscrits au tableau d'avancement par ordre de mérite (...) ".

7. L'inscription à un tableau annuel d'avancement ne constitue pas un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir. Le juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un recours tendant à l'annulation d'un arrêté portant inscription au tableau d'avancement et nomination dans un grade supérieur, ne peut se borner, dans le cadre de son contrôle restreint, à apprécier la valeur professionnelle d'un candidat écarté, et doit analyser les mérites comparés de cet agent et de ceux des autres agents candidats à ce même grade.

8. D'une part, il résulte de ce qui a été exposé au point 5 que l'administration n'a pas été en mesure d'apprécier la valeur professionnelle de M. AT... sur une période significative en raison de son placement en congé de maladie entre juillet 2017 et juillet 2019, de sorte que l'intéressé ne peut utilement soutenir que la décision contestée n'aurait pas résulté d'une analyse comparative de ses propres mérites avec ceux des agents promus, la circonstance qu'il figurait au premier rang sur la liste des agents promouvables au choix, laquelle comprenait 41 noms pour un nombre de promotion fixé à 25, de surcroît avec un avis très favorable de son chef de service étant, à cet égard, sans incidence sur l'appréciation à laquelle devait se livrer l'administration. L'appelant ne peut davantage utilement soutenir qu'aucun élément ne permet de comparer les critères retenus dans les lignes directrices de gestion en matière de promotion par le département, aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoyant l'application de telles lignes directrices à la date de la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

9. D'autre part, si l'appelant soutient également, certes sans être contredit, que le compte rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2019 indique qu'il a su s'intégrer dans ses nouvelles fonctions, à compter du 1er juillet 2019, dans le cadre d'une démarche volontaire, cette seule circonstance ne suffit pas davantage à établir, contrairement à ce qu'il prétend, qu'il aurait dû légitimement bénéficier d'un avancement au choix, et ce, d'autant plus qu'il ressort du courrier du 30 janvier 2020 par lequel l'administration a rejeté son recours gracieux, dont le contenu n'est pas contesté, que les appréciations littérales des années 2015 et 2016 se bornent à indiquer que les progrès réalisés doivent être consolidés. Dans ces conditions, et alors que la commission administrative paritaire a émis un avis favorable à la liste des agents proposés à l'avancement par l'administration par huit voix pour et une abstention, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. AT... aurait présenté des mérites supérieurs à ceux des agents inscrits au tableau d'avancement au grade d'adjoint technique principal de deuxième classe au titre de l'année 2020. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

10. En troisième et dernier lieu, il appartient au requérant, tant en première instance qu'en appel, d'assortir ses moyens des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé. Il suit de là que le juge d'appel n'est pas tenu d'examiner un moyen que l'appelant se borne à déclarer reprendre en appel, sans l'assortir des précisions nécessaires.

11. M. AT..., qui déclare, outre les moyens précédemment analysés, reprendre en tant que de besoin l'argumentation qu'il a développée devant le tribunal administratif de Marseille, ne met pas la Cour en mesure de se prononcer sur les erreurs que les premiers juges aurait pu commettre en écartant les autres moyens soulevés en première instance.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. AT... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 8 janvier 2020 par lequel la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône a établi le tableau d'avancement au grade d'adjoint technique principal de deuxième classe au titre de l'année 2020. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais de l'instance :

13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions en mettant à la charge de M. AT... la somme de 500 euros au titre des frais exposés par le département des Bouches-du-Rhône et non compris dans les dépens. En revanche, les conclusions présentées à ce titre par M. AT... dirigées contre le département, qui n'est pas la partie perdante, doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. AT... est rejetée.

Article 2 : M. AT... versera la somme de 500 euros au département des Bouches-du-Rhône en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. AH... AT..., à M. G... S..., à Mme T... L..., à M. AS..., à M. P... C..., à Mme N... AR..., à M. AM... D..., à M. AC... R..., à Mme AQ... Z..., à M. AL... O..., à Mme AD... H..., à Mme AN... V..., à M. AK... K..., à M. AI... AE..., à M. AP... M..., à M. Y... U..., à M. AG... F..., à M. AM... B..., à M. AO... AF..., à M. J... A..., à M. I... AA..., à M. W... AB..., à M. Q... AJ..., à M. X... E..., et au département des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2023, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 octobre 2023.

N° 22MA01788 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01788
Date de la décision : 03/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-06-02-01-01 Fonctionnaires et agents publics. - Notation et avancement. - Avancement. - Avancement de grade. - Tableaux d'avancement.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : SELARL WALGENWITZ AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-10-03;22ma01788 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award