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08/06/2023 | FRANCE | N°21MA01991

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 08 juin 2023, 21MA01991


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) CPI France a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014, des rappels de retenue à la source mis à sa charge au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1803333 du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la

Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 mai 2021, la SAS CPI France, représentée par Me Kr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) CPI France a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014, des rappels de retenue à la source mis à sa charge au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1803333 du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 mai 2021, la SAS CPI France, représentée par Me Kraus, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 30 mars 2021 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;

3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à sa charge la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle démontre que la somme de 4 millions d'euros versée en 2012 à la société Cactus Investments Group Ltd avait pour contrepartie le transfert de permis de construire qui étaient nécessaires à la poursuite de son projet immobilier ;

- l'administration n'était pas fondée à faire application de l'article 238 A du code général des impôts, dès lors qu'aucune charge n'a été constatée au titre du versement de la somme de 4 millions d'euros à la société Cactus Investments Group Ltd ;

- l'administration n'était pas fondée à faire application de la retenue à la source.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la SAS CPI France ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mastrantuono,

- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS CPI France, qui exerce une activité de marchand de biens, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 4 mai 2012, date de sa création, au 31 décembre 2014. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a estimé que la somme de 4 millions d'euros versée au cours de l'année 2012 à titre d'honoraires à une société soumise à un régime fiscal privilégié n'était pas déductible et ne pouvait en conséquence affecter la valeur des stocks vendus en 2014 et a, par ailleurs, regardé cette somme comme constitutive de revenus distribués sur le fondement de l'article 111-c du code général des impôts, et fait application de la retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis du même code. La SAS CPI France relève appel du jugement du 30 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a ainsi été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014, des rappels de retenue à la source mis à sa charge au titre de l'année 2012, et des pénalités correspondantes.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 238 A du code général des impôts : " Les intérêts, arrérages et autres produits des obligations (...) ou les rémunérations de services, payés (...) par une personne physique ou morale domiciliée ou établie en France à des personnes physiques ou morales qui sont domiciliées ou établies dans un Etat étranger (...) et y sont soumises à un régime fiscal privilégié, ne sont admis comme charges déductibles pour l'établissement de l'impôt que si le débiteur apporte la preuve que les dépenses correspondent à des opérations réelles et qu'elles ne présentent pas un caractère anormal ou exagéré (...) "

3. Il résulte de l'instruction que la SAS CPI France a versé au cours de l'année 2012 une somme de 4 millions d'euros à la société Cactus Investments Group Ltd, établie aux Iles Vierges britanniques, comptabilisée au compte " achat d'études et de prestations de services ", puis dans un compte de transfert de charges afin d'être portée au compte " stocks ". L'administration a remis en cause la déduction de cette charge et en conséquence la minoration de la valeur des stocks de la SAS CPI France sur le fondement des dispositions précitées de l'article 238 A du code général des impôts, et fait application de la retenue à la source sur cette somme, regardée comme une libéralité constitutive d'un avantage occulte au sens de l'article 111-c du même code.

4. La société requérante soutient que la somme de 4 millions d'euros correspond non à la rémunération d'une prestation de services, mais à la contrepartie du transfert du bénéfice de deux permis de construire, conformément à une convention conclue le 30 mai 2012. Il est toutefois constant que les permis de construire dont le bénéfice a été transféré à la SAS CPI France avaient été demandés non par la société Cactus Investments Group Ltd, mais par la société Luxury Property Services. La circonstance que la société Cactus Investments Group Ltd a été associée, au cours de l'année 2007, de la société Logan Estates, elle-même associée unique des sociétés qui ont mandaté la société Luxury Property Services pour présenter les demandes de permis de construire n'est pas de nature à démontrer que la société Cactus Investments Group Ltd aurait été en réalité bénéficiaire de ces permis. La production d'une attestation rédigée postérieurement à la vérification de comptabilité par le directeur de la société qui s'est retirée du projet au bénéfice de la SAS CPI France ne permet pas davantage de démontrer que la société Cactus Investments Group Ltd aurait cédé le bénéfice des permis de construire en contrepartie de la somme de 4 millions d'euros. Par conséquent, c'est à bon droit que l'administration a estimé que la SAS CPI France ne démontrait pas que cette dépense, enregistrée en comptabilité au titre d'une rémunérations de services, correspondait à une opération réelle. Elle était dès lors fondée à considérer que l'article 238 A du code général des impôts faisait obstacle à la déductibilité de cette somme, quand bien même sa comptabilisation n'avait pas eu d'impact sur le résultat imposable à l'impôt sur les sociétés en 2012, en raison du transfert de charges opéré par la société, et ainsi à remettre en cause la valorisation des stocks vendus en 2014.

5. En second lieu, d'une part, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ". D'autre part, aux termes du 2 de l'article 119 bis du même code : " Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France (...) ".

6. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que la SAS CPI France, au bénéfice de laquelle la société Luxury Property Services a demandé le transfert des permis de construire qu'elle avait obtenus, ne pouvait ignorer que la somme de 4 millions d'euros qu'elle a versée à la société Cactus Investments Group Ltd au motif du prétendu transfert de ces permis de construire et enregistrée en comptabilité en tant que rémunération de services était dépourvue de contrepartie, et que la société Cactus Investments Group Ltd ne pouvait ignorer qu'elle recevait sans contrepartie la somme en cause. Dans ces conditions, l'administration était fondée à regarder l'avantage ainsi octroyé comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées de l'article 111-c du code général des impôts, et à faire par conséquent application de la retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis du même code.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS CPI France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. En premier lieu, la présente affaire n'a donné lieu à aucun dépens. Par suite, les conclusions présentées par la SAS CPI France sur le fondement de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

9. En second lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SAS CPI France la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS CPI France est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée CPI France et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2023, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 juin 2023.

2

N° 21MA01991


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01991
Date de la décision : 08/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Cotisations d`IR mises à la charge de personnes morales ou de tiers - Retenues à la source.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Charges diverses.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS KRAUS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-06-08;21ma01991 ?
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