Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société HMTP a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 17 avril 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a mise en demeure de débuter l'enlèvement des remblais situés sur les parcelles A 999, A 1004 et A 1819, sur le territoire de la commune du Puy Sainte Réparade, occupant une surface de 4 hectares environ et d'un volume estimé à 100 000 m3, dans un délai de trois mois, la totalité des remblais devant être évacuée en un an maximum, et de déposer un dossier de remise en état du site auprès de la préfecture des Bouches-du-Rhône dans un délai de deux mois, ensemble l'arrêté du 4 juin 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a mise en demeure de régulariser sa situation administrative pour une installation de stockage de déchets inertes (ISDI) exploitée sur lesdites parcelles, soit en déposant une demande d'enregistrement d'une exploitation d'une installation classée pour la protection de l'environnement relevant de la rubrique 2760-3 de la nomenclature prévue aux articles R512-46-1 et suivants du code de l'environnement, soit en cessant son activité par la mise à l'arrêt définitif de l'ISDI et en procédant à l'élimination des déchets déposés vers une installation dûment autorisée puis à la remise en état du site.
Par un jugement n° 1904373, 1906037 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 15 novembre 2021, la société HMTP, représentée par Me Molina, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 septembre 2021 ;
2°) d'annuler les arrêtés des 17 avril et 4 juin 2019 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable ;
- le signataire de l'arrêté contesté n'est pas compétent ;
- il n'est pas établi que les agents auteurs des constats de manquements aient été commissionnés et assermentés dans les conditions prévues par les articles R. 172-1 et R. 172-4 du code de l'environnement ;
- les opérations de visite ayant permis les constats des 15 et 31 octobre 2018 ont été irrégulièrement menées, en méconnaissance des articles L. 171-1 et L. 171-2 du code de l'environnement ;
- l'arrêté du 17 avril 2019 est insuffisamment motivé car il ne répond pas aux arguments dont elle a fait part par courrier du 27 février 2019 adressé par son conseil aux services de la direction départementale des territoires et de la mer des Bouches-du-Rhône ;
- n'étant ni propriétaire, ni locataire du terrain concerné, ni maître d'ouvrage des travaux réalisés, elle n'a aucunement la qualité pour solliciter une autorisation environnementale ;
- les arrêtés attaqués ne déterminent pas de manière précise les volumes et les hauteurs des remblais en cause, les éléments sur lesquels ils se fondent étant manifestement insuffisants et n'établissent pas que les remblais en cause n'auraient pas existé avant l'arrivée de la société sur les lieux, d'autres intervenants ayant pu contribuer à cette situation ;
- aucune constatation préalable aux 15 et 31 octobre 2018 ne permet d'établir que les remblais présents n'auraient pas existé avec son arrivée sur les lieux ; il est impossible de quantifier sa responsabilité ;
- les sanctions prononcées par les arrêtés attaqués, eu égard à leur ampleur et aux délais imposés, sont disproportionnées et entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la Cour pourra modérer les sanctions prononcées, notamment au regard de l'article L. 171-8 du code de l'environnement.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 décembre 2021, le syndicat mixte d'aménagement de la vallée de la Durance (SMAVD), représenté par Me Schmidt, conclut au rejet de la requête en ce qui concerne l'arrêté du 17 avril 2019 et à ce que soit mise à la charge de la société HMTP la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir :
- à titre principal, la requête est irrecevable car elle n'est pas motivée ;
- à titre subsidiaire, aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 janvier 2022, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir :
- à titre principal, la requête est irrecevable car elle n'est pas motivée ;
- à titre subsidiaire, aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un premier arrêté du 17 avril 2019, le préfet des Bouches-du-Rhône a mis la société HMTP en demeure de débuter l'enlèvement des remblais situés sur les parcelles cadastrées section A n° 999, 1004 et 1819 sur le territoire de la commune du Puy Sainte Réparade, occupant une surface de 4 hectares environ et d'un volume estimé à 100 000 m3, dans un délai de trois mois, la totalité des remblais devant être évacuée dans le délai d'un an, et de déposer un dossier de remise en état du site auprès de la préfecture des Bouches-du-Rhône dans un délai de deux mois. Par un second arrêté du 4 juin 2019, le préfet des Bouches-du-Rhône a mis cette société en demeure de régulariser sa situation administrative pour une installation de stockage de déchets inertes (ISDI) exploitée sans enregistrement préalable sur ces mêmes parcelles, soit en déposant une demande d'enregistrement d'une exploitation d'une installation classée pour la protection de l'environnement relevant de la rubrique 2760-3 de la nomenclature prévue aux articles R. 512-46-1 et suivants du code de l'environnement, dans un délai de trois mois, soit en cessant son activité par la mise à l'arrêté définitif de l'ISDI dans un délai d'un mois en procédant à l'élimination des déchets déposés vers une installation dûment autorisée puis à la remise en état du site. La société HTMP relève appel du jugement du 16 septembre 2021 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 17 avril 2019 :
2. En premier lieu, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 17 avril 2019 et de l'insuffisance de motivation de cet arrêté, en méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 214-2 du code de l'environnement : " Les installations, ouvrages, travaux et activités visés à l'article L. 214-1 sont définis dans une nomenclature, établie par décret en Conseil d'Etat après avis du Comité national de l'eau, et soumis à autorisation ou à déclaration suivant les dangers qu'ils présentent et la gravité de leurs effets sur la ressource en eau et les écosystèmes aquatiques compte tenu notamment de l'existence des zones et périmètres institués pour la protection de l'eau et des milieux aquatiques. (...) ". Aux termes de l'article L. 214-3 de ce code : " I. - Sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d'accroître notablement le risque d'inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles. (...) ". L'article R. 214-1 de ce code dispose que : " La nomenclature des installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation ou à déclaration en application des articles L. 214-1 à L. 214-6 figure au tableau annexé au présent article (...) 3.2.2.0. Installations, ouvrages, remblais dans le lit majeur d'un cours d'eau 1° Surface soustraite supérieure ou égale à 10 000 m² (A...) ; (...) Au sens de la présente rubrique, le lit majeur du cours d'eau est la zone naturellement inondable par la plus forte crue connue ou par la crue centennale si celle-ci est supérieure. La surface soustraite est la surface soustraite à l'expansion des crues du fait de l'existence de l'installation ou ouvrage, y compris la surface occupée par l'installation, l'ouvrage ou le remblai dans le lit majeur. ". Aux termes de l'article L. 171-7 du même code : " Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation, de l'enregistrement, de l'agrément, de l'homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application des dispositions du présent code, ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine. / Elle peut édicter des mesures conservatoires et suspendre le fonctionnement des installations et ouvrages ou la poursuite des travaux, opérations ou activités jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la déclaration ou sur la demande d'autorisation, d'enregistrement, d'agrément, d'homologation ou de certification. / Si, à l'expiration du délai imparti, il n'a pas été déféré à la mise en demeure, ou si la demande d'autorisation, d'enregistrement, d'agrément, d'homologation ou de certification est rejetée, ou s'il est fait opposition à la déclaration, l'autorité administrative compétente peut : 1° Faire application des dispositions du II de l'article L. 171-8 ; 2° Ordonner la fermeture ou la suppression des installations ou ouvrages, la cessation définitive des travaux, opérations ou activités ainsi que la remise en état des lieux. ".
4. En outre, aux termes de l'article L. 172-1 du code de l'environnement : " I. - Outre les officiers et agents de police judiciaire et les autres agents publics spécialement habilités par le présent code, sont habilités à rechercher et à constater les infractions aux dispositions du présent code et des textes pris pour son application et aux dispositions du code pénal relatives à l'abandon d'ordures, déchets, matériaux et autres objets les fonctionnaires et agents publics affectés dans les services de l'Etat chargés de la mise en œuvre de ces dispositions, ou à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, dans les parcs nationaux et à l'Agence française pour la biodiversité. / Ces agents reçoivent l'appellation d'inspecteurs de l'environnement. II. - Pour exercer les missions prévues au I, les inspecteurs de l'environnement reçoivent des attributions réparties en deux catégories : 1° Les attributions relatives à l'eau et à la nature qui leur donnent compétence pour rechercher et constater les infractions prévues par les titres II, VI et VII du présent livre, les chapitres Ier à VII du titre Ier du livre II, le livre III, le livre IV et les titres VI et VIII du livre V du présent code et les textes pris pour leur application ainsi que sur les infractions prévues par le code pénal en matière d'abandon d'ordures, déchets, matériaux et autres objets ; 2° Les attributions relatives aux installations classées pour la protection de l'environnement qui leur donnent compétence pour rechercher et constater les infractions prévues par les titres II, VI et VII du présent livre, le livre II et les titres Ier, II, III, IV, V et VII du livre V du présent code et les textes pris pour leur application. III. - Les inspecteurs de l'environnement sont commissionnés par l'autorité administrative et assermentés pour rechercher et constater tout ou partie des infractions mentionnées au 1° ou au 2° du II du présent article. ". Aux termes de l'article R. 172-1 de ce code : " Le commissionnement des inspecteurs de l'environnement pour rechercher et constater les infractions mentionnées au 1° du II de l'article L. 172-1 et celles prévues au chapitre VIII du titre Ier du livre II est délivré par le ministre chargé de l'environnement. / Le commissionnement des inspecteurs de l'environnement pour rechercher et constater les infractions mentionnées au 2° du II de l'article L. 172-1 est délivré par le ministre chargé des installations classées pour la protection de l'environnement. / Le commissionnement fixe le ressort territorial dans lequel l'agent exerce ses fonctions, lorsque celui-ci excède le ressort de son service d'affectation. / Lorsque ces fonctionnaires et agents sont affectés à un établissement public, le commissionnement est délivré sur demande du directeur de cet établissement. ". Aux termes de l'article R. 172-4 du même code : " Les inspecteurs de l'environnement ne peuvent exercer leurs fonctions qu'après avoir prêté serment devant le tribunal de grande instance de leur résidence administrative. Un procès-verbal en est dressé et une copie remise à l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 172-5 du même code : " L'autorité administrative chargée du commissionnement délivre à l'inspecteur de l'environnement une carte de commissionnement qui comporte la photographie de son titulaire et mentionne ses nom et prénom, ainsi que ses attributions. Elle atteste son assermentation. ".
5. La société appelante soutient qu'aucun élément ne permet de justifier que les auteurs des constats dressés le 31 octobre 2018 et du rapport de manquement administratif du 22 novembre 2018, M. G... de Bodin de Galembert et Mme D... J..., auraient été régulièrement commissionnés et auraient prêté serment dans le respect des dispositions de l'article L. 171-2 du code de l'environnement et des articles R. 172-1 et R. 172-4 pris pour son application. Toutefois, il résulte de l'instruction que M. de Bodin de Galembert, inspecteur de l'environnement et co-auteur de ces constats et de ce rapport, a prêté serment le 18 juin 2002 devant le tribunal de grande instance de Marseille et qu'il est détenteur d'une carte nationale d'inspecteur, délivrée le 4 février 2016 par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, portant le numéro 2760 et valide jusqu'au 27 janvier 2022, attestant de son assermentation et le commissionnant pour contrôler les installations et activités soumises à sa surveillance dans les conditions fixées aux articles L. 171-1 et L. 172-1 du code de l'environnement. Par suite, l'absence de commissionnement et d'assermentation de Mme J..., qui s'est bornée à assister son collègue, sans procéder à des opérations de contrôle, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure préalable à l'édiction de l'arrêté en litige.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 171-1 du code de l'environnement : " I. - Les fonctionnaires et agents chargés des contrôles prévus à l'article L. 170-1 ont accès : 1° Aux espaces clos et aux locaux accueillant des installations, des ouvrages, des travaux, des aménagements, des opérations, des objets, des dispositifs et des activités soumis aux dispositions du présent code, à l'exclusion des domiciles ou de la partie des locaux à usage d'habitation. Ils peuvent pénétrer dans ces lieux entre 8 heures et 20 heures et, en dehors de ces heures, lorsqu'ils sont ouverts au public ou lorsque sont en cours des opérations de production, de fabrication, de transformation, d'utilisation, de conditionnement, de stockage, de dépôt, de transport ou de commercialisation mentionnées par le présent code ; 2° Aux autres lieux, à tout moment, où s'exercent ou sont susceptibles de s'exercer des activités soumises aux dispositions du présent code ; (...) II. - Les fonctionnaires et agents chargés des contrôles ne peuvent avoir accès aux domiciles et à la partie des locaux à usage d'habitation qu'en présence de l'occupant et avec son assentiment. ". Aux termes de l'article L. 171-2 du même code : " I. - Lorsque l'accès aux lieux mentionnés aux 1° et 2° du I de l'article L. 171-1 est refusé aux agents, ou lorsque les conditions d'accès énoncées au II du même article ne sont pas remplies, les visites peuvent être autorisées par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux ou les locaux à visiter. (...) ".
7. Le moyen tiré de la violation de ces dispositions doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, l'accord du propriétaire n'étant en l'espèce pas requis.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 512-7 du code de l'environnement : " I.- Sont soumises à autorisation simplifiée, sous la dénomination d'enregistrement, les installations qui présentent des dangers ou inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, lorsque ces dangers et inconvénients peuvent, en principe, eu égard aux caractéristiques des installations et de leur impact potentiel, être prévenus par le respect de prescriptions générales édictées par le ministre chargé des installations classées. (...) ". L'article R. 511-9 de ce code dispose que : " La colonne "A" de l'annexe au présent article constitue la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement ". Selon cette annexe, à la date de la décision attaquée comme à celle du présent jugement, la rubrique 2760-3 relative aux installations de stockage de déchets inertes est soumise à un enregistrement. Aux termes de l'article R. 512-46-1 de ce code : " Toute personne qui se propose de mettre en service une installation soumise à enregistrement adresse, dans les conditions de la présente sous-section, une demande au préfet du département dans lequel cette installation doit être implantée. (...) ".
9. Il résulte de l'instruction que les 15 et 31 octobre 2018, l'inspecteur de l'environnement a constaté, lors de deux visites inopinées, que le lit majeur de la Durance a été remblayé sur une surface d'environ 4 hectares et sur des hauteurs comprises entre 4 et 6 mètres, que des rampes avaient été aménagées afin que les camions puissent circuler sur ces remblais constitués de gravats de chantier, de pneus, de pierres, de câbles, de plastiques, de ferrailles et de déchets enrobés, enfouis ou en cours d'enfouissement sous des monticules de terres, que les travaux de remblaiement étaient en cours de réalisation par la société HMTP sur les parcelles cadastrées section A n° 999, 1004 et 1819 sur le territoire de la commune du Puy Sainte Réparade. Il ressort de ces deux constats que la superficie du stockage, d'environ 4 hectares, correspondait à un volume des déchets estimé à 100 000 m3. En se bornant à soutenir qu'il est impossible de quantifier sa responsabilité, la société HMTP ne critique pas utilement les faits constatés et repris par le rapport du manquement administratif du 22 novembre 2018, lesquels font foi jusqu'à preuve du contraire. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'inexactitude matérielle des faits soulevés par la société requérante doivent être écartés.
10. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction que les déchets inertes stockés sur les parcelles cadastrées section A n° 999, 1004 et 1819 ont bien été déposés par la société HMTP, qui disposait, à la demande de M. F..., propriétaire des parcelles A n° 999 et 1004, de l'exclusivité de la mise en remblai sur le terrain en litige. Il ne résulte pas de l'instruction que ce dernier aurait effectivement autorisé la société requérante à réaliser des remblaiements d'une telle importance pour aménager les parcelles cadastrées section A n° 999 et 1004 en vue de leur mise en culture. En outre, la parcelle cadastrée section A n° 1819, sur laquelle les remblaiements sont également réalisés par la société HMTP appartient au domaine privé de l'État et non à M. F... et ne peut donc pas faire l'objet du projet déclaré par ce dernier. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que l'installation en litige aurait fait l'objet d'un enregistrement au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement. Dès lors, quand bien même la société HMTP n'est ni propriétaire des parcelles, ni locataire de ces dernières, ni maître d'ouvrage de l'installation, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation en regardant cette société comme étant une personne intéressée au sens des dispositions de l'article L. 171-7 du code de l'environnement et l'a mise en demeure de régulariser sa situation administrative.
11. En sixième et dernier lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 171-8 du code de l'environnement, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 19 juillet 1976 dont elles sont issues, que lorsque l'inspecteur des installations classées a constaté, selon la procédure requise par le code de l'environnement, l'inobservation de conditions légalement imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet, sans procéder à une nouvelle appréciation de la violation constatée, est tenu d'édicter une mise en demeure de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé en rapport avec les mesures à prendre par l'exploitant.
12. Si les dispositions de l'article L. 171-8 du code de l'environnement laissent au préfet le choix entre plusieurs catégories de sanctions en cas de non-exécution de son injonction, la mise en demeure qu'il édicte n'emporte pas par elle-même une de ces sanctions. L'option ainsi ouverte en matière de sanctions n'affecte donc pas la compétence liée du préfet des Bouches-du-Rhône pour édicter la mise en demeure en litige, laquelle a été prise, en tout état de cause, sur le fondement de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, dès lors qu'elle concerne des aménagements effectués sans avoir fait l'objet de l'enregistrement requis. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que le délai de trois imparti à la société HMTP pour débuter l'enlèvement des remblais en cause, celui d'un an pour achever cet enlèvement et celui d'un mois pour déposer un dossier de remise en état du site auprès de la préfecture des Bouches-du-Rhône seraient insuffisants. Ainsi, le moyen tiré du caractère disproportionné des sanctions édictées par l'arrêté du 17 avril 2019 et de l'inadéquation des délais impartis pour se conformer aux mesures édictées par cet arrêté doit être écarté, de même que la demande de la société appelante tendant à ce que la Cour modère les mesures édictées à son encontre.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 4 juin 2019 :
13. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 4 juin 2019 doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
14. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que le signataire du rapport d'inspection du 18 février 2019, M. E... I..., technicien supérieur du service connaissance, aménagement durable et évaluation de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Provence-Alpes-Côte d'Azur exerçant également les missions d'inspecteur de l'environnement, a été commissionné par arrêté du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer du 12 juillet 2016 et a prêté serment le 24 mai 2016 devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence. Par suite, la circonstance que ce rapport a été signé par deux autres agents, M. C... et M. H..., qui n'ont pas procédé eux-mêmes à des opérations de contrôle, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure préalable à l'édiction de l'arrêté en litige.
15. En troisième lieu, le moyen tiré de la violation des dispositions des articles L. 171-1 et L 171-2 du code de l'environnement doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, l'accord du propriétaire n'étant en l'espèce pas requis.
16. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que le 29 novembre 2018 et le 8 janvier 2019, l'inspecteur de l'environnement a constaté, lors de deux visites inopinées, qu'une plateforme constituée de déchets du BTP de type pierre, terre, cailloux, gravats, corps de chaussée et matériaux de démolition, d'apparence majoritairement inerte mais comprenant en faible partie des déchets non inertes tels que bois, ferrailles, plastiques, pneus et végétaux, était en cours de réalisation par la société HMTP sur les parcelles cadastrées section A n° 999, 1004 et 1819 sur le territoire de la commune du Puy Sainte Réparade. Il ressort de ces deux constats, repris par le rapport de l'inspection des installations classées du 18 février 2019, que la superficie du stockage est d'environ 4 hectares, soit 500 mètres de longueur par 80 mètres de largeur et que le volume des déchets peut être estimé au minimum à 240 000 m3 ou 480 000 tonnes, le remblai culminant à près de 6 mètres au-dessus du terrain naturel. Il en ressort également, selon les déclarations du gérant de la société HMTP que les travaux de remblaiement avaient débuté trois à quatre mois auparavant et que les déchets provenaient d'un chantier situé à Aix-en-Provence. Il résulte en outre de l'instruction que M. F..., propriétaire des parcelles A n° 999 et 1004, avait missionné la société HMTP pour " aménager une plateforme pour du photovoltaïque ou des cultures fruitières en bio ", dans la continuité d'une autre parcelle déjà cultivée, laissant à la société HMTP le soin de réaliser toutes les démarches. Dans ces conditions, l'aménagement de cette plateforme était soumis au régime de l'enregistrement au regard de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement au titre de la rubrique 2760-3 relative aux installations de stockage de déchets inertes.
17. La société HMTP ne conteste pas avoir débuté ces travaux de remblaiement au plus tard au mois d'août 2017 et ne critique pas utilement les faits constatés et repris par le rapport de l'inspection des installations classées du 18 février 2019, lesquels font foi jusqu'à preuve du contraire. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'inexactitude matérielle des faits soulevés par la société requérante doivent être écartés.
18. En cinquième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 16, les déchets inertes stockés sur les parcelles cadastrées section A n° 999, 1004 et 1819 ont été déposés par la société HMTP, qui dispose, à la demande de M. F..., de l'exclusivité de la mise en remblai sur le terrain en litige. Il ne résulte pas de l'instruction que ce dernier aurait effectivement autorisé la société requérante à réaliser des remblaiements d'une telle importance pour aménager les parcelles cadastrées section A n° 999 et 1004 en vue de leur mise en culture. En outre, la parcelle cadastrée section A n° 1819, sur laquelle les remblaiements sont également réalisés par la société HMTP appartient au domaine privé de l'État et non à M. F... et ne peut donc pas faire l'objet du projet déclaré par ce dernier. Dès lors, et quand bien même la société HMTP n'est ni propriétaire des parcelles, ni locataire de ces dernières, ni maître d'ouvrage de l'installation, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation en regardant cette société comme étant une personne intéressée au sens des dispositions de l'article L. 171-7 du code de l'environnement et l'a mise en demeure de régulariser sa situation administrative.
19. En sixième et dernier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 12, le préfet des Bouches-du-Rhône était tenu d'édicter la mise en demeure en litige, laquelle a été prise sur le fondement de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, dès lors qu'elle concerne des aménagements effectués sans avoir fait l'objet de l'enregistrement requis. Ainsi, le moyen tiré du caractère disproportionné des sanctions édictées par l'arrêté du 4 juin 2019 doit être écarté, de même que la demande de la société appelante tendant à ce que la Cour modère les mesures édictées à son encontre.
20. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la ministre de la transition écologique et le SMAVD, que les conclusions de la société HMTP tendant à l'annulation des arrêtés du 17 avril 2019 et du 4 juin 2019 doivent être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
21. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société HMTP le versement au SMAVD de la somme demandée en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
22. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la société HMTP et non compris dans les dépens dans les deux instances.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société HMTP est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le syndicat mixte d'aménagement de la vallée de la Durance au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société HMTP, au syndicat mixte d'aménagement de la vallée de la Durance et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2023, où siégeaient :
- Mme Chenal Peter, présidente de chambre,
- M. Prieto, premier conseiller,
- Mme Marchessaux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 février 2023.
N° 21MA04405 2
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