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12/06/2023 | FRANCE | N°22MA01695

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 12 juin 2023, 22MA01695


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association syndicale libre des propriétaires de " Mougins Le Haut " représentée par son syndic " Immo de France Côte d'Azur ", le syndicat des copropriétaires Toits d'Azur bâtiments 32, le syndicat des copropriétaires Les Romarins bâtiments 33, le syndicat des copropriétaires Bella Vista bâtiment 31, le syndicat des copropriétaires du bâtiment 34, le syndicat des copropriétaires du bâtiment 35, le syndicat des copropriétaires du bâtiment 37, le syndicat des copropriétaires du bâtiment 40, le sy

ndicat des copropriétaires du bâtiment 39, le syndicat des copropriétaires du bâ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association syndicale libre des propriétaires de " Mougins Le Haut " représentée par son syndic " Immo de France Côte d'Azur ", le syndicat des copropriétaires Toits d'Azur bâtiments 32, le syndicat des copropriétaires Les Romarins bâtiments 33, le syndicat des copropriétaires Bella Vista bâtiment 31, le syndicat des copropriétaires du bâtiment 34, le syndicat des copropriétaires du bâtiment 35, le syndicat des copropriétaires du bâtiment 37, le syndicat des copropriétaires du bâtiment 40, le syndicat des copropriétaires du bâtiment 39, le syndicat des copropriétaires du bâtiment 38, le syndicat des copropriétaires du bâtiment 36, le syndicat des copropriétaires du parking C, le syndicat des copropriétaires du parking D1, le syndicat des copropriétaires du parking D2 et le syndicat des copropriétaires du parking E, ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 29 août 2019 par laquelle le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur leur a demandé de procéder, dans un délai de deux mois, au recensement, à l'arrachage et à la destruction de végétaux sur leur propriété suite à la découverte d'un foyer de bactérie Xylella fastidiosa.

Par un jugement n° 1905294 du 15 avril 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 juin 2022 et un mémoire enregistré le 2 mars 2023, l'association syndicale libre des propriétaires de " Mougins Le Haut " et autres, représentés par Me Kattineh-Borgnat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 15 avril 2022 ;

2°) d'annuler la décision du 29 août 2019 par laquelle le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur leur a demandé de procéder, dans un délai de deux mois, au recensement, à l'arrachage et à la destruction de végétaux sur leur propriété suite à la découverte d'un foyer de bactérie Xylella fastidiosa.

Ils soutiennent que :

- la décision attaquée est illégale en ce qu'elle a été prise au terme d'une procédure irrégulière ;

- la décision attaquée est entachée d'un défaut de base légale dès lors que l'arrêté du 27 février 2018 n'a pas été notifié aux propriétaires des parcelles concernées par les zones délimitées et les zones tampons ;

- les mesures d'arrachage des végétaux hôtes imposées aux propriétaires des parcelles des copropriétés concernées par ces mesures sont excessives au regard du but recherché et méconnaissent le principe de précaution ;

- la décision attaquée est illégale par voie d'exception de l'illégalité de la décision d'exécution (UE) 2015/789, en ce que ce périmètre de 100 mètres de la zone infectée est une application excessive du principe de précaution ;

- la décision d'exécution (UE) 2015/789 sur laquelle se fonde la décision attaquée a été abrogée par le règlement (UE) 2020/1201 du 14 août 2020, de sorte que la décision litigieuse se trouve privée de base légale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2023, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire conclut au rejet de la requête,

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive n° 2000/29/CE du Conseil du 8 mai 2000 concernant les mesures de protection contre l'introduction dans la Communauté d'organismes nuisibles aux végétaux et contre leur propagation à l'intérieur de la Communauté, modifiée par la directive n° 2002/89 du 28 novembre 2002 ;

- la décision d'exécution (UE) 2015/789 modifiée de la Commission européenne du 18 mai 2015 relative à des mesures visant à éviter l'introduction et la propagation dans l'Union de Xylella fastidiosa ;

- le règlement d'exécution (UE) 2020/1201 de la Commission européenne du 14 août 2020 relatif à des mesures visant à prévenir l'introduction et la dissémination dans l'Union de Xylella fastidiosa ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- l'arrêté du 15 décembre 2014 relatif à la liste des dangers sanitaires de première et deuxième catégorie pour les espèces végétales ;

- l'arrêté du ministre de l'agriculture du 23 décembre 2015 relatif aux mesures visant à éviter l'introduction et la propagation dans l'Union de Xylella fastidiosa ;

- l'arrêté du ministre de l'agriculture et de l'alimentation du 19 octobre 2020 relatif aux mesures visant à éviter l'introduction et la propagation dans l'union de la bactérie

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Prieto,

- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,

- et les observations de Me Kattineh-Borgnat, représentant les appelants.

Une note en délibéré présentée par Me Kattineh-Borgnat, pour les requérants, a été enregistrée le 29 mai 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Un foyer de la bactérie Xyllela fastidiosa subsp multiplex a été découvert le 2 août 2018 sur une lavande et une cornille glauque situées dans la copropriété de " Mougins Le Haut ". A la suite de la découverte de ce foyer, la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt de Provence-Alpes-Côte d'Azur (DRAAF PACA) a adressé au syndic Immo de France Côte d'Azur, gestionnaire de la copropriété " Mougins Le Haut ", une demande d'arrachage et de destruction des végétaux contaminés le 16 novembre 2018. Après la destruction des deux végétaux infectés, la DRAAF PACA a informé le syndic de copropriété, par courrier du 29 mars 2019, qu'elle allait procéder au recensement de toutes les espèces végétales hôtes de la bactérie présentes dans la zone infectée le 26 juin 2019. L'accès des agents de l'Etat n'ayant pas été autorisé sur les parcelles concernées de la copropriété, l'inventaire prévu n'a pu être réalisé. En raison de l'impossibilité de procéder au recensement des espèces végétales hôtes de la bactérie sur le site de la copropriété, le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a, par décision du 29 août 2019, demandé au syndic " Immo de France Côte d'Azur " de procéder à l'inventaire de ces espèces, ainsi qu'à leur arrachage et leur destruction dans le périmètre de 100 mètres autour des foyers de Xyllela fastidiosa. L'association syndicale libre des propriétaires " Mougins Le Haut " et autres relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Nice du 15 avril 2022 qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision du 29 août 2019.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 251-7 du code rural et de la pêche maritime : " Les propriétaires ou détenteurs de végétaux, produits de végétal ou autres objets mentionnés à l'article L. 201-2 sont tenus d'ouvrir leurs terrains et jardins, clos ou non, ainsi que leurs dépôts ou magasins, aux agents habilités mentionnés à l'article L. 250-3. Les représentants des organismes délégataires désignés par l'autorité administrative conformément à l'article L. 201-13 ont accès aux lieux mentionnés au premier alinéa au même titre que les agents habilités mentionnés à l'article L. 250-3 dans les conditions prévues à l'article L. 250-5. Ils peuvent effectuer des prélèvements dans les conditions prévues à l'article L. 250-6. Lorsqu'un végétal, produit de végétal ou autre objet mentionné à l'article L. 201-2 est suspecté de véhiculer des organismes nuisibles inscrits sur la liste prévue à l'article L. 251-3, les représentants des organismes délégataires peuvent ordonner sa consignation par le détenteur, dans l'attente de l'intervention d'un agent habilité mentionné à l'article L. 250-3. ".

3. En premier lieu, si les appelants soutiennent que les prélèvements et les analyses de végétaux ont été effectués sans que, ni le gestionnaire, ni les propriétaires des parcelles privées concernées n'aient été préalablement informés de ces opérations, il ressort toutefois des pièces du dossier que les appelants en ont été avertis par un courrier du 19 avril 2018, lui-même accompagné d'un courrier de la DRAAF PACA du 18 avril précisant les modalités d'inspection et fixant un délai de 10 jours, pour les propriétaires, pour faire part de leurs éventuelles observations en se faisant assister, le cas échéant, par un conseil ou de représenter par un mandataire de leur choix. En outre, des courriers du directeur de la DRAAF PACA des 16 novembre 2018 et 29 mars 2019 comportaient les mêmes invitations à présenter des observations écrites ou orales. En tout état de cause, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 251-7 du code rural et de la pêche maritime, les copropriétaires ne pouvaient s'opposer à la réalisation des prélèvements par les agents mandatés par l'Etat. Enfin, contrairement à ce qui est soutenu, les rapports d'analyse des prélèvements des végétaux qui ont été effectués sur le site ont bien été produits par l'administration. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la décision a été prise au terme d'une procédure irrégulière.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 221-2 du code des relations entre le public et l'administration : " L'entrée en vigueur d'un acte réglementaire est subordonnée à l'accomplissement de formalités adéquates de publicité, notamment par la voie, selon les cas, d'une publication ou d'un affichage, sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires ou instituant d'autres formalités préalables. " et aux termes de l'article L. 221-7 de ce code: " L'entrée en vigueur des décisions ni réglementaires ni individuelles est régie par les dispositions des articles L. 221-2 et L. 221-3. ".

5. Les appelants soutiennent que l'arrêté du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur du 27 février 2018, pris en application de l'arrêté ministériel du 23 décembre 2015 susvisé, ayant pour objet la définition du périmètre de la zone délimitée, en listant notamment les communes concernées par cette zone, devait être notifié aux propriétaires des parcelles concernées, de même que les modifications éventuelles de cette zone. Toutefois, cet arrêté qui n'est pas une décision individuelle devant être notifiée aux requérants a fait l'objet d'une publication au recueil des actes administratifs de la préfecture de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur n° R93-2018-022 du 5 mars 2018. Par suite, le moyen invoqué doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 251-20 du code rural et de la pêche maritime : " Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende : 1° Le fait d'introduire sur le territoire métropolitain et dans les départements d'outre-mer, de détenir sciemment et de transporter les organismes nuisibles visés à l'article L. 251-3, quel que soit le stade de leur évolution ; 2° Le fait de faire circuler des végétaux, produits végétaux et autres objets sans respecter les conditions prévues par les dispositions du troisième alinéa ou du quatrième alinéa du I de l'article L. 251-12 ; 3° Le fait de ne pas accompagner les végétaux, produits végétaux et autres objets mentionnés au I de l'article L. 251-12 d'un passeport phytosanitaire. II.- Est puni de six mois d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende :1° Le fait de ne pas respecter les obligations de déclaration ou de communication imposées par l'article L. 201-7 ; 2° Le fait de ne pas respecter les prescriptions édictées en application des articles L. 251-8, L. 251-10 et L. 251-14 ordonnées par les agents habilités en vertu de l'article L. 250-2.III. (Supprimé).IV.- Les personnes coupables de l'une des infractions prévues au présent article encourent également la peine complémentaire de l'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal pour les personnes physiques et par le 9° de l'article 131-39 du même code pour les personnes morales. Les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des infractions définies au présent article encourent, outre l'amende suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal, la peine prévue par le 9° de l'article 131-39 du même code. ".

7. Les dispositions précitées, qui se bornent à fixer la liste des sanctions pénales susceptibles d'être prononcées dans le cadre d'une décision juridictionnelle par le juge pénal en cas de non-respect des prescriptions édictées, ne peuvent, à ce titre, être utilement invoquées par les appelants à l'encontre de la sanction administrative attaquée.

8. En quatrième lieu, le droit de l'Union européenne a, par la directive n° 2000/29/CE modifiée du Conseil du 8 mai 2000, prévu des mesures de protection contre l'introduction et la propagation dans et à l'intérieur de l'Union d'organismes nuisibles aux végétaux et aux produits végétaux. Sur le fondement de cette directive, la Commission a fixé, par la décision (UE) 2015/789 du 18 mai 2015 modifiée par la décision 2015/2417 du 17 décembre 2015 puis par la décision 2017/2352 du 14 décembre 2017, des mesures visant à éviter l'introduction et la propagation dans l'Union de Xyllela fastidiosa, en raison du risque phytosanitaire constitué par cette bactérie pour le territoire de l'Union. L'article 4 de cette décision d'exécution modifiée précise : "1. Lorsque l'organisme spécifié est identifié, l'État membre concerné délimite sans délai une zone conformément au paragraphe 2 (ci-après la "zone délimitée") (...) / 2. La zone délimitée se compose d'une zone infectée et d'une zone tampon. / La zone infectée englobe tous les végétaux dont l'infection par l'organisme spécifié est connue, tous les végétaux présentant des symptômes d'une éventuelle infection par ledit organisme et tous les autres végétaux susceptibles d'être infectés par cet organisme en raison de leur proximité immédiate avec des végétaux infectés ou, si elle est connue, d'une source de production qu'ils ont en commun avec des végétaux infectés ou des végétaux qui en sont issus .(...) La zone tampon s'étend sur au moins 10 kilomètres autour de la zone infectée. La délimitation exacte des zones se fonde sur des principes scientifiques fiables, la biologie de l'organisme spécifié et de ses vecteurs, le niveau d'infection, la présence des vecteurs et la répartition des végétaux spécifiés dans la zone concernée (...) / 4. Les États membres tiennent et mettent à jour une liste des zones délimitées établies sur leur territoire respectif et publient cette liste ainsi que toute mise à jour. Ils communiquent leur liste ainsi que toute mise à jour à la Commission, conformément à la décision d'exécution 2014/917/UE de la Commission (*) / Sur la base de ces notifications, la Commission met à jour et publie sa liste des zones délimitées. / 5. Si, en fonction des résultats des enquêtes visées à l'article 3 et de la surveillance visée à l'article 6, paragraphe 7, la présence de l'organisme spécifié n'est pas détectée dans une zone délimitée pendant cinq ans, cette délimitation peut être levée. Dans ce cas, l'État membre concerné en informe la Commission et les autres États membres (...) ". Aux termes de l'article 6 de cette décision : " 1. L'État membre ayant établi la zone délimitée visée à l'article 4 prend dans cette zone les mesures énoncées aux paragraphes 2 à 11. / 2. L'État membre concerné procède, dans un rayon de 100 mètres autour des végétaux qui ont fait l'objet d'analyses ayant révélé une infection par l'organisme spécifié, à l'enlèvement immédiat : / a) des végétaux hôtes, quel que soit leur statut sanitaire ; / b) des végétaux dont l'infection par l'organisme spécifié est connue ; / c) des végétaux qui présentent des symptômes d'une éventuelle infection par ledit organisme ou qui sont soupçonnés d'être infectés par ledit organisme. (...) / 3. L'État membre concerné procède au prélèvement d'échantillons et à des analyses sur les végétaux spécifiés dans un rayon de 100 mètres autour de chacun des végétaux infectés, conformément à la norme internationale pour les mesures phytosanitaires (NIMP) no 31 (6). / 4. Avant l'enlèvement de végétaux visés au paragraphe 2, l'État membre concerné applique les traitements phytosanitaires appropriés contre les vecteurs de l'organisme spécifié aux végétaux susceptibles d'héberger ces vecteurs. Ces traitements peuvent inclure, s'il y a lieu, l'enlèvement de végétaux. / 5. L'État membre concerné détruit, sur place ou à un endroit proche désigné à cet effet dans la zone infectée, les végétaux et les parties de végétaux visés au paragraphe 2, de manière à éviter la propagation de l'organisme spécifié. (...) / 7. L'État membre concerné surveille la situation relative à la présence de l'organisme spécifié en menant des enquêtes annuelles à des moments opportuns. Il procède à des inspections visuelles des végétaux spécifiés et réalise des prélèvements d'échantillons et des analyses sur des végétaux symptomatiques, ainsi que sur des végétaux asymptomatiques se trouvant à proximité de ceux-ci. (...) ".

9. En droit interne, le législateur et le pouvoir réglementaire ont fixé des mesures en vue de lutter contre les dangers sanitaires présentés par des organismes nuisibles tels que la bactérie Xyllela fastidiosa, laquelle a été classée en danger sanitaire de première catégorie pour les espèces végétales par l'arrêté du 15 décembre 2014. Ainsi, aux termes de l'article L. 201-1 du code rural et de la pêche maritime : " Pour l'application du présent livre, sous réserve de dispositions particulières, on entend par dangers sanitaires les dangers qui sont de nature à porter atteinte à la santé des animaux et des végétaux ou à la sécurité sanitaire des aliments et les maladies d'origine animale ou végétale qui sont transmissibles à l'homme. / Les dangers sanitaires sont classés selon les trois catégories suivantes : / 1° Les dangers sanitaires de première catégorie sont ceux qui étant de nature, par leur nouveauté, leur apparition ou persistance, à porter une atteinte grave à la santé publique ou à la santé des végétaux et des animaux à l'état sauvage ou domestique ou à mettre gravement en cause, par voie directe ou par les perturbations des échanges commerciaux qu'ils provoquent, les capacités de production d'une filière animale ou végétale, requièrent, dans un but d'intérêt général, des mesures de prévention, de surveillance ou de lutte rendues obligatoires par l'autorité administrative ; (...) / La liste des dangers sanitaires des première et deuxième catégories est établie dans des conditions prévues par voie réglementaire ". Aux termes de l'article L. 251-3 de ce code : " Sont considérés comme des organismes nuisibles tous les ennemis des végétaux ou des produits végétaux, qu'ils appartiennent au règne animal ou végétal ou se présentent sous forme de virus, mycoplasmes ou autres agents pathogènes. / L'autorité administrative dresse la liste des organismes nuisibles qui sont des dangers sanitaires de première catégorie et de deuxième catégorie définis à l'article L. 201-1 ". Aux termes de l'article L. 201-4 du même code : " L'autorité administrative prend toutes mesures de prévention, de surveillance ou de lutte relatives aux dangers sanitaires de première catégorie. Elle peut prendre de telles mesures pour les dangers de deuxième catégorie. / A ce titre, elle peut, notamment : / 1° Imposer à certains propriétaires ou détenteurs d'animaux, de denrées d'origine animale ou d'aliments pour animaux, ainsi qu'à certains propriétaires ou détenteurs de végétaux, des mesures particulières de contrôle adaptées à ces dangers ; (...) ".

10. La décision d'exécution (UE) 2015/789 modifiée précise, en son article 6, que lorsqu'une zone d'un rayon de 100 mètres est délimitée autour d'un foyer de Xyllela fastidiosa, l'Etat membre procède dans ce rayon à l'enlèvement immédiat des végétaux dont l'infection est connue, des végétaux présentant des symptômes d'une éventuelle infection et de ceux soupçonnés d'être infectés, ainsi que des végétaux hôtes quel que soit leur statut sanitaire. Dans les affaires C-78/16 et C-79/16, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé, le 9 juin 2019, que l'obligation d'enlèvement immédiat des végétaux hôtes, quel que soit leur statut sanitaire, constituait, en l'état des connaissances scientifiques disponibles et en l'absence de traitement permettant de guérir lesdits végétaux, une mesure appropriée et nécessaire pour éviter la propagation de la bactérie Xyllela fastidiosa à partir de ces végétaux par les insectes vecteurs de celle-ci et ne méconnaissait dès lors pas les principes de proportionnalité et de précaution.

11. A la date de la décision attaquée, la base de données des végétaux hôtes de la bactérie Xyllela fastidiosa était celle déterminée par la Commission au 11 avril 2019, parmi lesquelles figuraient les espèces listées dans la décision contestée devant faire l'objet des mesures d'arrachement prescrites.

12. En l'espèce, il est constant que les parcelles listées dans la décision attaquée sont situées à moins de 100 mètres du foyer d'infection. Par suite, à la date de la décision attaquée, en l'état des données scientifiques disponibles et notamment de l'absence de mesures alternatives permettant d'éradiquer la maladie, la mesure d'abattage, quel que soit leur statut sanitaire, des espèces végétales listées dans la décision litigieuse, relevant de la catégorie des végétaux hôtes déterminés par la Commission et présentent sur lesdites parcelles, n'apparaît pas disproportionnée, quand bien même elle entraîne l'abattage d'un très grand nombre de végétaux et emporte des conséquences sur l'environnement, eu égard à la virulence de la bactérie et à son mode de propagation. Cette mesure, qui présente ainsi un caractère adapté et nécessaire pour lutter contre la propagation de la bactérie Xyllela fastidiosa à partir de végétaux hôtes par les insectes vecteurs, ne méconnaît pas le principe de précaution déterminé par l'article 5 de la Charte de l'environnement. Par suite, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que la décision attaquée porte atteinte aux principes de proportionnalité et de précaution. Pour les mêmes motifs, ils ne sont pas davantage fondés à soutenir que le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a, en prescrivant, par la décision attaquée, une obligation d'arrachage des végétaux hôtes compris dans le rayon de 100 mètres autour du foyer de Xyllela fastidiosa, commis une erreur manifeste d'appréciation.

13. En dernier lieu, aux termes de l'arrêté ministériel du 19 octobre 2020, publié le 24 octobre 2020, relatif aux mesures visant à éviter l'introduction et la propagation dans l'union de la bactérie : " Article 1er : Les dispositions du règlement d'exécution (UE) 2020/1201 du 14 août 2020 relatif à des mesures visant à éviter l'introduction et la propagation dans l'Union de Xylella fastidiosa (Wells et al.) sont d'application immédiate. Article 2 : En application de l'article 4 du règlement d'exécution (UE) 2020/1201 susvisé, le préfet de région fixe par arrêté le périmètre de la zone délimitée, en listant les communes concernées par la zone infectée et les communes concernées par la zone délimitée et en annexant une cartographie de ces zones. Cet arrêté mentionne la sous-espèce concernée de Xylella fastidiosa si elle est identifiée. (...) Article 4 : L'arrêté du 23 décembre 2015 relatif aux mesures visant à éviter l'introduction et la propagation dans l'Union de Xylella fastidiosa (Wells et al.) est abrogé ".

14. Les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de circonstances postérieures à la décision en litige, résultant de l'abrogation de la décision d'exécution (UE) 2015/789 par l'adoption du règlement d'exécution (UE) 2020/1201 de la Commission européenne le 14 août 2020, ainsi que des dispositions précitées de l'arrêté ministériel du 19 octobre 2020. De la même façon, ils ne peuvent pas non plus utilement faire valoir que, dans le cadre d'une procédure de marché public engagée par l'Etat en mars 2022, ayant pour objet des prestations visant à lutter contre la bactérie Xylella fastidiosa, les pièces du marché se réfèrent au règlement d'exécution (UE) 2020/1201, et non au règlement (UE) 2015/789. Enfin, le présent litige n'ayant pas pour objet le refus d'abrogation de l'arrêté préfectoral du 27 février 2018 mentionné au point 5, les requérants ne sont pas davantage fondés à se prévaloir utilement, dans la présente instance, des dispositions de l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration.

15. Il résulte de tout ce qui précède que l'association syndicale libre des propriétaires de " Mougins Le Haut " représentée par son syndic " Immo de France Côte d'Azur " et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 29 août 2019 du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'association syndicale libre des propriétaires de " Mougins Le Haut " et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association syndicale libre des propriétaires de " Mougins Le Haut " représentée par son syndic " Immo de France Côte d'Azur ", nommée en qualité de représentant unique et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Copie en sera adressée au préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2023, où siégeaient :

- Mme Chenal Peter, présidente de chambre,

- Mme Ciréfice, présidente assesseure,

- M. Prieto, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 juin 2023.

22MA01695 2

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01695
Date de la décision : 12/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-045 Nature et environnement.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: M. Gilles PRIETO
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : KATTINEH

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-06-12;22ma01695 ?
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