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14/11/2022 | FRANCE | N°20MA02382

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 14 novembre 2022, 20MA02382


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune de Briançon à lui payer la somme de 1 700 000 euros " en réparation de ses préjudices financiers causés par les fautes, fraudes et ruses de la commune de Briançon ".

Par un jugement n° 1706101 en date du 8 juillet 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande et a infligé à M. B... une amende pour recours abusif de 3 000 euros.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enre

gistrée le 21 juillet 2020, et quatre mémoires enregistrés le 5 août 2020, le 1er mars 2021, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune de Briançon à lui payer la somme de 1 700 000 euros " en réparation de ses préjudices financiers causés par les fautes, fraudes et ruses de la commune de Briançon ".

Par un jugement n° 1706101 en date du 8 juillet 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande et a infligé à M. B... une amende pour recours abusif de 3 000 euros.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2020, et quatre mémoires enregistrés le 5 août 2020, le 1er mars 2021, le 12 mai 2022 et le 14 juin 2022, M. B..., représenté par Me Fenech, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) et de condamner la commune de Briançon à lui payer la somme de 1 950 000 euros en réparation du préjudice qu'il a subi.

M. B... soutient que :

- les premiers juges ont statué sans disposer de l'autorisation administrative d'exploitation ;

- il a été privé de sa propriété commerciale ;

- l'article 10 du décret du 14 novembre 1949 qui prévoyait l'indemnisation des exploitants exploitant un service de transport supprimé n'a pas été expressément abrogé par le décret du 16 août 1985 ;

- la délibération en date du 14 décembre 1992 par laquelle le conseil municipal de Briançon a approuvé la conclusion d'une transaction est opposable à la commune ;

- c'est à tort que la convention de transaction a été déclarée nulle ;

- il démontre que c'est par ruse que la commune a obtenu l'arrêt de son exploitation commerciale fin 1992 ;

- il a droit à être indemnisé du préjudice subi ;

- les moyens de défense présentés par la commune de Briançon sont infondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2022, la commune de Briançon, représentée par Me Millias, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 10 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune soutient que :

- la demande de M. B... est prescrite ;

- l'autorité de la chose jugée s'oppose à ce qu'il soit fait droit à la demande de M. B... ;

- les moyens de M. B... sont infondés.

Par une lettre en date du 24 août 2022, la Cour a informé les parties qu'il était envisagé d'inscrire cette affaire à une audience qui pourrait avoir lieu entre le 1er novembre et le 31 décembre 2022, et que l'instruction était susceptible d'être close par l'émission d'une ordonnance à compter du 15 septembre 2022.

Par ordonnance du 19 septembre 2022, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat.

Par une décision en date du 27 novembre 2020, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Le 28 octobre 2022, M. B... a produit un mémoire qui, arrivé après clôture de l'instruction, n'a pas été communiqué et dont il n'est pas tenu compte.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret-loi du 12 novembre 1938 relatif à la coordination des transports et au statut des bateliers ;

- le décret n° 85-891 du 16 août 1985 relatif aux transports urbains de personnes et aux transports routiers ;

- le décret n° 49-1473 du 14 novembre 1949 relatif à la coordination et à l'harmonisation des transports ferroviaires et routiers ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Renaud Thielé, rapporteur,

- les conclusions de M. François Point, rapporteur public,

- et les observations de M. B..., assisté de Me Fenech.

Connaissance prise de la note en délibéré produite par M. B... et enregistrée au greffe le 8 novembre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., gérant de la société Briançon Bus, a exploité une ligne de bus sur le territoire de la commune de Briançon. A partir de 1986, un litige a opposé la société Briançon Bus et la commune de Briançon du fait de la mise en service d'une ligne de transport public de voyageurs exploitée par la Société d'économie mixte des transports urbains de Briançon (Semitub), doublant celles exploitées par la société Briançon Bus. Le 15 décembre 1992, la société Briançon Bus et son gérant ont conclu avec la commune de Briançon un accord transactionnel prévoyant le transfert des actifs de la société Briançon Bus à la société Semitub en échange de l'octroi d'une participation dans cette dernière société à M. B..., et en échange de diverses indemnités. Par un arrêt en date du 21 septembre 2000, devenu définitif par suite du rejet du pourvoi le 19 décembre 2007 par le Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté une demande de M. B... tendant à la condamnation de la commune à lui payer les intérêts moratoires sur les indemnités, en constatant la nullité de cet accord de transaction. M. B... a saisi le tribunal administratif d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Briançon à lui payer une indemnité d'un montant de 1 700 000 euros. Par le jugement attaqué, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande et a infligé à M. B... une amende pour recours abusif d'un montant de 3 000 euros.

Sur la régularité du jugement :

2. La circonstance que les premiers juges n'ont pas sollicité la production de l'autorisation administrative d'exploiter dont la société Briançon Bus était titulaire, et qu'ils mentionnent dans le point 2 de leur décision, n'est pas de nature à entacher ce jugement d'irrégularité. En effet, l'absence de cette autorisation n'est pas de nature à faire considérer que la société Briançon Bus était titulaire d'un droit de propriété sur les lignes qu'elle exploitait.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, l'absence de l'autorisation administrative d'exploiter requise par la législation des transports à compter de l'entrée en vigueur du décret-loi du 12 novembre 1938 relatif à la coordination des transports et au statut des bateliers n'est pas de nature à établir l'existence d'un droit de nature patrimoniale de M. B... sur la ligne que transport urbain de voyageurs qu'il exploitait. M. B... ne peut donc utilement se prévaloir de l'atteinte qui, selon lui, aurait été portée à un tel droit.

4. Contrairement à ce que soutient M. B..., l'article 10 du décret du 14 novembre 1949 qui prévoyait l'indemnisation des exploitants d'un service de transport supprimé a été abrogé par l'article 48 du décret du 16 août 1985. Le requérant ne peut donc, en tout état de cause, solliciter une indemnisation sur le fondement de ces dispositions abrogées.

5. Dès lors que la cour administrative d'appel de Lyon, par un arrêt devenu définitif, a constaté la nullité de la convention de transaction conclue le 15 décembre 1992, M. B... ne peut plus se prévaloir d'un droit quelconque résultant de cette convention. Même si la délibération approuvant la signature de cette convention n'a, quant à elle, pas disparu de l'ordonnancement juridique, M. B... ne peut pas plus soutenir qu'elle est " opposable à la commune " et qu'elle peut, à elle seule, fonder un droit à indemnisation.

6. Si M. B... fait valoir que la commune a obtenu par ruse la cessation de son exploitation, il n'assortit pas ce moyen des précisions qui permettraient d'en apprécier le bien-fondé.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur l'amende :

8. La demande de première instance présentée par M. B... ne présentait pas un caractère abusif. C'est donc à tort que les premiers juges lui ont infligé l'amende prévue par l'article R. 741-12 du code de justice administrative.

Sur les frais liés au litige :

9. L'article L. 761-1 du code de justice administrative fait obstacle à ce qu'une somme quelconque soit laissée à la charge de la commune de Briançon, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre une somme à la charge de M. B... à ce titre.

D É C I D E :

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 1706101 en date du 8 juillet 2020 du tribunal administratif de Marseille infligeant à M. B... une amende pour recours abusif de 3 000 euros est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Briançon tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la commune de Briançon, à Me Fenech et au directeur régional des finances publiques de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Délibéré après l'audience du 31 octobre 2022, où siégeaient :

- M. Alexandre Badie, président,

- M. Renaud Thielé, président assesseur,

- Mme Isabelle Gougot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 novembre 2022.

N° 20MA02382 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02382
Date de la décision : 14/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Jugements - Amende pour recours abusif.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Fondement de la responsabilité - Responsabilité pour faute.

Transports - Transports routiers.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Renaud THIELÉ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : FENECH

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-11-14;20ma02382 ?
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