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26/05/2023 | FRANCE | N°22MA00366

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 26 mai 2023, 22MA00366


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mahmouti,

- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., associé de la SARL JMF, et Mme E..., sa conjointe, gérante statutaire de cette société, ont fait l'objet d'un examen de leur situat

ion fiscale personnelle au titre des années 2014 à 2016, qui s'est conclu par une proposition de rectification en date du 1...

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mahmouti,

- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., associé de la SARL JMF, et Mme E..., sa conjointe, gérante statutaire de cette société, ont fait l'objet d'un examen de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2014 à 2016, qui s'est conclu par une proposition de rectification en date du 15 décembre 2017 constatant l'existence de revenus distribués par cette société à M. B... et Mme E.... En parallèle, l'administration a effectué la vérification de la comptabilité de l'activité occulte d'intermédiaire imputée à M. B... au titre des années 2007 à 2016. Par une proposition de rectification du 25 juin 2018, elle a réintégré, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, les commissions tirées de cette activité. M. B... et Mme E... relèvent appel du jugement du 29 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande tendant à ce qu'il prononce la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis, en conséquence de ces deux procédures, au titre des années 2008 à 2014, en droits et pénalités.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne des bénéfices non commerciaux imputés à M. B... au titre de l'exercice d'une activité occulte :

S'agissant de l'exercice d'une activité occulte :

2. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " (...) L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite (...) ". Dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, l'administration fiscale doit être réputée apporter la preuve, qui lui incombe, de l'exercice occulte de l'activité professionnelle si le contribuable n'est pas lui-même en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ses obligations déclaratives.

3. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a estimé que M. B... percevait, de façon habituelle, des commissions, jamais déclarées, en contrepartie de son rôle d'intermédiaire entre des prêteurs et des emprunteurs et qu'il exerçait ainsi une activité occulte d'apporteur d'affaires au titre des années 2008 à 2016. Pour ce faire, l'administration s'est fondée sur les constatations effectuées au cours de l'examen de la situation fiscale personnelle de Mme A..., au titre de l'année 2015, sur la vérification de la comptabilité de la SCI VDF et de celle de l'EURL AetM D..., ainsi que sur l'examen des relevés bancaires de M. B... au titre des années 2008 à 2016.

4. Les requérants soutiennent que les revenus en cause proviennent de l'activité statutaire et des seuls moyens de la société JMF, dont M. B... est associé. L'objet statutaire de cette société porte toutefois sur des activités de courtage en assurances, de conseil d'entreprise et toute activité annexe ou connexe, qui ne correspondent pas à celle d'intermédiaire entre prêteur et emprunteur. En outre, la vérification de comptabilité de la SCI VDF a établi que M. B... avait perçu des commissions de 25 000 euros en 2015, facturées par ce dernier, et non par la SARL JMF. Enfin, les tableaux réalisés par les requérants et versés aux débats n'établissent pas la concordance entre les commissions encaissées par M. B... sans être déclarées et l'activité de courtage en assurances de la société JMF. Par suite, et dès lors que M. B... n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire, ou fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce et que, en outre, il n'établit pas ni même n'allègue qu'il aurait commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ses obligations déclaratives, l'administration fiscale établit, au titre des années en litige, l'exercice par M. B... d'une activité occulte.

S'agissant du droit de reprise :

5. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " (...) le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable exerce une activité occulte ".

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... exerçait, au titre des années en litige une activité occulte. Par suite, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. Dès lors, les années d'imposition en litige n'étaient pas prescrites.

S'agissant de la procédure d'imposition :

7. Aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions ".

8. La proposition de rectification en date du 25 juin 2018 adressée à M. B... mentionne l'impôt concerné, les années en cause, le montant des différents rehaussements envisagés, leur fondement légal, ainsi que le montant des impositions résultant de ces rectifications. Par ailleurs, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'administration ne s'est pas bornée à déduire le caractère occulte des revenus de M. B... de la seule constatation faite lors de la vérification de la comptabilité de la SCI VDF au titre de l'année 2015, mais a qualifié d'occultes au titre des années 2008 à 2016 les sommes encaissées par chèque par M. B... en l'absence de toute autre justification des crédits et de toute autre source de revenus connue de l'administration. Elle a ainsi indiqué dans la proposition de rectification en litige que la vérification de comptabilité de l'EURL AetM D... a permis de constater que M. B... avait servi d'intermédiaire pour des prêts consentis le 1er octobre 2011, le 15 mai 2012, les 12 et 26 juin 2013 et le 8 avril 2014, cette répétition suffisant par ailleurs à établir le caractère habituel de l'activité exercée. Il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation de la proposition de rectification du 25 juin 2018 doit être écarté, les requérants ne pouvant par ailleurs pas utilement se prévaloir de l'interprétation administrative de la loi fiscale pour contester la procédure d'imposition.

En ce qui concerne les revenus regardés comme distribués par la société JMF à Mme E... :

S'agissant des locations immobilières :

9. Les requérants n'apportent aucun élément en appel de nature à remettre en cause le motif retenu à juste titre par les premiers juges au point 16 de leur jugement et qu'il y a dès lors lieu d'adopter.

S'agissant du solde du compte courant d'associé débiteur :

10. Si les requérants persistent à soutenir que le solde du compte courant débiteur ne saurait être taxé sur le fondement de l'article 111 c du code général des impôts mais seulement sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 de ce code, ils ne produisent aucun élément de nature à remettre en cause le motif retenu par les premiers juges aux points 14 et 15 de leur jugement, et qu'il y a dès lors lieu d'adopter, selon lequel la somme en question ne pouvait être regardée comme ayant distribué à un associé, Mme E... n'étant pas associée dans la SARL JMF.

En ce qui concerne les revenus regardés comme distribués par la société JMF à M. B... :

S'agissant des revenus de capitaux mobiliers issus de la rémunération de gérance :

11. Aux termes de l'article 62 du code général des impôts : " Les traitements, remboursements forfaitaires de frais et toutes autres rémunérations sont soumis à l'impôt sur le revenu au nom de leurs bénéficiaires s'ils sont admis en déduction des bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés par application de l'article 211, même si les résultats de l'exercice social sont déficitaires, lorsqu'ils sont alloués : Aux gérants majoritaires des sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes dans les conditions prévues à l'article 3-IV du décret n° 55-594 du 20 mai 1955 modifié ou dans celles prévues à l'article 239 bis AA ou à l'article 239 bis AB ; Aux gérants des sociétés en commandite par actions ; Aux associés en nom des sociétés de personnes, aux membres des sociétés en participation et aux associés mentionnés aux 4° et 5° de l'article 8 lorsque ces sociétés ou exploitations ont opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux. Le montant imposable des rémunérations visées au premier alinéa est déterminé, après déduction des cotisations et primes mentionnées à l'article 154 bis, selon les règles prévues en matière de traitements et salaires ".

12. Il résulte des termes mêmes de cet article que, pour être imposables à l'impôt sur le revenu, en application de ces dispositions, les rémunérations en cause doivent avoir été admises en déduction des bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés.

13. L'administration a réintégré dans les charges de la société JMF la somme de 36 000 euros comptabilisée, par une écriture d'opérations diverses en date du 31 décembre 2014, au crédit du compte-courant d'associé détenu par M. B... dans les comptes de cette société, et a regardé cette somme distribuée à M. B... sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Les requérants soutiennent que cette somme a été octroyée à M. B... en rémunération de son activité de " cogérance de fait ", en échange d'un travail effectif, et qu'elle doit être imposée sur le fondement de l'article 62 du code général des impôts. Il résulte toutefois de l'instruction que M. B... détient 49 % des parts de la SARL JMF et que Mme E..., gérante, n'en est pas associée et ne détient donc aucune part. Il suit de là que, contrairement à ce qu'il soutient, M. B..., qui se prévaut de sa qualité de gérant de fait, ne peut être regardé comme le gérant majoritaire de cette société. En outre, il n'en est pas non plus le salarié. Enfin, si les requérants versent aux débats la décision d'assemblée générale du 19 juin 2015, celle-ci a homologué le principe du versement d'une rémunération mais n'en mentionne pas le montant. Dès lors et ainsi que l'avait jugé à juste titre le tribunal, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que cette somme constituait la rémunération de la gérance de fait exercée par M. B....

S'agissant des revenus issus de la maîtrise de l'affaire :

14. Il résulte de l'instruction que l'administration a considéré que M. B... était le maître de l'affaire et l'a regardé à ce titre comme le bénéficiaire de recettes distribuées pour un montant de 57 494 euros au titre de l'année 2014. M. B..., qui possède 49% des parts de la société dont le nom correspond à ses initiales, exerce une activité de courtage en assurances qui correspond à sa spécialité, dispose de la signature sur les comptes bancaires de la société ainsi que des moyens matériels de celle-ci et gère les relations de cette société avec les clients. Son père, M. C... B..., détient 51% des parts sans qu'il ne résulte de l'instruction qu'il prendrait part à quelque acte de gestion. Enfin, Mme E..., si elle est gérante statutaire et détient, elle aussi, la signature sur les comptes bancaires, elle exerce à temps complet une activité salariée de secrétaire dans une autre société située à Cogolin et ne conteste pas ne pas posséder les qualifications requises pour exercer l'activité de courtage en assurance, outre que, par ailleurs, sa collaboration au sein de la société n'a jamais été constatée lors des opérations de contrôle. Compte tenu de tous ces éléments, c'est à bon droit que l'administration a considéré M. G... B... comme le seul maître de l'affaire de la société JMF et qu'il devait être regardé comme le bénéficiaire des revenus réputés distribués par cette société.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Sur les frais liés à l'instance :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par M. B... et Mme E... sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... B..., à Mme F... E... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2023 où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- M. Mahmouti, premier conseiller,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 mai 2023.

2

N° 22MA00366


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00366
Date de la décision : 26/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Jérôme MAHMOUTI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : FEAT SOCIETE D'AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-05-26;22ma00366 ?
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