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28/02/2023 | FRANCE | N°21MA01826

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 28 février 2023, 21MA01826


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2018 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice, a prononcé son exclusion temporaire de fonctions pour une durée de vingt-quatre mois dont quatorze mois avec sursis, ou subsidiairement, de réduire sa sanction à un blâme, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros à titre indemnitaire et enfin, de le réintégrer dans ses fonctions à l'UEMO Aix Université ou

Celony ou Martigues.

Par un jugement n° 1810705 du 22 mars 2021, le tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2018 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice, a prononcé son exclusion temporaire de fonctions pour une durée de vingt-quatre mois dont quatorze mois avec sursis, ou subsidiairement, de réduire sa sanction à un blâme, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros à titre indemnitaire et enfin, de le réintégrer dans ses fonctions à l'UEMO Aix Université ou Celony ou Martigues.

Par un jugement n° 1810705 du 22 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 mai 2021 et le 6 décembre 2022, M. C..., représenté par Me Hanffou, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 22 mars 2021 ;

2°) d'annuler cet arrêté d'exclusion temporaire de fonctions du 29 octobre 2018 ;

3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice, de lui verser une somme correspondant aux dix mois de traitement dont il a été privé du fait de son exclusion irrégulière, dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) d'enjoindre au ministre d'effacer de son dossier toute mention relative à la procédure disciplinaire'dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir';

5°) d'enjoindre au ministre de procéder à la reconstitution de sa carrière'dans les mêmes conditions de délai ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête d'appel, qui comporte des moyens d'appel et n'est pas la reproduction de ses écritures de première instance, est recevable ;

- la procédure disciplinaire est irrégulière, ayant été l'objet, le 30 janvier 2018, d'un changement d'affectation constitutif d'une première sanction disciplinaire, au terme d'un entretien avec sa hiérarchie, sans avoir pu bénéficier de l'assistance d'un avocat ni être en mesure d'apporter des éléments de contradiction ;

- le procès-verbal de la séance du conseil de discipline, affecté de nombreuses inexactitudes, n'est ni visé par l'arrêté en litige, ni signé, ne lui a pas été communiqué et doit être écarté des débats ;

- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas retenu le moyen tiré de l'erreur de fait alors que, d'une part, c'est à l'administration de rapporter la preuve des griefs formulés contre l'agent, d'autre part, que devant le tribunal, le ministre n'a pas produit de mémoire en défense avant la clôture de l'instruction et avait donc acquiescé aux faits exposés par le requérant et enfin, qu'il apportait des témoignages d'usagers et de collègues de travail qui étaient à prendre en compte ;

- le motif de la sanction tenant à l'absence de suites données aux convocations de ses supérieurs hiérarchiques est erroné en fait, un simple oubli expliquant qu'il ne se soit pas rendu à l'une d'elles ;

- l'administration ne produit pas le courriel insultant qu'il aurait adressé à l'ensemble de la structure le 13 décembre 2017 ;

- tous les autres motifs de la sanction sont entachés d'erreurs de fait ;

- seul peut lui être reproché un justificatif de frais de déplacement de 4 euros, produit par erreur, sans conséquence d'ailleurs puisque l'erreur a été rectifiée ;

- la sanction en litige fait suite à des agissements de harcèlement moral, qu'il justifie par de nombreuses pièces et qui a donné lieu de sa part à une demande de protection fonctionnelle, dont le refus d'enregistrement est contesté devant le tribunal administratif ;

- la sanction en litige est disproportionnée, compte tenu de son niveau de motivation et d'engagement et de la qualité de travail, saluée par les usagers et les magistrats ;

- l'annulation de la sanction lui ouvre droit à une indemnité représentative des dix mois de traitements dont il a été illégalement privé et qu'il reviendra à l'administration de lui verser, sur renvoi par la Cour pour liquidation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2022, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.

Le ministre fait valoir que :

- la requête d'appel est irrecevable, faute de comporter une critique du jugement attaqué ;

- le moyen tiré de l'illégalité externe de la décision en litige est irrecevable, car relevant d'une cause juridique distincte des moyens de première instance, et n'est en tout état de cause pas fondé ;

- les autres moyens d'appel ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 6 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 23 janvier 2023, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me Hanffou, représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse, en poste à la direction interrégionale de la protection judiciaire de la jeunesse Sud-Est, s'est vu infliger par arrêté du 29 octobre 2018 une exclusion temporaire de fonctions d'une durée de vingt-quatre mois, dont quatorze avec sursis. Par un jugement du 22 mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant d'une part, à l'annulation de cet arrêté, d'autre part, à ce que soit ordonnée sa réintégration, et enfin, à la condamnation de l'Etat à l'indemniser du préjudice subi du fait de cette éviction. M. C... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté les deux premiers chefs de sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. C... tendant à l'annulation de la sanction en litige et ses prétentions à fin d'injonction :

En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté en litige :

2. M. C... n'a présenté devant le tribunal administratif de Marseille, à l'appui de son recours tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 octobre 2018 lui infligeant la sanction d'exclusion temporaire de fonctions, que des moyens mettant en cause la légalité interne de cette décision. Il n'est donc pas recevable, ainsi que le fait valoir le ministre de la justice, à développer pour la première fois en appel, des moyens relatifs à la régularité procédurale de cette sanction, qui relèvent d'une cause juridique distincte. Ses moyens tirés de l'irrégularité de la procédure disciplinaire, des vices entachant l'avis rendu par le conseil de discipline le 6 septembre 2018 et du défaut de communication de cet avis sont ainsi irrecevables et doivent, pour ce motif, être écartés.

3. En outre, à les supposer présentées, les conclusions de M. C..., fondées sur l'existence de telles irrégularités, tendant à ce que l'avis du conseil de discipline soit écarté des débats, ne peuvent, elles aussi, qu'être rejetées.

En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté en litige :

S'agissant du harcèlement moral allégué :

4. Aux termes des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983, désormais codifiés aux articles L. 133-2 et L. 133-3 du code général de la fonction publique : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'appréciation de la valeur professionnelle, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération :/ 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / (...) ".

5. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

6. Néanmoins et d'une part, en se bornant à renvoyer à des pièces jointes à son recours, sans les accompagner d'une argumentation propre, pour soutenir que le " harcèlement moral dont il est victime est parfaitement caractérisé et justifié auprès de son administration ", M. C... n'assortit pas cette branche de son moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point 4, des précisions suffisantes pour apprécier la vraisemblance des agissements ainsi dénoncés.

7. D'autre part, pour se plaindre des agissements de harcèlement moral que, dans sa requête d'appel, il dit subir depuis deux années de la part de sa hiérarchie directe, à savoir la directrice territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse, la directrice du service territorial éducatif de milieu ouvert d'Aix-en-Provence'et le responsable d'unité du quartier mineurs du centre pénitentiaire de Luynes, M. C... ne peut utilement invoquer, à l'appui de son recours dirigé contre la sanction du 29 octobre 2018, dont la légalité s'apprécie à la date de sa signature, des circonstances qui sont postérieures à celle-ci.

8. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal, qui contrairement à ce qu'affirme l'intéressé, n'était pas tenu de joindre dans un même jugement cette affaire et le recours, enregistré sous un numéro différent, relatif spécifiquement aux faits de harcèlement moral, a écarté son moyen, articulé contre la sanction disciplinaire, tiré de ce qu'il a dû subir de tels agissements.

S'agissant de la matérialité des faits reprochés :

9. En l'absence de disposition législative contraire, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, à laquelle il incombe d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction à un agent public, peut apporter la preuve de ces faits devant le juge administratif par tout moyen.

10. S'il ressort des pièces soumises aux premiers juges que malgré la mise en demeure qui lui a été adressée le 26 juin 2019, le garde des sceaux, ministre de la justice, n'a produit qu'après la clôture de l'instruction intervenue le 15 septembre 2020 son premier mémoire en défense qui n'a donc pas été communiqué, le tribunal n'était pas tenu de considérer le ministre comme ayant acquiescé aux faits exposés par le requérant et non contredits par les pièces du dossier, dès lors que l'intéressé ne contestait pas l'exactitude matérielle des motifs de la sanction en litige. En tout état de cause, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, il revient à la Cour de se prononcer sur la contestation de la matérialité de ces motifs, portée devant elle par M. C..., à partir de l'ensemble des pièces du dossier, ainsi que de l'argumentation qui lui a été soumise par le garde des sceaux, ministre de la justice, avant la clôture de l'instruction.

11. Pour décider l'exclusion temporaire de fonctions de M. C... pour une durée de vingt-quatre mois, dont quatorze avec sursis, le garde des sceaux, ministre de la justice, a retenu les motifs tirés, premièrement, de ce qu'il a " régulièrement refusé d'exécuter les tâches et les missions confiées ", deuxièmement, qu'il n'a pas " honoré les convocations de ses supérieurs hiérarchiques, notamment la convocation en entretien annuel d'évaluation ", troisièmement, qu'il a " adopté à plusieurs reprises une attitude provocante et agressive à l'égard de ses collègues, sa hiérarchie et des partenaires de l'institution ", quatrièmement, qu'il a " envoyé le

13 décembre 2017 à l'ensemble de sa structure un courriel insultant à l'égard de sa hiérarchie ", cinquièmement, qu'il a " exposé dans les locaux de la protection judiciaire de la jeunesse une affiche satirique à l'égard des magistrats ", sixièmement, " fourni des justificatifs de frais de déplacements ne correspondant pas aux déplacements professionnels réels " et dernièrement, " refusé d'honorer son ordre de mission pour l'unité éducative de jour d'Aix-en-Provence ".

12. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment du compte rendu de la séance du conseil de discipline du 6 septembre 2018, qu'il a été reproché à M. C... de donner peu ou pas d'information sur le suivi des jeunes qui lui sont confiés ou de refuser de transférer les dossiers afférents. Si en cause d'appel, à l'image de son argumentation dans un premier temps devant le conseil de discipline, l'intéressé dénonce le défaut au dossier d'instance de tout élément probant à ce sujet, il ressort des pièces du dossier qu'il n'a pas répondu clairement à la question de la présidente de ce conseil de savoir si les faits ainsi reprochés sont faux. Par ailleurs et en tout état de cause, il résulte de l'ensemble des pièces produites par le ministre de la justice au dossier d'appel sur demande de la Cour, qui accompagnaient le rapport de saisine du conseil de discipline, qui ont été dûment communiquées à l'appelant et qui n'ont reçu de sa part aucune contradiction, qu'à plusieurs reprises, l'intéressé a pris des initiatives à l'égard de jeunes en difficulté, sans concertation avec les partenaires de la protection judiciaire de la jeunesse et au détriment du bon suivi des usagers de ce service. Dans ces conditions qui démentent l'affirmation générale de l'appelant selon laquelle ce grief résulterait des déclarations de sa supérieure hiérarchique directe dont il qualifie de mauvaises les méthodes d'encadrement, en produisant des courriels qui en tout état de cause ne le démontrent pas, la circonstance qu'il n'aurait jamais été destinataire d'une notification de service non-fait n'est pas de nature à remettre en cause la matérialité du premier motif de la sanction en litige.

13. En deuxième lieu, en affirmant, pour remettre en cause le deuxième motif de la sanction, tiré de son refus d'honorer les convocations de ses supérieurs hiérarchiques, notamment la convocation en entretien annuel d'évaluation, M. C... se borne à affirmer avoir reçu pour l'évaluation 2017 trois convocations à entretien en 2018, dont deux auraient été annulées par sa hiérarchie, selon lui sans explication, mais ne nie pas de la sorte ne pas s'être rendu à la troisième. S'il se prévaut d'un simple oubli pour justifier son absence à la convocation que lui avait adressée le directeur territorial après l'incident créé par son courriel collectif adressé le 13 décembre 2017, cette absence ne correspond pas à un entretien d'évaluation. Ainsi, l'intéressé, dont il ressort des débats devant le conseil de discipline qu'il dénie toute légitimité ou utilité aux entretiens d'évaluation, ne conteste pas sérieusement les faits ayant présidé au deuxième motif de sa sanction.

14. En troisième lieu, M. C... ne peut valablement se borner à invoquer des témoignages de collègues de travail et de parents de jeunes en difficulté pour critiquer le troisième motif de la sanction, fondé sur l'attitude provocante et agressive qu'il a adoptée à plusieurs reprises à l'égard de ses collègues, de sa hiérarchie et des partenaires de l'institution, alors qu'il ressort des déclarations de la directrice des ressources humaines de la direction interrégionale de la protection judiciaire de la jeunesse Sud-Est devant le conseil de discipline, auxquelles l'intéressé, bien que mis à même d'y répliquer par la présidente du conseil, s'est abstenu d'apporter la contradiction, a évoqué de nombreux signalements de la directrice d'établissement au sujet d'interventions de M. C... auprès de collègues de travail et de courriels agressifs de sa part et qu'ont été produites au dossier disciplinaire des attestations d'acteurs associatifs à ce titre défavorables. La circonstance, à la supposer avérée, que d'autres propos et comportements agressifs que les siens, tenus et adoptés en réunions, n'auraient pas été sanctionnés, est sans incidence sur la réalité des propres manquements de M. C....

15. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier, et spécialement des déclarations de l'appelant devant le conseil de discipline, ainsi que des convocations qui lui ont été adressées d'abord par le directeur régional, le 9 janvier 2018, puis par la directrice inter-régionale le 30 janvier 2018, que M. C... a adressé le 13 décembre 2017 à l'ensemble des agents du service un courriel par lequel il évoque au sujet de sa hiérarchie des relations de copinage. M. C... ne peut utilement justifier le contenu de ce courrier, dont il ne peut sérieusement nier l'existence devant la Cour après avoir tenté d'en relativiser les termes devant le conseil de discipline, en prétendant répondre par ce moyen aux fausses affirmations de sa hiérarchie et dénoncer le harcèlement moral qu'il subit, compte tenu de ce qui a été dit aux points 6 à 8.

16. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier, et il n'est du reste pas contesté, que dans son bureau, au sein du tribunal judiciaire, face au bureau d'une greffière, M. C... a placardé une affiche détournant le titre du journal satirique " Charlie Hebdo " pour y inscrire la mention " Quenelle Hebdo " et que cette démarche, dans un lieu recevant du public, portant atteinte à la neutralité du service public et à l'image de l'institution judiciaire, a suscité un rappel à l'ordre du président de la juridiction à l'intention du directeur régional de la protection judiciaire de la jeunesse. Il résulte également des éléments de l'instance que M. C... a porté sur le magazine " Avenirs " de la protection judiciaire de la jeunesse la mention " Lol ", manifestant de la sorte de l'ironie au sujet du sérieux et de l'utilité des missions de ce service. La réalité de ces comportements n'est pas remise en cause par la circonstance que les propos ou les écrits outranciers d'autres agents n'auraient pas reçu de réponses appropriées de la part de leur hiérarchie.

17. En sixième lieu, si M. C... prétend que seule une erreur, d'un montant de 4 euros, peut lui être imputée dans sa production de justificatifs au soutien de ses demandes de remboursement de déplacements et frais professionnels, il ressort des déclarations de la directrice des ressources humaines de la direction interrégionale devant le conseil de discipline, d'une part, qu'ont été relevées par ses services plusieurs discordances relatives aux frais de tunnel et de repas réellement exposés et entre les demandes de frais de déplacement présentées par l'intéressé et les données de carte GPS, et d'autre part, que M. C... n'a pas répliqué à de telles déclarations, alors que la présidente du conseil de discipline l'y avait invité.

18. L'ensemble de ces manquements de M. C... à ses obligations d'obéissance hiérarchique, de neutralité et de réserve, dont la matérialité est ainsi établie, constituent des fautes de nature à justifier le prononcé d'une sanction disciplinaire.

19. Certes, il ne ressort pas des pièces du dossier, pas même des mentions du compte rendu de séance du conseil de discipline, que M. C... aurait refusé d'honorer son ordre de mission pour l'unité éducative de jour d'Aix-en-Provence où, d'après les déclarations de la directrice des ressources humaines devant l'organe consultatif disciplinaire, il a exercé ses fonctions vingt-quatre jours.

20. Toutefois, il résulte de l'instruction que s'il ne s'était pas fondé sur ce dernier motif, le garde des sceaux, ministre de la justice, aurait pris la même décision de l'exclure de ses fonctions pour une durée de vingt-quatre mois, en l'assortissant d'un sursis de quatorze mois, une telle sanction n'étant pas disproportionnée, compte tenu de la nature des fonctions exercées par M. C..., de la gravité des fautes commises et de leurs effets sur le service, et malgré la qualité intrinsèque de ses compétences professionnelles et les attestations de parents de jeunes en difficulté.

21. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 29 octobre 2018 et ses prétentions accessoires à fin de réintégration.

Sur les conclusions accessoires de M. C... :

22. Le rejet par le présent arrêt des conclusions principales de M. C... emporte, par voie de conséquence, celui de ses conclusions accessoires aux fins d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 10 février 2023, où siégeaient :

- M. Revert, président,

- M. Martin, premier conseiller,

- M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 février 2023.

N° 21MA018262


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01826
Date de la décision : 28/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-09-03-01 Fonctionnaires et agents publics. - Discipline. - Motifs. - Faits de nature à justifier une sanction.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Michaël REVERT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : HANFFOU

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-02-28;21ma01826 ?
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