Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 19 août 2020 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle TPM Var Est a autorisé la société Transfix à le licencier pour motif économique.
Par un jugement n° 2002848 du 27 mai 2022, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 6 juillet, 12 octobre et 8 décembre 2022 sous le n° 22MA01913, M. B..., représenté par Me Goldmann, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 27 mai 2022 ;
2°) d'annuler la décision du 19 août 2020 de l'inspecteur du travail ;
3°) de mettre à la charge de la société Transfix la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal ne s'est pas prononcé sur les démarches réellement entreprises par la société Transfix pour tenter de procéder à son reclassement ;
- l'inspecteur du travail a violé le principe du contradictoire ;
- le tribunal a estimé à tort que le périmètre d'appréciation de la cause économique était limité au seul niveau de la société Transfix ;
- l'inspecteur du travail n'a pas procédé à un contrôle de la réalité des difficultés économiques et financières de la société Transfix ;
- il n'a pas apprécié ces difficultés au niveau du groupe Cahors et des sociétés le composant ;
- aucun document comptable n'a été joint à la demande d'autorisation de licenciement si bien que l'inspecteur du travail n'a procédé à aucun contrôle des chiffres indiqués dans la demande d'autorisation ;
- la société Transfix n'apporte pas la preuve des difficultés économiques qu'elle invoque ;
- l'inspecteur du travail s'est contenté de relever l'existence de " difficultés économiques et financières " sans caractériser précisément la nature desdites difficultés ;
- il n'a exercé aucun contrôle sur la situation économique du groupe Epsys ;
- le tribunal aurait dû se fonder sur les fonctions qu'il a réellement exercées et non sur son bulletin de salaire ;
- l'employeur ne justifie pas de la suppression du poste qu'il a réellement occupé ;
- l'inspecteur du travail n'a pas contrôlé si le poste impacté correspondait aux fonctions réellement exercées ;
- l'inspecteur du travail n'a pas contrôlé si une recherche loyale et complète de reclassement avait été faite ;
- la société Transfix n'a pas procédé à une recherche complète, loyale et individualisée de reclassement ;
- elle n'a pas recueilli son accord pour recevoir des propositions de qualification inférieure en violation des dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
- il n'a pas tiré les conclusions de l'exercice de ses fonctions représentatives et des mesures prises par l'employeur pour l'évincer ;
- son licenciement présente un lien avec l'exercice de ses mandats syndicaux ;
- il a fait l'objet d'une discrimination syndicale.
Par trois mémoires en défense, enregistré les 6 septembre 2022, 8 novembre 2022 et 9 janvier 2023, la société anonyme (SA) Transfix, représentée par Me Pialoux, conclut au rejet de la requête de M. de B... et demande à la Cour de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée au ministre du travail, du plein l'emploi et de l'insertion qui n'a pas produit de mémoire.
Un courrier du 22 mars 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.
Une ordonnance portant clôture immédiate de l'instruction a été émise le 25 avril 2023.
Deux mémoires présentés pour M. B... ont été enregistrés les 17 mai et 3 juillet 2023, postérieurement à la clôture d'instruction.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de ce que le moyen de légalité externe relatif à la méconnaissance du principe du contradictoire par l'inspecteur du travail est irrecevable dès lors que M. B... l'a invoqué dans un mémoire complémentaire enregistré le 12 octobre 2022 alors que dans sa requête enregistrée le 6 juillet 2022, il n'a développé que des moyens de légalité interne.
Des observations en réponse au moyen d'ordre public ont été produites le 6 juillet 2023 pour la SA Transfix, et communiquées le même jour.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marchessaux,
- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public ;
- et les observations de Me Goldmann, représentant M. B... et de Me Roberge, représentant la société Transfix.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a été embauché le 1er juin 1992 par la société Transfix, filiale du groupe Cahors spécialisé dans la conception et la fabrication des équipements pour les réseaux de distribution énergie et télécom, en qualité de responsable service achats puis a été nommé directeur des achats à compter de l'année 2000. A l'issue des élections du 9 avril 2019, il a été élu membre suppléant du comité social et économique (CSE) et le 11 avril 2019, il a été désigné par la CFE-CGC comme délégué syndical. Le 18 mars 2020, la société Transfix a sollicité de l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier pour motif économique M. B.... Par une décision du 19 août 2020, l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle TPM Var Est a autorisé la société Transfix à le licencier pour motif économique. M. B... relève appel du jugement du 27 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 août 2020 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement.
Sur l'irrecevabilité du moyen tiré de la violation du principe du contradictoire :
2. M. B..., qui n'a soulevé dans sa requête, enregistrée le 6 juillet 2022 au greffe de la Cour, que des moyens de légalité interne, invoque dans un mémoire complémentaire enregistré le 12 octobre 2022 un moyen de légalité externe tiré de ce que l'inspecteur du travail a méconnu le principe du contradictoire à l'encontre de la décision contestée. Ce moyen, fondé sur une cause juridique distincte de ceux invoqués dans sa requête constituent une demande nouvelle qui, présentée après l'expiration du délai d'appel est tardive et, par suite, irrecevable.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Il ressort du point 21 du jugement attaqué que les premiers juges se sont suffisamment prononcés sur les démarches entreprises par la société Transfix en vue de procéder au reclassement de M. B....
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment : / 1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés. / Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à : (...) / c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ; (...) / La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise. / Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude. / Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce. / Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché. (...) ".
5. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière. Pour apprécier la réalité des motifs économiques allégués à l'appui d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé présentée par une société qui fait partie d'un groupe, l'autorité administrative est tenue de faire porter son examen sur la situation économique de l'ensemble des sociétés du groupe intervenant dans le même secteur d'activité que la société en cause. A ce titre, le groupe s'entend, ainsi qu'il est dit au I de l'article L. 2331-1 du code du travail, de l'ensemble constitué par les entreprises placées sous le contrôle d'une même entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce. Toutes les entreprises ainsi placées sous le contrôle d'une même entreprise dominante sont prises en compte, quel que soit le lieu d'implantation de leur siège, tant que ne sont pas applicables à la décision attaquée les dispositions introduites par l'article 15 de l'ordonnance du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail à l'article L. 1233-3 du code du travail en vertu desquelles seules les entreprises implantées en France doivent alors être prises en considération.
6. Lorsque le juge administratif est saisi d'un litige portant sur la légalité de la décision par laquelle l'autorité administrative a autorisé le licenciement d'un salarié protégé pour un motif économique ou a refusé de l'autoriser pour le motif tiré de ce que les difficultés économiques invoquées ne sont pas établies et qu'il se prononce sur le moyen tiré de ce que l'administration a inexactement apprécié le motif économique, il lui appartient de contrôler le bien-fondé de ce motif économique en examinant la situation de l'ensemble des entreprises du groupe intervenant dans le même secteur d'activité dans les conditions mentionnées au point précédent.
En ce qui concerne le secteur d'activité :
7. En l'espèce, la société Transfix qui employait M. B... appartient au groupe Cahors, détenu à 94,9 % par la société Epsys Holding. La société intimée est spécialisée dans la fabrication de transformateurs et de postes métalliques, plus précisément de " postes de transformation compacte et à couloir de manœuvre et des transformateurs MT/BT secs et immergés huile ". Si le requérant soutient que la société Epsys est spécialisée dans la fabrication de postes préfabriqués moyenne tension et Télécoms, elle fabrique en réalité des postes fabriqués en béton. Par ailleurs, le marché de l'une est différent de l'autre, la société Transfix vendant ses produits principalement à l'export et au marché tertiaire alors que les produits de la société Epsys sont destinés aux marchés publics, au segment privé (client raccordé au réseau en moyenne tension), aux énergies renouvelables et à l'infratel (déploiement de réseau téléphonique 4G et fibre optique). En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que les autres filiales du groupe exerceraient la même activité précitée que la société Transfix. La circonstance que certaines de ces filiales seraient intégrées dans la même division " moyenne tension " n'est pas de nature à établir qu'elles exerceraient la même activité. Il en va de même du fait que le groupe Cahors se présenterait comme un groupe offrant des " métiers industriels complémentaires ", " réunissant des équipes commerciales, des équipes industrielles, des équipes et des services R et D intégrés dans le même groupe " et " répondant aux demandes ciblées de ses clients avec ses 10 filiales implantées en France et à l'international dont la société Transfix à Toulon ". Par suite, la société Transfix étant la seule société du groupe à relever de l'activité de " fabrication des transformateurs et de postes métalliques " à être établie sur le territoire national, l'inspecteur du travail n'avait ainsi à examiner que la seule situation économique de la société Transfix et non celle des autres sociétés du groupe Cahors.
En ce qui concerne la réalité des difficultés économiques :
8. Pour solliciter l'autorisation de licencier pour motif économique M. B..., la société Transfix a fait état, dans sa demande d'autorisation du 18 mars 2020, de plusieurs données comptables portant sur l'évolution, entre les années 2012 à 2018, du chiffre d'affaires, de l'excédent brut d'exploitation et du résultat net consolidé du groupe Cahors, ainsi que, pour elle, de l'évolution de son chiffre d'affaires, de son excédent brut d'exploitation, de sa production, de son résultat net consolidé et du poids de sa dette en 2018. La société Transfix a également joint, à sa demande qui les mentionnait dans la liste des pièces jointes, les procès-verbaux des réunions du CSE ainsi que la note d'information sur le projet contenant ces données comptables. En outre, la décision contestée montre que l'inspecteur du travail a recueilli des éléments lors de l'enquête contradictoire effectuée le 30 juin 2020 et le 7 juillet 2020 avec les parties qui ont été mises à même de faire valoir leurs observations sur les documents et données produits par elles. D'ailleurs, cette décision vise les résultats du premier semestre 2020. Dans le cadre du contrôle de ces données, l'inspecteur du travail a estimé que la société Transfix affichait notamment : " a. un résultat d'exploitation négatif sur les 4 derniers exercices clos ; situation qui perdure sur le premier semestre 2020 ; b. un excédent brut d'exploitation négatif sur les 4 derniers exercices clos avec une situation qui tend également à se dégrader sur le premier semestre 2020 ". Il a ainsi estimé, à juste titre, que les difficultés économiques avancées par la société Transfix étaient établies. Par suite, l'inspecteur du travail ne s'est pas contenté de relever l'existence de difficultés économiques et financières mais à opérer un véritable contrôle des données comptables produites par l'employeur. L'appelant ne peut utilement se prévaloir du bilan de l'année 2020 du groupe Cahors ni des résultats du groupe Epsys dès lors que seule la situation économique de la société Transfix doit être prise en compte ainsi qu'il a été dit au point 7. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'aucun document comptable n'a été joint à la demande d'autorisation de licenciement si bien que l'inspecteur du travail n'a procédé à aucun contrôle des chiffres indiqués dans la demande d'autorisation.
En ce qui concerne la réalité de la suppression du poste :
9. Il ressort des pièces du dossier que le licenciement de M. B..., directeur des achats, résulte de difficultés économiques nécessitant la mise en œuvre de mesures de réduction des dépenses d'exploitation et de coût de structure lesquelles ont donné lieu à une réorganisation consistant, notamment, en la centralisation de la direction des achats au niveau du groupe, la désignation d'un acheteur pilote pour chaque famille de produit afin de négocier les conditions d'achats dont bénéficieront les trois filiales avec comme objectif d'optimiser les marges. Si un directeur achats du groupe Cahors a été recruté antérieurement à la décision en litige, le bulletin de paie du mois de décembre 2019 indique que M. B... était toujours directeur des achats. La circonstance que dans le cadre du projet stratégique Ecodesign 2021 qui avait pris du retard, les fonctions " achat tôles magnétiques " du requérant ont été confiées à un autre salarié dans le cadre d'une équipe de renfort, cette circonstance ne permet pas d'établir que M. B... n'exerçait plus ses fonctions de directeur des achats à la date de la décision en litige. Par suite, l'inspecteur du travail n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que la suppression du poste était établie et a bien procédé à un contrôle de cette suppression.
En ce qui concerne la recherche et les offres de reclassement :
10. Aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. / Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce. / Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. / L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises ".
11. Il résulte de ces dispositions que, pour apprécier si l'employeur a satisfait à son obligation de moyen renforcée en matière de reclassement de salarié protégé, l'autorité administrative doit s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'il a procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié protégé, tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises du groupe auquel elle appartient, ce dernier étant entendu, à ce titre, comme les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel.
12. Il ressort de la décision contestée que l'inspecteur du travail ne s'est pas contenté de relever que M. B... avait implicitement refusé les postes de reclassement qui lui ont été proposés puisqu'il a aussi mentionné que la société Transfix lui avait proposé cinq postes disponibles au sein des sociétés françaises du groupe Cahors qu'il a listés. Il a ensuite constaté que le salarié disposait d'un délai de quinze jours à compter de la remise en mai propre des propositions de reclassement pour accepter ou refuser et que l'absence de réponse expresse de sa part après le délai imparti pouvait être regardée comme un refus des propositions de reclassement dans la mesure où toutes les précisions lui ont été données et qu'il ne pouvait ignorer l'urgence de la réponse qu'il devait apporter dans le délai prescrit. Il a donc estimé que l'impossibilité de reclassement était établie.
13. Il ressort des pièces du dossier que la société Transfix a procédé à des recherches de reclassement de M. B... en interrogeant toutes les filiales du groupe en France, par des courriers des 8 et 20 novembre 2019, ces filiales ayant jusqu'au 26 novembre 2019 pour répondre à cette demande. Elle a également sollicité, par lettre du 19 février 2020, d'autres sociétés en vue d'un reclassement externe du salarié. Par courriers des 21 janvier 2020, 3 février 2020, elle a proposé au requérant cinq postes d'acheteur au sein de la société Transfix, d'assistant commercial Export au sein de la société Lacaze Energies, de responsable équipement de fabrication et d'inspecteur qualité final au sein de la société Epsys-Cahors solution intégrées et de technico-commercial sédentaire au sein de la société MAEC. Ces courriers précisaient que le salarié disposait d'un délai maximum de 15 jours à compter de leur remise, soit jusqu'au 18 février 2020 inclus, pour faire part, de manière écrite, de sa décision d'acceptation ou de refus. Des formulaires de réponse étaient joints auxdits courriers. Or, M. B... n'y a pas répondu, ce qu'il ne conteste pas. Il devait, dès lors, être regardé comme ayant refusé ces reclassements. Ainsi, l'employeur s'est acquitté sur ce point de ses obligations de recherches de reclassement.
14. Si M. B... soutient que la société Transfix a fait preuve d'empressement pour engager la procédure de licenciement, en un mois seulement, ce délai n'est pas de nature à démontrer que l'employeur aurait méconnu son obligation de reclassement alors qu'ainsi qu'il a été dit au point 13, il a pu rechercher des postes au sein de la société et des filiales du groupe, ainsi qu'en externe et lui a proposé cinq postes. Il a également satisfait à son obligation de reclassement en lui proposant ces postes de catégorie inférieure y compris celui d'acheteur qu'il prétend avoir occupé antérieurement, en l'absence de toute possibilité de reclasser l'intéressé, à l'intérieur de l'entreprise, dans un emploi équivalent à celui qu'il occupait antérieurement. Est sans incidence la circonstance que les courriers de recherche de poste auraient été adressés le 8 novembre 2019 alors que la première réunion du CSE devait se tenir le 5 novembre 2019 dès lors que l'offre de reclassement doit être effectuée à compter du moment où le licenciement est envisagée et avant que l'administration ne statue sur la demande de licenciement. Par ailleurs, lors de la réunion du CSE du 5 novembre 2019, la société Transfix a présenté les recherches de reclassement en interne ainsi qu'une liste de postes identifiés.
15. Les dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail n'impliquent pas que l'employeur sollicite l'accord du salarié sur une proposition de reclassement de poste de catégorie inférieure.
En ce qui concerne le lien avec le mandat :
16. M. B... soutient que la société Transfix s'est en réalité servie du projet de restructuration de l'entreprise pour se séparer de lui, après lui avoir retiré une partie de ses prérogatives et de ses fonctions, qu'il a été la cible de la Direction depuis son élection en tant que représentant du personnel, laquelle n'a eu de cesse de le malmener pour le forcer à abandonner son mandat. Toutefois, à supposer même que les fonctions " achat tôles magnétiques " de l'appelant aient été confiées à un autre salarié dans le cadre du projet stratégique Ecodesign 2021 qui avait pris du retard en raison des absences du requérant du fait de son mandat de délégué du personnel, cette circonstance ne permet pas d'établir que son licenciement qui est justifié pour un motif économique serait en lien avec ses mandats.
17. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 août 2020 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement.
Sur les frais liés au litige :
18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Transfix qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Transfix et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera à la société Transfix une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la société Transfix et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
Délibéré après l'audience du 8 septembre 2023, où siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Marchessaux, première conseillère,
- Mme Poullain, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 septembre 2023.
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N° 22MA01913
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