Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge, en droits et majorations, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2011.
Par un jugement n° 1604355 du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Nice, après avoir prononcé un non-lieu partiel, a rejeté le surplus de sa demande.
Par une requête, enregistrée le 17 mai 2019 régularisée le 6 septembre 2019, et un mémoire enregistré le 13 septembre 2019, M. D..., représenté par Me Courmont, demandait à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du 14 mars 2019 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;
2°) de prononcer la décharge de l'imposition et majorations restant en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de E... L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Il soutenait que :
- les premiers juges ont omis de répondre aux moyens tirés de ce que l'administration fiscale n'a pas suffisamment motivé la réponse à ses observations et aurait dû tenir compte de son patrimoine pour fixer la part déductible de la pension versée pour l'entretien de son fils A... ;
- le dernier mémoire produit par l'administration fiscale, enregistré au greffe du tribunal le 22 octobre 2018, ne lui a pas été communiqué, en méconnaissance du principe du contradictoire ;
- l'administration fiscale n'a pas suffisamment motivé sa réponse aux observations du contribuable, en méconnaissance de E... L. 57 du livre des procédures fiscales ;
- la procédure a excédé le simple contrôle sur pièces et les principes de simplicité, de respect et d'équité prévus par la charte du contribuable vérifié ont été méconnus ;
- le montant de son obligation alimentaire envers son fils ne saurait équitablement être apprécié uniquement en fonction de son revenu, mais devait l'être également en fonction du montant de son patrimoine, conformément à E... 208 du code civil ;
- le montant de la pension alimentaire versée à son fils n'était pas excessif, au regard des besoins de ce dernier, de l'état de besoin de la mère et du montant des sommes versées pour ses autres enfants ;
- l'administration fiscale a, à tort, appliqué un barème de manière mécanique ;
- pour évaluer le montant déductible de la pension litigieuse, l'administration aurait dû apprécier ses ressources en prenant en compte ses revenus avant déduction des pensions versées pour l'entretien de ses autres enfants.
Par une ordonnance n° 19MA02326 du 3 octobre 2019, le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. D... contre le jugement n° 1604355 du 14 mars 2019 du tribunal administratif de Nice.
Par une décision n° 436589 et 436590 du 14 avril 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cette ordonnance et renvoyé l'affaire devant la Cour.
Procédure devant la Cour après renvoi :
Les parties ont été informées, le 20 avril 2022, de la reprise de l'instance après cassation et de la possibilité qui leur était offerte de produire, dans le délai d'un mois, de nouveaux mémoires ou observations.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 novembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Carotenuto,
- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'un contrôle sur pièces des déclarations de revenus de M. D..., l'administration fiscale a réduit le montant admis en déduction de ses revenus au titre de la pension de 18 000 euros qu'il a déclaré avoir versé à Mme B... pour l'entretien de son fils A..., né le 27 juillet 2010, à hauteur de 6 522 euros au titre de l'année 2011. Par un jugement du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Nice, après avoir prononcé un non-lieu partiel, a rejeté le surplus de la demande de M. D... tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il avait été assujetti à raison de cette rectification, ainsi que des majorations correspondantes. Par une ordonnance du 3 octobre 2019, le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. D... contre ce jugement. Par une décision du 14 avril 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, sur pourvoi formé par M. D..., a annulé cette ordonnance et a renvoyé l'affaire devant la Cour.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de E... L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Il ressort des mentions du jugement attaqué que le tribunal administratif de Nice, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments invoqués par M. D..., a répondu de manière suffisamment motivée aux moyens présentés par ce dernier et notamment, celui tiré de l'insuffisante motivation de la réponse aux observations du contribuable, aux points 3 et 4 du jugement, et celui tiré de ce que le service, pour fixer la part déductible de la pension versée pour l'entretien de son fils, n'a pas tenu compte " de la situation de la mère de l'enfant et de sa propre fortune ", au point 8 dudit jugement. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier.
4. En second lieu, aux termes de E... L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire ". Selon E... R. 611-1 du même code : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".
5. Il ressort des pièces du dossier de première instance que le dernier mémoire en réplique de l'administration fiscale, enregistré au greffe du tribunal le 22 octobre 2018, n'a pas été communiqué à M. D.... Toutefois, il ressort de la lecture de ce mémoire qu'il ne comporte aucun moyen ni élément n'ayant pas été précédemment soumis au débat contradictoire au cours de l'instruction, l'administration fiscale ayant seulement porté à la connaissance de la juridiction une " erreur de plume " sans incidence sur l'issue du litige concernant l'âge de l'enfant mineur du requérant, G. D.... Ainsi, en s'abstenant de procéder à la communication de ce mémoire, les premiers juges n'ont pas méconnu le principe du respect du caractère contradictoire de la procédure.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
6. En premier lieu, aux termes du dernier alinéa de E... L. 57 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ". L'exigence de motivation qui s'impose à l'administration dans ses relations avec le contribuable vérifié en application du dernier alinéa de cet article s'apprécie au regard de l'argumentation de celui-ci.
7. Il résulte de l'instruction que par lettres du 12 décembre 2014 et du 10 février 2015, M. D... a formulé des observations à la suite des rectifications qui lui ont été adressées par une proposition de rectification du 4 décembre 2014. Concernant les " pensions alimentaires " versées au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation de son enfant A..., il a exposé que leur montant tenait compte de l'état de besoin de la mère de l'enfant, qui a des ressources très faibles, et de sa propre fortune. La réponse aux observations du contribuable du 31 juillet 2015 a répondu aux observations formulées par le requérant. L'administration a notamment indiqué qu'à défaut d'obtenir des éléments de la part du requérant quant à l'état de besoin du bénéficiaire de la pension alimentaire, le service avait pris en référence des éléments objectifs de calcul, explicités lors de la proposition de rectification, et a rappelé la méthode retenue pour arrêter le montant déductible de la pension en litige. M. D... n'a, en revanche, pas fait valoir dans ses observations que l'administration aurait dû, pour évaluer le montant déductible de la pension litigieuse, apprécier ses ressources en prenant en compte de son patrimoine. Ainsi, au regard de l'argumentation développée par le requérant dans ses observations, la réponse de l'administration répond aux exigences des dispositions de E... L. 57 du livre des procédures fiscales précitées et est suffisamment motivée.
8. En deuxième lieu, les irrégularités qui entachent la décision par laquelle l'administration statue sur la réclamation du contribuable sont sans influence sur la régularité ou le bien-fondé des impositions. Par suite, à supposer que M. D... ait entendu se prévaloir de l'insuffisante motivation de la décision de rejet de sa réclamation préalable, ce moyen ne peut être utilement invoqué.
9. Enfin, le requérant ne peut utilement faire valoir que l'administration n'aurait pas respecté les " principes de simplicité, de respect et d'équité " contenus dans la charte des droits et obligations du contribuable vérifié qui n'est pas opposable à l'administration fiscale dans le cadre d'un contrôle sur pièces, dont il a fait l'objet.
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :
10. Aux termes, d'une part, de E... 156 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : / (...) II. Des charges ci-après lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories : / (...) 2° (...) pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211, 367 et 767 du code civil (...) / Le contribuable ne peut opérer aucune déduction pour ses descendants mineurs lorsqu'ils sont pris en compte pour la détermination de son quotient familial ".
11. Aux termes, d'autre part, de E... 203 du code civil : " Les époux contractent ensemble, par le fait seul du mariage, l'obligation de nourrir, entretenir et élever leurs enfants ". E... 371-2 du même code dispose que " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant ".
12. En vertu des dispositions du 2° du II de E... 156 du code général des impôts, une pension alimentaire versée par un contribuable en vue de pourvoir aux besoins de toute nature de ses enfants mineurs est déductible du revenu imposable à l'impôt sur le revenu. S'agissant d'une pension versée en application de l'obligation d'entretien et d'éducation, il appartient au contribuable qui entend la déduire de ses revenus imposables de justifier du montant correspondant à cette obligation, soit en se prévalant d'une décision de justice fixant ce montant, soit en établissant son caractère proportionné au regard de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant, compte tenu notamment de son âge. Les ressources à prendre en compte pour apporter cette justification s'apprécient sans déduction ou adjonction des pensions versées ou reçues. Lorsque le contribuable verse plusieurs pensions, cette proportionnalité doit s'apprécier en tenant compte de l'ensemble des pensions versées.
13. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a remis en cause la somme de 18 000 euros, soit 1 500 euros mensuel, déclarée par M. D... au titre de la pension alimentaire versée à son enfant A... et l'a évaluée à 6 522 euros, soit 543,50 euros mensuel. En l'absence de décision de justice fixant le montant annuel de la pension alimentaire due à l'enfant et à défaut d'éléments communiqués par le requérant permettant de justifier le versement effectif de la pension en litige, seuls des numéros de chèques et leurs montants correspondants ayant été fournis, l'administration pouvait, pour évaluer ladite pension, utilement se reporter à la table de référence des contributions aux frais d'éducation et d'entretien des enfants de parents séparés, publiée dans la circulaire du 12 avril 2010 du garde des sceaux, ministre de la justice, alors même qu'elle n'a qu'une valeur indicative, ainsi qu'à l'échelle d'équivalence utilisée par l'Insee qui fixe les charges liées à l'entretien de l'enfant à un pourcentage des revenus du parent à qui incombe l'obligation de l'enfant. L'administration, selon ce barème de l'Insee plus favorable au requérant, a appliqué au revenu fiscal de référence de M. D... un taux de 16,60 %, correspondant à un seul enfant de moins de quatorze ans dans le ménage.
14. Si le requérant fait valoir que l'administration aurait dû évaluer le montant déductible de la pension au regard de son " état de fortune " qui s'apprécie au regard de ses revenus et de son patrimoine immobilier, seules ses facultés contributives doivent être prises en compte s'agissant d'une pension versée en application de l'obligation d'entretien et d'éducation visée à E... 203 du code civil. En revanche, il résulte de ce qui a été dit au point 12, que M. D... est fondé à soutenir que ses ressources doivent être appréciées en prenant en compte ses revenus avant déduction des pensions versées à ses enfants. Il n'est pas contesté, que le montant annuel de revenus du requérant au titre de l'année 2011 s'élève ainsi, sans déduction des pensions versées, à 68 890 euros, soit 5 471 euros mensuel.
15. Pour justifier du caractère non excessif du montant déclaré, le requérant se prévaut des faibles ressources de la mère de l'enfant, des besoins de ce dernier et de l'égalité de traitement au regard du montant des sommes versées pour ses autres enfants. Si M. D... fait valoir que les bénéfices industriels et commerciaux annuels réalisés par Mme B..., la mère de l'enfant G., étaient de 2 250 euros au titre de l'année 2011 alors qu'elle devait faire face à une charge annuelle de 13 371,60 euros, il expose également qu'elle a cédé en 2006 sa résidence principale, réalisant ainsi une plus-value, lui ayant permis d'acquérir un logement plus spacieux et qu'en 2010, elle a acquis le logement mitoyen grâce à la vente, pour la somme de 155 967,89 euros, de ses parts dans l'appartement hérité de sa mère décédée en 2008. Par ailleurs, la seule production d'un " avis d'échéance " de paiement, au nom de M. D..., d'un montant de 329,56 euros du mois de novembre 2011 au titre de frais de garde, ne saurait justifier le montant allégué de tels frais à hauteur de 500 euros par mois. Au demeurant, l'administration fait valoir sans être contredite que Mme B... a déclaré un montant de frais de garde de 736 euros au titre de cette année. M. D..., en l'absence de justificatifs des dépenses effectivement engagées, n'établit pas que la somme mensuelle de 1 500 euros était uniquement destinée à son enfant et proportionnée à ses besoins, compte tenu notamment de son âge. Enfin, il résulte de l'instruction, que selon un protocole transactionnel en date du 15 février 2011, le requérant verse à chacun de ses enfants aînés une pension fixée à 500 euros mensuel, avec une première revalorisation au 5 janvier 2012. Le requérant, qui ne justifie pas avoir supporté des frais supplémentaires pour ses aînés, ne peut utilement faire valoir que le montant retenu par l'administration créerait une différence de traitement économique entre ses trois enfants. Dans ces conditions, à défaut d'un quelconque élément sur les besoins particuliers de l'enfant et de justification que le montant plus important versé à la mère de l'enfant correspondait aux besoins de ce dernier, M. D... n'établit pas que le montant mensuel de 1 500 euros revendiqué serait proportionné au regard de ses ressources, de celles de la mère de l'enfant, des besoins de ce dernier et de l'ensemble des pensions versées ni que le montant retenu par l'administration ne serait pas proportionné au regard des mêmes éléments.
16. Il résulte de tout ce qui précède, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté le surplus de sa demande.
Sur les frais liés au litige :
17. En premier lieu, les dispositions de E... L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. D... de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
18. D'autre part, aucun dépens n'ayant été exposé dans cette instance, les conclusions présentées par M. D... sur le fondement de E... R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
E... 1er : La requête de M. D... est rejetée.
E... 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, où siégeaient :
- M. Platillero, président assesseur, président de la formation de jugement en application de E... R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Carotenuto et Mme F..., premières conseillères.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 juin 2023.
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N° 22MA01097