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04/11/2022 | FRANCE | N°20MA00771

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 04 novembre 2022, 20MA00771


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) SNCF Réseau a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, à titre principal, de condamner solidairement les sociétés à responsabilité limitée (SARL) Sogefy, Question Déco, MED et VET Distribution et la société civile immobilière (SCI) Pierres et Terres à lui verser une provision de 309 369, 16 euros T.T.C , représentant le montant des indemnités d'occupation du domaine public de la société SNCF Réseau impayées, au cours de la période du 1er ja

nvier 2016 au 31 juillet 2019, à titre subsidiaire, de les condamner à lui verser une p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) SNCF Réseau a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, à titre principal, de condamner solidairement les sociétés à responsabilité limitée (SARL) Sogefy, Question Déco, MED et VET Distribution et la société civile immobilière (SCI) Pierres et Terres à lui verser une provision de 309 369, 16 euros T.T.C , représentant le montant des indemnités d'occupation du domaine public de la société SNCF Réseau impayées, au cours de la période du 1er janvier 2016 au 31 juillet 2019, à titre subsidiaire, de les condamner à lui verser une provision de 226 652,37 euros T.T.C sauf à parfaire, représentant le montant des indemnités d'indue d'occupation impayées par la société Sogefy pour la période précitée et calculé selon la méthode arrêtée par l'expert immobilier mandaté par la partie défenderesse.

Par une ordonnance n° 1902742 du 5 février 2020, la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a condamné les SARL Sogefy, Question Déco, MED et VET Distribution et la SCI Pierres et Terres à verser à la société SNCF Réseau la somme de 226 652,37 euros, augmentée des intérêts moratoires.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 19 février 2020, 2 juillet 2020 et 18 novembre 2021 sous le n° 20MA00771, les SARL Sogefy, Question Déco, MED et VET Distribution et la SCI Pierres et Terres, représentées par Me Comte et Me Courant, demandent à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler cette ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille du 5 février 2020 ;

2°) à titre subsidiaire, de fixer le montant de la provision allouée à la somme maximale de 7 063,30 euros, à régler en cinq mensualités de 1 412,66 euros ;

3°) de rejeter l'intégralité des demandes formulées à l'encontre de la SCI Pierres et Terres ;

4°) à titre reconventionnel, d'ordonner une mesure d'expertise ;

5°) de mettre à la charge de la société SNCF Réseau la somme de 3 000 euros chacune, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le juge administratif est incompétent dès lors qu'elles occupent une dépendance du domaine privé de la société SNCF Réseau ;

- l'ordonnance attaquée est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de fait dès lors que la SCI Pierres et Terres n'est nullement sous-occupante et ne devait pas être condamnée à verser une provision en contrepartie de l'occupation et l'utilisation privative du domaine public ;

- la provision réclamée présente un caractère sérieusement contestable dès lors que la fixation du montant de l'indemnité due au titre d'une occupation sans titre ne relève pas de la compétence du juge des référés et que la société SNCF Réseau s'est fondée sur un rapport qu'elle interprète de façon erronée ;

- à titre subsidiaire, le montant de la provision doit être ramenée à de plus justes proportions, à savoir à la somme de 7 063,30 euros ;

- à titre reconventionnel, la Cour désignera un expert.

Par trois mémoires en défense, enregistrés les 3 juin 2020, 16 juillet 2020 et 29 septembre 2022, la société anonyme (SA) SNCF Réseau, représentée par Me de Belenet et en dernier lieu Me Büsch, conclut au rejet de la requête de la SARL Sogefy et autres et demande à la Cour de mettre à leur charge solidaire la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- il reviendra aux requérantes d'établir, en l'absence d'intervention volontaire du mandataire ou de l'administrateur désigné par le tribunal de commerce, que celui-ci a toujours la capacité d'agir au nom de la société ;

- les moyens soulevés par la SARL Sogefy et autres ne sont pas fondés.

Le mémoire présenté pour la SARL Sogefy et autres, par Me Comte et Me Courant, enregistré le 14 octobre 2022, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 ;

- la loi n° 97-135 du 13 février 1997 ;

- le décret n° 97-445 du 5 mai 1997 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public ;

- et les observations de Me Courant, représentant les SARL Sogefy, Question Déco, MED et VET Distribution et la SCI Pierres et Terres et de Me Vandecasteele, représentant la SA SNCF Réseau.

Considérant ce qui suit :

1. La société SNCF Réseau est propriétaire de terrains bâtis et non bâtis situés 125 avenue des Logissons sur le territoire de la commune de Venelles (13770) sur la parcelle cadastrée BP n° 115 issue de la division de la parcelle cadastrée section BP n° 84. Le 16 juin 2003, la société SNCF Réseau a conclu avec la SARL Sogefy une convention d'occupation n° 32442, l'autorisant à occuper 1 797 m² de terrain nu et 735 m² d'entrepôts, pour une durée initiale de cinq années, qui a été prolongée jusqu'au 30 juin 2018, moyennant une redevance de 100 euros HT/an la première année puis de 3 000 euros HT/an les années suivantes. Le 10 mai 2005, la société SNCF Réseau a conclu avec la SARL Sogefy une seconde convention d'occupation n° 121-05, l'autorisant à occuper 4 175 m² de terrain nu, 1 685 m² d'entrepôts et 100 m² de bureaux, pour une durée d'un an, moyennant une redevance de 9 500 euros HT/an. Bien que ces deux conventions d'occupation aient pris fin respectivement le 30 juin 2018 et le 1er janvier 2006, en l'absence de reconduction tacite, les SARL Sogefy, Question Déco, MED et VET Distribution et la SCI Pierres et Terres se sont maintenues sur les lieux. La société SNCF Réseau a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, à titre principal, de condamner solidairement les SARL Sogefy, Question Déco, MED et VET Distribution et la SCI Pierres et Terres à lui verser une provision de 309 369, 16 euros TTC, représentant le montant des indemnités d'occupation du domaine public de la société SNCF Réseau impayées, au cours de la période du 1er janvier 2016 au 31 juillet 2019, à titre subsidiaire, de les condamner à lui verser une provision de 226 652,37 euros TTC, représentant le montant des indemnités d'indue occupation impayées par la société Sogefy pour la période du 1er janvier 2016 au 31 juillet 2019. La SARL Sogefy et autres relèvent appel de l'ordonnance du 5 février 2020 par laquelle la juge des référés du tribunal administratif de Marseille les a condamnées à verser à la société SNCF Réseau la somme de 226 652,37 euros, augmentée des intérêts moratoires.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

En ce qui concerne l'exception d'incompétence de la juridiction administrative :

2. Avant l'entrée en vigueur de la partie législative du code général de la propriété des personnes publiques, intervenue le 1er juillet 2006, l'appartenance d'un bien au domaine public était, sauf si ce bien était directement affecté à l'usage du public, subordonnée à la double condition qu'il ait été affecté à un service public et spécialement aménagé en vue du service public auquel il était destiné. En l'absence de toute disposition en ce sens, l'entrée en vigueur de ce code n'a pu, par elle-même, entraîner le déclassement de dépendances qui appartenaient antérieurement au domaine public et qui, depuis le 1er juillet 2006, ne rempliraient plus les conditions désormais fixées par son article L. 2111-1 qui exige, pour qu'un bien affecté au service public constitue une dépendance du domaine public, que ce bien fasse l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public.

3. Aux termes de l'article 20 de la loi du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs (LOTI), dans sa version en vigueur à la date de signature des conventions d'occupation du domaine public entre la société SNCF Réseau et la SARL Sogefy : " Les biens immobiliers affectés au service public du transport ferroviaire et aménagés spécialement à cette fin ont le caractère de domaine public. ". Aux termes de l'article 11 de la loi du 13 février 1997 portant création de l'établissement public " Réseau ferré de France " en vue du renouveau du transport ferroviaire, dans sa version en vigueur : " Les biens immobiliers appartenant à Réseau ferré de France, affectés au transport ferroviaire et aménagés spécialement à cet effet, ont le caractère de domaine public ". L'article L. 2111-15 du code général de la propriété des personnes publiques en vigueur depuis le 1er juillet 2006 dispose que : " Le domaine public ferroviaire est constitué des biens immobiliers appartenant à une personne publique mentionnée à l'article L. 1, non compris dans l'emprise des biens mentionnés à l'article L. 2111-14 et affectés exclusivement aux services de transports publics guidés le long de leurs parcours en site propre. "

4. La société Sogefy ayant signé, les 16 juin 2003 et 10 mai 2005, avec la société SNCF agissant pour le compte de Réseau ferré de France, deux conventions d'occupation du domaine public et, plus particulièrement, de la parcelle cadastrée n° 84 section BP, soit avant l'entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques, il incombe au juge, dans le cadre de son office, de déterminer, d'une part, si ce terrain faisait partie du domaine public ferroviaire avant le 1er juillet 2006, en vérifiant notamment s'il satisfaisait aux conditions alors applicables d'affectation au service public du transport ferroviaire et d'aménagement spécial, et, d'autre part, si ce bien appartenait au domaine public, de vérifier si, à la date à laquelle il statuait, il n'avait fait l'objet depuis lors d'aucun déclassement, ainsi qu'en dispose l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques, qui réitère en le codifiant l'état du droit antérieurement applicable.

5. Il résulte de l'instruction que la parcelle cadastrée BP n° 84 a été divisée en deux parcelles cadastrées BP n° 115 et BP n° 116, la première étant occupée par la société Sogefy et la seconde ayant été désaffectée et déclassée par une décision préfectorale du 26 avril 2012. Cette parcelle cadastrée BP n° 84 constituait, avant le 1er juillet 2006, une partie de l'ancien terminal ferroviaire desservi et traversé par des voies du réseau ferré de l'ancienne gare de Venelles. Le plan parcellaire de la gare de Venelles corroboré par l'extrait cadastral, les photos aériennes d'archives prises en 1949, 1959, 1960 et 1973 issues du fonds documentaire de l'Institut géographique National (IGN) produits par la société SNCF Réseau montrent la présence, sur le terrain occupé, de voies ferrées, d'un quai découvert, d'une cour de marchandises, d'une voie d'évitement et de déchargement, ainsi que d'un wagon en stationnement. Ainsi, la parcelle BP n° 84 a été affectée au service public du transport ferroviaire et a fait l'objet d'aménagements spéciaux à cette effet. Les sociétés requérantes ne peuvent utilement se prévaloir de la circonstance qu'une autre parcelle, cadastrée n° 86, ait fait l'objet d'une convention d'occupation entre la société SNCF et la société Sud Céréales, qui détenait une convention d'embranchement résiliée le 30 juin 1999 ainsi que des embranchements particuliers. Est également sans incidence la mention de l'appartenance des parcelles cadastrées n° 115 et 116 au domaine privé de la société SNCF Mobilités figurant dans un acte d'apport et dans un acte de vente du 8 août 2012 consenti entre la société SNCF et la société ICF Sud-est Méditerranée SA d'HLM en l'absence d'un acte de déclassement de la parcelle cadastrée n° 115 occupée par les appelantes. Il en va de même du fait qu'à la date de la signature des conventions d'occupation du domaine public ferroviaire, le terrain était à l'état de friche, inoccupé, inaffecté et que le bâti se trouvait à l'état d'abandon. Dans ces conditions, la parcelle cadastrée BP n° 115 relève du domaine public ferroviaire. Par suite, il appartient à la juridiction administrative de connaître du présent litige, qui est relatif à l'occupation de ce domaine.

En ce qui concerne l'incompétence du juge des référés :

6. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. "

7. Ces dispositions s'appliquent quelle que soit la nature des sommes réclamées, l'octroi d'une provision n'étant soumise qu'à la seule condition de l'existence d'une obligation non sérieusement contestable. Par suite, la juge des référés du tribunal administratif de Marseille était compétente pour se prononcer sur la demande de la société SNCF Réseau tendant à l'octroi d'une provision correspondant à l'indemnisation de l'occupation irrégulière de son domaine public ferroviaire par les sociétés appelantes. Par ailleurs, les circonstances que la somme réclamée à titre de provision par la société SNCF Réseau serait très sérieusement contestable et que cette dernière se fonderait sur un rapport du cabinet Vernet qu'elle interprèterait de manière erronée ne sont pas de nature à établir une incompétence de la juge des référés saisie sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative mais relèvent de la contestation du bien-fondé de l'ordonnance contestée.

En ce qui concerne l'insuffisance de motivation de l'ordonnance attaquée :

8. Il ressort de l'ordonnance attaquée que la juge des référés s'est appuyée sur le rapport de l'expert foncier désigné par l'occupante lequel a fixé un tarif de 30,45 euros HT/m2/an pour le bâti, mieux à même de refléter le revenu qu'aurait pu produire un occupant régulier des locaux, tarif que la société SNCF Réseau a accepté de retenir pour un montant inchangé en 2020 ainsi que sur la convention de 2005, dont la redevance initiale s'élevait à 9 500 euros HT par an, pour condamner les sociétés Sogefy, Question Déco, MED et VET Distribution et la SCI Pierres et Terres à verser une provision à la société SNCF Réseau. Ainsi, elle a implicitement estimé que la demande d'expertise était inutile et n'avait pas à se prononcer sur l'ensemble des arguments soulevés par les sociétés requérantes. Par suite, l'ordonnance contestée est suffisamment motivée.

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

9. Aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous. (...). ". L'article L. 2125-1 de ce code dispose que : " Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique (...) donne lieu au paiement d'une redevance (...) ". Aux termes de l'article L. 2125-3 du code précité : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation. ".

10. Les sociétés Sofegy et autres reconnaissent que l'adresse du siège social de la SCI Pierres et Terres est la même que celle des sièges sociaux des autres sociétés. Par ailleurs, elles ne contestent pas le fait qu'elles ont toutes le même représentant légal lequel utilise le bien occupé sur le domaine public ferroviaire et les moyens qui y sont implantés pour assurer tous les actes de gestion de cette société. Par suite, la seule circonstance que l'adresse du siège social de la SCI Pierres et Terres soit la même que celle des sièges sociaux respectifs des SARL Sogefy, Question Déco et MED etVET Distribution suffit à ce que la SCI Pierres et Terres soit regardée comme utilisant la parcelle à son profit d'une manière individuelle qui dépasse donc le droit d'usage appartenant à tous et qu'elle soit par conséquent qualifiée de sous-occupante de la parcelle, et ce alors même qu'elle n'y exercerait aucune activité. Le moyen tiré de l'erreur de fait doit, dès lors, être écarté.

11. La société SNCF Réseau est fondée à réclamer à l'occupant sans titre de son domaine public, au titre de la période d'occupation irrégulière, une indemnité compensant les revenus qu'elle aurait pu percevoir d'un occupant régulier pendant cette période. A cette fin, elle doit rechercher le montant des redevances qui auraient été appliquées si l'occupant avait été placé dans une situation régulière, soit par référence à un tarif existant, lequel doit tenir compte des avantages de toute nature procurés par l'occupation du domaine public, soit, à défaut de tarif applicable, par référence au revenu, tenant compte des mêmes avantages, qu'aurait pu produire l'occupation régulière de la partie concernée du domaine public ferroviaire.

12. En premier lieu, si la société Sogefy et autres soutiennent que seuls les montants des redevances fixées par les conventions n° 32442 du 16 juin 2003 et n° 121-05 du 10 mai 2005 ne sont pas sérieusement contestables, il résulte de ces deux conventions que le tarif de 3 000 euros HT/an fixé par la première et celui de 9 500 euros HT/an retenu par la seconde tenaient compte, en réalité, d'importants travaux consistant en la révision de la toiture et son isolation, la viabilité du sol à l'intérieur du bâtiment, l'enlèvement des silos et machineries et le raccordement aux réseaux d'eau et d'électricité que devait réaliser l'occupant, en application de l'article 12 de la convention du 16 juin 2003. Par ailleurs, alors que cette convention devait arriver à expiration le 30 juin 2008, la société SNCF Réseau a décidé de la prolonger jusqu'au 30 juin 2018 dans l'intérêt de l'occupant qui a pu ainsi bénéficier de ce tarif pendant quinze ans alors qu'il ne reflétait plus la réalité du marché.

13. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que pour accorder la provision réclamée par la société SNCF Réseau, la juge des référés du tribunal administratif de Marseille s'est fondée sur un tarif de 30,45 euros HT/m2 lequel résulte d'une étude de mai 2010, établie à la demande des sociétés appelantes par un expert foncier qui s'est appuyé sur une analyse du marché de la zone ainsi que sur les avantages et inconvénients des locaux occupés. Pour calculer la valeur locative des biens occupés, l'expert foncier a retenu une valeur locative annuelle des locaux d'activité, eu égard à leurs caractéristiques, de 50,75 euros HT/m², puis a appliqué un abattement de 40 % en raison du caractère précaire de l'occupation. La société SNCF Réseau qui est d'accord pour retenir ce même tarif n'a ainsi pas fait une interprétation erronée de ce rapport ni n'a imputé au prix du loyer une valeur propre et indépendante pour les terrains nus contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes. Il s'en suit que ce tarif tient compte des avantages de toute nature procurés par l'occupation du domaine public ferroviaire.

14. En troisième lieu, sur la base de ce tarif de 30,45 euros HT/m2 et tel que le propose la société SNCF Réseau, la redevance concernant les biens occupés au titre de la convention n° 32442 du 16 juin 2003 d'une surface de 735 m2 d'entrepôt doit être fixée à 26 856,90 euros TTC par an et celle relative aux biens occupés au titre de la convention n° 121-05 du 10 mai 2005 d'une surface totale de 1 785 m2 d'entrepôt et de bureaux à 65 223,90 euros par an. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que la société Sogefy a procédé à des versements de 7 040,50 euros TTC au titre de la convention n° 32442 du 16 juin 2003 et de 29 120 euros TTC au titre de la convention n° 121-05 du 10 mai 2005. Par suite, elle reste débitrice des sommes de 22 054,48 euros TTC et de 204 597,90 euros, soit un total de 226 652,37 euros TTC pour la période comprise entre le 1er janvier 2016 et le 31 juillet 2019. La société Sogefy et autres ne peuvent utilement demander que la somme de 6 456,70 euros correspondant aux intérêts et frais de saisie-attribution soit déduite du montant de cette provision dès lors que le calcul de cette dernière ne les comprend pas. Ainsi, la provision d'un montant de 226 652,37 euros TTC mise à la charge des sociétés requérantes par la juge des référés du tribunal administratif de Marseille n'est pas sérieusement contestable.

15. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société SNCF Réseau, que la SARL Sogefy et autres ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la juge des référés du tribunal administratif de Marseille les a condamnées à verser à la société SNCF Réseau une provision de 226 652,37 euros, augmentée des intérêts moratoires. Par voie de conséquence, leurs conclusions subsidiaires tendant à ce que la provision soit ramenée à la somme de 7 063,30 euros doivent être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'expertise :

16. Aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision. (...) ".

17. Il ne résulte pas de l'instruction qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise demandée par la SARL Sogefy et autres, qui ne présente pas d'utilité pour la solution du litige. Par suite, ses conclusions tendant à la désignation d'un expert doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SA SNCF Réseau, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SARL Sogefy et autres demandent chacune au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire de la Sarl Sogefy et autres une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SA SNCF Réseau et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Sogefy et autres est rejetée.

Article 2 : La SARL Sogefy et autres verseront solidairement à la SA SNCF Réseau une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Sogefy, nommée en qualité de représentante unique et à la SA SNCF Réseau.

Copie en sera adressée à la SCP Douhaire-Avazeri-Bonetto, administrateur judiciaire des sociétés Sogefy et Question Déco, et à la SCP BR Associés, mandataire judiciaire des sociétés Sogefy et Question Déco.

Délibéré après l'audience du 21 octobre 2022, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Ciréfice, présidente assesseure,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 novembre 2022.

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N° 20MA00771

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