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23/06/2022 | FRANCE | N°21MA03225

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 23 juin 2022, 21MA03225


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches, M. et Mme B... I..., A... M... E... et M. J... de Vigan, M. et Mme F... C..., la société civile immobilière (SCI) Les Michaux et Mme G... K... épouse D... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2015 par lequel le maire de la commune de Bormes-les-Mimosas a délivré à M. L... H... un permis de construire afin d'édifier un immeuble collectif d'habitation comportant seize logements sur un lot d

étaché des parcelles cadastrées section AE n° 332 et n° 333 et situé au n° 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches, M. et Mme B... I..., A... M... E... et M. J... de Vigan, M. et Mme F... C..., la société civile immobilière (SCI) Les Michaux et Mme G... K... épouse D... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2015 par lequel le maire de la commune de Bormes-les-Mimosas a délivré à M. L... H... un permis de construire afin d'édifier un immeuble collectif d'habitation comportant seize logements sur un lot détaché des parcelles cadastrées section AE n° 332 et n° 333 et situé au n° 100 de la montée des Cactus.

Par un jugement n° 2001017 du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté et mis à la charge de M. H... une somme de 2 700 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 août 2021, M. H..., représenté par Me Hequet, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches et autres devant le tribunal administratif de Toulon ;

3°) de mettre à la charge du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches et autres la somme de 3 600 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a refusé de faire application des dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme dans le cas où il accueillerait le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UB 11 du règlement du plan local d'urbanisme, sans motiver ce refus ;

- la demande de première instance était tardive ;

- la division du terrain d'assiette ne nécessitait pas le dépôt d'une déclaration préalable ni ne constituait un lotissement devant être autorisé par un permis d'aménager ;

- le jugement du tribunal administratif de Toulon n° 1602708 du 30 avril 2019 est revêtu de l'autorité relative de la chose jugée ;

- il résulte de l'article R. 442-2 du code de l'urbanisme que l'indication dans la demande de permis de construire que le terrain est issu d'une division tient lieu de déclaration préalable de lotissement ;

- seules sont opposables à sa demande de permis de construire les dispositions d'urbanisme en vigueur à la date du certificat d'urbanisme tacite obtenu ;

- par application de l'article 10 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme, les articles 3 à 8 et 10 à 12 du règlement applicable au secteur UBb1 sont seuls opposables au permis du 21 décembre 2015, à l'exclusion des mêmes articles du règlement de la zone UC ;

- en l'absence de danger résultant de l'accès au projet, l'arrêté contesté ne méconnaît ni l'article UB 3 du règlement du PLU, ni l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- en tout état de cause, ce vice pourrait être régularisé sur le fondement des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

- compte tenu de la configuration des lieux, le plancher haut du garage souterrain ne peut être regardé comme dépassant le niveau du sol de sorte que les dispositions de l'article UB 6 relatives à l'implantation des constructions n'ont pas été méconnues ;

- l'article UB 11 n'interdit pas les toitures terrasses ;

- en tout état de cause, ce vice pourrait être régularisé sur le fondement des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

- appelé à la cause pour observations, il n'avait pas la qualité de partie en première instance de sorte qu'aucune somme ne pouvait être mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 novembre 2021, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches, ayant été désigné comme représentant unique en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, M. et Mme I..., A... E... et M. de Vigan, M. et Mme C..., la société civile immobilière (SCI) Les Michaux et Mme K... épouse D..., représentés par Me Lacroix, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. H... de la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par M. H... ne sont pas fondés.

Les parties ont été invitées à présenter leurs observations quant à l'application éventuelle des dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire, enregistré le 7 juin 2022, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches et autres exposent qu'aucun des vices affectant la légalité du permis de construire contesté n'est régularisable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

- les conclusions de Mme Gougot, rapporteure publique.

- et les observations de Me Humbert-Simeone, substituant Me Hequet, représentant M. H..., et de Me Lacroix, représentant le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches et autres.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 21 décembre 2015, le maire de Bormes-les-Mimosas a délivré à M. H... un permis de construire afin d'édifier un immeuble collectif d'habitation comportant seize logements sur un lot détaché des parcelles cadastrées section AE n° 332 et n° 333 et situé au n° 100 de la montée des Cactus. Satisfaisant à une demande formulée en ce sens par le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches et certains riverains, il a prononcé le retrait de ce permis par un arrêté du 17 mars 2016. M. H... a alors déposé une nouvelle demande portant sur un projet similaire à laquelle le maire a fait droit par un nouvel arrêté du 21 juillet 2016, avant de délivrer un permis modificatif par arrêté du 7 mars 2018. Par un jugement n° 1602708 du 30 avril 2019, devenu définitif par suite du rejet, par un arrêt de la Cour n° 19MA02836 du 30 janvier 2020, de l'appel formé par la commune, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 17 mars 2016. Statuant par ailleurs sur les demandes présentées par le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches et plusieurs particuliers tendant à l'annulation des arrêtés des 19 mai et 23 octobre 2015 par lesquels le maire de Bormes-les-Mimosas ne s'était pas opposé aux déclarations préalables de M. H... portant sur la division des parcelles cadastrées section AE n° 332 et n° 333 et des arrêtés du 21 juillet 2016 et du 7 mars 2018, le tribunal administratif de Toulon a, par un jugement n° 1603035, 1700177, 1802844 du 30 avril 2019 également, déclaré qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mai 2015, annulé les arrêtés des 21 juillet 2016 et 7 mars 2018 portant délivrance des permis de construire et permis de construire modificatif et les décisions implicites de rejet des recours gracieux correspondantes, et rejeté le surplus des demandes. Par un arrêt n° 19MA02968, 19MA02991 du 30 janvier 2020, la Cour a cependant annulé les arrêtés des 19 mai 2015 et 23 octobre 2015. M. H... relève appel du jugement du 25 mai 2021 par lequel ce même tribunal a, sur la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches et autres, annulé l'arrêté du 21 décembre 2015, rétabli du fait de l'annulation de l'arrêté du 17 mars 2016 qui en avait prononcé le retrait.

Sur la régularité du jugement :

2. Si M. H... soutient que le tribunal administratif n'a pas motivé son refus de faire application, comme il le demandait, des dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme dans le cas où il accueillerait le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UB 11 du règlement du plan local d'urbanisme, le jugement attaqué mentionne que " que, compte tenu de la nature des illégalités dont il est entaché, l'arrêté du 21 décembre 2015 délivrant un permis de construire à M. H... doit être annulé dans sa totalité, sans qu'il y ait lieu de mettre en œuvre les dispositions des articles L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ". Par suite, ce moyen manque en fait et M. H... n'est pas fondé à soutenir que ce jugement attaqué a été irrégulièrement rendu.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

3. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. ".

4. Lorsqu'un permis de construire est retiré et que ce retrait est annulé, le permis initial est rétabli à compter de la lecture de la décision juridictionnelle prononçant cette annulation. Pour les tiers à l'égard desquels il n'était pas encore expiré à la date du retrait, le délai de recours contentieux à l'encontre du permis ainsi rétabli court à nouveau à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain, postérieurement à cette annulation, des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme. Pour les tiers à l'égard desquels le délai de recours contentieux était expiré à la date du retrait, le rétablissement du permis illégalement retiré n'a pas pour effet de rouvrir ce délai.

5. Il résulte du motif énoncé au point 1 que le permis de construire délivré à M. H... le 21 décembre 2015 a été rétabli à compter du 30 avril 2019, date de lecture du jugement du tribunal administratif de Toulon, devenu définitif, qui a annulé l'arrêté du 17 mars 2016 qui avait retiré ce permis. Dès lors que la résidence Les Pierres Blanches et d'autres riverains avaient formé, à l'encontre de ce permis de construire, des recours gracieux reçus le 9 février 2016 et le 15 février 2016, alors que le délai de recours contentieux n'était pas expiré, le délai de recours contentieux à l'encontre de ce permis rétabli n'a pu courir à nouveau qu'à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain, postérieurement à cette annulation, des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme. Si M. H... soutient que l'affichage de ce permis s'est poursuivi depuis la période initiale suivant sa délivrance, il ne produit aucune pièce à l'appui de cette affirmation tandis qu'il résulte des photographies produites en défense que cet affichage a été modifié à plusieurs reprises pour tenir compte de la délivrance du permis de construire du 21 juillet 2016. Le requérant ne peut utilement exciper de la connaissance acquise par les intimés du permis de construire contesté. Dans ces conditions, le délai de recours ouvert à l'encontre du permis rétabli n'ayant pas recommencé à courir, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté opposée par M. H... sur le fondement du délai de deux mois prévu par l'article R. 421-5 du code de justice administrative doit être écartée, comme l'ont estimé les premiers juges.

6. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contesté indéfiniment par les tiers un permis de construire, une décision de non-opposition à une déclaration préalable, un permis d'aménager ou un permis de démolir. Dans le cas où l'affichage du permis ou de la déclaration, par ailleurs conforme aux prescriptions de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme, n'a pas fait courir le délai de recours de deux mois prévu à l'article R. 600-2, faute de mentionner ce délai conformément à l'article A. 424-17, un recours contentieux doit néanmoins, pour être recevable, être présenté dans un délai raisonnable à compter du premier jour de la période continue de deux mois d'affichage sur le terrain. En règle générale et sauf circonstance particulière dont se prévaudrait le requérant, un délai excédant un an ne peut être regardé comme raisonnable. Il résulte en outre de l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme qu'un recours présenté postérieurement à l'expiration du délai qu'il prévoit n'est pas recevable, alors même que le délai raisonnable mentionné ci-dessus n'aurait pas encore expiré.

7. Il résulte du motif énoncé au point 5 que l'affichage du permis contesté après son rétablissement et conformément aux prescriptions de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme n'est pas démontré. Ainsi, M. H... n'est pas fondé à soutenir que la demande de première instance n'a pas été présentée dans un délai raisonnable au regard du principe de sécurité juridique.

Sur la légalité de l'arrêté du 21 décembre 2015 :

En ce qui concerne le respect des dispositions relatives aux lotissements :

8. Aux termes de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme : " Constitue un lotissement la division en propriété ou en jouissance d'une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis ". Aux termes de l'article L. 442-1-1 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Un décret en Conseil d'Etat énumère les divisions en vue de construire qui, en fonction de leur objet particulier ou par suite de leur contrôle au titre d'une autre procédure, ne sont pas constitutives d'un lotissement au sens de l'article L. 442-1. ". Aux termes de l'article L. 442-2 du même code : " Un décret en Conseil d'Etat précise, en fonction de la localisation de l'opération ou du fait que l'opération comprend ou non la création de voies, d'espaces ou d'équipements communs, les cas dans lesquels la réalisation d'un lotissement doit être précédée d'un permis d'aménager. ". Aux termes de l'article L. 442-3 du même code : " Les lotissements qui ne sont pas soumis à la délivrance d'un permis d'aménager doivent faire l'objet d'une déclaration préalable ". L'article R. 442-1 de ce code dispose : " Ne constituent pas des lotissements au sens du présent titre et ne sont soumis ni à déclaration préalable ni à permis d'aménager : / a) Les divisions en propriété ou en jouissance effectuées par un propriétaire au profit de personnes qui ont obtenu un permis de construire ou d'aménager portant sur la création d'un groupe de bâtiments ou d'un immeuble autre qu'une maison individuelle au sens de l'article L. 231-1 du code de la construction et de l'habitation ; / b) Les divisions effectuées dans le cadre d'une opération de remembrement réalisée par une association foncière urbaine autorisée ou constituée d'office régie par le chapitre II du titre II du livre III ; (...) d) Les divisions de terrains effectuées conformément à un permis de construire prévu à l'article R. 431-24 ; / e) Les détachements de terrains supportant des bâtiments qui ne sont pas destinés à être démolis ; / f) Les détachements de terrain d'une propriété en vue d'un rattachement à une propriété contiguë ; (...). ". Aux termes de l'article R. 421-19 : " Doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager : / a) Les lotissements : / -qui prévoient la création ou l'aménagement de voies, d'espaces ou d'équipements communs à plusieurs lots destinés à être bâtis et propres au lotissement. Les équipements pris en compte sont les équipements dont la réalisation est à la charge du lotisseur ; / -ou qui sont situés dans un secteur sauvegardé, dans un site classé ou en instance de classement ; (...). ". Aux termes de l'article R. 421-23 : " Doivent être précédés d'une déclaration préalable les travaux, installations et aménagements suivants : / a) Les lotissements autres que ceux mentionnés au a de l'article R. 421-19 ; (...). ". Enfin, l'article R. 442-2 dispose : " Lorsqu'une construction est édifiée sur une partie d'une unité foncière qui a fait l'objet d'une division, la demande de permis de construire tient lieu de déclaration préalable de lotissement dès lors que la demande indique que le terrain est issu d'une division. ".

9. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme: " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique. ". Au nombre des dispositions, dont l'autorité qui délivre le permis de construire doit en vertu de ce texte assurer le respect, figurent celles qui concernent les lotissements. Il suit de là qu'un permis de construire ne peut être légalement délivré pour une construction à édifier sur un terrain compris dans un lotissement non autorisé ou autorisé dans des conditions irrégulières.

10. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet de construction autorisé par l'arrêté du 21 décembre 2015 s'étend sur une superficie totale de 1 516 m² recouvrant les parcelles cadastrées AE n° 332 et n° 333 après division, une surface de 77 m² étant détachée de la seconde et rattachée à la première, déjà bâtie, dont la surface était portée à 877 m² et une surface de 21 m² étant détachée de la première et rattachée à la seconde, ramenant ainsi sa surface à 618 m². Ainsi qu'il a été rappelé au point 1, cette opération de division a fait l'objet de deux déclarations préalables successives auxquelles le maire de Bormes-les-Mimosas ne s'est pas opposé par arrêtés du 19 mai 2015 et du 23 octobre 2015. Ces arrêtés considèrent que les déclarations portaient sur la création d'un lotissement de deux lots à bâtir, un lot A et B, surplus de propriété déjà bâtie d'une superficie de 877 m² et un lot C et D d'une superficie de 618 m² à bâtir. Si M. H... soutient que cette opération devait être regardée comme portant sur le détachement de terrain d'une propriété en vue d'un rattachement à une propriété contiguë au sens du f de l'article R. 442-1 du code de l'urbanisme et qu'ainsi, ne constituant pas un lotissement, elle n'était soumise ni à déclaration préalable ni à permis d'aménager, elle prévoyait, outre les deux rattachements décrits plus haut, l'implantation du bâtiment autorisé par le permis de construire contesté, sur les lots C et D correspondant à la parcelle cadastrée AE n° 333. Par suite, ce lotissement, qui n'entrait pas dans le champ d'application du a et du b de l'article R. 421-19 du même code et n'avait pas à être précédé d'un permis d'aménager, devait faire l'objet, à la date du 21 décembre 2015 à laquelle le permis de construire litigieux a été délivré, d'une déclaration préalable. En raison de l'annulation par le juge administratif, avec effet rétroactif, des arrêtés du 19 mai 2015 et du 23 octobre 2015 par lesquels le maire de Bormes-les-Mimosas ne s'était pas opposé aux déclarations préalables déposées par M. H..., ce lotissement n'était pas autorisé à cette date. Le requérant ne peut utilement exciper de ce que le permis de construire délivré à cette date tenait lieu de déclaration préalable de lotissement en application de l'article R. 442-2 du code de l'urbanisme dès lors que sa demande de permis du 24 septembre 2015 se référait expressément à la déclaration préalable qu'il venait de déposer et qu'il n'avait pas renseigné la rubrique prévue dans le formulaire de demande indiquant que le terrain était issu de la division d'une propriété bâtie. Il suit de là que le permis de construire délivré le 21 décembre 2015, qui autorisait une construction sur un terrain compris dans un lotissement non autorisé, ne pouvait être légalement délivré par le maire de Bormes-les-Mimosas.

En ce qui concerne le respect des dispositions du plan local d'urbanisme :

11. Il ressort des pièces du dossier que, le 8 septembre 2015, M. H... a, sur le fondement du b de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, déposé une demande de certificat d'urbanisme afin de savoir si l'opération de construction d'un immeuble collectif d'habitation sur les parcelles AE n° 332 et AE n° 333 était réalisable. En l'absence de réponse explicite, un certificat d'urbanisme tacite est intervenu le 8 octobre 2015, ouvrant à M. H..., en application de ces dispositions, le droit de voir sa demande de permis de construire déposée durant les dix-huit mois qui suivent, examinée au regard des dispositions d'urbanisme applicables à la date de ce certificat. Dès lors, seules sont opposables à sa demande de permis de construire, déposée le 24 septembre 2015, les dispositions d'urbanisme en vigueur au 8 octobre 2015, et notamment le plan local d'urbanisme de Bormes-les-Mimosas approuvé par la délibération du conseil municipal du 28 mars 2011, à l'exclusion des modifications issues de la délibération du 17 décembre 2015 relative à la modification n° 1 de ce document.

12. L'article 10 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme de Bormes-les-Mimosas dispose : " Propriétés concernées par plusieurs zonages de type urbain / Par exception, et sous réserve du respect des dispositions des articles 1 et 2 du règlement des zones ou secteurs concernés, en vue d'améliorer l'organisation des constructions, lorsqu'une propriété est l'objet de plusieurs zonages urbains, il peut être fait application à l'ensemble de la propriété du corps de règles de l'une seulement des zones ou secteurs concernés, sauf en ce qui concerne la détermination des possibilités maximales d'emprise au sol (article 9) et d'espaces libres (article 13). / Celles-ci sont obtenues par addition des possibilités partielles calculées sur chacune des zones ou secteurs à partir de leurs coefficients respectifs. ".

13. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est classé à cheval sur les secteurs UBb1 et UCa du plan local d'urbanisme de Bormes-les-Mimosas. En vertu de l'article 10 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme, dont le maire a fait application, les articles 3 à 8 et 10 à 12 du règlement applicable au secteur UBb1 sont seuls opposables au permis de construire contesté, à l'exclusion des mêmes articles du règlement de la zone UC.

14. En premier lieu, aux termes de l'article 3 UB du règlement du plan local d'urbanisme de Bormes-les-Mimosas : " Accès et voirie / 1. Les constructions doivent être desservies par des voies publiques ou privées dont les caractéristiques, telles qu'elles se présentent au moment de l'exécution du projet, soient conformes à leur destination et satisfassent les règles minimales de sécurité, telles que défense contre incendie, protection civile et brancardage. / 2. Les accès sur voies publiques doivent être aménagés de façon à éviter toute perturbation et tout danger pour la circulation générale (...) ".

15. Il ressort des pièces du dossier que la construction litigieuse, qui comporte seize logements et quatorze places de stationnement, est desservie par la montée des Cactus qui est une voie en forte pente, dont l'inclinaison est en moyenne de 9 %. La rampe d'une largeur de 3,5 à 4 mètres et d'une longueur de 5 mètres prévue entre cette voie et l'entrée du stationnement souterrain est également en pente et est en partie masquée depuis la montée des Cactus par le rocher situé au débouché de cet ouvrage sur la voie publique. Des places de stationnement sont en outre aménagées sur cette voie en face de cette rampe. La montée des Cactus est dépourvue de trottoir à cet endroit. Même si cette voie est en sens unique dans le sens de la montée et en dépit de l'installation possible d'un dispositif lumineux informant les usagers de la sortie d'un véhicule, les conditions d'accès ainsi prévues par le projet ne répondent pas aux exigences de sécurité résultant de l'article 3 UB du règlement du plan local d'urbanisme.

16. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 du règlement de la zone UB du plan local d'urbanisme : " Implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques (...) / 5. En bordure des autres voies ouvertes à la circulation automobile non indiquées au document graphique, les constructions devront être implantées à une distance minimum de 5,00 mètres de la limite d'emprise (...) ". En l'absence de disposition particulière relative aux constructions entièrement enterrées, ces dispositions qui fixent les règles d'implantation des constructions par rapport à l'alignement existant ou projeté, dont l'objet est lié à des préoccupations d'hygiène, d'urbanisme et de protection du voisinage, ne s'appliquent pas à la partie souterraine d'un bâtiment qui ne dépasse pas le niveau du sol naturel.

17. Il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit l'implantation de la façade est de la construction à une distance de 5 mètres par rapport à l'alignement de la voie publique. Il comporte également la construction, après travaux d'excavation, d'un garage souterrain s'étendant jusqu'à la limite de la voie publique et fermé par un mur longeant le côté nord de la rampe d'accès puis la montée des Cactus. Si les plans de coupe joints à la demande de permis de construire représentent le niveau du terrain naturel à une altitude supérieure à celle du plafond haut de ce garage et qu'il en est de même du plan des façades et des toitures PC5, l'altitude du terrain naturel est mesurée sur ce dernier plan au pied de la façade. En réalité et du fait de la forte pente du terrain et de la montée des Cactus, ce plancher haut du garage souterrain dépasse largement le niveau du terrain naturel, jusqu'à 1,70 mètre de hauteur pour la partie qui jouxte la rampe d'accès. Contrairement à ce que soutient M. H..., le mur extérieur du garage souterrain ne peut être regardé ni comme assurant le soutènement des terres, ni comme un mur de clôture au sens de l'article 11 du règlement de la zone UB du plan local d'urbanisme. Par suite, le permis de construire délivré le 21 décembre 2015 méconnaît également les dispositions de l'article 6 UB du règlement du plan local d'urbanisme.

18. En troisième lieu, aux termes de l'article 11 UB du règlement du plan local d'urbanisme de Bormes-les-Mimosas : " Aspect extérieur des constructions / (...) 2. Dispositions particulières / (...) 2.6. Les toitures / Les toitures peuvent être à une ou plusieurs pentes n'excédant pas 30% et recouvertes de tuiles rondes "canal". / Les toitures terrasses sont autorisées sur les bâtiments annexes édifiés en limite séparative et doivent être inaccessibles (...) ".

19. Il résulte clairement de ces dispositions qu'elles n'autorisent les toitures terrasses que sur les bâtiments annexes. Il ressort du plan de masse annexé à la demande de permis de construire que l'unique bâtiment projeté est couvert partiellement au nord par une toiture-terrasse. Ainsi, le permis de construire contesté méconnaît le paragraphe 2.6 de l'article 11 UB du règlement du plan local d'urbanisme.

Sur l'application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

20. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé. ". Aux termes de l'article L. 600-5-1 du même code : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".

21. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires ayant précédé l'adoption de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, que lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée, sont susceptibles d'être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation. Il invite au préalable les parties à présenter leurs observations sur la possibilité de régulariser le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme. Le juge n'est toutefois pas tenu de surseoir à statuer, d'une part, si les conditions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme sont réunies et qu'il fait le choix d'y recourir, d'autre part, si le bénéficiaire de l'autorisation lui a indiqué qu'il ne souhaitait pas bénéficier d'une mesure de régularisation. Un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.

22. Dans la mesure où aucun permis de construire ne peut être délivré sur un terrain compris dans un lotissement non autorisé, l'illégalité tenant à l'absence de déclaration préalable de division ne peut être regardée comme un vice susceptible de faire l'objet d'une mesure de régularisation en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ou d'une annulation partielle en application de l'article L. 600-5 du même code. Pour ce seul motif, la demande de M. H... tendant à l'application de ces dispositions ne peut qu'être rejetée.

23. Il résulte de tout ce qui précède que M. H... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

24. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

25. D'une part, doit être regardée comme une partie à l'instance la personne qui a été invitée par la juridiction à présenter des observations et qui, si elle ne l'avait pas été, aurait eu qualité pour former tierce opposition contre cette décision. En première instance, M. H... a été invité à présenter des observations en sa qualité de pétitionnaire du permis de construire dont les intimés demandaient l'annulation. A défaut, il aurait eu qualité pour former tierce opposition au jugement faisant droit à cette demande. Ainsi, il n'est pas fondé à soutenir qu'il n'avait pas la qualité de partie au litige devant le tribunal administratif et qu'aucune somme ne pouvait être mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

26. D'autre part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches et autres, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. H... demande au titre des frais exposés par lui en appel et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. H... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés en appel par le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches et autres et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. H... est rejetée.

Article 2 : M. H... versera au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches et autres une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. L... H... et au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Pierres Blanches, représentant unique des défendeurs.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2022, où siégeaient :

- M. Chazan, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2022.

N° 21MA03225 2

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03225
Date de la décision : 23/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Légalité interne du permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : HEQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-06-23;21ma03225 ?
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