Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision implicite, née le 28 mai 2019, par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 1903560 du 31 décembre 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 23 février 2022, Mme C..., représentée par Me Guigui, doit être regardée comme demandant à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 31 décembre 2021 ;
2°) d'annuler la décision implicite, née le 28 mai 2019, par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de " renouveler " son titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à venir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision litigieuse méconnaît l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ainsi que l'article 11 de l'avenant du 8 septembre 2000 à cet accord et le tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- cette décision ne respecte pas le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le tribunal a commis une erreur d'appréciation, de fait et de droit à cet égard ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et méconnaît la circulaire du ministère de l'intérieur du 28 novembre 2012.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante tunisienne née en 1970, est entrée en France le 12 mars 2012 munie d'un visa de long séjour portant la mention " vie privée et familiale " et valable jusqu'au 27 février 2013. Par un arrêté du 23 juillet suivant, devenu définitif, le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a notamment assorti ce refus d'une mesure d'éloignement. Mme C..., qui déclare s'être maintenue sur le territoire français par la suite, a, par une lettre du 22 janvier 2019, reçue le 28 janvier suivant, saisi le préfet des Alpes-Maritimes d'une demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour. Mme C... relève appel du jugement du 31 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du préfet des Alpes-Maritimes rejetant cette demande.
Sur la régularité du jugement :
2. Hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel.
3. Il résulte de ce qui vient d'être dit que Mme C... ne peut utilement se prévaloir des erreurs de fait, de droit ou d'appréciation commises, selon elle, par les premiers juges pour demander l'annulation du jugement attaqué.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. En premier lieu, d'une part, en vertu de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, dans sa rédaction résultant de l'avenant du 8 septembre 2000, sans préjudice des stipulations " du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ". Selon le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur à la date de la décision implicite en litige, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. D'autre part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Pour l'application de ces stipulations et dispositions, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
5. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... s'est mariée en Tunisie avec un ressortissant français en 2010 et qu'elle est entrée régulièrement en France au cours de l'année 2012, munie d'un visa de long séjour portant la mention " vie privée et familiale ". L'intéressée, qui déclare avoir été victime de violences commises par son époux et avoir été contrainte de quitter le domicile conjugal le 1er octobre suivant, produit le jugement de divorce rendu le 8 février 2016 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Toulon, lequel précise que les époux ont accepté le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de celle-ci. Si Mme C... soutient qu'elle résidait en France depuis plus de sept ans à la date de la décision litigieuse et argue de la présence de plusieurs membres de sa famille proche sur le territoire français, et en particulier de deux membres de sa fratrie, elle ne justifie pas de la réalité et de l'intensité des liens entretenus avec eux. La requérante n'établit pas, par les seules pièces qu'elle produit, avoir tissé des liens personnels stables sur le territoire français où elle ne justifie pas d'une intégration particulière. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C..., qui est célibataire et sans charge de famille en France, serait dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine dans lequel elle a vécu la majeure partie de sa vie, jusqu'à l'âge de quarante et un ans, et ce quand bien même ses parents y sont décédés en 2002 et 2009. Compte tenu notamment des conditions du séjour en France de l'intéressée rappelées au point 1, et en dépit de ses efforts d'insertion professionnelle, la décision implicite en litige ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas méconnu les stipulations et dispositions mentionnées au point précédent en refusant de lui délivrer un titre de séjour. Pour les mêmes raisons, il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle et familiale de Mme C....
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) ". Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée.
7. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions alors en vigueur de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit et il dispose à cette fin d'un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation. En revanche, les stipulations de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ne font pas obstacle à l'application, aux ressortissants tunisiens sollicitant leur admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale, des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en tant qu'elles prévoient la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".
8. Mme C... persiste à soutenir en appel que le préfet des Alpes-Maritimes a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions alors en vigueur de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En l'absence d'éléments nouveaux, il y a lieu d'écarter ce moyen, en ses deux branches, par adoption des motifs pertinents retenus au point 7 du jugement attaqué.
9. En troisième et dernier lieu, si Mme C... se prévaut de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, elle n'établit pas, en tout état de cause, remplir l'ensemble des critères énoncés dans cette circulaire.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Chazan, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Mouret, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2022.
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N° 22MA00670
hw