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12/01/2023 | FRANCE | N°21MA03036

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 12 janvier 2023, 21MA03036


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

1°) Mme B... I... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 4 février 2021 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

2°) M. C... (E...)D...(/E...) a demandé au tribu

nal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 4 février 2021 par lequel le préfet des...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

1°) Mme B... I... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 4 février 2021 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

2°) M. C... (E...)D...(/E...) a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 4 février 2021 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2101311, 2101314 du 6 juillet 2021, le tribunal administratif de Nice a annulé les arrêtés du préfet des Alpes-Maritimes du 4 février 2021 en tant qu'ils prononcent à l'encontre de M. et Mme D... une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions des demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2021, M. et Mme D..., représentés par Me Bochnakian, demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'article 3 du jugement n° 2101311, 2101314 du 6 juillet 2021 du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler les arrêtés du 4 février 2021 en tant que le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté leurs demandes de titres de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de leur délivrer des cartes de séjour temporaires portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le préfet des Alpes-Maritimes a méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- ils sont fondés à se prévaloir de la circulaire du 28 novembre 2012 ;

- le préfet des Alpes-Maritimes a méconnu le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet des Alpes-Maritimes a commis une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une ordonnance du 27 octobre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention relative aux droits de l'enfants du 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. H...,

- et les observations de Me Bochnakian, représentant M. et Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D..., ressortissants tunisiens, ont sollicité leur admission au séjour sur le territoire français le 6 février 2018. Par un jugement du 24 janvier 2020, le tribunal administratif de Nice a annulé les décisions implicites par lesquelles le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté ces demandes, au motif qu'il n'avait pas communiqué les motifs du refus implicite, et lui a enjoint de procéder à leur réexamen. Par des arrêtés du 4 février 2021, le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté les demandes de titre de séjour de M. et Mme D..., leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office et a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Par un jugement du 6 juillet 2021, le tribunal administratif de Nice, saisi de demandes d'annulation de ces arrêtés, les a annulés en tant qu'ils prononcent à l'encontre de M. et Mme D... une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des demandes. M. et Mme D... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il leur est défavorable.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

3. Il ressort des pièces du dossier que si M. et Mme D... sont respectivement entrés en France en décembre 2011 et en septembre 2014 sous couvert de visas touristiques, ils se sont ensuite maintenus en situation irrégulière sur le territoire. Il est constant qu'ils ne disposent d'aucune attache en France autre que leur cellule familiale en situation irrégulière, que les autres membres de leurs familles résident en Tunisie et qu'ils étaient âgés de trente-trois ans et trente-six ans lors de leur entrée sur le territoire. Si M. et Mme D... font valoir qu'ils sont parents de trois enfants, dont l'aîné, né en 2008, est scolarisé en France depuis l'année scolaire 2014/2015 à l'école élémentaire et inscrit au titre de l'année scolaire 2020/2021 au collège en classe de 5ème, les deux autres, nés en France en 2015 et en 2017, étant scolarisés en école maternelle, ils se bornent à se prévaloir de l'ancienneté de la scolarisation de leur fils aîné, sans apporter aucun élément à l'appui de leurs allégations selon lesquelles celui-ci, comme d'ailleurs leurs autres enfants, serait dans l'incapacité de poursuivre dans de bonnes conditions sa scolarité en langue arabe en Tunisie ni d'ailleurs établir aucune circonstance particulière qui ferait obstacle à la poursuite de cette scolarisation dans leur pays d'origine. Par ailleurs, les requérants ne justifient d'aucune insertion privée ou professionnelle particulière dans la société française. Dans ces conditions, compte tenu notamment des conditions du séjour en France de M. et Mme D..., le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas porté à leur droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des objectifs du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

4. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 3, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas entaché les arrêtés attaqués d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle des requérants.

5. En troisième lieu, dès lors qu'un étranger ne détient aucun droit à l'exercice par le préfet de son pouvoir de régularisation, il ne peut utilement se prévaloir des orientations générales contenues dans la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 pour l'exercice de ce pouvoir. Ainsi, le moyen tiré de ce que M. et Mme D... remplirait les conditions prévues par cette circulaire pour bénéficier d'une mesure de régularisation, à le supposer invoqué, doit en tout état de cause être écarté comme inopérant.

6. En quatrième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

7. Ainsi qu'il a été dit au point 3, M. et Mme D... n'apportent aucun élément à l'appui de leurs allégations selon lesquelles leur fils aîné, quand bien même il a suivi sa scolarité en langue française depuis l'année scolaire 2014/2015, comme d'ailleurs leurs autres enfants, serait dans l'incapacité de poursuivre dans de bonnes conditions sa scolarité en langue arabe en Tunisie ni n'établissent aucune circonstance particulière qui ferait obstacle à la poursuite de la scolarisation de leurs enfants dans leur pays d'origine, les décisions contestées n'ayant par ailleurs ni pour objet ni pour effet de séparer la cellule familiale. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté le surplus des conclusions de leurs demandes. Leurs conclusions aux fins d'annulation partielle de ce jugement et des dispositions des arrêtés du 4 février 2021 du préfet des Alpes-Maritimes en litige doivent dès lors être rejetées.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

9. Le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions de M. et Mme D... aux fins d'injonction et d'astreinte doivent dès lors être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme D... demandent au titre des frais qu'ils ont exposés.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... A..., épouse D..., à M. C... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2022, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 janvier 2023.

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N° 21MA03036


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03036
Date de la décision : 12/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : BOCHNAKIAN et LARRIEU-SANS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-01-12;21ma03036 ?
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