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13/03/2023 | FRANCE | N°21MA02225

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 13 mars 2023, 21MA02225


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Kennedy a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la délibération du conseil municipal d'Ajaccio du 25 novembre 2019 approuvant la révision du plan local d'urbanisme en tant qu'elle a délimité, sur les parcelles dont elle est propriétaire, un périmètre d'attente de projet d'aménagement global.

Par un jugement n° 2000074 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la requête de la SCI Kennedy.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et u

n mémoire enregistrés les 9 juin 2021 et 20 décembre 2022, ce dernier mémoire n'ayant pas été c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Kennedy a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la délibération du conseil municipal d'Ajaccio du 25 novembre 2019 approuvant la révision du plan local d'urbanisme en tant qu'elle a délimité, sur les parcelles dont elle est propriétaire, un périmètre d'attente de projet d'aménagement global.

Par un jugement n° 2000074 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la requête de la SCI Kennedy.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 9 juin 2021 et 20 décembre 2022, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la SCI Kennedy, représentée par Me Recchi, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2000074 du 8 avril 2021 du tribunal administratif de Bastia, ensemble la délibération du conseil municipal d'Ajaccio du 25 novembre 2019 approuvant la révision du plan local d'urbanisme en tant qu'elle a délimité, sur les parcelles dont elle propriétaire, un périmètre d'attente de projet d'aménagement global ;

2°) de mettre à la charge de la commune d'Ajaccio le paiement de la somme de 20 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable ;

- le rapport de présentation est insuffisamment motivé s'agissant de la création d'un périmètre d'attente de projet d'aménagement global sur le site de la Miséricorde ;

- il n'est pas établi qu'une note de synthèse conforme aux exigences de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales aurait été envoyée à tous les conseillers municipaux dans le délai de 5 jours francs avant la séance du conseil municipal ;

- la délibération du 26 octobre 2015 n'est pas suffisamment précise quant aux objectifs de la révision du PLU et aux modalités de la concertation ; ces dernières n'ont pas été respectées ;

- l'enquête publique n'a pas tenu compte de ses observations formulées au titre des espaces boisés classés ;

- aucune étude préalable n'a été réalisée ;

- l'instauration d'un périmètre d'attente de projet d'aménagement global est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- un tel périmètre d'attente ne peut être instauré en zone UC du PLU ;

- les documents graphiques du PLU ne font pas apparaître la date à laquelle la servitude sera levée ;

- cette servitude constitue une atteinte à son droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- l'instauration de ce périmètre d'attente est entachée d'un détournement de pouvoir.

Par mémoires en défense enregistrés les 17 et 22 février 2022, la commune d'Ajaccio, représentée par la SELARL Parme Avocats, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête de la SCI Kennedy ;

2°) de mettre à la charge de la SCI Kennedy le paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable car elle constitue la reproduction littérale des écritures de première instance ;

- les moyens de la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent, présidente assesseure,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- les observations de Me Gatel pour la commune d'Ajaccio.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 25 novembre 2019, le conseil municipal d'Ajaccio a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune, dont il avait prescrit l'élaboration par une délibération du 26 octobre 2015 et arrêté le projet par une délibération du 28 novembre 2018. Cette délibération a instauré, notamment sur les parcelles dont est propriétaire la SCI Kennedy pour une superficie totale de 39 911 m², un périmètre d'attente de projet d'aménagement global (ci-après PAPAG) pour une durée de cinq ans. Par jugement n° 2000074 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté la requête de la SCI Kennedy tendant à l'annulation de la délibération du 25 novembre 2019 en tant qu'elle a instauré ce périmètre d'attente. La SCI Kennedy interjette appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité externe :

S'agissant de la motivation du rapport de présentation :

2. Aux termes de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : (...) 5° Dans les zones urbaines et à urbaniser, des servitudes interdisant, sous réserve d'une justification particulière, pour une durée au plus de cinq ans dans l'attente de l'approbation par la commune d'un projet d'aménagement global, les constructions ou installations d'une superficie supérieure à un seuil défini par le règlement. Ces servitudes ne peuvent avoir pour effet d'interdire les travaux ayant pour objet l'adaptation, le changement de destination, la réfection ou l'extension limitée des constructions existantes (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 151-2 du même code : " Le rapport de présentation comporte les justifications de : (...) 5° L'institution des zones urbaines prévues par l'article R. 151-19, des zones urbaines ou zones à urbaniser prévues par le deuxième alinéa de l'article R. 151-20 lorsque leurs conditions d'aménagement ne font pas l'objet de dispositions réglementaires ainsi que celle des servitudes prévues par le 5° de l'article L. 151-41 (...) ".

3. Le rapport de présentation fait état de ce que le secteur de la Miséricorde fait partie du périmètre de la convention " Action cœur de ville " et constitue un enjeu considérable pour la commune d'Ajaccio au regard de son emplacement stratégique en centre-ville. Il précise également que ce périmètre d'attente permettra de mener une réflexion sur un projet d'aménagement global ayant pour finalité de créer un parc urbain végétalisé, d'accueillir des services public d'importance tels que le centre administratif des services de l'Etat et un commissariat, de réaliser entre 600 et 1 000 logements de mixité sociale et générationnelle, de relier les quartiers du Salario, des jardins de l'Empereur, de l'avenue Napoléon III et de l'avenue Impératrice Eugénie, d'accueillir un pôle d'échanges multimodal avec un parking relais de 1 100 places et de réaliser un éco-quartier. Il précise ainsi, de manière suffisamment circonstanciée, les justifications particulières qui ont conduit à l'instauration du PAPAG contesté. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du rapport de présentation doit, dès lors, être écarté.

S'agissant de l'efficience de la concertation :

4. Aux termes de l'article L. 103-2 du code de l'urbanisme alors applicable : " Font l'objet d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées : 1° L'élaboration ou la révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d'urbanisme (...) ". Aux termes de l'article L.103-3 du même code : " Les objectifs poursuivis et les modalités de la concertation sont précisés par : 1° L'autorité administrative compétente de l'Etat lorsque la révision du document d'urbanisme ou l'opération sont à l'initiative de l'Etat ; 2° L'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement public dans les autres cas (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 600-11 dudit code alors applicable : " Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux articles L. 103-2 et L. 300-2 ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies aux articles L. 103-1 à L. 103-6 et par la décision ou la délibération prévue à l'article L. 103-3 ont été respectées. Les autorisations d'occuper ou d'utiliser le sol ne sont pas illégales du seul fait des vices susceptibles d'entacher cette délibération ou les modalités de son exécution ".

5. Il résulte de ces dispositions que l'adoption ou la révision du plan local d'urbanisme doit être précédée d'une concertation associant les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées. Le conseil municipal doit, avant que ne soit engagée la concertation, délibérer, d'une part, et au moins dans leurs grandes lignes, sur les objectifs poursuivis par la commune en projetant d'élaborer ou de réviser ce document d'urbanisme, et, d'autre part, sur les modalités de la concertation. Si cette délibération est susceptible de recours devant le juge de l'excès de pouvoir, son illégalité ne peut, en revanche, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoquée contre la délibération approuvant le plan local d'urbanisme. Ainsi que le prévoit l'article L. 600-11 du code de l'urbanisme précité, les irrégularités ayant affecté le déroulement de la concertation au regard des modalités définies par la délibération prescrivant la révision du document d'urbanisme demeurent par ailleurs invocables à l'occasion d'un recours contre le plan local d'urbanisme approuvé.

6. Il suit de là, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que la délibération du 26 octobre 2015 ayant prescrit la révision du document d'urbanisme aux fins d'élaboration d'un plan local d'urbanisme serait insuffisamment motivée quant aux objectifs poursuivis et aux modalités de la concertation envisagées est inopérant à l'appui des conclusions dirigées contre la délibération du 25 novembre 2019. En deuxième lieu, si la SCI requérante est, en revanche, recevable à soutenir que les modalités de la concertation telles que prévues par la délibération du 26 octobre 2015 n'ont pas été respectées, elle n'assortit pas son moyen de précision suffisante alors, au contraire, qu'il ressort de la note de synthèse adressée aux conseillers municipaux qu'une vaste concertation a eu lieu au travers, notamment, de l'organisation de quatre réunions de quartiers en juin et juillet 2015, d'une réunion publique le 14 novembre 2018 et d'une enquête publique dont le public a été informé par voie d'affichage en mairie, de publications d'annonces légales et de publications dans la presse locale, au cours de laquelle le public a été mis à même de présenter ses observations par voie écrite ou dématérialisée. Par suite, le moyen précité doit, en ses deux branches, être écarté.

S'agissant de la prise en compte, par la commission d'enquête publique, des observations de la SCI Kennedy :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 153-19 du code de l'urbanisme : " Le projet de plan local d'urbanisme arrêté est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou le maire ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public./ Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet (...) ". Il résulte des dispositions de l'article R. 123-19 du code de l'environnement que, si celles-ci n'imposent pas au commissaire enquêteur de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, elles l'obligent à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis.

8. Il résulte du rapport d'enquête publique établi en octobre 2019 que la commission d'enquête a synthétisé, dans le point n° 2475, les observations formulées par la SCI Kennedy, relaté la position de la commune d'Ajaccio sur lesdites observations et formulé un avis motivé sur ce point. Dès lors, la SCI Kennedy n'est pas fondée à soutenir que ses observations, formulées par lettre du 20 août 2019, n'auraient pas été prises en compte par la commission d'enquête.

S'agissant de la convocation des conseillers municipaux :

9. Aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal (...) Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs (...) ". Il résulte de ces dispositions que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, la convocation aux réunions du conseil municipal doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Le défaut d'envoi de cette note ou son insuffisance entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose toutefois pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés, à qui il est au demeurant loisible de solliciter des précisions ou explications conformément à l'article L. 2121-13 du même code, une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.

10. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier qu'une note explicative de synthèse rappelant le contexte de l'annulation du PLU de 2013 et la nécessité d'adapter le PLU au PADDUC, le déroulement de la concertation et de la consultation des personnes publiques associées, listant les différents avis émis par celles-ci, retraçant la publicité, le déroulement de l'enquête publique, les conclusions de celle-ci avec notamment, ses recommandations et réserves, les modifications détaillées apportées au projet de PLU à la suite de l'enquête publique, ainsi que les évolutions de surfaces par rapport au PLU de 2013, a été rédigée. Cette note de synthèse était suffisamment précise et détaillée pour permettre aux conseillers municipaux d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit de la délibération envisagée et de mesurer les implications de leur décision.

11. En deuxième lieu, si la SCI requérante fait valoir qu'il n'est pas établi que chacun des conseillers municipaux aurait reçu cette note de synthèse, il ressort des captures d'écran produites en première instance par la commune d'Ajaccio, lesquelles sont complètes, qu'a été adressé à chaque conseiller via la plateforme dématérialisée X-bus, la convocation à la séance du 25 novembre 2019 ainsi qu'un lien permettant de télécharger la note de synthèse précitée.

12. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que la convocation à la séance du 25 novembre 2019 a été adressée par voie dématérialisée aux conseillers municipaux le 19 novembre 2019. Si l'article 642 du code de procédure civile dispose que : " le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant ", ces dispositions ne sont pas applicables, en tout état de cause, au délai de convocation du conseil municipal. Ainsi, alors même que le délai expirait un dimanche, cette convocation a été adressée dans le respect du délai de cinq jours francs prévu par l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales.

13. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la convocation des conseillers municipaux serait irrégulière doit, en toute ses branches, être écarté.

S'agissant de l'absence de réalisation d'une étude préalable :

14. Si la SCI Kennedy soutient que le PAPAG a été instauré sans qu'ait été réalisée auparavant une étude préalable, ce moyen ne peut qu'être écarté dès lors qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne l'impose.

En ce qui concerne la légalité interne :

15. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que ce périmètre d'attente a pour objectif de mener une réflexion sur un projet d'aménagement global ayant pour finalité de créer un parc urbain végétalisé, d'accueillir le centre administratif des services de l'Etat et un commissariat, de réaliser entre 600 et 1 000 logements de mixité sociale et générationnelle, de relier les quartiers du Salario, des jardins de l'Empereur, de l'avenue Napoléon III et de l'avenue Impératrice Eugénie, d'accueillir un pôle d'échanges multimodal avec un parking relais de 1 100 places et de réaliser un éco-quartier. Si la SCI Kennedy soutient, sans l'établir, que les services de l'Etat auraient refusé ce projet de création d'un centre administratif, que le commissariat, qui sera situé à l'emplacement de l'ancienne usine de l'eau ne sera pas compris dans le périmètre de la servitude et que la création d'un éco-quartier ne saurait, à elle seule, justifier l'instauration d'une telle servitude, il ressort en tout état de cause des pièces du dossier que la commune d'Ajaccio justifie, au regard de la localisation privilégiée de ces terrains en plein centre-ville et à l'intersection de plusieurs quartiers, d'un intérêt particulier à geler toute constructibilité dans l'attente d'une réflexion d'ensemble permettant un aménagement optimal de cet espace dans le respect de l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires. Par suite, quand bien même la commune d'Ajaccio n'aurait pas la maîtrise foncière de ces terrains, elle n'a, en instaurant ce PAPAG, pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

16. En deuxième lieu, il résulte des dispositions précitées de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme qu'un périmètre d'attente de projet d'aménagement global peut être instauré dans les zones urbaines et à urbaniser. Par suite, le moyen tiré de ce qu'une telle servitude serait impossible en zone UC du PLU ne peut être qu'écarté.

17. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 151-32 du code de l'urbanisme : " Dans les zones U et AU, les documents graphiques du règlement font apparaître, s'il y a lieu les secteurs délimités en application du 5° de l'article L. 151-41 en précisant à partir de quelle surface les constructions ou installations sont interdites et la date à laquelle la servitude sera levée. "

18. Si, ainsi que le soutient la requérante, les documents graphiques du plan local d'urbanisme litigieux ne comportent pas, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 151-32 du code de l'urbanisme, l'indication de la date à laquelle la servitude de constructibilité limitée affectant le secteur concerné par le PAPAG sera levée, il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de présentation, que les auteurs du plan local d'urbanisme n'ont pas entendu déterminer une date autre que celle qui résulte, en application de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme, de la durée maximale de cinq ans à partir de la date d'approbation du plan local d'urbanisme, durée qui est d'ailleurs mentionnée dans le règlement du PLU. Dans ces conditions, l'absence d'indication, sur les documents graphiques, de la date mettant fin à la servitude de constructibilité limitée n'a pas été de nature à entacher d'illégalité le plan local d'urbanisme litigieux.

19. En quatrième lieu, la propriété figure au nombre des droits de l'homme consacrés par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Aux termes de son article 17 : " La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité ". En l'absence de privation du droit de propriété, il résulte néanmoins de l'article 2 de la Déclaration de 1789 que les limites apportées à son exercice doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi. Aux termes de l'article L.151-41 précité : " Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : (...) 5° Dans les zones urbaines et à urbaniser, des servitudes interdisant, sous réserve d'une justification particulière, pour une durée au plus de cinq ans dans l'attente de l'approbation par la commune d'un projet d'aménagement global, les constructions ou installations d'une superficie supérieure à un seuil défini par le règlement ". D'une part, ces dispositions, qui n'emportent aucune privation du droit de propriété mais se bornent à apporter des limites à son exercice, ne méconnaissent pas l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. La SCI requérante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir qu'elle aurait dû bénéficier d'une juste et préalable indemnité. D'autre part, les restrictions apportées à l'exercice du droit de propriété sont justifiées par l'intérêt général qui s'attache à la durée et la qualité de la réflexion qu'impose un projet d'aménagement global. Ces restrictions, qui ne sont que temporaires, d'une durée maximale de cinq ans, et sont accompagnées, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de garanties de fond et de procédure prévues pour la procédure d'élaboration des plans locaux d'urbanisme, sont proportionnées à l'objectif poursuivi. En outre, les dispositions combinées des articles L. 152-2 et L. 230-1 et suivants du code de l'urbanisme permettent au propriétaire d'un terrain situé dans le périmètre d'un PAPAG de faire usage de son droit de délaissement en mettant en demeure la commune d'acquérir ledit terrain. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la servitude ainsi instituée serait contraire au droit de propriété de la requérante tel que garanti par la déclaration des droits de l'homme et du citoyen doit être écarté.

20. En dernier lieu, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

21. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par la commune d'Ajaccio, que la SCI Kennedy n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de la délibération du 25 novembre 2019 en tant qu'elle a institué un PAPAG sur les terrains dont elle est propriétaire.

Sur les frais d'instance :

22. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Kennedy le paiement de la somme de 2 000 euros qui sera versée à la commune d'Ajaccio en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par la SCI Kennedy.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Kennedy est rejetée.

Article 2 : La SCI Kennedy versera la somme de 2 000 (deux mille) euros à la commune d'Ajaccio en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Kennedy et à la commune d'Ajaccio.

Une copie en sera adressée au préfet de la Corse-du-Sud.

Délibéré après l'audience du 27 février 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- Mme Vincent, présidente-assesseure,

- Mme Balaresque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 mars 2023.

21MA0222502


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA02225
Date de la décision : 13/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SELARL PARME AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-03-13;21ma02225 ?
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