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14/04/2023 | FRANCE | N°21MA01419

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 14 avril 2023, 21MA01419


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme à responsabilité limitée (SARL) SR Invest a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2016.

Par un jugement n° 1900778 du 22 mars 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 avril 2021, la SARL SR Invest, représentée par la SELARL FEAT, ag

issant par Me Peltier-Feat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administrat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme à responsabilité limitée (SARL) SR Invest a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2016.

Par un jugement n° 1900778 du 22 mars 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 avril 2021, la SARL SR Invest, représentée par la SELARL FEAT, agissant par Me Peltier-Feat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 22 mars 2021 ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les parcelles n° 2832 et n° 2837 sont des parties communes invendables servant de dessertes et de voiries devant e^tre prises en compte dans le calcul du prix de revient global des lots mis en vente, ce que confirment la décision de rescrit n° 2006/5 FI du 7 février 2006, la réponse ministérielle du 5 juillet 2005 faite à M. A..., ainsi que les instructions BOI 8 A-11-79, BOI 8 A-4211 n° 10 du 15 novembre 2001 et BOI-TVA-IMM-10-20-10 n° 300 du 2 mars 2016 ;

- le tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation en affirmant que la société appelante était propriétaire des parcelles n° 2833 et n° 2836 ;

- le tribunal aurait dû prendre en compte que les parcelles en litige servent de voies d'accès aux parcelles cédées ;

- la cession effective à titre gratuit ou onéreux des parcelles destinées à servir de voie d'accès n'est pas une condition essentielle à leur intégration dans le prix de revient ; le tribunal a commis une erreur de droit en considérant qu'une transaction spécifique était nécessaire pour intégrer le prix d'acquisition des parcelles litigieuses dans le prix de revient global ;

- elle justifie la méthode employée pour calculer le prix de revient.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté numérique demande à la cour de rejeter la requête de la SARL SR Invest.

Il fait valoir que les moyens invoqués par l'appelante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 25 août 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Danveau,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société anonyme à responsabilité limitée (SARL) SR Invest, qui exerce une activité de marchand de biens, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016. A l'issue des opérations de contrôle, l'administration fiscale lui a notifié, par une proposition de rectification datée du 7 août 2017, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2016 selon la procédure de taxation d'office, concernant la vente de deux terrains à bâtir déclarée selon le régime de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge. La SARL SR Invest relève appel du jugement du 22 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2016.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. Le I de l'article 257 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles, lesquelles comprennent les livraisons à titre onéreux de terrains à bâtir, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée. En vertu du 2 du b de l'article 266 du même code, l'assiette de la taxe est en principe constituée par le prix de cession.

3. L'article 392 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée dispose toutefois que : " Les États membres peuvent prévoir que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n'a pas eu droit à déduction à l'occasion de l'acquisition, la base d'imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d'achat ". L'article 268 du code général des impôts, pris pour la transposition de ces dispositions, prévoit que : " S'agissant de la livraison d'un terrain à bâtir (...), si l'acquisition par le cédant n'a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, la base d'imposition est constituée par la différence entre : / 1° D'une part, le prix exprimé et les charges qui s'y ajoutent ; / 2° D'autre part, selon le cas : / - soit les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l'acquisition du terrain(...); / - soit la valeur nominale des actions ou parts reçues en contrepartie des apports en nature qu'il a effectués ".

4. Il résulte des dispositions précitées de l'article 268 du code général des impôts que, dans le cas de revente par lot d'un immeuble ou d'un terrain à bâtir acheté en une seule fois pour un prix global, chaque vente de lot constitue une opération distincte, à raison de laquelle le vendeur doit acquitter une taxe calculée sur la base de la différence entre, d'une part, le prix de vente de ce lot et, d'autre part, son prix de revient estimé en imputant à ce lot une fraction du prix d'achat global de l'immeuble ou du terrain. Il appartient au contribuable de procéder à cette imputation par la méthode de son choix, sous réserve du droit de vérification de l'administration et sous le contrôle du juge de l'impôt. Ces dispositions ne permettent pas au contribuable, dans le cas où la vente d'un lot s'effectue à un prix inférieur au prix de revient, de déduire la moins-value résultant de cette vente de la base d'imposition dégagée par d'autres ventes. Toutefois, ces règles ne s'opposent pas à ce que le contribuable impute sur le prix de revient de chacun des lots vendus une fraction du prix d'acquisition des terrains cédés gratuitement ou pour l'euro symbolique à une commune en vue de la réalisation d'aménagements de voirie, lorsque cette cession conditionne la réalisation de l'opération immobilière.

5. Il résulte de l'instruction que la SARL SR Invest a acquis le 29 janvier 2016 auprès d'un particulier quatre terrains cadastrés A 2832, A 2834, A 2835 et A 2837 situés au lieu dit B... sur le territoire de la commune de Evenos, pour un prix de 130 000 euros. Par actes du 25 juillet 2016 et du 16 février 2016, elle a cédé les terrains à bâtir cadastrés A 2834, d'une surface de 467 mètres carrés, et A 2835, d'une surface de 392 mètres carrés, aux prix respectifs de 175 000 euros et de 115 000 euros. Ces cessions ont été soumises à la taxe sur la valeur ajoutée selon le régime de la marge en application de l'article 268 du code général des impôts, sur la base de la différence entre, d'une part, le prix de vente de ces lots et, d'autre part, leur prix de revient. Pour déterminer le prix de revient au mètre carré de ces lots, l'administration a divisé le prix d'achat global des terrains par la SARL SR Invest par la superficie totale acquise et a appliqué le prix d'acquisition au mètre carré ainsi obtenu à la superficie des lots cédés les 25 juillet 2016 et 16 février 2016.

6. La SARL SR Invest soutient que, pour déterminer la marge servant d'assiette à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de chacun des lots vendus aux particuliers, il y a lieu de prendre compte, dans le calcul du prix de revient, une fraction, déterminée au prorata de la surface de chaque lot, du coût d'acquisition des parcelles n° 2832 et n° 2837 servant d'assiette à la desserte et aux parties communes des terrains avoisinants, dont font partie les parcelles n° 2834 et n° 2835.

7. Il résulte de l'instruction que la parcelle cadastrée A 2832 est, selon l'extrait de plan cadastral produit par l'appelante, enclavée entre les parcelles n° 2334 et 2833 et n'a pas vocation à desservir les parcelles n° 2834 et 2835. Il n'est pas établi que cette parcelle, d'une superficie de 54 mètres carrés, aurait servi ou aurait été destinée à la réalisation d'équipements collectifs indispensables aux terrains à bâtir litigieux, la requérante précisant qu'elle aurait dû " être cédée à titre gratuit au propriétaire de la parcelle n° 2334 ou à la mairie ". Dans ces conditions, l'acquisition de la parcelle n° 2832 par la SARL SR Invest ne saurait été regardée comme ayant été indispensable à la commercialisation et à la réalisation des opérations immobilières litigieuses.

8. En revanche, il résulte de l'instruction, en particulier de l'acte d'acquisition du 29 janvier 2016 et des actes de revente des parcelles n° 2834 et 2835 que le terrain cadastré A 2837, qui est une parcelle non constructible à " usage de chemin " d'une superficie de 875 mètres carrés selon l'attestation notariée du 20 juillet 2017, permet de desservir notamment les parcelles n° 2834 et 2835 et est traversé par une servitude de passage de canalisations instituée au profit de l'ensemble des propriétaires des parcelles avoisinantes. Il suit de là que l'acquisition de ce terrain a concouru à la réalisation du projet relatif à ces parcelles, sans qu'ait d'incidence la circonstance que ce terrain n'ait pas, par la suite, fait l'objet d'une transaction spécifique et en particulier d'une cession gratuite à la commune de Evenos en vue de l'entretien des aménagements de voirie et de réseaux réalisés. Dans ces conditions, la requérante est fondée à imputer une fraction de son prix d'acquisition sur le prix de revient desdites parcelles. Toutefois, compte tenu de ce qu'elle est restée propriétaire de ce terrain et de l'affectation non exclusive du terrain cadastré A 2837 à la desserte des parcelles n° 2834 et n° 2835, la marge de la société doit être déterminée en ne tenant compte que de la valeur de l'utilité de ce terrain à ces seules parcelles. L'appelante ne saurait ainsi imputer sur le prix de revient de chacun des lots vendus l'intégralité du prix d'acquisition du terrain A 2837 qui est également destiné à l'usage d'autres parcelles. A cet égard, les éléments du dossier ne permettent pas à la cour d'évaluer son utilité globale pour chacun des terrains à bâtir, alors notamment qu'il résulte de l'instruction qu'elle assure également la desserte par les voies et réseaux publics d'autres parcelles avoisinantes et qu'elle constitue le seul accès à la voie de défense des forêts contre l'incendie située à proximité. Il y a lieu, dès lors, d'ordonner un supplément d'instruction afin de permettre aux parties de discuter contradictoirement la valeur de cette utilité au regard de l'ensemble des éléments qu'elles entendront produire à cet égard et de réserver leurs autres droits et moyens jusqu'à la fin de l'instance.

D E C I D E :

Article 1er : Avant de statuer sur les conclusions de la requête de la SARL SR Invest, il sera procédé à un supplément d'instruction tendant à la production des éléments de nature à déterminer la valeur de l'utilité pour chacune des parcelles n° 2834 et n° 2835 de celle cadastrée n° 2837.

Article 2 : Ces éléments devront parvenir au greffe de la Cour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL SR Invest et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 30 mars 2023, où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- M. Mahmouti, premier conseiller,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 avril 2023.

2

N° 21MA01419


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01419
Date de la décision : 14/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-01-01 Contributions et taxes. - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. - Taxe sur la valeur ajoutée. - Personnes et opérations taxables. - Opérations taxables.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : FEAT SOCIETE D'AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-04-14;21ma01419 ?
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