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23/06/2022 | FRANCE | N°21MA03035

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 23 juin 2022, 21MA03035


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 25 avril 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, ainsi que la décision du 29 avril 2021 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 25 avril 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, ainsi que la décision du 29 avril 2021 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2103749, 2103822 du 6 mai 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2021, M. C..., représenté par Me Carmier, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille du 6 mai 2021 ;

2°) d'annuler les décisions des 25 et 29 avril 2021 par lesquelles le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du dépôt d'un dossier de demande de titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est entachée d'une erreur de droit et méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation et méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberté fondamentales et les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision portant refus de délai de départ :

- la décision est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberté fondamentales et les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- la décision est illégale ;

En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :

- la décision est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision est entachée d'une erreur de droit ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberté fondamentales.

La procédure a été régulièrement communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. C... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 juin 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien, relève appel du jugement du 6 mai 2021 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions des 25 et 29 avril 2021 par lesquelles le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour de étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...). ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., conjoint d'une ressortissante française, est père d'une enfant de nationalité française née le 5 juillet 2020. Les pièces produites, notamment les attestations d'amis et de voisins, l'attestation très détaillée de sa compagne, la reconnaissance de paternité, l'attestation d'hébergement de sa belle-mère, indiquant héberger M. C..., sa compagne et leur fille à son domicile situé avenue Raimu à Marseille, et les factures libellées à cette adresse, à laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a d'ailleurs assigné M. C... à résidence, démontrent que celui-ci réside de manière ininterrompue au même domicile que l'enfant et sa mère depuis la naissance de l'enfant. M. C... doit dès lors être regardé, en raison de la communauté de vie avec sa fille, comme contribuant à l'entretien et à l'éducation de celle-ci. Dans ces conditions, il est fondé à soutenir que le préfet a méconnu les dispositions précitées en l'obligeant à quitter le territoire français.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête, et à demander l'annulation du jugement en litige et de la décision du 25 avril 2021 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français, et par voie de conséquence, l'annulation des décisions des 25 et 29 avril 2021 par lesquelles le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. Le présent arrêt implique nécessairement qu'une autorisation provisoire de séjour soit délivrée à M. C..., conformément aux dispositions de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile valable pendant la durée du réexamen de sa situation par le préfet des Bouches-du-Rhône. Il y a lieu, dès lors, de lui enjoindre de lui délivrer cette autorisation dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

6. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Carmier, avocat de M. C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Carmier de la somme de 1 500 euros.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille du 6 mai 2021 est annulé.

Article 2 : Les décisions des 25 et 29 avril 2021 par lesquelles le préfet des Bouches-du-Rhône a obligé M. C... à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. C... dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'État versera à Me Carmier une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Me Carmier et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Marseille.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2022 où siégeaient :

- M. Chazan, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- Mme Baizet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2022.

2

N° 21MA03035


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03035
Date de la décision : 23/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: Mme Elisabeth BAIZET
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : CARMIER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-06-23;21ma03035 ?
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