Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil municipal de Bormes-les-Mimosas a approuvé la modification n° 2 du plan local d'urbanisme communal, en tant qu'elle a institué un espace vert protégé sur une partie des parcelles cadastrées section AD nos 521, 522 et 523, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.
Par un jugement n° 2001566 du 8 février 2022, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 avril et 6 octobre 2022, Mme A..., représentée par la SELARL LLC et Associés, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil municipal de Bormes-les-Mimosas a approuvé la modification n° 2 du plan local d'urbanisme communal, en tant qu'elle a institué un espace vert protégé sur une partie des parcelles cadastrées section AD nos 521, 522 et 523, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre à l'autorité compétente d'engager, dans un délai de deux mois et le cas échéant sous astreinte, la procédure adéquate d'évolution du plan local d'urbanisme communal afin de supprimer l'espace vert protégé institué sur sa propriété ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Bormes-les-Mimosas la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle justifie d'un intérêt à agir ;
- sa demande de première instance n'a pas été introduite tardivement ;
- la délibération attaquée ne comporte aucune motivation de nature à justifier l'impossibilité pour la commune de lever les réserves émises par le commissaire enquêteur dont les conclusions doivent être regardées comme présentant un caractère défavorable ;
- la modification litigieuse est, en tant qu'elle institue l'espace vert à protéger en cause, incompatible avec le schéma de cohérence territoriale applicable ;
- l'institution de cet espace vert à protéger, au titre de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme, sur une partie de sa propriété est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la servitude litigieuse entre en contradiction avec les permis de construire tacites qui ont été antérieurement délivrés.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 juin 2022, la commune de Bormes-les-Mimosas, représentée par la SELARL Grimaldi et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par la requérante sont inopérants ou infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mouret,
- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,
- les observations de Me Reghin, représentant Mme A..., et celles de Me Dubecq, représentant la commune de Bormes-les-Mimosas.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 19 décembre 2019, le conseil municipal de Bormes-les-Mimosas a approuvé la modification n° 2 du plan local d'urbanisme de la commune. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler cette délibération en tant qu'elle a institué un espace vert protégé sur une partie des parcelles cadastrées section AD nos 521, 522 et 523, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux. Elle relève appel du jugement du 8 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
2. En premier lieu, l'article L. 153-41 du code de l'urbanisme prévoit les cas dans lesquels le projet de modification d'un plan local d'urbanisme est soumis à une " enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par (...) le maire ". Selon le troisième alinéa de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur (...) consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet ".
3. D'une part, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au conseil municipal de lever les réserves émises par le commissaire enquêteur dans ses conclusions formulées à l'issue de l'enquête publique relative au projet de modification d'un plan local d'urbanisme. Il suit de là que, contrairement à ce que soutient Mme A..., le conseil municipal de Bormes-les-Mimosas, qui n'était pas lié par les conclusions de la commissaire enquêtrice, n'était nullement tenu de lever les réserves dont cette dernière a assorti ses conclusions favorables relatives à la modification n° 2 du plan local d'urbanisme de cette commune.
4. D'autre part, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 123-16 du code de l'environnement : " Tout projet d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public de coopération intercommunale ayant donné lieu à des conclusions défavorables du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête doit faire l'objet d'une délibération motivée réitérant la demande d'autorisation ou de déclaration d'utilité publique de l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement de coopération concerné ".
5. Les dispositions du code de l'environnement citées au point précédent n'exigent pas que l'organe délibérant débatte spécifiquement des conclusions du commissaire enquêteur, mais lui imposent seulement de délibérer sur le projet en ayant eu connaissance du sens et du contenu des conclusions du commissaire enquêteur.
6. La délibération contestée du 19 décembre 2019 précise notamment que l'avis favorable émis le 8 novembre 2019 par la commissaire enquêtrice est assorti de réserves. Il ressort des pièces du dossier que les conseillers municipaux ont eu connaissance du sens et du contenu des conclusions de la commissaire enquêtrice. Dans ces conditions, à supposer même que les procédures d'adoption et d'évolution des plans locaux d'urbanisme entrent dans le champ d'application des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 123-16 du code de l'environnement, le moyen tiré du non-respect de ces dispositions ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
7. En deuxième lieu, si Mme A... soutient que la modification approuvée par la délibération contestée, en tant qu'elle institue plusieurs espaces verts protégés au titre de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme, est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale Provence Méditerranée, elle n'assortit pas ses allégations sur ce point de précisions suffisantes en se bornant à se référer à la page 25 du document d'orientation et d'objectifs de ce schéma qui indique que les " espaces formant des sites d'intérêts paysagers spécifiques " " font l'objet de réflexions particulières quant à leur ouverture au public, la préservation des abords, leur mise en valeur, la préservation des cônes de vue ". Par ailleurs, la requérante n'invoque aucune disposition législative ou réglementaire imposant la réalisation d'une " analyse détaillée " des caractéristiques des parcelles concernées, ou encore d'une " étude paysagère ", préalablement à la création d'espaces verts protégés sur le fondement de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme.
8. En troisième et dernier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les sites et secteurs à protéger pour des motifs d'ordre écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation (...) ".
9. Ces dispositions permettent au règlement d'un plan local d'urbanisme d'édicter des dispositions visant à protéger, mettre en valeur ou requalifier un élément du paysage dont l'intérêt le justifie. Le règlement peut notamment, à cette fin, identifier un secteur en raison de ses caractéristiques particulières. La localisation de ce secteur, sa délimitation et les prescriptions le cas échéant définies doivent être proportionnées et ne peuvent excéder ce qui est nécessaire à l'objectif recherché.
10. D'une part, la notice de présentation de la modification n° 2 du plan local d'urbanisme de Bormes-les-Mimosas indique que la création d'espaces verts protégés sur le fondement de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme " vise à préserver les espaces verts urbains et les espaces verts des lotissements ou de grandes propriétés afin de (...) préserver des espaces de respiration (" poumons verts ") au milieu des espaces urbanisés ". Elle précise qu'il a été décidé d'étendre cette protection - qui a déjà été instituée dans deux lotissements par la délibération approuvant la modification n° 1 de ce plan - dans trois autres quartiers " jugés sensibles d'un point de vue paysager ", parmi lesquels figure le lotissement du Mont des Roses.
11. D'autre part, l'article 3 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme de Bormes-les-Mimosas précise que les différentes zones délimitées par ce plan, notamment les zones urbaines, " incluent, le cas échéant (...) les espaces verts protégés ", lesquels " doivent être constitués d'essences locales ou méditerranéennes (...) ". L'annexe à ce règlement intitulée " Terminologie et croquis explicatifs " précise que les " espaces verts protégés (EVP), définis au titre de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme, représentent les secteurs végétalisés ou à végétaliser qui doivent conserver ou mettre en valeur leur aspect végétal afin d'améliorer les transitions paysagères entre les espaces bâtis et non bâtis ", avant de détailler les prescriptions applicables à ces espaces au sein desquels certaines occupations et utilisations du sol peuvent être admises.
12. Il ressort des pièces du dossier que la délibération contestée approuve notamment la création d'un espace vert protégé sur une partie, non bâtie et partiellement boisée, de la propriété de Mme A... qui est située à l'extrémité nord du lotissement du Mont des Roses et jouxte la limite sud d'un vaste espace boisé classé. Il n'est pas contesté que cet espace vert protégé, qui est localisé sur une partie des parcelles cadastrées section AD nos 522 et 523 et est bordé par une voie de circulation desservant ce lotissement, est institué sur un tènement comportant des plantations d'essences locales ou méditerranéennes. Si la requérante se prévaut du caractère faiblement boisé de cette partie de sa propriété, il résulte, en tout état de cause, de ce qui a été dit au point précédent que les auteurs du plan local d'urbanisme de Bormes-les-Mimosas ont entendu créer des espaces verts protégés tant dans les " secteurs végétalisés " que dans les secteurs " à végétaliser ". Par ailleurs, la circonstance alléguée que le projet d'aménagement et de développement durables de ce plan local d'urbanisme ne comporte aucune précision relative à la création d'espaces verts protégés ne saurait, par elle-même, suffire à remettre en cause la cohérence interne de ce document d'urbanisme, ni faire obstacle à la création de tels espaces, sur le fondement des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme, notamment à l'occasion de la modification de ce plan. Ces dispositions, qui n'exigent pas la réalisation d'une étude paysagère ainsi qu'il a été dit, n'imposent pas que les arbres et autres éléments de végétation inclus dans un secteur à protéger présentent un caractère remarquable. Elles ne font, en tout état de cause, pas obstacle à ce qu'une voie de circulation soit, en tout ou partie, incluse dans le périmètre d'un espace vert protégé institué sur leur fondement. Enfin, la délivrance de deux permis de construire tacites, nés au cours du mois d'août 2017 et autorisant chacun l'édification d'une maison individuelle respectivement sur les parcelles cadastrées section AD nos 522 et 523, ne saurait, par elle-même, faire obstacle à l'institution d'un espace vert protégé sur une partie des parcelles litigieuses, alors que certaines occupations et utilisations du sol peuvent être admises au sein d'un tel espace. Au demeurant, ces permis tacites, dont l'existence n'a été reconnue que postérieurement à la délibération contestée, confèrent des droits acquis à leurs titulaires. Dans ces conditions, et au regard des prescriptions définies dans les espaces à protéger en cause, la localisation et la délimitation de l'espace vert protégé sur une partie, de faible superficie, du tènement de Mme A... apparaissent proportionnées et n'excèdent pas ce qui est nécessaire à l'objectif recherché à cet égard par les auteurs de la modification n° 2 du plan local d'urbanisme de Bormes-les-Mimosas, consistant notamment à améliorer les transitions paysagères entre les espaces bâtis et non bâtis. Il suit de là que la délibération contestée ne méconnaît pas, en tant qu'elle approuve la création de cet espace vert protégé, les dispositions de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme.
13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Par suite, la requête de Mme A... doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Bormes-les-Mimosas sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Bormes-les-Mimosas au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Bormes-les-Mimosas.
Délibéré après l'audience du 31 août 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Portail, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Mouret, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 septembre 2023.
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N° 22MA01023
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