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13/10/2022 | FRANCE | N°19MA02490

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 13 octobre 2022, 19MA02490


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Cesco a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1700932 du 29 mars 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 29 mai 2019, l

a SARL Cesco, représentée par Me Roustouil, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Cesco a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1700932 du 29 mars 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 29 mai 2019, la SARL Cesco, représentée par Me Roustouil, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 mars 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;

3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à sa charge la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé s'agissant des moyens relatifs à la limitation du montant des déficits imputables ;

- les rectifications relatives à la limitation du montant des déficits imputables sur le fondement du troisième alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts sont inéquitables ;

- la limitation du montant du déficit imputable résultant de la modification du I de l'article 209 du code général des impôts par la loi n °2011-1117 du 19 septembre 2011 porte atteinte à une situation légalement acquise ;

- la limitation du déficit imputable résultant de la modification du I de l'article 209 du code général des impôts sans prévision d'une atténuation pour les entreprises en difficulté a fait peser sur ces entreprises une charge excessive, qui est contraire au principe d'égalité devant les charges publiques ;

- la réintégration à ses résultats des revenus réputés distribués par la société B... doit être neutralisée dans le cadre du régime de l'intégration fiscale ;

- à titre subsidiaire, elle est fondée à mettre en œuvre le report en arrière du déficit constaté au titre de l'exercice clos en 2013 et en conséquence à déduire du résultat de l'exercice clos en 2012 une dette de 2 450 000 euros, rétablie en raison du retour à meilleure fortune ;

- la doctrine administrative référencée BOI-IS-DEF-20-10 n° 50 permet d'opter pour le report en arrière des déficits dans le cadre d'une réclamation contentieuse ;

- selon la doctrine administrative référencée BOI-BIC-BASE-50-20-10, n° 290, la dette de 2 450 000 euros est déductible du résultat de l'exercice au cours duquel elle a été rétablie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la SARL Cesco ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,

- et les observations de Me Roustouil, représentant la SARL Cesco.

Une note en délibéré présentée pour la SARL Cesco a été enregistrée le 30 septembre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Cesco, qui est la société mère d'un groupe fiscalement intégré, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er avril 2011 au 31 mars 2014. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a notamment remis en cause l'imputation sur le résultat d'ensemble d'une partie des déficits d'ensemble déclarés. La SARL Cesco relève appel du jugement du 29 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a ainsi été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2014, et des pénalités correspondantes.

Sur la régularité du jugement :

2. Doit être écarté le moyen tiré de ce que le jugement serait insuffisamment motivé s'agissant des moyens tirés de ce que les rectifications résultant de la limitation du montant des déficits imputables seraient inéquitables, de ce que cette limitation porterait atteinte à une situation légalement acquise et de ce que la modification du texte relatif à cette limitation ferait peser sur les entreprises en difficulté une charge excessive, dès lors que ces moyens, qui revenaient à contester devant le tribunal la conformité à la Constitution des dispositions du I de l'article 209 du code général des impôts, ne pouvaient être utilement invoqués en dehors de la procédure prévue à l'article 61-1 de la Constitution. En tout état de cause, eu égard à la nature et à l'objet de cette procédure, le tribunal administratif pouvait, comme il l'a d'ailleurs fait, se prononcer sur ces moyens relatifs à la conformité d'une disposition législative aux droits et libertés garantis par la Constitution par référence à l'ordonnance refusant de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la requérante au Conseil d'Etat sans entacher son jugement d'insuffisance de motivation, dès lors que la motivation de l'ordonnance était elle-même suffisante.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que les moyens tirés de ce que les rectifications relatives à la limitation du montant des déficits imputables sur le fondement du troisième alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts seraient inéquitables, de ce que la limitation du montant des déficits imputables résultant de la modification du I de l'article 209 du code général des impôts par la loi n °2011-1117 du 19 septembre 2011 porterait atteinte à une situation légalement acquise et de ce que la limitation des déficits résultant de la modification du I de l'article 209 du code général des impôts sans prévision d'une atténuation pour les entreprises en difficulté aurait fait peser sur ces entreprises une charge excessive, qui serait contraire au principe d'égalité devant les charges publiques, doivent être écartés.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 223 B du code général des impôts, relatif au résultat d'ensemble des groupes de sociétés, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le résultat d'ensemble est déterminé par la société mère en faisant la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, déterminés dans les conditions de droit commun (...). / L'abandon de créance ou la subvention directe ou indirecte consenti entre des sociétés du groupe (...) n'est pas pris en compte pour la détermination du résultat d'ensemble (...) ". Aux termes de l'article 46 quater-0 ZG de l'annexe III au même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La subvention indirecte mentionnée au sixième alinéa de l'article 223 B et au premier alinéa de l'article 223 R du code général des impôts s'entend des renonciations à recettes qui proviennent des prêts ou d'avances sans intérêt ou à un taux d'intérêt inférieur au taux du marché. Elle s'entend également de la livraison de biens ou de la prestation de services entre sociétés du groupe sans contrepartie ou pour un prix inférieur à leur prix de revient ou, s'agissant de biens composant l'actif immobilisé, pour un prix inférieur à leur valeur réelle. / Constituent également une subvention indirecte au sens des articles 223 B et 223 R déjà cités les excédents de charges qui proviennent des emprunts contractés, des avances reçues qui sont assortis d'un taux d'intérêt plus élevé que celui du marché. Il en est de même des achats de biens ou de services pour un prix plus élevé que leur valeur réelle ".

5. Si l'administration fiscale, après avoir procédé à la vérification de comptabilité de la société B..., filiale de la requérante, a réintégré aux résultats de cette dernière des revenus réputés distribués correspondant aux recettes omises par la filiale au titre des exercices clos en 2011 et 2012, la circonstance que la société B... a désigné la société requérante comme étant la bénéficiaire de ces revenus distribués ne permet pas de regarder la filiale comme ayant procédé au versement effectif au bénéfice de sa société mère d'une quelconque somme. Par suite, les rectifications en cause ne peuvent être regardées comme révélant des subventions directes consenties entre des sociétés du groupe. Par ailleurs, en l'absence d'acte anormal de gestion, les distributions en cause ne traduisent pas davantage l'existence de subventions indirectes. Par conséquent, la SARL Cesco n'est pas fondée à soutenir que la réintégration à ses résultats des revenus réputés distribués par la société B... devrait être neutralisée le cadre du régime de l'intégration fiscale.

6. En troisième lieu, aux termes du I de l'article 220 quinquies du code général des impôts, applicable aux sociétés mères d'un groupe de sociétés en vertu de l'article 223 G du même code : " Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa du I de l'article 209, le déficit constaté au titre d'un exercice ouvert à compter du 1er janvier 1984 par une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'exercice précédent, dans la limite de la fraction non distribuée de ce bénéfice et à l'exclusion du bénéfice exonéré en application des articles 44 sexies (...) et 207 à 208 sexies ou qui a bénéficié des dispositions du premier alinéa du f du I de l'article 219 ou qui a ouvert droit au crédit d'impôt prévu aux articles 220 quater et 220 quater A ou qui a donné lieu à un impôt payé au moyen de crédits d'impôts (...) ".

7. Il résulte de l'instruction qu'au cours de l'année 2011, le gérant et associé de la SARL Cesco lui a consenti un abandon de créance avec clause de retour à meilleure fortune, pour un montant de 2 450 000 euros. Si la société fait valoir qu'en raison de la reconstitution de ses capitaux propres au cours de l'année 2012, elle aurait été tenue de constater la dette de 2 450 000 euros ainsi rétablie au cours de l'exercice clos en 2013, il est constant que ce passif n'a pas été constaté en comptabilité. La SARL Cesco, qui, en s'abstenant de procéder à cette constatation, a pris une décision de gestion qui lui est opposable, ne saurait ainsi être fondée à demander le bénéfice du report en arrière du déficit de l'exercice clos en 2013 à hauteur de 2 450 000 euros.

8. En quatrième et dernier lieu, la SARL Cesco n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations des doctrines administratives référencées BOI-IS-DEF-20-10 n° 50 et BOI-BIC-BASE-50-20-10, n° 290, qui ne comportent aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il a été fait application.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Cesco n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. En premier lieu, la présente affaire n'a donné lieu à aucun dépens. Par suite, les conclusions présentées par la SARL Cesco sur le fondement de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

11. En second lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SARL Cesco la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1 : La requête de la SARL Cesco est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Cesco et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2022, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- Mme Carotenuto, première conseillère,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 13 octobre 2022.

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N° 19MA02490


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