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04/10/2022 | FRANCE | N°20MA03385

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 04 octobre 2022, 20MA03385


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler la décision de licenciement dont il a fait l'objet et les décisions implicites par lesquelles la chambre de commerce et d'industrie de Provence-Alpes-Côte d'Azur et la chambre de commerce et d'industrie du Var ont rejeté sa demande du 18 décembre 2017 à fin de requalification de son contrat de travail, d'annulation de son licenciement, d'indemnisation du préjudice en résultant et de réintégration, d'autre part d'enjoindre

la chambre de commerce et d'industrie de requalifier son emploi en emplo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler la décision de licenciement dont il a fait l'objet et les décisions implicites par lesquelles la chambre de commerce et d'industrie de Provence-Alpes-Côte d'Azur et la chambre de commerce et d'industrie du Var ont rejeté sa demande du 18 décembre 2017 à fin de requalification de son contrat de travail, d'annulation de son licenciement, d'indemnisation du préjudice en résultant et de réintégration, d'autre part d'enjoindre à la chambre de commerce et d'industrie de requalifier son emploi en emploi d'enseignant permanent statutaire depuis le 9 novembre 2010, ou, subsidiairement, en emploi d'enseignant permanent non statutaire, de le réintégrer et de procéder à la reconstitution de sa carrière, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir, et, enfin, de condamner la chambre de commerce et d'industrie à lui verser la somme de

121 117,73 euros en réparation du préjudice financier subi, la somme de 26 735,50 euros en réparation de la précarité de la situation dans laquelle il a été maintenu, la somme de

26 735,50 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence qu'il a subis et la somme de 13 367,75 euros " pour travail dissimulé ", ou à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise afin de déterminer le montant de la perte de revenus subie et des indemnités de licenciement et de préavis dont il doit bénéficier et, dans l'attente, de condamner la chambre de commerce et d'industrie à lui verser à ce titre une provision de 20 000 euros.

Par un jugement n° 1801667 du 6 juillet 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 septembre 2020 et le 23 novembre 2021, M. A... C..., représenté par Me Consalvi, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1801667 du 6 juillet 2020 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler par voie de conséquence les décisions implicites de rejet de ses demandes tendant à la requalification de la relation de travail, à l'annulation de son licenciement, à l'indemnisation des préjudices subis ainsi qu'à sa réintégration ;

3°) de requalifier son emploi en emploi d'enseignant permanent non statutaire depuis son recrutement ;

4°) d'annuler la décision de licenciement révélée par la diminution des heures de travail et de la rémunération résultant de la proposition de contrat de travail ;

5°) de condamner solidairement la chambre de commerce et d'industrie du Var et la chambre de commerce et d'industrie Provence-Alpes-Côte d'Azur à lui payer la somme de 121 117,73 euros en réparation de son préjudice financier ;

6°) de condamner la chambre de commerce et d'industrie Provence-Alpes-Côte d'Azur à lui payer, d'une part, la somme de 26 735,50 euros du fait de la précarité dans laquelle il a été illégalement maintenu, d'autre part, la somme de 26 735,50 euros en réparation du préjudice moral et des troubles anormaux d'existence subis, et, enfin, la somme de 13 367,75 euros pour travail dissimulé ;

7°) d'enjoindre à la chambre de commerce et d'industrie de procéder à la reconstitution de sa carrière et de le réintégrer dans ses effectifs dans un délai déterminé et sous astreinte ;

8°) d'ordonner en tant que de besoin et avant dire droit une mesure d'instruction afin de déterminer le montant exact de la perte de revenus et des indemnités de licenciement et de préavis ;

9°) de mettre à la charge solidaire de la chambre de commerce et d'industrie Provence-Alpes-Côte d'Azur et de la chambre de commerce et d'industrie du Var la somme de 5 000 euros au titre des frais d'instance.

Il soutient que :

- en application de l'article 48-7 du statut du personnel administratif des chambres consulaires, il aurait dû bénéficier d'un contrat à durée indéterminée dès lors que, de novembre 2010 à septembre 2017, il est intervenu en tant qu'enseignant sur un emploi permanent au sein du centre de formation CAPFORMA rattaché à la chambre de commerce et d'industrie du Var sous le statut d'enseignant vacataire intermittent puis d'autoentrepreneur ;

- dans ces conditions, la rupture de la relation de travail résultant d'une modification unilatérale de ses conditions de travail et de sa rémunération doit s'analyser en un licenciement irrégulier, sans cause réelle et sérieuse, ouvrant droit à indemnisation, de sorte que c'est à tort que le tribunal administratif a considéré qu'il était seul responsable d'une telle rupture ;

- en ne lui faisant pas bénéficier d'un contrat d'enseignant permanent et en le maintenant illégalement dans une situation professionnelle précaire, la chambre de commerce et d'industrie a commis une faute qui engage sa responsabilité et lui ouvre droit à indemnisation des préjudices en résultant ;

- en outre, en lui proposant une modification substantielle et défavorable de ses conditions de travail et de sa rémunération, sous couvert de régulariser sa situation professionnelle au regard du statut, la chambre de commerce et d'industrie a irrégulièrement rompu la relation de travail.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 février 2021, la chambre de commerce et d'industrie du Var, représentée par la SCP F. Rocheteau et C. Uzan-Sarano, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. C... le paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés dès lors qu'il n'établit pas remplir les conditions pour prétendre au bénéfice de l'article 55 du statut du personnel administratif des chambres consulaires, et qu'il ne remplit pas davantage les conditions fixées par l'article 48-7 du statut permettant aux compagnies consulaires d'employer des enseignants permanents hors statut dès lors qu'il n'établit aucunement le caractère permanent des tâches et fonctions qu'il remplissait ;

- en tout état de cause, il n'a jamais répondu aux offres de contrats qui lui ont été formulées à compter de la rentrée 2017 sur le fondement de l'article 48-7 du statut, de sorte que la rupture de la relation de travail lui est entièrement imputable ;

- en raison de l'absence de licenciement, aucune faute ne peut être retenue à l'encontre la chambre ; en outre, et à titre subsidiaire, à supposer même que la Cour estime que le requérant pouvait prétendre au bénéfice d'un contrat sur le fondement de l'article 48-7, elle ne pourrait que rejeter la demande d'indemnisation des différents chefs de préjudice allégués dès lors qu'elle lui a proposé à plusieurs reprises le bénéfice d'un contrat à durée indéterminée en qualité d'enseignant permanent hors statut, ce que l'intéressé a toujours refusé ;

- en tout état de cause, les montants exorbitants réclamés à titre indemnitaire ne sont pas démontrés ni étayés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'arrêté interministériel du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel des chambres consulaires ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me Murat, de la SCP F. Rocheteau et C. Uzan-Sarano, représentant la chambre de commerce d'industrie du Var.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a été recruté par la chambre de commerce et d'industrie du Var en novembre 2010 pour exercer les fonctions d'enseignant en management, contrôle de gestion et stratégie d'entreprise au sein du centre de formation CAPFORMA, d'abord en qualité de vacataire jusqu'à la rentrée de septembre 2015, puis sous le statut d'autoentrepreneur.

Par courriers des 3 juillet, 20 juillet, et 3 août 2017, la chambre de commerce et d'industrie a proposé à M. C... la conclusion d'un contrat à durée indéterminée en tant qu'enseignant permanent non statutaire en application de l'article 48-7 du statut du personnel administratif des chambres consulaires. En l'absence de réponse à la dernière offre formulée, elle lui a adressé un courrier du 5 septembre 2017 par lequel elle l'informait de ce qu'elle prenait acte de la fin de leur collaboration à compter du 13 octobre suivant. Par courrier du

18 décembre 2017, M. C... a saisi la chambre de commerce et d'industrie Provence-Alpes-Côte d'Azur et la chambre de commerce et d'industrie du Var d'une demande tendant à la requalification de son contrat de travail, à l'annulation de son licenciement, à l'indemnisation du préjudice en résultant et à sa réintégration. Par la présente requête,

M. C... relève appel du jugement du 6 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite née du silence conservé sur ses demandes du 18 décembre 2017.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 48-7 du statut du personnel administratif des chambres consulaires, dans ses dispositions applicables au litige : " Les compagnies consulaires peuvent employer des enseignants permanents hors statut (accomplissant un service inférieur à la moitié de la durée hebdomadaire du travail d'un agent à temps complet...). Ces enseignants seront employés sous contrat permanent hors statut (...) ". Selon l'article 49-5 du même statut, relatif aux conditions de recours aux vacataires : " Les compagnies consulaires peuvent employer des intervenants vacataires dans les cas suivants : exécution d'une tâche précise sur un emploi dénué de permanence, exécution d'une tâche spécialisée, d'une expertise, en complément d'une autre activité professionnelle exercée à titre principal 1. Dans les services de formation professionnelle continue et les centres d'étude des langues (...) 2. Dans l'enseignement supérieur (...) 3. Dans les services d'enseignement technologique (...) ". Ces dispositions ouvrent la possibilité aux compagnies consulaires d'employer des enseignants permanents hors statut et limitent l'emploi d'intervenants vacataires aux situations d'exécution de tâches précises ou spécialisées, dénuées de permanence.

3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que M. C... a été recruté en qualité de vacataire pour exercer les fonctions d'enseignant en management, contrôle de gestion et stratégie d'entreprise au sein du centre de formation CAPFORMA dépendant de la chambre de commerce et d'industrie du Var. Si cet enseignement au sein d'un organisme consulaire doit être regardé comme relevant de l'activité normale du service, M. C... se borne à produire, au titre des années 2010 à 2015, quelques fiches de paie ainsi qu'un tableau récapitulatif faisant état d'un total de 119 heures d'enseignement, sur l'ensemble de la période, qui ne sauraient suffire à établir, en l'absence de toute autre précision sur le contenu des missions accomplies et eu égard au très faible nombre d'heures allégué, qu'il aurait occupé un emploi permanent au cours de cette période. S'il est certes constant qu'à compter de la rentrée 2015, M. C... a vu son nombre d'heures augmenter de manière significative dès lors qu'il soutient, sans être contredit, avoir accompli 279,5 heures au titre de l'année 2015-2016 et 429 heures au titre de l'année 2016-2017, cette seule circonstance ne saurait suffire à établir l'existence d'un besoin permanent, et ce quand bien même l'intéressé serait intervenu dans le cadre de filières dont l'enseignement est proposé par la chambre de commerce et d'industrie chaque année depuis plus de 20 ans. Par ailleurs, outre que les heures accomplies ne sauraient être regardées comme portant sur une durée significative, il n'est de surcroît pas établi qu'elles auraient porté sur les mêmes prestations au cours de ces deux dernières années. Enfin, alors qu'elles ont été réalisées, aux dires mêmes du requérant, seulement sous forme de face à face pédagogique à l'exclusion des autres activités également inhérentes aux fonctions d'enseignement, il résulte de la proposition de contrat de travail à durée indéterminée formulée le 3 août 2017 par la chambre de commerce et d'industrie du Var sur le fondement de l'article 48-7 précédemment cité du statut du personnel administratif des chambres consulaires que ce n'est qu'à compter de la rentrée scolaire 2017 qu'un volume annuel global de 466,44 heures a été proposé à M. C..., comprenant 276 heures de face à face pédagogique auxquelles ont été adjointes, pour la première fois, des activités annexes ressortissant aux enseignants de la chambre, et ce, à hauteur de 126,96 heures. Dans ces conditions, au regard des seuls éléments qu'il produit, M. C... n'établit pas qu'il aurait exercé des fonctions répondant à un besoin permanent de la chambre de commerce et d'industrie qui auraient justifié la conclusion d'un contrat permanent hors statut en application de l'article 48-7 du statut avant la rentrée 2017. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir qu'en ne lui faisant pas bénéficier d'un contrat d'enseignant permanent dès l'année 2010, la chambre de commerce et d'industrie du Var aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

4. En second lieu, il résulte de ce qui vient d'être exposé que M. C... avait la qualité de vacataire en application de l'article 49-5 du statut du personnel administratif des chambres consulaires entre 2010 et 2017. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la chambre de commerce et d'industrie aurait commis une faute, consistant en une rupture irrégulière de la relation de travail, en lui proposant, à compter de la rentrée 2017, un contrat à durée indéterminée sur le fondement de l'article 48-7 du statut emportant une modification substantielle et défavorable de ses conditions de travail et de sa rémunération.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise avant dire droit, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'annulation, d'injonction et d'indemnisation ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais d'instance :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge solidaire de la chambre de commerce et d'industrie Provence-Alpes-Côte d'Azur et de la chambre de commerce et d'industrie du Var, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la chambre de commerce et d'industrie du Var fondées sur les mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la chambre de commerce et d'industrie du Var en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à la chambre de commerce et d'industrie du Var et à la chambre de commerce et d'industrie Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2022, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 octobre 2022.

N° 20MA03385


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03385
Date de la décision : 04/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Organisation professionnelle des activités économiques - Chambres de commerce et d'industrie - Personnel.

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires - Fin du contrat - Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU et UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-10-04;20ma03385 ?
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