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04/07/2022 | FRANCE | N°21MA02328

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 04 juillet 2022, 21MA02328


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 10 octobre 2018 par laquelle le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont elle a été victime le 19 juillet 2018, ensemble la décision du 29 novembre 2018 portant rejet de son recours gracieux, de condamner l'Etat à lui payer la somme de 16 547 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis et de mettre à la charge de l'Etat la totalité des frais d

'expertise médicale.

Par un jugement n° 1900572 du 19 avril 2021, le tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 10 octobre 2018 par laquelle le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont elle a été victime le 19 juillet 2018, ensemble la décision du 29 novembre 2018 portant rejet de son recours gracieux, de condamner l'Etat à lui payer la somme de 16 547 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis et de mettre à la charge de l'Etat la totalité des frais d'expertise médicale.

Par un jugement n° 1900572 du 19 avril 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 juin 2021, Mme B..., représentée par Me de Laubier, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation des décisions des 10 octobre et 29 décembre 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 10 octobre 2018 par laquelle le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de trajet dont elle a été victime le 19 juillet 2018, ensemble la décision du 29 novembre 2018 portant rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au recteur de l'académie d'Aix-Marseille de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'accident survenu dans les parties communes d'un immeuble, est survenu au cours du trajet domicile-travail et constitue donc un accident de trajet.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 juin 2022, le recteur de l'académie d'Aix-Marseille conclut au rejet de la requête.

Par courrier du 9 juin 2022 les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible d'enjoindre d'office au recteur de l'académie d'Aix-Marseille de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de trajet dont Mme B... a été victime le 19 juillet 2018.

Par ordonnance du 07 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 15 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a décidé, par décision du 23 mai 2022, de désigner M. Philippe Portail, président assesseur, pour présider par intérim la 6éme chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gilles Taormina, rapporteur,

- les conclusions de M. Renaud Thielé, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., adjointe administrative de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, exerçant les fonctions d'agent d'accueil au sein de la faculté d'économie et de gestion du site Ferry à Aix-en-Provence, a, le 19 juillet 2018 à 10h25, chuté dans l'escalier de l'immeuble où elle réside et qu'elle quittait pour se rendre sur son lieu de travail. Par une décision du 10 octobre 2018, le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident, sur le fondement de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. Mme B... ayant formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision qui a été rejeté par une décision du 29 novembre 2018, relève appel du jugement n° 1900572 du 19 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions et à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " I.- Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. ...III.- Est reconnu imputable au service, lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit en apportent la preuve ou lorsque l'enquête permet à l'autorité administrative de disposer des éléments suffisants, l'accident de trajet dont est victime le fonctionnaire qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son service et sa résidence ou son lieu de restauration et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel du fonctionnaire ou toute autre circonstance particulière étrangère notamment aux nécessités de la vie courante est de nature à détacher l'accident du service... ".

3. Est réputé constituer un accident de trajet tout accident dont est victime un agent public qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son travail et sa résidence et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel de cet agent ou toute autre circonstance particulière est de nature à détacher l'accident du service. Le trajet est le parcours qui commence après que l'agent est effectivement sorti de son domicile ou de la résidence où il est hébergé même provisoirement, que cette habitation soit individuelle ou collective.

4. Il ressort des pièces du dossier, que le 19 juillet 2018 à 10h25, Mme B... a été victime d'une chute en descendant les marches de l'escalier situé dans les parties communes de la résidence " La Croix Verte " dans laquelle elle occupe un appartement, alors qu'elle se rendait à son travail. L'accident s'étant produit alors qu'elle avait quitté son domicile, nonobstant le fait qu'elle se trouvait à l'intérieur du hall d'entrée de l'immeuble dont Mme B... a un usage privé avec les autres habitants de l'immeuble, copropriétaires ou locataires, elle doit être regardée comme ayant quitté son domicile pour emprunter le trajet séparant celui-ci de son lieu de travail, au moment de l'accident. Dès lors, la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal, considérant qu'elle ne pouvait prétendre avoir été victime d'un accident de trajet, a rejeté sa demande. Par suite, doivent être annulés, outre le jugement en litige, la décision du 10 octobre 2018 par laquelle le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de trajet dont elle a été victime le 19 juillet 2018, ensemble la décision du 29 novembre 2018 portant rejet de son recours gracieux.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure ".

6. Le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint au recteur de l'académie d'Aix-Marseille de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de trajet dont Mme B... a été victime le 19 juillet 2018, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens... ".

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1900572 rendu le 19 avril 2021 par le tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : La décision du 10 octobre 2018 par laquelle le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de trajet dont a été victime Mme B... le 19 juillet 2018, ensemble la décision du 29 novembre 2018 portant rejet de son recours gracieux, sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au recteur de l'académie d'Aix-Marseille de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de trajet dont Mme B... a été victime le 19 juillet 2018, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Il est mis à la charge de l'Etat une somme 2 000 euros au profit de Mme B..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie d'Aix-Marseille.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2022, où siégeaient :

- M. Philippe Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Gilles Taormina, président assesseur,

- M. François Point, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juillet 2022.

N° 21MA02328 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA02328
Date de la décision : 04/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-04-01-03 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS. - POSITIONS. - CONGÉS. - CONGÉS DE MALADIE. - ACCIDENTS DE SERVICE. - ACCIDENT DE SERVICE-ACCIDENT DE TRAJET. FONCTIONNAIRE VICTIME D'UNE CHUTE DANS LES PARTIES COMMUNES DE SON IMMEUBLE COLLECTIF ALORS QU'IL PART PRENDRE SON SERVICE.

36-05-04-01-03 Recours dirigé contre la décision du recteur refusant de reconnaître une chute comme accident de service au motif qu'elle s'est produite dans l'escalier de l'immeuble où se trouve l'appartement de la requérante. Application de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. ......La Cour relève que l'accident s'est produit alors que l'agent avait quitté son domicile. Bien qu'il se trouvait à l'intérieur du hall d'entrée de l'immeuble dont il a un usage privé avec les autres habitants de l'immeuble, copropriétaires ou locataires, elle juge que l'agent doit être regardé comme ayant quitté son domicile pour emprunter le trajet séparant celui-ci de son lieu de travail au moment de l'accident, et que celui-ci est dès lors imputable au service et constitue un accident de trajet. Elle annule la décision attaquée et enjoint au recteur de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de trajet dont l'agent a été victime....[RJ1].


Références :

[RJ1]

Comp. CE 5 / 3 SSR 1987-02-18 56147 M. Christmann... CE 3 SS 1989-06-23 88056 ministre d'Etat, chargé de l'économie, des finances et de la privatisation c/ Mme Babayan...... Cour de Cassation chambre sociale 8 mai 1952 Bulletin n° 386 p 282.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Gilles TAORMINA
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : DE LAUBIER

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-07-04;21ma02328 ?
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