Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.
Par un jugement n° 1804082 du 5 mars 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 25 juin 2020, et un mémoire complémentaire, enregistré le 17 mai 2022, M. C..., représenté par Me Pointud, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 mars 2020 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il est victime des négligences de ses successeurs au sein de la société D... ;
- l'administration n'a pas mis en œuvre les dispositions de l'article 117 du code général des impôts et a ainsi omis une formalité substantielle pour la désignation du bénéficiaire de revenus distribués par une société et méconnu sa propre doctrine publiée le 20 août 2017 et référencée BOI-RPPM-RCM-10-20-20-40 ;
- il n'était pas maître de l'affaire au sein de la société D...et ni lui, ni sa famille n'ont perçu des revenus réputés distribués par cette société ;
- les revenus considérés comme distribués par l'administration n'existent pas ;
- les impositions supplémentaires mises à sa charge sont manifestement exagérées, l'administration n'ayant pas procédé à une évaluation aussi exacte que possible, justifié du bien-fondé des rehaussements de la société, ni fait connaître la méthode qu'elle a adoptée comme le prescrivent les paragraphes 230 à 270 de l'instruction administrative référencée BOI-RPPM-RCM-10-20.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 5 novembre 2020 et le 8 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Un nouveau mémoire présenté pour M. C... et enregistré le 10 octobre 2022, n'a pas été communiqué en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E...,
- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,
- et les observations de Me Pointud, représentant M. C....
Considérant ce qui suit :
1. A la suite de la vérification de comptabilité de la SARL D... au titre de ses exercices 2012 et 2013, société exerçant notamment une activité de travaux de maçonnerie générale dont il était, durant cette période le gérant et associé à hauteur de 50 % des parts, l'administration a considéré M. C... comme bénéficiaire de revenus distribués par cette société et rehaussé ses revenus de ces deux années. M. C... relève appel du jugement du 5 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant de ce rehaussement.
Sur l'application de la loi fiscale :
En ce qui concerne la qualité de maître de l'affaire :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ". En cas de refus des propositions de rectifications par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire de sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.
3. En relevant qu'au cours de la période vérifiée, M. C..., ainsi qu'il le confirme d'ailleurs par ses écritures d'appel, détenait 50 % des parts de la SARL D..., disposait des pouvoirs les plus étendus pour la représenter et agir en son nom à l'égard des tiers, et avait la signature et la gestion totale du compte bancaire connu par l'administration, celle-ci a suffisamment établi qu'il était seul maître de l'affaire, et pouvait dès lors être présumé avoir appréhendé les revenus distribués par la SARL D...au cours des années 2012 et 2013. La circonstance qu'un changement de gérant serait intervenu en janvier 2014 est à cet égard sans incidence. Par suite, celui-ci ne peut utilement soutenir que sa famille n'a pas perçu les sommes en cause, dès lors que la qualité de seul maître de l'affaire suffit à regarder le contribuable comme bénéficiaire des revenus réputés distribués, en application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, par la société en cause, la circonstance qu'il n'aurait pas effectivement appréhendé les sommes correspondantes ou qu'elles auraient été versées à des tiers étant sans incidence à cet égard.
4. En second lieu, l'article 117 du code général des impôts prévoit que : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ".
5. Il résulte des dispositions de l'article 117 du code général des impôts que si l'administration s'abstient d'inviter une personne morale à lui faire parvenir des indications sur les bénéficiaires d'un excédent de distribution qu'elle a constaté, cette abstention a seulement pour effet de la priver de la possibilité d'assujettir ladite personne morale à la pénalité prévue par l'article 1759 de ce code à raison des sommes correspondantes, mais est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard des personnes physiques qui ont bénéficié de la distribution, et que l'administration, compte tenu des renseignements dont elle dispose, est, comme en l'espèce, en mesure d'identifier. Par suite, le moyen fondé sur la méconnaissance des dispositions précitées du code général des impôts doit être écarté.
En ce qui concerne l'existence et le montant des revenus distribués :
6. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. " M. C... qui n'a pas présenté d'observations à la proposition de rectification du 9 décembre 2015 que lui a notifiée l'administration dans le délai de trente jours, supporte, en application de ces dispositions, la charge de la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration fiscale.
7. Il résulte de l'instruction que, pour évaluer le chiffre d'affaires de la SARL D... en application de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'aucun élément comptable probant ne lui avait été remis et que la vérification de la comptabilité n'avait pu avoir lieu du fait de la contribuable, l'administration s'est fondée essentiellement sur ses déclarations fiscales et les entrées sur le seul compte bancaire dont elle connaissait l'existence, par le biais d'un droit de communication exercé auprès de la CIC Lyonnaise de Banque où ce compte était ouvert, dont elle a diminué le montant de celui de la taxe sur la valeur ajoutée au taux de 19,6 %, dans la mesure où les attestations obligatoires pour l'application du taux intermédiaire de 7 % ne lui ont pas été communiquées, afin d'obtenir les chiffres d'affaires hors taxes réalisés durant les deux exercices vérifiés. M. C... n'est donc pas fondé à soutenir que l'administration ne se serait fondée sur aucun élément concret pour procéder à cette évaluation. En outre, alors que l'administration a retenu des montants de frais et charges de 318 000 euros pour l'exercice 2012 et de 127 000 euros pour l'exercice 2013 sans disposer d'aucun justificatif, afin de déterminer le résultat imposable de la SARL D..., en s'appuyant pour l'étayer sur les résultats connus d'entreprises du même secteur, M. C..., en produisant seulement une analyse des performances financières des entreprises du BTP en 2016 établie de la BTP Banque et une analyse sectorielle des entreprises du secteur du bâtiment pour les années 2013-2014 émanant de l'ordre des experts-comptables, n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les bases d'imposition retenues par l'administration sont exagérées.
Sur l'interprétation administrative de la loi fiscale :
8. M. C... ne peut se prévaloir, ni, d'une part de l'instruction administrative publiée le 20 août 2017 et référencée BOI-RPPM-RCM-10-20-20-40 relative à la désignation du bénéficiaire des distributions, ni, d'autre part, des paragraphes 230 à 270 de l'instruction administrative publiée le 20 septembre 2012 et référencée BOI-RPPM-RCM-10-20 relatifs à la détermination des revenus distribués et de leur bénéficiaires, lesquelles ne comportent, en tout état de cause, pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il lui a été fait application.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Ses conclusions fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
D É C I D E
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 13 octobre 2022, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- Mme Carotenuto, première conseillère,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 novembre 2022.
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N° 20MA02078