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27/06/2022 | FRANCE | N°20MA00603

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 27 juin 2022, 20MA00603


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur (EPF PACA) à lui verser la somme de 150 000 euros en réparation des préjudices subis, en sa qualité d'acquéreur évincé, du fait de l'illégalité de la décision de préemption du 12 août 2011.

Par un jugement n° 1607376 du 19 décembre 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregis

trée le 13 février 2020, M. A... B..., représenté par Me Lasalarie, demande à la Cour :

1°) d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur (EPF PACA) à lui verser la somme de 150 000 euros en réparation des préjudices subis, en sa qualité d'acquéreur évincé, du fait de l'illégalité de la décision de préemption du 12 août 2011.

Par un jugement n° 1607376 du 19 décembre 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 février 2020, M. A... B..., représenté par Me Lasalarie, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 décembre 2019 ;

2°) de condamner l'EPF PACA à lui verser la somme de 150 000 euros en réparation des préjudices subis ;

3°) de mettre à la charge de l'EPF PACA la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il est fondé à obtenir, en sa qualité d'acquéreur évincé, réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité de la décision de préemption ;

- il justifie avoir souscrit des baux précaires pour poursuivre son activité et est donc fondé à solliciter l'indemnisation de ce préjudice ;

- l'EPF PACA a commis une faute en ne lui proposant pas d'acquérir le bien à un prix correspondant au prix initial mais à un prix majoré du coût de travaux qui n'étaient pas indispensables à la conservation du bien ; il est fondé à solliciter une indemnisation à ce titre ;

- il a subi une perte de chance de réaliser une plus-value d'au moins 250 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2020, l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur (EPF PACA), représenté par Me Xoual, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à la mise à la charge de M. B... d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève ;

- les préjudices dont le requérant demande réparation n'ont pas de lien de causalité direct avec l'irrégularité entachant la décision de préemption, qui était justifiée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience au cours de laquelle ont été entendus :

- le rapport de Mme C... ;

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public ;

- les observations de Me Lasalarie représentant M. B... et celles de Me Molland substituant Me Xoual pour l'EPF PACA.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 12 août 2011, l'EPF PACA a exercé son droit de préemption relatif à un bien constitué d'un entrepôt d'une superficie de 880 m² et ayant fait l'objet d'une déclaration d'intention d'aliéner pour un montant de 370 000 euros. Par un jugement no 1106458 du 30 mai 2013, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette décision et a enjoint à l'EPF PACA de proposer à la vente le bien préempté à M. B..., acquéreur évincé. M. B... relève appel du jugement du 19 décembre 2019 du tribunal administratif de Marseille rejetant sa demande tendant à la condamnation de l'EPF PACA à lui verser la somme de 150 000 euros en réparation des préjudices subis, en sa qualité d'acquéreur évincé, du fait de l'illégalité de la décision de préemption du 12 août 2011.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'illégalité fautive de la décision de préemption :

2. Si toute illégalité qui entache une décision de préemption constitue en principe une faute de nature à engager la responsabilité de la collectivité au nom de laquelle cette décision a été prise, une telle faute ne peut donner lieu à la réparation du préjudice subi par le vendeur ou l'acquéreur évincé lorsque, les circonstances de l'espèce étant de nature à justifier légalement la décision de préemption, le préjudice allégué ne peut être regardé comme la conséquence du vice dont cette décision est entachée.

3. Il résulte de l'instruction que la décision de préemption du 12 août 2011 a été annulée par le tribunal administratif de Marseille le 30 mai 2013 au motif tiré de l'incompétence de son auteur, en l'absence de publication de la décision du maire de Marseille délégant l'exercice de son droit de préemption à l'EPF PACA. Ce dernier fait valoir en appel, sans être contredit par le requérant, que la décision en cause était justifiée par un motif d'intérêt général. Dans ces conditions, l'illégalité formelle de cette décision tenant à la seule incompétence de son auteur n'était pas de nature, en l'espèce, à ouvrir droit à réparation des préjudices invoqués par M. B..., relatifs à la souscription de baux précaires et à la perte de chance d'obtenir une plus-value, qui ne sont au demeurant nullement justifiés.

En ce qui concerne la faute alléguée dans l'exécution du jugement du 30 mai 2013 :

4. Aux termes de l'article L. 213-11-1 inséré dans le code de l'urbanisme par la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové : " Lorsque, après que le transfert de propriété a été effectué, la décision de préemption est annulée ou déclarée illégale par la juridiction administrative, le titulaire du droit de préemption propose aux anciens propriétaires ou à leurs ayants cause universels ou à titre universel l'acquisition du bien en priorité. / Le prix proposé vise à rétablir, sans enrichissement injustifié de l'une des parties, les conditions de la transaction à laquelle l'exercice du droit de préemption a fait obstacle. A défaut d'accord amiable, le prix est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation, conformément aux règles mentionnées à l'article L. 213-4. / A défaut d'acceptation dans le délai de trois mois à compter de la notification de la décision juridictionnelle devenue définitive, les anciens propriétaires ou leurs ayants cause universels ou à titre universel sont réputés avoir renoncé à l'acquisition. / Dans le cas où les anciens propriétaires ou leurs ayants cause universels ou à titre universel ont renoncé expressément ou tacitement à l'acquisition dans les conditions mentionnées aux trois premiers alinéas du présent article, le titulaire du droit de préemption propose également l'acquisition à la personne qui avait l'intention d'acquérir le bien, lorsque son nom était inscrit dans la déclaration mentionnée à l'article L. 213-2 ". Il résulte de ces dispositions que, s'il appartient au juge administratif, saisi de conclusions en ce sens par l'ancien propriétaire ou l'acquéreur évincé, d'exercer les pouvoirs qu'il tient des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative afin d'ordonner, le cas échéant sous astreinte, les mesures qu'implique l'annulation, par le juge de l'excès de pouvoir, de la décision de préemption, il appartient au juge judiciaire, en cas de désaccord sur le prix auquel l'acquisition du bien doit être proposée, de fixer ce prix. Ces dispositions se sont appliquées immédiatement, s'agissant de la compétence du juge de l'expropriation, aux litiges en cours devant le juge de l'exécution lorsque le prix d'acquisition du bien n'avait pas encore été fixé par une décision juridictionnelle, quelle que soit la date du jugement dont l'exécution était poursuivie. (CE, 9 novembre 2018, n°410967).

5. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'annulation de la décision de préemption du 12 août 2011 par le jugement du tribunal administratif de Marseille du 30 mai 2013, l'EPF PACA a proposé à M. B..., par un courrier du 7 août 2014, d'acquérir le bien préempté au prix de 432 938, 66 euros, justifiant la différence de prix par rapport au montant de la vente initiale par des travaux de dépose de la toiture afin d'éviter que le bien ne soit irrégulièrement occupé. M. B..., qui conteste la nécessité de ces travaux, demande réparation du préjudice qu'il allègue avoir subi du fait de la faute qu'aurait commise l'EPF en ne lui proposant pas d'acquérir le bien à un prix correspondant au prix initial. Il résulte toutefois de l'instruction que M. B..., qui n'établit ni même n'allègue avoir saisi en temps utile le juge judiciaire, seul compétent pour connaître de ce désaccord sur le prix auquel l'acquisition du bien devait lui être proposée, a renoncé à acquérir le bien préempté. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à demander réparation de sa perte de chance de réaliser une plus-value, laquelle n'a pas pour origine directe et certaine la faute qu'aurait commise l'EPF PACA dans la fixation du prix d'acquisition, dont l'existence n'est au demeurant pas établie, mais la renonciation de l'intéressé à acquérir le bien préempté. Dans ces conditions, la demande indemnitaire qu'il a présenté à ce titre ne peut qu'être rejetée.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'EPF PACA qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une quelconque somme au titre des frais exposés par l'EPF PACA et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'EPF PACA au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur (EPF PACA).

Délibéré après l'audience du 30 mai 2022, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- Mme Balaresque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2022.

N°20MA00603 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00603
Date de la décision : 27/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Services de l'urbanisme.

Urbanisme et aménagement du territoire - Procédures d'intervention foncière - Préemption et réserves foncières - Droits de préemption - Droit de préemption urbain.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Claire BALARESQUE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : XOUAL

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-06-27;20ma00603 ?
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