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21/10/2022 | FRANCE | N°19MA05470

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 21 octobre 2022, 19MA05470


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Collectif pour l'environnement des riverains élisyques à Narbonne, l'association Rubresus, association de défense et protection des basses plaines de l'Aude, M. B... A..., Mme M... A..., M. S... K..., Mme J... K..., M. et Mme G... et H... C..., M. N... V..., Mme I... V..., M. E... Q..., Mme R... Q..., Mme U... F..., Mme T... D..., représentés par Me Maitre, ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté n° DREAL-UID11-2017-39 du préfet de l'Aude du 8 novembre 2017 ac

tualisant les prescriptions techniques applicables aux installations de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Collectif pour l'environnement des riverains élisyques à Narbonne, l'association Rubresus, association de défense et protection des basses plaines de l'Aude, M. B... A..., Mme M... A..., M. S... K..., Mme J... K..., M. et Mme G... et H... C..., M. N... V..., Mme I... V..., M. E... Q..., Mme R... Q..., Mme U... F..., Mme T... D..., représentés par Me Maitre, ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté n° DREAL-UID11-2017-39 du préfet de l'Aude du 8 novembre 2017 actualisant les prescriptions techniques applicables aux installations de purification de concentrés uranifères et de fabrication de tétrafluorure d'uranium exploitées par la société Areva NC et situées sur le territoire de la commune de Narbonne et autorisant l'exploitation d'une unité complémentaire dénommée TDN (traitement des nitrates).

Par un jugement n° 1801132 du 15 octobre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 décembre 2019 et 12 novembre 2021, sous le n° 19MA05470, l'association Collectif pour l'environnement des riverains élisyques à Narbonne, l'association Rubresus, association de défense et protection des basses plaines de l'Aude, M. B... A..., Mme M... A..., M. S... K..., Mme J... K..., Mme G... C..., M. H... C..., M. N... V..., Mme I... V..., M. E... Q..., Mme R... Q..., Mme U... F..., Mme T... D..., représentés par Me Maitre, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 15 octobre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Aude du 8 novembre 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier car les premiers juges n'ont pas motivé leur décision et qu'ils ne se sont pas prononcés sur le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude de dangers du projet qu'ils ont assimilé à tort au moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact ;

- le dossier ne contient pas les rubriques de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement relatives aux installations thermiques et les éléments obligatoires au titre d'une demande d'autorisation d'émission de gaz à effet de C... ;

- l'étude d'impact environnemental contient de nombreuses lacunes et insuffisances ;

- l'état de pollution des sols contient de nombreuses lacunes et insuffisances ;

- l'étude de dangers du projet TDN est insuffisante ;

- la consultation de l'autorité environnementale était irrégulière dans la mesure où le même service a instruit le projet d'avis et la demande d'autorisation ;

- la publicité de l'enquête publique n'a pas été correctement assurée ;

- le dossier soumis à enquête publique était incomplet, notamment en raison de l'absence des avis des collectivités et autres personnes intéressées ;

- l'économie générale du projet soumis à l'enquête ne pouvait pas être bouleversée sans réalisation d'une nouvelle enquête publique ;

- la décision attaquée est entachée d'illégalité compte tenu de la gravité des atteintes portées par le projet à la santé et à l'environnement ;

- le principe de prévention, garanti notamment par l'article 3 de la Charte de l'environnement, ainsi que le principe de précaution ont été méconnus ;

- le projet TDN est contraire au principe tendant à hiérarchiser les modes de traitement des déchets.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juillet 2020, la société Orano Cycle, représentée par Me Boivin, conclut, à titre principal, au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à titre subsidiaire, à ce que le juge d'appel fasse usage des pouvoirs qui lui sont conférés par l'article L. 181-18 du code de l'environnement et, à titre infiniment subsidiaire, à ce que le juge d'appel fasse usage de ses pouvoirs de juge de plein contentieux en autorisant, à titre provisoire, et le cas échéant sous réserve de prescriptions complémentaires, la poursuite de l'exploitation dans l'attente de la délivrance d'une nouvelle autorisation par le préfet de l'Aude.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Un mémoire, présenté pour la société Orano Chimie Enrichissement, venant aux droits de la société Orano Cycle, par Me Boivin, et enregistré le 16 décembre 2021, n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment la Charte de l'environnement à laquelle renvoie son Préambule ;

- la directive 2010/75/UE du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles ;

- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;

- le code de l'environnement ;

- le code du travail ;

- l'ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2016 ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;

- l'arrêté du 20 septembre 2002 relatif aux installations d'incinération et de co-incinération de déchets dangereux ;

- l'arrêté du 23 juin 2015 relatif aux installations mettant en œuvre des substances radioactives, déchets radioactifs ou résidus solides de minerai d'uranium, de thorium ou de radium soumises à autorisation au titre de la rubrique 1716, de la rubrique 1735 et de la rubrique 2797 de la nomenclature des installations classées ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme O...,

- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,

- et les observations de Me Maitre représentant l'association Collectif pour l'environnement des riverains élisyques à Narbonne, l'association Rubresus et autres et Me Souchon, représentant la société Orano Chimie Enrichissement.

Considérant ce qui suit :

1. La société Areva NC, devenue la société Orano Cycle, puis Orano Chimie Enrichissement exploite, dans le cadre de ses activités de fabrication de combustibles nucléaires, une usine de conversion de l'uranium au lieu-dit " L... " sur le territoire de la commune de Narbonne. L'usine réceptionne des concentrés miniers d'uranium et met en œuvre la première étape de la conversion de ces concentrés uranifères en précédant à leur purification à un très haut degré puis à leur conversion en tétrafluorure d'uranium. Les activités exploitées sur le site de L... relèvent, d'une part, de la législation sur les installations classées, l'établissement étant classé Seveso seuil haut pour la zone " usine ", et d'autre part, de la réglementation des installations nucléaires de base, s'agissant de la partie du site constituée des anciens bassins de décantation B1 et B2. La société Areva a déposé, le 16 décembre 2015, une demande d'autorisation pour la création, sur ce site de L..., d'une installation dénommée TDN (Traitement des Nitrates) ayant pour objectif de traiter les effluents liquides nitratés accumulés dans les lagunes d'évaporation afin de résorber le passif d'environ 350 000 m3 ainsi que les effluents qui continueront d'être produits par les installations de production via l'étape d'évaporation dans les lagunes. Le principe de traitement consiste en une décomposition chimique et thermique des effluents nitratés de façon à transformer les nitrates en azote moléculaire, d'une part, et d'autre part à piéger les substances indésirables au sein d'une matrice minérale solide évacuée vers une filière adaptée pour y être traités. Le préfet de l'Aude a, par arrêté du 8 novembre 2017, autorisé la société Areva à poursuivre l'exploitation des installations de purification de concentrés uranifères et de fabrication de tétrafluorure d'uranium et à créer une unité complémentaire de traitement des nitrates dénommée TDN au sein de son usine. L'association Collectif pour l'environnement des riverains élisyques et autres relèvent appel du jugement n° 1801132 du 15 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Montpellier a expressément répondu aux moyens contenus dans la requête. En particulier, le tribunal qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre au moyen tiré de l'insuffisance de l'étude de dangers du projet, moyen écarté au point 20 du jugement. Par suite, l'association Collectif pour l'environnement des riverains élisyques à Narbonne et autres ne sont pas fondés à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.

Sur le droit applicable et l'office du juge :

3. Les dispositions de l'ordonnance du 26 janvier 2017 susvisée relative à l'autorisation environnementale et codifiées aux articles L. 181-1 et suivants du code de l'environnement, instituent une autorisation environnementale dont l'objet est de permettre qu'une décision unique tienne lieu de plusieurs décisions auparavant distinctes dans les conditions qu'elles précisent.

4. L'article 15 de cette ordonnance précise les conditions d'entrée en vigueur de ces dispositions : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance, ou au titre de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014, avant le 1er mars 2017, sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ; / 2° Les demandes d'autorisation au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable ; (...) / Les dispositions du présent article sont précisées et, le cas échéant, complétées par décret en Conseil d'Etat ".

5. En vertu de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de l'ordonnance du 26 janvier 2017 et applicable depuis le 1er mars 2017, l'autorisation environnementale est soumise, comme l'autorisation unique l'était avant elle ainsi que les autres autorisations mentionnées au 1° de l'article 15 de cette même ordonnance, à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient, dès lors, au juge du plein contentieux d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

En ce qui concerne les rubriques de la nomenclature des installations classées :

6. Aux termes de l'article R. 512-3 du code de l'environnement applicable au litige : " La demande prévue à l'article R. 512-2, remise en sept exemplaires, mentionne : (...) / 3°) La nature et le volume des activités que le demandeur se propose d'exercer ainsi que la ou les rubriques de la nomenclature dans lesquelles l'installation doit être rangée ; (...) ". Il appartient à l'exploitant, sous le contrôle de l'administration, de classer lui-même son installation dans la rubrique pertinente de la nomenclature en fonction des renseignements en sa possession.

7. Les requérants font valoir que le dossier de demande d'autorisation devait classer le projet au titre des trois rubriques relatives aux installations thermiques - 2910, 2770 et 3510 -, dans la mesure où l'installation projetée correspondrait à un système de traitement thermique d'effluents dangereux et qu'il serait assimilable, au regard des risques encourus, à un incinérateur de déchets dangereux. L'omission de ces rubriques aurait eu, selon eux, pour conséquence une sous-estimation des risques liés au procédé de traitement thermique projeté sur le site. Il ressort, toutefois, de l'article 1er de l'arrêté du 20 septembre 2002 relatif aux installations d'incinération et de co-incinération de déchets dangereux, concernant la rubrique 2770, et de l'article 3 de la directive 2010/75/UE du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles, concernant la rubrique 3510, que ces textes ne s'appliquent pas, respectivement, aux déchets radioactifs et aux substances radioactives. S'il est constant, par ailleurs, que l'administration a modifié le classement de l'oxydateur thermique en le classant dans la rubrique 2910 et non dans la 2797 proposée par le demandeur, un simple changement de rubrique de la nomenclature entre la demande d'autorisation et l'arrêté portant autorisation n'est pas de nature à faire regarder le projet comme modifié, ni comme faisant l'objet d'un changement substantiel de nature à justifier une nouvelle enquête publique dès lors notamment que l'oxydateur thermique est décrit avec suffisamment de précision dans l'étude d'impact et l'étude des dangers, l'insuffisance de classement initial, corrigée par l'administration, n'ayant pas eu, dès lors, pour effet de nuire à l'information complète de la population. Par suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne l'étude d'impact :

8. Aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement dans sa version alors applicable : " I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. / II. - L'étude d'impact présente : 1° Une description du projet comportant des informations relatives à sa conception et à ses dimensions, y compris, en particulier, une description des caractéristiques physiques de l'ensemble du projet et des exigences techniques en matière d'utilisation du sol lors des phases de construction et de fonctionnement et, le cas échéant, une description des principales caractéristiques des procédés de stockage, de production et de fabrication, notamment mis en œuvre pendant l'exploitation, telles que la nature et la quantité des matériaux utilisés, ainsi qu'une estimation des types et des quantités des résidus et des émissions attendus résultant du fonctionnement du projet proposé. (...) 2° Une analyse de l'état initial de la zone et des milieux susceptibles d'être affectés par le projet, portant notamment sur la population, la faune et la flore, les habitats naturels, les sites et paysages, les biens matériels, les continuités écologiques telles que définies par l'article L. 371-1, les équilibres biologiques, les facteurs climatiques, le patrimoine culturel et archéologique, le sol, l'eau, l'air, le bruit, les espaces naturels, agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, ainsi que les interrelations entre ces éléments ; / 3° Une analyse des effets négatifs et positifs, directs et indirects, temporaires (y compris pendant la phase des travaux) et permanents, à court, moyen et long terme, du projet sur l'environnement, en particulier sur les éléments énumérés au 2° et sur la consommation énergétique, la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses), l'hygiène, la santé, la sécurité, la salubrité publique, ainsi que l'addition et l'interaction de ces effets entre eux ; / 4° Une analyse des effets cumulés du projet avec d'autres projets connus. Ces projets sont ceux qui, lors du dépôt de l'étude d'impact : - ont fait l'objet d'un document d'incidences au titre de l'article R. 214-6 et d'une enquête publique ; - ont fait l'objet d'une étude d'impact au titre du présent code et pour lesquels un avis de l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement a été rendu public. / Sont exclus les projets ayant fait l'objet d'un arrêté au titre des articles R. 214-6 à R. 214-31 mentionnant un délai et devenu caduc, ceux dont la décision d'autorisation, d'approbation ou d'exécution est devenue caduque, dont l'enquête publique n'est plus valable ainsi que ceux qui ont été officiellement abandonnés par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage ; / 5° Une esquisse des principales solutions de substitution examinées par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage et les raisons pour lesquelles, eu égard aux effets sur l'environnement ou la santé humaine, le projet présenté a été retenu ; / 6° Les éléments permettant d'apprécier la compatibilité du projet avec l'affectation des sols définie par le document d'urbanisme opposable, ainsi que, si nécessaire, son articulation avec les plans, schémas et programmes mentionnés à l'article R. 122-17, et la prise en compte du schéma régional de cohérence écologique dans les cas mentionnés à l'article L. 371-3 ; (...) / 7° Les mesures prévues par le pétitionnaire ou le maître de l'ouvrage pour : - éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; - compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité./ La description de ces mesures doit être accompagnée de l'estimation des dépenses correspondantes, de l'exposé des effets attendus de ces mesures à l'égard des impacts du projet sur les éléments visés au 3° ainsi que d'une présentation des principales modalités de suivi de ces mesures et du suivi de leurs effets sur les éléments visés au 3° ; / 8° Une présentation des méthodes utilisées pour établir l'état initial visé au 2° et évaluer les effets du projet sur l'environnement et, lorsque plusieurs méthodes sont disponibles, une explication des raisons ayant conduit au choix opéré ; / 9° Une description des difficultés éventuelles, de nature technique ou scientifique, rencontrées par le maître d'ouvrage pour réaliser cette étude ; / 10° Les noms et qualités précises et complètes du ou des auteurs de l'étude d'impact et des études qui ont contribué à sa réalisation ; / 11° Lorsque certains des éléments requis en application du II figurent dans l'étude de maîtrise des risques pour les installations nucléaires de base ou dans l'étude des dangers pour les installations classées pour la protection de l'environnement, il en est fait état dans l'étude d'impact ; / 12° Lorsque le projet concourt à la réalisation d'un programme de travaux dont la réalisation est échelonnée dans le temps, l'étude d'impact comprend une appréciation des impacts de l'ensemble du programme. (...) IV. - Afin de faciliter la prise de connaissance par le public des informations contenues dans l'étude, celle-ci est précédée d'un résumé non technique des informations visées aux II et III. Ce résumé peut faire l'objet d'un document indépendant (...) ". VII. - Pour les installations classées pour la protection de l'environnement relevant du titre Ier du livre V du présent code et les installations nucléaires de base relevant du titre IV de la loi du 13 juin 2006 susmentionnée, le contenu de l'étude d'impact est précisé et complété en tant que de besoin conformément aux articles R. 512-6 et R. 512-8 du présent code et à l'article 9 du décret du 2 novembre 2007 susmentionné. ".

9. Et aux termes de l'article R. 512-8 du code de l'environnement dans sa version alors applicable : " I. - Le contenu de l'étude d'impact mentionnée à l'article R. 512-6 doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. / II. - Le contenu de l'étude d'impact est défini à l'article R. 122-5. Il est complété par les éléments suivants : 1° L'analyse mentionnée au 3° du II de l'article R. 122-5 précise notamment, en tant que de besoin, l'origine, la nature et la gravité des pollutions de l'air, de l'eau et des sols, les effets sur le climat le volume et le caractère polluant des déchets, le niveau acoustique des appareils qui seront employés ainsi que les vibrations qu'ils peuvent provoquer, le mode et les conditions d'approvisionnement en eau et d'utilisation de l'eau ; / 2° Les mesures réductrices et compensatoires mentionnées au 7° du II de l'article R. 122-5 font l'objet d'une description des performances attendues, notamment en ce qui concerne la protection des eaux souterraines, l'épuration et l'évacuation des eaux résiduelles et des émanations gazeuses ainsi que leur surveillance, l'élimination des déchets et résidus de l'exploitation, les conditions d'apport à l'installation des matières destinées à y être traitées, du transport des produits fabriqués et de l'utilisation rationnelle de l'énergie ; / 3° Elle présente les conditions de remise en état du site après exploitation. / III. - Pour les installations visées à la section 8 du chapitre V du présent titre, le contenu de l'étude d'impact comporte en outre les compléments mentionnés au I de l'article R. 515-59. (...) ".

10. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision de l'autorité administrative.

11. En premier lieu, les requérants reprennent en appel le moyen tiré de l'absence de caractérisation et d'analyse des risques des effluents traités. S'agissant de la composition des effluents traités par l'installation TDN, l'étude d'impact mentionne dès son premier volume, la composition des effluents à traiter (nitrate, chlore, calcium, sulfates, potassium et uranium) et leur quantité et détaille les radionucléides ou radioéléments présents dans ces nitrates au chapitre 2 sur la description du projet du volume 2. S'agissant par ailleurs de la dangerosité des effluents, l'annexe 2 de l'étude d'impact est spécifiquement dédiée à l'exposé de chaque étape de l'évaluation des risques sanitaires du projet TDN et présente successivement la démarche de modélisation des rejets atmosphériques liés au projet TDN et la démarche de caractérisation du risque sanitaire qui en découle et qui utilise des " quotients de danger " et des " excès de risque sanitaire " calculés pour les différentes substances. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que les informations données sur les effluents à traiter et leur dangerosité serait insuffisante.

12. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ressort des termes mêmes du point 7 du jugement que les premiers juges ne se sont pas uniquement fondés sur la tierce expertise commandée par le préfet de l'Aude pour écarter le moyen tiré de l'absence d'analyse des émissions de dioxines et de furanes. Par ailleurs, dès lors qu'aucune pièce du dossier ne permet d'établir l'existence de telles émissions lors du fonctionnement du projet TDN, l'étude d'impact n'avait pas à contenir une évaluation concernant ces rejets.

13. En troisième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ressort des termes mêmes du point 8 du jugement que les premiers juges n'ont pas exclu le caractère possiblement expérimental du procédé TDN mais ont jugé qu'un tel caractère ne faisait pas obstacle à une évaluation des risques du procédé, le cas échéant sous la forme d'une estimation. Concernant la formation d'ozone troposphérique, l'impact des NOx (oxydes d'azote) et des COV (composés organiques volatils) ayant été étudié dans le chapitre 4 du volume 2 de l'étude d'impact, aucune insuffisance de l'étude d'impact sur l'analyse des émissions atmosphériques et leurs potentiels effets sur la santé et l'environnement n'est établie.

14. En quatrième lieu, si les requérants soutiennent que l'étude d'impact n'analyserait pas les effets cumulés de l'installation de traitement des nitrates avec ceux des bassins d'évaporation existants d'où seront prélevés les effluents et avec les effets des autres installations existantes sur le site de L... et relèvent, en outre, que l'étude d'impact n'aborderait pas la question du cumul avec les effluents accumulés depuis 50 ans sur le site, il résulte de l'étude d'impact et notamment de son chapitre 5 intitulé " analyse des effets cumulés du projet TDN " que l'ensemble des effets cumulés a été étudié en prenant notamment en compte les accumulations des 50 dernières années. Par ailleurs, le dossier de demande d'autorisation précise également les conditions dans lesquelles les effluents des bassins d'évaporation sont acheminés vers l'installation TDN, ainsi que le fonctionnement des lignes de pompage correspondant, totalement confiné, avec un système de détection de fuites. Enfin, les requérants critiquent la faiblesse de l'étude d'impact s'agissant des émissions de gaz à effet de C.... Toutefois, il résulte du chapitre 4 du volume de 2 de l'étude d'impact que les émissions de gaz à effet de C... liées au fonctionnement du projet TDN sont étudiées, notamment dans un bilan de ces émissions mentionnant la " combustion du gazole de circulation des camions sur le site TDN ". Ainsi, l'étude d'impact n'est pas insuffisante sur ce point.

15. En cinquième lieu, la circonstance que l'installation TDN, qui comporte une cheminée de 32, 40 mètres, sera visible depuis l'Oppidum de Montlaurès, classé monument historique, est prise en compte par l'étude d'impact laquelle relève que le projet aura un faible impact visuel en raison de l'implantation de la nouvelle installation dans le prolongement des installations existantes. L'étude d'impact indique par ailleurs que l'installation a fait l'objet d'un avis de l'architecte des bâtiments de France, lequel a rendu un avis favorable assorti de prescriptions reprises dans l'avis de l'autorité environnementale, le permis de construire et l'arrêté d'autorisation. Par ailleurs, s'agissant du canal de la Robine et de l'église Saint Just de Narbonne, situés à plus de deux kilomètres du site, l'impact visuel ne sera que limité. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que l'installation TDN générera un panache de fumée permanent au-dessus de la cheminée. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le volet paysage de l'étude d'impact serait insuffisant sur ce point.

16. En sixième lieu, les requérants soutiennent que l'étude d'impact est également incomplète s'agissant des conséquences du projet sur la faune, la flore et les équilibres biologiques du projet. Il résulte de l'instruction que, si le site de L... se situe à proximité de zones naturelles d'intérêt écologique et floristique, la plus proche étant située à 500 mètres environ, l'étude d'impact, dans ses chapitres 3 et 4 du volume 2, analyse précisément la faune et la flore existant autour du site, ainsi que l'impact des rejets chimiques sur ces dernières. La circonstance que l'étude de 2010 réalisée dans le cadre du suivi environnemental annuel de la faune et la flore n'aurait pas été réactualisée en 2015 n'a pas nui à l'information complète de la population alors qu'aucun élément au dossier ne va dans le sens de la présence de nouvelles espèces protégées susceptibles d'être affectées par le projet. Par ailleurs, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, les valeurs écotoxicologiques de l'acide fluorhydrique ont été mentionnées dans l'étude d'impact au titre 3.3.2 du chapitre 4 du volume 2, intitulé " Evaluation quantitative des risques liés à la toxicité chimique des rejets sur l'environnement ". L'étude d'impact peut être regardée comme suffisante sur ce point.

17. En septième lieu, l'évaluation des impacts des transports liés au projet TDN sur les voies de circulation routière a été fondée sur les données les plus récentes disponibles lors de l'élaboration du dossier de demande d'autorisation. Par ailleurs, l'étude d'impact relève la très faible augmentation du trafic routier lié au projet. En effet, en prenant en compte l'hypothèse majorante dans laquelle l'ensemble des flux routiers imputable au projet emprunte la même route départementale, le projet ne génère qu'une augmentation de l'ordre de 1 % à 6 % sur la RD 169 et de l'ordre de 0,3 % à 3 % sur la RD 607. Ainsi l'étude d'impact est suffisante concernant l'analyse des impacts liés au transport.

18. En huitième lieu, aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, s'agissant du contenu de l'étude d'impact, il n'est exigé qu'une " esquisse des principales solutions de substitution examinées par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage et les raisons pour lesquelles, eu égard aux effets sur l'environnement ou la santé humaine, le projet présenté a été retenu ". Si les requérants soutiennent que l'étude des solutions alternatives est trop brève et non vulgarisée, il ressort du chapitre 6 du volume 2 consacré aux " raisons du choix du projet " que toutes les solutions alternatives ont été listées et qu'y figurent de manière simplement expliquée les raisons pour lesquelles le procédé TDN a été retenu ainsi que des références bibliographiques. La réalisation, postérieurement à l'étude d'impact, d'une expertise complémentaire sur la pertinence du projet TDN au regard des autres procédés possibles est sans incidence sur le caractère suffisant de l'étude d'impact sur ce point.

19. En neuvième et dernier lieu, conformément aux dispositions précitées du point 12° du II de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, l'étude des dangers, document distinct de l'étude d'impact, ne fait pas partie des informations qui doivent obligatoirement figurer dans ladite étude d'impact, laquelle doit seulement faire ressortir les effets prévisibles du projet sur l'environnement. Il résulte de l'instruction que les éléments figurant dans l'étude des dangers, s'agissant notamment de la question du stockage des déchets radioactifs ont été régulièrement insérés au dossier de demande d'autorisation et soumis à enquête publique.

20. Toutefois, ainsi qu'il a été précisé au point 1, le procédé TDN a pour objectif de traiter les effluents nitratés par un procédé de reformage à la vapeur en lit fluidisé (dit procédé Thor) et d'aboutir, en sortie de traitement, à des déchets solides radioactifs de très faible activité (TFA), qui seront eux même évacués vers une filière adaptée à ce type de déchets. Le dossier de demande d'autorisation présenté par le pétitionnaire prévoit notamment que ces déchets TFA, constitués de résidus solidifiés, seront stockés, sur le site de L..., dans des " big bags ", lesquels seront entreposés dans un local dit local d'entreposage GRVS, puis envoyés vers le centre industriel de regroupement, d'entreposage et de stockage (Cires) exploité par l'agence nationale de gestion des déchets et matières radioactifs (ANDRA) dans l'Aube. Par ailleurs, un arrêté ministériel du 23 février 2017 établissant les prescriptions du plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR) confirme que les déchets solides issus du procédé TDN, produits sur le site de L... à compter du 1er janvier 2019, seront bien identifiés et déclarés dans la catégorie des déchets TFA, susceptibles de relever de la filière TFA. Or, le préfet de l'Aude a demandé à la société dans son " relevé des insuffisances " du 11 février 2015 de compléter le dossier précisément sur la filière de déchets radioactifs émis par l'usine TDN et sur les conditions d'entreposage de ces déchets dans l'attente de leur éventuelle acceptation par l'ANDRA. Il ressort en effet de l'étude d'impact si la société Orano a précisé dans sa demande d'autorisation qu'elle pouvait traiter 20 000 m3 d'effluents par an et 7 100 m3 de déchets solides TFA par an, avec une capacité d'entreposage temporaire dans l'attente d'un transfert vers le Cires d'environ deux mois de production, elle n'a en revanche apporté aucune précision concernant les effets liés à un entreposage important des déchets solides en cas d'indisponibilité du Cires. Elle n'a, par ailleurs, pas produit d'étude sur une solution alternative visant à créer localement des installations dédiées au stockage adaptées à certains types de déchets TFA, alors même que ladite étude était recommandée tant par l'IRSN dans son courrier du 29 mars 2017 que par l'ASN dans son courrier du 2 septembre 2019. Enfin, aucune précision n'est apportée sur les modalité de transport vers la filière dédiée. Par suite, compte tenu des volumes importants de déchets concernés, à savoir 110 000 m3 de résidus solides après 2019 et de la nature physico-chimique de ces déchets, les requérants sont fondés à soutenir que l'étude d'impact est insuffisante s'agissant de la gestion des déchets radioactifs. Cette insuffisance est de nature à avoir nui à l'information complète de la population.

En ce qui concerne l'état de pollution des sols :

21. Aux termes de l'article L. 512-18 du code de l'environnement : " L'exploitant d'une installation classée relevant des catégories visées à l'article L. 516-1 est tenu de mettre à jour à chaque changement notable des conditions d'exploitation un état de la pollution des sols sur lesquels est sise l'installation. Cet état est transmis par l'exploitant au préfet, au maire de la commune concernée et, le cas échéant, au président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme concerné ainsi qu'au propriétaire du terrain sur lequel est sise l'installation. Le dernier état réalisé est joint à toute promesse unilatérale de vente ou d'achat et à tout contrat réalisant ou constatant la vente des terrains sur lesquels est sise l'installation classée. / Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article L. 516-1 de ce code : " La mise en activité, tant après l'autorisation initiale qu'après une autorisation de changement d'exploitant, des installations définies par décret en Conseil d'Etat présentant des risques importants de pollution ou d'accident, des carrières et des installations de stockage de déchets est subordonnée à la constitution de garanties financières ". Aux termes de l'article R. 512-4 du même code, alors en vigueur et applicable en l'espèce, dont les dispositions ont au demeurant été reprises en substance à l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement entré en vigueur le 1er mars 2017 : " La demande d'autorisation est complétée dans les conditions suivantes : (...) 4° Lorsque le dossier est déposé dans le cadre d'une demande de modification substantielle en application du II de l'article R. 512-33 et si l'installation relève des catégories mentionnées à l'article L. 516-1, la demande comprend l'état de pollution des sols prévu à l'article L. 512-18 ; / Lorsque cet état de pollution des sols met en évidence une pollution présentant des dangers ou inconvénients pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques ou de nature à porter atteinte aux autres intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, l'exploitant propose soit les mesures de nature à éviter, réduire ou compenser cette pollution et le calendrier correspondant qu'il entend mettre en œuvre pour appliquer celles-ci, soit le programme des études nécessaires à la définition de telles mesures. (...) ".

22. Il résulte de l'instruction que le projet TDN a pour effet de modifier substantiellement les conditions d'exploitation du site de L.... Dès lors, la demande d'autorisation d'exploiter devait comporter l'état de pollution des sols prévu à l'article L. 512-18 du code de l'environnement, lequel doit porter sur le terrain sur lequel l'installation en cause devra être implanté. S'il est constant que le dossier de demande d'autorisation ne comporte effectivement pas de document spécifique sur l'état de pollution des sols, une partie de l'étude d'impact - chapitre 3, pages 122 à 139 - traite de l'état initial de la qualité des sols, et comprend une synthèse des prélèvements et analyses de sols réalisés dans le cadre de la surveillance des sols, hors site et sur site. Toutefois, d'une part, si ce document comprend une mise à jour des données portant sur la qualité des sols, actualisée notamment, s'agissant de l'emplacement situé au droit de la zone de l'installation TDN, en 2015, il n'expose, s'agissant des prélèvements et des analyses des sols effectués sur l'ensemble du site, que des prélèvements et analyses des sols effectués en 2007 et 2008, puis synthétisées en 2011. Alors que l'arrêté en litige a pour objet d'autoriser, outre la création d'une installation complémentaire de traitement des nitrates, la poursuite de l'ensemble de l'exploitation des installations de purification de concentrés uranifères et de fabrication de tétrafluorure d'uranium, la mise à jour de l'état de pollution des sols doit concerner l'intégralité de l'emprise du site. Les requérants sont ainsi fondés à soutenir que les analyses des sols situés sur l'emprise du site de L... sont obsolètes.

23. Par ailleurs, le dossier du pétitionnaire expose les résultats du diagnostic des sols effectué en 2007 sur le site de L..., lequel a été divisé en huit zones. Il en résulte que les sols sont marqués par des concentrations en uranium, fluorures, nitrates supérieures au fond géochimique local, en particulier en ce qui concerne la zone E, comprenant les bassins de décantation. Les sols situés au niveau des zones C, D et E sont également impactés par des métaux tels que le cuivre, le cadmium et le mercure. En outre, il est précisé que l'ensemble du site présente un marquage en uranium et en activité alpha/bêta supérieur au fond géochimique local. S'agissant de la zone du projet TDN, les analyses effectuées en 2015 concluent également à un dépassement des valeurs de référence, en particulier pour l'ammonium, l'azote nitreux, et l'uranium. Toutefois, en dépit du constat de l'ensemble de ces dépassements de seuils, l'étude d'impact relative à l'état initial de la qualité des sols ne comporte aucune mesure d'évitement, de réduction et de compensation de la pollution que le maître de l'ouvrage doit prévoir, en application des dispositions précitées de l'article R 512-4 du code de l'environnement. Or, contrairement à ce que soutient la société Orano Chimie Enrichissement, il ne résulte pas de l'instruction que l'ensemble des valeurs mesurées sur le site sont soit inférieures aux seuils d'admission permettant de qualifier un déchet d'inerte, soit comprises dans les gammes de valeurs correspondant à des anomalies naturelles au sens du programme ASPITET de l'INRA. Dans ces conditions, la pollution des sols mise en évidence doit être regardée comme présentant des dangers ou inconvénients pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques pour lesquelles l'exploitant doit proposer des mesures de nature à éviter, réduire ou compenser cette pollution ou le programme des études nécessaires à la définition de telles mesures.

24. Il résulte de ce qui précède que ces insuffisances du dossier s'agissant de l'état de pollution des sols ont été de nature à nuire à la bonne information du public et à avoir une incidence sur le sens de la décision contestée.

S'agissant de l'étude de dangers :

25. Aux termes de l'article article R 512-9 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " I. - L'étude de dangers mentionnée à l'article R. 512-6 justifie que le projet permet d'atteindre, dans des conditions économiquement acceptables, un niveau de risque aussi bas que possible, compte tenu de l'état des connaissances et des pratiques et de la vulnérabilité de l'environnement de l'installation. Le contenu de l'étude de dangers doit être en relation avec l'importance des risques engendrés par l'installation, compte tenu de son environnement et de la vulnérabilité des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. II. - Cette étude précise, notamment, la nature et l'organisation des moyens de secours dont le demandeur dispose ou dont il s'est assuré le concours en vue de combattre les effets d'un éventuel sinistre. Dans le cas des installations figurant sur la liste prévue à l'article L. 515-8, le demandeur doit fournir les éléments indispensables pour l'élaboration par les autorités publiques d'un plan particulier d'intervention. L'étude comporte, notamment, un résumé non technique explicitant la probabilité, la cinétique et les zones d'effets des accidents potentiels, ainsi qu'une cartographie des zones de risques significatifs. Le ministre chargé des installations classées peut préciser les critères techniques et méthodologiques à prendre en compte pour l'établissement des études de dangers, par arrêté pris dans les formes prévues à l'article L. 512-5. Pour certaines catégories d'installations impliquant l'utilisation, la fabrication ou le stockage de substances dangereuses, le ministre chargé des installations classées peut préciser, par arrêté pris sur le fondement de l'article L. 512-5, le contenu de l'étude de dangers portant, notamment, sur les mesures d'organisation et de gestion propres à réduire la probabilité et les effets d'un accident majeur. "

26. Il résulte de l'instruction qu'un volume entier du dossier de demande d'autorisation est consacré à l'étude de dangers, laquelle décrit notamment la zone d'étude, les activités et équipements de l'installation TDN qui présentent un potentiel de dangers, analyse les risques et expose l'organisation de la sécurité et des moyens d'intervention. La seule circonstance que le préfet de l'Aude a pris un arrêté complémentaire, le 5 juin 2018, dans le cadre du réexamen au moins quinquennal de l'étude de dangers prévu à l'article R 515-98 du code de l'environnement, dans lequel il prescrit la réalisation d'une étude sur le caractère comburant du nitrate d'uranyle ne saurait caractériser à elle seule une insuffisance de l'étude de dangers initiale.

En ce qui concerne la régularité de l'avis de l'autorité environnementale :

27. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement : " Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation. À cet effet, les États membres désignent les autorités à consulter, d'une manière générale ou au cas par cas. (...) ". L'article L. 122-1 du code de l'environnement, pris pour la transposition des articles 2 et 6 de cette directive, dispose, dans sa rédaction applicable en l'espèce, que : " I. - Les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements publics et privés qui, par leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine sont précédés d'une étude d'impact. (...) / III. - Dans le cas d'un projet relevant des catégories d'opérations soumises à étude d'impact, le dossier présentant le projet, comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation, est transmis pour avis à l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement. (...). / IV. - La décision de l'autorité compétente qui autorise le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage à réaliser le projet prend en considération l'étude d'impact, l'avis de l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement et le résultat de la consultation du public (...) ". En vertu du III de l'article R. 122-6 du même code, dans sa version issue du décret du 29 décembre 2011 portant réforme des études d'impact des projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagement, applicable au litige, l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement mentionnée à l'article L. 122-1, lorsqu'elle n'est ni le ministre chargé de l'environnement, dans les cas prévus au I de cet article, ni la formation compétente du Conseil général de l'environnement et du développement durable, dans les cas prévus au II de ce même article, est le préfet de la région sur le territoire de laquelle le projet de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement doit être réalisé.

28. L'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 a pour objet de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Eu égard à l'interprétation de l'article 6 de la directive du 27 juin 2001 donnée par la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l'affaire C-474/10, il résulte clairement des dispositions de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce que l'entité administrative concernée dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée en donnant un avis objectif sur le projet concerné.

29. Lorsque le projet est autorisé par un préfet de département autre que le préfet de région, l'avis rendu sur le projet par le préfet de région en tant qu'autorité environnementale doit, en principe, être regardé comme ayant été émis par une autorité disposant d'une autonomie réelle répondant aux exigences de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011, sauf dans le cas où c'est le même service qui a, à la fois, instruit la demande d'autorisation et préparé l'avis de l'autorité environnementale. En particulier, les exigences de la directive, tenant à ce que l'entité administrative appelée à rendre l'avis environnemental sur le projet dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, ne peuvent être regardées comme satisfaites lorsque le projet a été instruit pour le compte du préfet de département par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et que l'avis environnemental émis par le préfet de région a été préparé par la même direction, à moins que l'avis n'ait été préparé, au sein de cette direction, par le service mentionné à l'article R. 122-21 du code de l'environnement qui a spécialement pour rôle de préparer les avis des autorités environnementales.

30. Il résulte de l'instruction que le rapport de l'inspection de l'environnement sur la demande d'autorisation d'exploiter en litige a été signé par un inspecteur de l'environnement de l'unité interdépartementale Aude-Pyrénées Orientales de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement Occitanie. Il ressort par ailleurs des énonciations de l'avis rendu sur le projet le 29 avril 2016 par l'autorité environnementale qu'il a été préparé par la " division évaluation environnementale ", au sein de cette même unité territoriale de la DREAL, cet avis ayant été signé par le directeur adjoint de la direction. Le projet en litige a donc été instruit pour le compte du préfet de l'Aude par le service de l'unité interdépartementale Aude-Pyrénées Orientales de la DREAL Occitanie et l'avis environnemental du 29 avril 2016 émis par le préfet de région a été préparé par ce même service. Dans ces conditions, l'avis environnemental n'a pas été rendu par une entité interne disposant d'une autonomie réelle à l'égard de l'auteur de la décision attaquée. Par suite, les exigences découlant des dispositions précitées de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 ont été méconnues, entachant en conséquence l'autorisation litigieuse d'un vice de procédure. Ce vice a été de nature à priver le public de la garantie tendant à ce qu'un avis objectif soit émis sur les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement par une autorité disposant d'une autonomie réelle.

31. Il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que l'avis environnemental a été rendu dans des conditions irrégulières de nature à affecter la légalité de l'arrêté du 8 novembre 2017 du préfet de l'Aude.

En ce qui concerne l'enquête publique :

32. Les requérants font valoir, en premier lieu, que l'intitulé donné à l'opération lors des mesures de publicité et tout au long de l'instruction était inexact et n'a pas permis au public de prendre connaissance de la nature et de l'ampleur réelle du projet. Il résulte toutefois de l'instruction que l'avis d'enquête publique ainsi qu'un rappel ont été publiés dans deux journaux locaux à savoir " La Dépêche " et " L'Indépendant " le 19 août 2016 et le 5 septembre 2016 et que le projet visé dans ses parutions et dans l'avis d'enquête, dénommé " projet d'une installation dénommée TDN (traitement des nitrates) " correspond au projet conduit par la société Orano Cycle. Par suite, le moyen tiré de ce que le public aurait été induit en erreur sur l'objet de l'enquête publique doit être écarté.

33. En second lieu, les requérants reprennent en appel les moyens tirés de l'absence dans le dossier d'enquête publique des avis obligatoires des communes concernées, du directeur de l'agence régionale de santé, de l'Institut national de l'origine, de l'architecte des bâtiments de France, du service départemental d'incendie et de secours, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail d'Areva, et de l'autorité de sûreté nucléaire.

Quant à l'avis des communes concernées :

34. Les requérants invoquent une méconnaissance du V de l'article L. 122-1 du code de l'environnement qui prévoit une transmission du dossier du pétitionnaire aux collectivités territoriales et à leurs groupements intéressés par le projet, afin qu'ils émettent un avis devant être joint au dossier d'enquête publique. Toutefois, la rédaction des dispositions dont les requérants se prévalent est issue de l'ordonnance du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes, laquelle a modifié l'article L. 122-1 et qui prévoit, dans son article 6, une entrée en vigueur pour les projets dont la demande d'autorisation a été déposée à compter du 16 mai 2017. Avant l'entrée en vigueur de ces dispositions, l'article R 512-20 du même code prévoyait que l'avis des conseils municipaux des communes était sollicité dès l'ouverture de l'enquête, comme cela a été fait en l'espèce. En revanche, les avis n'avaient pas à être sollicités préalablement à l'ouverture de l'enquête et ne pouvaient par conséquent figurer dans le dossier d'enquête publique. De la même façon, les articles R. 122-7 et R. 122-9 du code de l'environnement qui prévoient que soient joints à l'enquête publique les avis des communes sont issus du décret du 11 août 2016 qui prévoit la même entrée en vigueur que celle prévue à l'article 6 de l'ordonnance précitée, et n'étaient pas applicables à la date de demande d'autorisation déposée par la société Areva, antérieure au 16 mai 2017.

Quant à l'avis de l'agence régionale de santé :

35. L'article R. 123-8 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. Le dossier comprend au moins (...)4° Lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l'ouverture de l'enquête, les avis émis sur le projet plan, ou programme. (...°) ". Aux termes de l'article R. 122-7 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - L'autorité compétente pour prendre la décision d'autorisation, d'approbation ou d'exécution des travaux, de l'ouvrage ou de l'aménagement projetés transmet pour avis le dossier comprenant l'étude d'impact et le dossier de demande d'autorisation à l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement définie à l'article R. 122-6. (...) . II. - (...°). L'avis ou l'information relative à l'absence d'observations émises dans le délai est joint au dossier d'enquête publique ou de la procédure équivalente de consultation du public prévue par un texte particulier. III. - Les autorités administratives de l'Etat compétentes en matière d'environnement mentionnées à l'article R. 122-6 rendent leur avis après avoir consulté :- le ou les préfets de département sur le territoire desquels est situé le projet, au titre de leurs attributions dans le domaine de l'environnement ;-dans les cas mentionnés aux I et II de l'article R. 122-6, le ministre chargé de la santé ou le directeur général de l'agence régionale de santé dans les cas mentionnés au III du même article ( ...). Ces autorités disposent d'un délai d'un mois à compter de la réception du dossier pour émettre leur avis. En cas d'urgence, l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement peut réduire ce délai sans que celui-ci ne puisse être inférieur à dix jours. ".

36. Il résulte de ces dispositions que seuls les avis obligatoires, exigés préalablement à l'ouverture de l'enquête, doivent figurer dans le dossier d'enquête publique préalable à l'autorisation délivrée au titre des installations classées pour la protection de l'environnement. Or, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'avis de l'agence régionale de santé recueilli en application du III de l'article R. 122-7 du code de l'environnement dans le cadre de la consultation de l'autorité environnementale, ne figure pas au nombre des avis obligatoires visés au 4° de l'article R. 123-8 de ce même code. Il n'est pas non plus au nombre des avis dont le II de l'article R. 122-7 du code de l'environnement prévoit qu'ils soient joints au dossier d'enquête publique. Par suite, la circonstance que cet avis, au surplus favorable au projet, n'était pas joint au dossier d'enquête publique est sans incidence sur la régularité de la procédure.

Quant aux avis de l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO), de l'architecte des bâtiments de France, du service départemental d'incendie et de secours et de l'autorité de sûreté nucléaire :

37. Aux termes de l'article R. 512-21 du code de l'environnement, dans sa version applicable au litige : " I. - Le préfet communique, pour avis, un exemplaire de la demande d'autorisation à l'Institut national de l'origine et de la qualité dans les conditions prévues par l'article L. 512-6 et, le cas échéant, à l'établissement public du parc national concerné, qui se prononce dans le délai de trente jours, faute de quoi l'avis est réputé émis. Ces avis sont adressés au préfet et à l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement. II. - Le préfet informe, s'il y a lieu, de la demande d'autorisation les services de l'Etat chargés de l'urbanisme, de l'agriculture, de la sécurité civile, des milieux naturels et de la police de l'eau, de l'inspection du travail et l'architecte des Bâtiments de France. (...). IV. - Les avis recueillis par l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement pour lui permettre d'émettre son avis sur un projet relevant du III de l'article L. 122-1 sont transmis au préfet. ".

38. Ni les dispositions de l'article R. 512-21 du code de l'environnement, ni aucune autre disposition législative ou règlementaire ne prévoient que ces avis doivent être joints au dossier d'enquête publique. Par ailleurs, aucune disposition n'impose que ces avis soient émis préalablement à l'ouverture de l'enquête publique et soient inclus dans le dossier d'enquête publique au sens de l'article R. 123-8 du code de l'environnement. Par suite, le moyen ainsi soulevé doit être écarté.

Quant à l'avis du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail d'Orano :

39. Aux termes de l'article R. 512-24 du code de l'environnement, alors en vigueur : " Lorsqu'il existe un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail dans l'établissement où est située l'installation, ce comité est consulté dans les conditions fixées par les articles L. 4612-15, R. 4523-2, R. 4523-3, R. 4612-4 et R. 4612-5 du code du travail ". Il ressort des dispositions de l'article R. 4612-4 du code du travail que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l'établissement concerné par l'installation classée doit être consulté sur le dossier établi par l'employeur à l'appui de sa demande, dans le délai d'un mois à compter de la clôture de l'enquête publique, et émettre un avis motivé sur ce dossier après avoir pris connaissance des résultats de cette enquête. Cette consultation étant postérieure à l'enquête publique, il en résulte, implicitement mais nécessairement, que cet avis n'est pas au nombre des documents devant figurer dans le dossier d'enquête publique. Par suite, le moyen tiré du défaut de production, dans le dossier d'enquête publique, de l'avis émis par le CHSCT d'Orano est inopérant.

S'agissant de la nécessité d'une nouvelle enquête publique eu égard aux modifications substantielles du projet :

40. Aux termes de l'article R. 512-28 du code de l'environnement alors applicable : " L'arrêté d'autorisation et, le cas échéant, les arrêtés complémentaires fixent les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1, L. 220-1 et L. 511-1. / Ces prescriptions tiennent compte notamment, d'une part, de l'efficacité des meilleures techniques disponibles et de leur économie, d'autre part, de la qualité, de la vocation et de l'utilisation des milieux environnants ainsi que de la gestion équilibrée de la ressource en eau. (...) ". Conformément à ces dispositions, le préfet a fixé des moyens d'analyse et de mesures nécessaires au contrôle de l'installation et à la surveillance de ses effets sur l'environnement. Il a, notamment, prescrit des limites d'émissions de polluants plus faibles que celles sollicitées par le pétitionnaire. Il résulte toutefois du dossier soumis à enquête publique que ces limites correspondent à la fourchette basse de la meilleure technique disponible du document de référence et qu'elles respectent les capacités techniques du projet avec lesquelles elles sont compatibles. Le préfet pouvait donc imposer ces limites sans soumettre le projet à une nouvelle enquête publique. S'il a par ailleurs prévu que " le transfert par voie ferrée est à privilégier pour le transfert des déchets solidifiés produits par l'installation ", le site comporte déjà un embranchement ferroviaire utilisé pour ses approvisionnements en matières premières et ses départs en produits finis et les modes de transfert routier et ferroviaire ont bien été envisagés dès l'élaboration du dossier de demande d'autorisation. Enfin, la durée de trente ans mentionnée dans le dossier de demande d'autorisation correspond à l'horizon prévisionnel de résorption du passif d'effluents nitratés sur le site et non à la durée de l'exploitation, laquelle durée n'a pas été fixée. Ainsi, en ne fixant, comme il pouvait légalement le faire eu égard à la nature du projet, aucune durée d'autorisation, le préfet n'a pas modifié le projet soumis à enquête publique. Il résulte de ce qui vient d'être dit que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le projet autorisé ne diffère pas de celui figurant dans le dossier de demande d'autorisation soumis à enquête publique. Les requérants ne peuvent davantage invoquer la nécessité d'organiser une nouvelle enquête publique en lien avec l'actualisation des prescriptions applicables aux installations existantes sur le site de L..., lesdites actualisations n'entraînant pas, en l'espèce, de modifications substantielles des conditions d'exploiter desdites installations.

41. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'irrégularité de l'enquête publique doit être écarté en toutes ses branches.

En ce qui concerne la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la charte de l'environnement et les dispositions des articles L. 511-1 et L. 512-1 du code de l'environnement :

42. Aux termes de l'article 3 de la charte de l'environnement : " Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement. ". Et aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ". Aux termes de l'article L. 512-1 du même code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale, applicable en l'espèce : " Sont soumises à autorisation les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1. / L'autorisation, dénommée autorisation environnementale, est délivrée dans les conditions prévues au chapitre unique du titre VIII du livre Ier. ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 181-3 du même code, créé par la même ordonnance, dont les dispositions ont été rendues applicables aux autorisations d'exploiter délivrées avant son entrée en vigueur en vertu des dispositions de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas. (...) ".

43. Dans l'exercice de ses pouvoirs de police administrative en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement, il appartient à l'autorité administrative d'assortir l'autorisation d'exploiter délivrée en application de l'article L. 512-1 du code de l'environnement des prescriptions de nature à assurer la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du même code, en tenant compte des conditions d'installation et d'exploitation précisées par le pétitionnaire dans le dossier de demande, celles-ci comprenant notamment les engagements qu'il prend afin d'éviter, réduire et compenser les dangers ou inconvénients de son exploitation pour ces intérêts.

44. En l'espèce, l'installation en litige a pour objet, d'une part, de poursuivre l'exploitation des installations de purification de concentrés uranifères et de fabrication de tétrafluorure d'uranium et, d'autre part, de créer une unité complémentaire de traitement des nitrates dénommée TDN au sein de son usine dont l'objectif est de résorber un entreposage historique d'effluents salins renfermant de faibles quantités de substances radioactives sur le site de L.... Le traitement réalisé permet de transformer cet effluent liquide en un déchet solide de plus faible volume. Ce déchet, chimiquement inerte, peut être évacué vers une filière de stockage adaptée Il résulte de l'instruction, notamment de l'étude d'impact que les installations de traitement ont été conçues pour limiter les effets sur l'environnement, en particulier le confinement des matières à traiter. Par ailleurs, les études produites par les requérants afin de démontrer le caractère massif et la dangerosité des rejets atmosphériques ont été prises en compte par le conseil départemental de l'environnement, des risques sanitaires et technologiques (CODERST) de l'Aude qui a émis dans sa séance du 13 octobre 2017 un avis favorable au projet TDN après avoir notamment entendu les critiques de certains élus et d'une association en ce qui concerne les rejets atmosphériques et la consommation énergétique élevée. Ces études ont amené le préfet de l'Aude à baisser, par des arrêtés ultérieurs, les valeurs limites de DEHP (phtalate de bis) à ne pas dépasser. Des mesures, notamment par la présence d'un oxydateur thermique et d'un filtre à bougies permettant de piéger les particules solides présentes, ont été prises afin de limiter les rejets atmosphériques. En outre, des mesures ont également été fixées en matière d'étanchéité et de solidité des matériaux de nature à prévenir les risques d'explosion. La circulation supplémentaire de véhicules liée au projet TDN - 34 mouvements par jour - n'est pas non plus de nature à porter atteinte à la sécurité routière. Les requérants n'apportent par ailleurs aucun élément qui établirait que les modifications des installations situées sur le site de L... par des arrêtés préfectoraux complémentaires aggraveraient les impacts du projet sur l'environnement. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que l'installation projetée aurait, malgré ces mesures, des conséquences graves sur la santé ou l'environnement. Par ailleurs, un observatoire du suivi des émissions (air, eau, déchets) du site de L... a été mis en place, au sein de la commission de suivi du site, par un arrêté préfectoral du 7 mars 2018. Enfin, si la consommation de matières premières nécessaire au fonctionnement de l'installation est relativement importante, elle est justifiée et proportionnée tant en ce qui concerne le choix des matériaux que la quantité utilisée qui, contrairement à d'autres procédés, notamment l'extraction par solvant, sont plus consommateurs de matières premières. Par conséquent, il ne résulte pas de l'instruction que les effets du projet seraient tels qu'ils caractériseraient une atteinte aux intérêts visés à l'article 3 de la charte de l'environnement et aux articles L. 511-1 et L. 512-1 du code de l'environnement qui auraient justifié un refus d'autorisation.

En ce qui concerne la méconnaissance du principe de précaution :

45. Aux termes de l'article 5 de la Charte de l'environnement : " Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ". Les conditions d'application de ces dispositions sont notamment précisées à l'article L. 110-1 du code de l'environnement, qui définit le principe de précaution dans les termes suivants : " (...) Le principe de précaution, selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable (...) ". Il résulte de ces dispositions que le principe de précaution est applicable lorsqu'il existe des éléments circonstanciés de nature à accréditer l'hypothèse de risques de dommages graves et irréversibles pour l'environnement ou d'atteintes à l'environnement susceptibles de nuire de manière grave à la santé, en dépit des incertitudes subsistant sur leur réalité et leur portée en l'état des connaissances scientifiques. Il ne saurait, en revanche, être utilement invoqué lorsque la réalité et la portée de tels risques ne présentent pas, en l'état des connaissances scientifiques, un caractère hypothétique mais sont, au contraire, connues et évaluées.

46. En l'espèce, il ne résulte pas de l'instruction que le projet comporterait des risques inconnus liés à des incertitudes sur la composition des déchets atmosphériques et solides émis par l'installation, composition précisément détaillée dans l'étude d'impact et qui n'est pas sérieusement contestée par les études produites par les requérants dont le CODERST a eu connaissance. Il ne résulte pas, par ailleurs, davantage de l'instruction que les arrêtés complémentaires aggraveraient les risques allégués.

En ce qui concerne le respect du principe de hiérarchie des modes de traitement des déchets :

47. L'article L. 541-1 du code de l'environnement, issu de l'ordonnance du 17 décembre 2010 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des déchets dispose, dans son II, que : " Les dispositions du présent chapitre et de l'article L. 125-1 ont pour objet : (...) 2° De mettre en œuvre une hiérarchie des modes de traitement des déchets consistant à privilégier, dans l'ordre : a) La préparation en vue de la réutilisation ; b) Le recyclage ; c) Toute autre valorisation, notamment la valorisation énergétique ; d) L'élimination ; (...) ; 4° D'organiser le transport des déchets et de le limiter en distance et en volume selon un principe de proximité ; " . Et l'article D. 542-75 de ce code prévoit que : " La gestion des déchets radioactifs est mise en œuvre conformément aux dispositions des articles L. 542-1 et suivants par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs et les producteurs et détenteurs de déchets radioactifs de sorte que : (...) 2° L'utilisation des installations de stockage de déchets radioactifs soit optimisée ; ".

48. Les requérants soutiennent que le procédé TDN choisi par le pétitionnaire méconnaît le principe de hiérarchisation des déchets prévu au 2° du II de l'article L 541-1 du code de l'environnement, et qu'un procédé alternatif d'extraction des nitrates (EDN) permettrait le recyclage de certaines substances composant les effluents nitratés stockés actuellement dans les bassins de l'installation, ce qui permettrait de réduire dans une proportion importante la quantité de déchets à évacuer en centre de stockage TFA. Toutefois, ce procédé EDN a été étudié par le pétitionnaire, puis écarté en l'absence de maturité technique d'un tel procédé, qui produirait par ailleurs une quantité importante d'effluents liquides (3 240 tonnes d'ammoniaque et 14 400 tonnes d'acide citrique par an) et de déchets solides (26 500 m3 de gypse par an) alors que le procédé TDN utilisé produit seulement 7 100 m3 de blocs cimentés par an. En outre, les requérants n'établissent pas la faisabilité du recyclage d'une partie des effluents liquides ainsi produits. Dans ces conditions, dès lors que seul le CIRES, situé dans l'Aube, est susceptible de recevoir les déchets solides déchets de très faible activité issus de l'exploitation, le principe de proximité issu des dispositions précitées du code de l'environnement n'a pas non plus été méconnu. Dès lors, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que le projet en cause aurait méconnu les dispositions des articles L. 541-1 et D. 542-75 du code de l'environnement, ainsi que le principe d'optimisation de l'utilisation des installations de stockage de déchets radioactifs, réitéré dans le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs.

49. Il résulte de tout ce qui précède que l'arrêté en litige est illégal en raison seulement de l'irrégularité qui affecte l'avis de l'autorité environnementale, l'étude d'impact concernant le stockage, le transport et le traitement des déchets de très faible activité et l'insuffisance de l'état de pollution des sols.

Sur l'application des dispositions du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement :

50. Aux termes du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations ".

51. Les dispositions précitées du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement permettent au juge, même pour la première fois en appel, lorsqu'il constate un vice qui entache la légalité de l'autorisation environnementale attaquée mais qui peut être régularisé par une décision modificative, de rendre un jugement avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Cette faculté relève d'un pouvoir propre du juge qui n'est pas subordonné à la présentation de conclusion en ce sens. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation, qui implique l'intervention d'une décision corrigeant le vice dont est entachée la décision attaquée. Un vice de procédure, dont l'existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de la décision attaquée, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. Si ces modalités ne sont pas légalement applicables, notamment du fait de l'illégalité des dispositions qui les définissent, il appartient au juge de rechercher si la régularisation peut être effectuée selon d'autres modalités qu'il lui revient de définir en prenant en compte les finalités poursuivies par les règles qui les ont instituées et en se référant, le cas échéant, aux dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue.

52. Ainsi qu'il a été dit au point 49, l'autorisation délivrée à la société Orano Chimie Enrichissement par l'arrêté contesté du 8 novembre 2017 du préfet de l'Aude est entachée d'illégalité en ce que l'étude d'impact concernant le stockage, le transport et le traitement des déchets de très faible activité était insuffisante, en ce que l'état de pollution des sols était insuffisant, et en ce qu'elle n'a pas été précédée d'un avis régulièrement émis par l'autorité environnementale. De tels vices peuvent être régularisés par une décision modificative.

En ce qui concerne les vices affectant l'étude d'impact et l'état de pollution des sols :

53. Le préfet de l'Aude devra enjoindre à l'exploitant de compléter l'étude d'impact sur la question tenant au stockage, au transport et au traitement des déchets de très faible activité, ainsi que l'état de pollution des sols, conformément aux points 22 et 23, puis, une fois cette étude et ce document actualisés, faire réaliser une nouvelle consultation du public sur ces points, consistant en une enquête publique complémentaire organisée selon les modalités prévues par les articles L. 123-14 et R. 123-23 du code de l'environnement, en vue de l'adoption d'un arrêté préfectoral modificatif contenant le cas échéant des prescriptions complémentaires.

En ce qui concerne le vice affectant l'avis de l'autorité environnementale :

54. Par sa décision n° 400559 du 6 décembre 2017, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé le décret du 28 avril 2016 portant réforme de l'autorité environnementale en tant qu'il maintient, au IV de l'article R. 122-6 du code de l'environnement, la désignation du préfet de région en qualité d'autorité compétente de l'Etat en matière d'environnement, en méconnaissance des objectifs énoncés au paragraphe 1 de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement. Le vice de procédure qui résulte de ce que l'avis prévu par le III de l'article L. 122-1 du code de l'environnement a été rendu en méconnaissance des dispositions de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011, peut être réparé par la consultation, sur le projet en cause, à titre de régularisation, d'une autorité présentant les garanties d'impartialité requises.

55. L'illégalité de l'avis émis le 29 avril 2016 par l'autorité environnementale peut être régularisée par la consultation, s'agissant du projet présenté par la société Orano Chimie Enrichissement, d'une autorité environnementale présentant les garanties d'impartialité requises. Pour que cette régularisation puisse être effectuée, ce nouvel avis devra être rendu dans les conditions définies aux articles R. 122-6 à R. 122-8 et R. 122-24 du code de l'environnement, applicables à la date de l'émission de cet avis ou de la constatation de l'expiration du délai requis pour qu'il soit rendu, par la mission régionale de l'autorité environnementale (MRAE) du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) compétente pour la région Occitanie.

56. Lorsque ce nouvel avis aura été rendu, ou lorsqu'il sera constaté que la MRAE du CGEDD compétente pour la région Occitanie n'a pas émis d'observations dans le délai qui lui est imparti par les dispositions du code de l'environnement mentionnées au point précédent, ce nouvel avis ou l'information relative à l'absence d'observations émises par la MRAE sera mis en ligne sur un site internet suffisamment accessible et ayant une notoriété suffisante, tels que le site de la préfecture de la région Occitanie ou celui de la préfecture de l'Aude, de manière à ce qu'une information suffisante du public soit assurée et que celui-ci ait la possibilité, par des cadres définis et pouvant accepter un nombre suffisant de caractères, de présenter ses observations et propositions. L'accessibilité de cet avis implique également qu'il soit renvoyé à son contenu intégral par un lien hypertexte figurant sur la page d'accueil du site en cause.

57. Dès lors qu'une enquête publique complémentaire est rendue nécessaire dans le cadre de la régularisation des vices relatifs à l'insuffisance de l'étude d'impact et de l'état de pollution des sols, organisée à titre de régularisation selon les modalités prévues par les articles L. 123-14 et R. 123-23 du code de l'environnement, le nouvel avis émis par l'autorité environnementale (MRAE) sera également soumis à cette procédure d'enquête publique, dans le cadre de laquelle le dossier d'enquête publique initiale pourra utilement être mis à la disposition du public pour sa complète information.

58. Dans ces circonstances, il y a lieu pour la Cour, de surseoir à statuer sur la requête dans l'attente de l'autorisation modificative qui devra être prise dans le respect des principes précédemment mentionnés, dans' un délai de douze mois à compter de la notification du présent arrêt. Pendant cette période, il appartiendra au préfet de justifier auprès de la Cour de l'accomplissement des mesures de régularisation.

Sur l'éventuelle suspension de l'exécution de l'autorisation :

59. En vertu du II de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " En cas d'annulation ou de sursis à statuer affectant une partie seulement de l'autorisation environnementale, le juge détermine s'il y a lieu de suspendre l'exécution des parties de l'autorisation non viciées ". Il résulte de ces dispositions que lorsque le juge prononce l'annulation d'une partie divisible de l'autorisation, il peut suspendre l'exécution des parties non annulées dans l'attente de la nouvelle décision que l'administration devra prendre sur la partie annulée. Il en résulte également, d'une part, que le juge qui sursoit à statuer pour permettre la régularisation de l'autorisation a la faculté de suspendre l'exécution de celle-ci et, d'autre part, que lorsque le vice qui motive le sursis ne concerne qu'une partie divisible de l'autorisation, cette faculté concerne à la fois cette partie et les parties non viciées. Par ailleurs, lorsqu'il prononce l'annulation, totale ou partielle, d'une autorisation environnementale, le juge de pleine juridiction des autorisations environnementales a toujours la faculté, au titre de son office, d'autoriser lui-même, à titre provisoire, et le cas échéant sous réserve de prescriptions complémentaires qu'il fixe lui-même et pour un délai qu'il détermine, la poursuite de l'exploitation, des activités ou des travaux en cause dans l'attente de la délivrance d'une nouvelle autorisation par l'autorité administrative. Les dispositions de l'article L. 181-18 n'ont ni pour objet ni pour effet de lui retirer ce pouvoir. Dans tous les cas, que ce soit pour suspendre l'exécution de l'autorisation attaquée ou pour délivrer une autorisation provisoire, il appartient au juge de prendre en compte, pour déterminer l'opportunité de telles mesures, l'ensemble des éléments de l'espèce, notamment la nature et la portée de l'illégalité en cause, les considérations d'ordre économique et social ou tout autre motif d'intérêt général pouvant justifier la poursuite de l'exploitation, des activités ou des travaux et l'atteinte éventuellement causée par ceux-ci aux intérêts mentionnés aux articles L. 181-3 et L. 181-4 du code l'environnement ou à d'autres intérêts publics et privés.

60. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard au rôle crucial des installations exploitées sur le site de L... dans la filière nucléaire française, il n'y a pas lieu de faire usage de la faculté prévue par les dispositions précitées de suspendre l'exécution de l'autorisation délivrée à l'exploitant.

D É C I D E :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de l'association Collectif pour l'environnement des riverains élisyques à Narbonne, l'association Rubresus, association de défense et protection des basses plaines de l'Aude et autres jusqu'à ce que le préfet de l'Aude ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation édicté après le respect des différentes modalités définies aux points 53 à 58 du présent arrêt jusqu'à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 2 : Le préfet de l'Aude fournira à la Cour (greffe de la 7ème chambre), au fur et à mesure de leur accomplissement, les actes entrepris en vue de la régularisation prévue à l'article précédent.

Article 3 : Tous droits et conclusions des parties, sur lesquels il n'a pas été statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Collectif pour l'environnement des riverains élisyques à Narbonne, première dénommée de la requête en qualité de représentante unique en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, et à la société Orano Chimie Enrichissement.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Ciréfice, présidente assesseure,

- M. Prieto, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 octobre 2022.

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N°19MA05470

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA05470
Date de la décision : 21/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Energie - Installations nucléaires.

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement.

Nature et environnement.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Pouvoirs du juge de plein contentieux.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Virginie CIREFICE
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : SELARL ATMOS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-10-21;19ma05470 ?
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