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05/07/2022 | FRANCE | N°20MA01688

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 05 juillet 2022, 20MA01688


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 5 mars 2018 par lequel le président du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) des Bouches-du-Rhône l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 12 juin 2018.

Par un jugement no 1803775 du 23 mars 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 avril 2020, Mme B... C..., représentée

par la société d'avocats Goldmann et associés, agissant par Me Heulin, demande à la Cour :

1°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 5 mars 2018 par lequel le président du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) des Bouches-du-Rhône l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 12 juin 2018.

Par un jugement no 1803775 du 23 mars 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 avril 2020, Mme B... C..., représentée par la société d'avocats Goldmann et associés, agissant par Me Heulin, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 mars 2018 par lequel le président du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) des Bouches-du-Rhône l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 12 juin 2018 ainsi que la décision du 19 janvier 2018 refusant la prolongation de son activité au-delà de la limite d'âge ;

3°) d'enjoindre au SDIS des Bouches-du-Rhône de la réintégrer à compter du

12 juin 2018 et de reconstituer sa carrière, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du SDIS des Bouches-du-Rhône la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'arrêté attaqué est illégal dès lors qu'il a été pris en application de la décision de refus de prolongation d'activité du 19 janvier 2018, elle-même illégale car insuffisamment motivée, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, méconnaissant les dispositions de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984, entachée d'un détournement de pouvoir, et qui n'était pas définitive à la date d'introduction de son recours, faute de comporter mention des voies et délais de recours.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2020, le SDIS des Bouches-du-Rhône, représenté par Me Jean-Pierre, conclut au rejet de la requête de Mme C... et à ce que soit mise à la charge de cette dernière une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conclusions à fin d'annulation de la décision du 19 janvier 2018 sont irrecevables car nouvelles en appel ;

- les moyens soulevés à l'encontre de l'arrêté du 5 mars 2018 ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me Heulin, représentant Mme C..., et de

Me Dech, substituant Me Jean-Pierre, représentant le SDIS des Bouches-de-Rhône.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 19 janvier 2018, le président du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de Mme C... tendant à être maintenue en activité en raison d'une durée de services liquidables insuffisante pour obtenir une retraite à taux plein, sur le fondement de l'article 1-1 de la loi du

13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public. Par un arrêté du 5 mars 2018, le président du SDIS des Bouches-du-Rhône a admis l'intéressée à la retraite, à compter du 12 juin 2018, au motif que celle-ci aura atteint la limite d'âge légale

le 11 juin 2018. Par la présente requête, Mme C... relève appel du jugement du 23 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du président du SDIS des Bouches-du-Rhône du 5 mars 2018.

Sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision du

19 janvier 2018 :

2. Dans sa requête devant les premiers juges, Mme C... s'est bornée à demander l'annulation de l'arrêté du 5 mars 2018 par lequel le président du SDIS des Bouches-du-Rhône l'a admise à la retraite à compter du 12 juin 2018. Si elle soutenait que l'arrêté était illégal par voie d'exception d'illégalité de la décision du 19 janvier 2018 refusant de lui accorder une prolongation d'activité, elle n'a pas entendu demander l'annulation de cette première décision. Au demeurant, si elle critique, en appel, la position des premiers juges qui ont regardé comme inopérant le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision du

19 janvier 2018, elle ne critique pas la lecture que les premiers juges ont faite de ses conclusions en les limitant à une demande d'annulation de l'arrêté du 5 mars 2018. Par suite, la fin de

non-recevoir soulevée par le SDIS des Bouches-du-Rhône, tirée de l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision du 19 janvier 2018, car nouvelles en appel, doit être accueillie.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 5 mars 2018 :

3. Aux termes de l'article I de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public : " Sous réserve des reculs de limite d'âge pouvant résulter des textes applicables à l'ensemble des agents de l'Etat, la limite d'âge des fonctionnaires civils de l'Etat est fixée à soixante-sept ans lorsqu'elle était, avant l'intervention de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, fixée à

soixante-cinq ans. ". Aux termes de l'article 28 de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites : " I. ' Pour les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du

13 juillet 1983 précitée dont la limite d'âge était de soixante-cinq ans en application des dispositions législatives et réglementaires antérieures à l'entrée en vigueur de la présente loi et nés à compter du 1er janvier 1955, la limite d'âge est fixée à soixante-sept ans. / II. ' Cette limite d'âge est fixée par décret dans la limite de l'âge mentionné au I pour les fonctionnaires atteignant avant le 1er janvier 2015 l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite applicable antérieurement à la présente loi et, pour ceux atteignant cet âge entre le

1er juillet 2011 et le 31 décembre 2014, de manière croissante à raison : / 1° De quatre mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le 1er juillet et le 31 décembre 2011 ; / 2° De cinq mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le

1er janvier 2012 et le 31 décembre 2014. " et aux termes de l'article 8 du décret n° 2011-2103 du 30 décembre 2011 portant relèvement des bornes d'âge de la retraite des fonctionnaires, des militaires et des ouvriers de l'Etat : " I.- Comme il est dit aux II des articles 28 et 31 de la loi du 9 novembre 2010 susvisée, les limites d'âge applicables aux agents nés avant les dates mentionnées aux I de ces mêmes articles sont fixées, à titre transitoire, pour ceux atteignant avant le 1er janvier 2015 l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite qui leur était applicable avant l'entrée en vigueur de ladite loi, de manière croissante à raison : / 1° De quatre mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le 1er juillet et le

31 décembre 2011 ; / 2° De cinq mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2014. ". Enfin, aux termes de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. (...) ".

4. Ainsi qu'il a été dit au point 1, Mme C..., née le 11 septembre 1952, a demandé à être maintenue en activité sur le fondement de l'article 1-1 de la loi du

13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, fixée, en application des dispositions précitées, à 65 ans et 11 mois, compte tenu de son année de naissance, mais cette demande a été rejetée par une décision du président du SDIS des Bouches-du-Rhône, en date du 19 janvier 2018. Mme C..., ainsi qu'il a été dit au point 2, n'a pas contesté cette première décision et, par un arrêté du 5 mars 2018, le président du SDIS des Bouches-du-Rhône l'a admise à la retraite à compter du 12 juin 2018 au motif qu'elle atteignait la limite d'âge légale le 11 juin 2018. Mme C... soulève à l'encontre de cet arrêté un moyen, unique, tiré de l'illégalité de la décision du 19 janvier 2018, dont l'arrêté du 5 mars 2018 constituerait une décision d'application.

5. D'une part, l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale. D'autre part, en raison des effets qui s'y attachent, l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé ou qui sont en l'espèce intervenues en raison de l'acte annulé. Il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l'acte annulé et de celles dont l'acte annulé constitue la base légale.

6. Il résulte des dispositions citées au point 3 que, si l'administration a compétence liée pour prononcer l'admission d'office à la retraite d'un fonctionnaire dont elle constate qu'il a atteint la limite d'âge, elle peut néanmoins déroger à cette règle et maintenir le fonctionnaire en activité au-delà de la limite d'âge, en application, notamment, de l'article 1-1 de la loi du

13 septembre 1984, si l'intéressé remplit les conditions d'aptitude physique et si son maintien en activité ne porte pas atteinte à l'intérêt du service. Toutefois, si l'annulation, le cas échéant, d'une décision de refus de prolongation d'activité présentée sur ce fondement peut conduire à l'annulation, par voie de conséquence, d'un arrêté de mise à la retraite d'office pour atteinte de la limite d'âge, cela ne fait pas de la décision de refus de prolongation d'activité la base légale de la décision de mise à la retraite d'office ni de cette dernière une mesure prise en application de la première, le constat de l'atteinte de la limite d'âge présentant un simple caractère recognitif. Dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que l'unique moyen de la requête, tiré de l'illégalité, invoquée par voie d'exception, de la décision du

19 janvier 2018, ne pouvait qu'être écarté comme inopérant.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 mars 2018 par lequel le président du SDIS des Bouches-du-Rhône l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 12 juin 2018. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du SDIS des Bouches-du-Rhône, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'appelante la somme demandée par le SDIS des Bouches-du-Rhône au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du SDIS des Bouches-du-Rhône présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., au ministre de l'intérieur et au service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 21 juin 2022, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. Revert, président assesseur,

- Mme Renault, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 5 juillet 2022.

2

N° 20MA01688


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA01688
Date de la décision : 05/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-01 Fonctionnaires et agents publics. - Cessation de fonctions. - Mise à la retraite pour ancienneté ; limites d'âge.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Thérèse RENAULT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SELARL GOLDMANN ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-07-05;20ma01688 ?
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