Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par un recours n° 1901599, Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 22 juillet 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Bastia a refusé de reconnaître l'imputabilité au service d'un incident qui s'est produit le 27 mars 2018, d'enjoindre à cette autorité de reconnaître l'imputabilité au service de cet incident dans un délai de quinze jours et de rétablir son plein traitement à compter du 27 mars 2018 et de mettre à la charge de ce centre hospitalier une somme de 2 000 euros au titre des frais du litige.
Par un recours n° 2000242, Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner le centre hospitalier de Bastia à lui verser son plein traitement depuis le 27 mars 2018, de condamner ce centre hospitalier à lui verser une indemnité de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral et de mettre à sa charge une somme de 5 000 euros au titre des frais du litige.
Par un jugement n° 1901599 - 2000242 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Bastia, après avoir joint ces deux recours, a annulé la décision contestée du directeur du centre hospitalier de Bastia, lui a enjoint de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont a été victime Mme A... le 27 mars 2018 en rétablissant son plein traitement depuis cette dernière date et a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 septembre 2021, le centre hospitalier de Bastia, représenté par Me Canazzi, doit être regardé comme demandant à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 22 janvier 2021 en tant qu'il a annulé la décision prise le 22 juillet 2019 par le directeur du centre hospitalier de Bastia et lui a enjoint de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont a été victime Mme A... le 27 mars 2018 en rétablissant son plein traitement depuis cette dernière date ;
2°) de rejeter les demandes présentées par Mme A... devant le tribunal administratif de Bastia ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'incident du 27 mars 2018, dès lors qu'il trouve sa cause exclusive dans le comportement et la faute de l'intéressée, est détachable du service et c'est donc à bon droit qu'il a, par la décision du 22 juillet 2019 contestée, refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cet incident ;
- la Cour devra confirmer le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions indemnitaires présentées par Mme A....
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 novembre 2021, Mme A..., représentée par Me Genissieux, conclut :
1°) à la confirmation des jugements attaqués en tant qu'ils ont annulé la décision contestée du directeur du centre hospitalier de Bastia et lui a enjoint de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont a été victime Mme A... le 27 mars 2018 en rétablissant son plein traitement depuis cette dernière date ;
2°) à la réformation de ces jugements en condamnant le centre hospitalier de Bastia à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation des troubles causés par l'administration dans ses conditions d'existence et au titre de son préjudice moral ;
3°) à la mise à la charge du centre hospitalier de Bastia de la somme de 5 000 euros au titre des frais d'instance.
Elle soutient que :
- c'est à bon droit que le tribunal a estimé que son comportement ne constitue pas une faute détachable du service et que, dès lors, l'incident du 27 mars 2018, qui est survenu sur le lieu et le temps du service, présente le caractère d'un accident de service ;
- c'est, au contraire, à tort que le tribunal a estimé que l'administration n'avait commis aucune faute alors que celle-ci ne s'est prononcée que le 9 juillet 2019, soit plus d'un an après le recours hiérarchique exercé le 1er juin 2018.
La clôture de l'instruction a été fixée au 8 juin 2022, par application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 24 mai 2022.
Par une ordonnance n° 21MA03938 du 25 novembre 2021, le président de la 2ème chambre de la cour a ordonné le sursis à exécution du jugement attaqué jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond sur la requête d'appel du centre hospitalier de Bastia.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision du 22 juillet 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Bastia a refusé de faire droit à la demande de reconnaissance de l'imputabilité au service d'un incident qui s'est produit le 27 mars 2018 dont l'avait saisi Mme A..., enjoint à cette autorité de reconnaître l'imputabilité au service des conséquences de cet incident en rétablissant son plein traitement à Mme A... depuis cette dernière date et, enfin, rejeté les conclusions de celle-ci tendant à la condamnation de ce centre hospitalier à lui verser une indemnité de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral. Le centre hospitalier de Bastia relève appel de ce jugement en tant qu'il a annulé la décision du directeur du centre hospitalier de Bastia et lui a enjoint de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont a été victime Mme A... le 27 mars 2018 en rétablissant son plein traitement depuis cette dernière date. Par ses conclusions, Mme A... demande le rejet de la requête et la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité de la décision du 22 juillet 2019 :
2. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) II. Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier et, en particulier des témoignages suffisamment précis établis par deux agents du service et la directrice-adjointe de l'hôpital que le 27 mars 2018 un incident a opposé Mme A... à une de ses collègues partageant son bureau à propos de l'ouverture d'une fenêtre. Ces mêmes témoignages, qui font état des cris et hurlements de Mme A... et précisent que sa collègue a alors quitté le bureau calmement, contredisent la version des faits donnés par Mme A... qui affirme avoir été " agressée ". Ainsi, et alors qu'il résulte par ailleurs des pièces versées aux débats que le médecin expert qui l'a examinée le 21 octobre 2018 a estimé que Mme A... présentait une personnalité sensitive et que cette dernière a été à l'origine d'autres incidents au cours desquels elle a fait preuve d'un comportement manifestement excessif à propos d'incidents mineurs, le centre hospitalier de Bastia est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a, pour annuler la décision contestée de son directeur, retenu que la pathologie présentée par l'intéressée présentait un lien suffisant avec le service pour lui être reconnu imputable.
4. Il revient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'ensembles des autres moyens soulevés à l'encontre de la décision contestée, tant en première instance qu'en appel, par Mme A....
5. En premier lieu, Mme A... ne peut utilement se prévaloir des irrégularités de procédure qui auraient entaché les décisions des 16 mai et 25 juillet 2018 rejetant sa demande, ces mêmes décisions, annulées par un jugement du 6 mars 2020 du tribunal administratif de Bastia devenu définitif, n'étant pas en cause dans le présent litige.
6. En deuxième lieu, l'avis rendu le 9 juillet 2019 par la commission de réforme après audition de l'intéressée assistée de son conseil, qui fait état " d'éléments médicaux antérieurs importants " et précise qu'il " ne s'agit pas d'une agression mais d'une altercation " entre agents pour conclure à l'absence d'imputabilité au service est, contrairement à ce que soutient Mme A..., suffisamment motivé.
7. En troisième lieu, Mme A... allègue que le rapport du médecin de prévention ne figurait pas au dossier soumis à la commission, que la commission s'est fondée sur le rapport du médecin psychiatre qui l'a examinée, qui était pourtant favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service, et que les membres de cette commission ont été irrégulièrement convoqués, sans préciser quelle incidence de telles circonstances qui, à les supposer même établies, ne l'ont privée d'aucune garantie, auraient pu avoir sur le sens de l'avis de la commission de réforme.
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :
8. Il résulte de l'instruction que le centre hospitalier de Bastia s'est prononcé dès le 16 mai 2018 sur la demande faite par Mme A... d'imputer au service l'incident ayant eu lieu le 27 mars 2018. Il a ainsi pris position sur la demande de Mme A... dans un délai raisonnable pour ensuite la placer en congé de maladie ordinaire, aucun élément n'étant apporté par la requérante pour démontrer, ainsi qu'elle le soutient, que le centre hospitalier aurait ensuite fait en sorte de retarder la prise de la décision de la commission de réforme le 9 juillet 2019. Si la requérante fait valoir en appel avoir contesté cette décision par un recours hiérarchique exercé le 1er juin 2018, cette circonstance n'est pas de nature à démontrer une faute alors que, comme l'a exactement jugé le tribunal, la régularité de la procédure suivie est sans incidence sur l'appréciation du délai dans lequel le centre hospitalier a statué sur la demande de la requérante.
9. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement annulé en tant qu'il a prononcé l'annulation de la décision contestée du 22 juillet 2019 du directeur du centre hospitalier de Bastia et a enjoint à cette autorité de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A... en lui rétablissant son plein traitement depuis le 27 mars 2018 et de rejeter les conclusions tendant à de telles fins présentées devant le tribunal administratif de Bastia par Mme A... ainsi que ses conclusions d'appel incident présentées devant la cour.
Sur les frais de procédure :
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chacune des parties la charge de ses frais d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement n° 1901599 - 2000242 du 13 juillet 2021 du tribunal administratif de Bastia sont annulés.
Article 2 : Les conclusions tendant à l'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier de Bastia du 22 juillet 2019 et les conclusions à fin d'injonction subséquentes, présentées devant le tribunal administratif de Bastia par Mme A..., ainsi que les conclusions d'appel incident qu'elle a présentées devant la cour sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Bastia et à Mme C... A....
Délibéré après l'audience du 30 juin 2022 où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme Massé-Degois, présidente-assesseure,
- M. Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 juillet 2022.
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N° 21MA03866