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21/06/2022 | FRANCE | N°21MA04167

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 21 juin 2022, 21MA04167


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 1er avril 2021 A... lequel la préfète des Hautes-Alpes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

A... un jugement n° 2103763 du 21 septembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

A... une requête enregistrée le 19 octobre 2021, M

. C..., représenté A...

Me Amafroi-Broisat, demande à la Cour :

1°) d'annuler de jugement du 21 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 1er avril 2021 A... lequel la préfète des Hautes-Alpes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

A... un jugement n° 2103763 du 21 septembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

A... une requête enregistrée le 19 octobre 2021, M. C..., représenté A...

Me Amafroi-Broisat, demande à la Cour :

1°) d'annuler de jugement du 21 septembre 2021 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er avril 2021 de la préfète des Hautes-Alpes ;

3°) d'enjoindre à la préfète des Hautes-Alpes de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros A... jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 400 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier faute pour le tribunal d'avoir visé et analysé son mémoire complémentaire et quatre pièces complémentaires ; il est entaché de dénaturation matérielle des faits ;

Sur le refus de titre de séjour :

- son auteur est incompétent pour signer la décision contestée ;

- la décision est insuffisamment motivée ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est méconnu ;

- les articles 7, 8 et 9 de la convention internationale des droits de l'enfant est méconnu ;

- l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant est méconnu ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision est illégale A... voie de conséquence de celle du refus de délivrance du titre de séjour ;

- son auteur est incompétent pour signer la décision contestée ;

- elle est entachée d'erreur manifeste de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision accordant un délai volontaire de trente jours :

- le délai accordé de trente jours pour quitter la France est manifestement trop court eu égard à sa situation familiale.

A... un mémoire enregistré le 28 janvier 2002, la préfète des Hautes-Alpes conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens de M. C... sont infondés.

Une ordonnance du 24 février 2022 a fixé la clôture de l'instruction au 25 avril 2022 à 12 heures.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale A... une décision du 26 novembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., né le 8 juillet 1972, de nationalité russe et d'origine tchétchène, qui déclare être entré en France le 5 septembre 2011 avec son épouse également de nationalité russe et d'origine tchétchène, et leur enfant né le 18 octobre 2010 aux Pays-Bas, alors que deux enfants sont nés le 23 mars 2012 et le 23 mai 2014 à Gap, a été débouté de l'asile A... une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du

16 septembre 2013, qui a été confirmée A... une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 4 mars 2014. Ces refus ont été réitérés A... les mêmes instances, sur demande de réexamen, le 15 septembre 2014, le 21 juillet 2015 et le 21 décembre 2016, pour l'OFPRA, et le 4 mars 2014, 21 juillet 2015 et 31 mai 2017 pour la CNDA. M. C... a fait l'objet d'un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français le 5 novembre 2015, ainsi que d'une obligation de quitter le territoire français sans délai assortie d'une interdiction de retour en France d'un an du 23 novembre 2017, qui a été confirmée A... une décision n° 1703568 du

20 décembre 2017 du tribunal administratif de Nîmes, confirmée A... un arrêt n° 18MA02366 du 11 février 2019 de la présente Cour. Après l'avis défavorable du 22 décembre 2020 de la commission du titre de séjour sur la demande du 5 février 2019 de M. C... de son admission exceptionnelle au séjour au titre de sa vie privée et familiale, la préfète des Hautes-Alpes a pris à l'encontre de l'intéressé un nouvel arrêté du 1er avril 2021 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et fixation du pays d'éloignement. M. C... relève appel du jugement du 21 septembre 2021 du tribunal administratif de Marseille qui rejette sa requête dirigée contre cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. D'une part, il résulte de l'examen du jugement attaqué que celui-ci vise le mémoire complémentaire présenté le 27 août 2021 A... le requérant représenté A... Me Amafroi-Broisat. Et, contrairement à ce que soutient l'intéressé, les premiers juges n'ont pas omis de répondre à ses dernières écritures. A... ailleurs, les pièces complémentaires versées au dossier A... M. C... sont réputées visées dans les visas du jugement attaqué contesté à la ligne " autres pièces du dossier ". A... suite, M. C... n'est pas fondée à soutenir que le jugement contesté est entaché d'irrégularité.

3. D'autre part, il appartient au juge d'appel non d'apprécier au titre de la régularité du jugement attaqué le bien-fondé des motifs A... lesquels le tribunal s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. C... ne peut donc utilement se prévaloir de la dénaturation des faits que les premiers juges auraient commise pour contester la régularité du jugement attaqué.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre :

4. En premier lieu, comme il a été dit A... les premiers juges, l'arrêté attaqué est signé A... M. Cédric Verline, secrétaire général de la préfecture des Hautes-Alpes, qui disposait d'une délégation de signature de la préfète en date du 31 août 2020, accessible tant au juge qu'aux parties, l'autorisant à signer toute décision en lieu et place de la préfète à l'exception des réquisitions de la force armée, des arrêtés de conflit et déclinatoires de compétence et de la réquisition du comptable, publié au recueil administratif spécial n° 05-2020-178 du même jour. A... suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté doit être écarté.

5. En deuxième lieu, la décision contestée comporte dans ses visas et motifs toutes les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Plus particulièrement, la décision contestée mentionne la situation familiale et personnelle de l'intéressé, les conditions de son séjour en France, et comporte l'appréciation de l'administration sur celles-ci, lui permettant ainsi de connaître les motifs du refus qui lui est opposé et de contester la décision attaquée. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que cette décision est insuffisamment motivée.

6. En troisième lieu, pour refuser le renouvellement du titre litigieux, la préfète des Hautes-Alpes s'est notamment fondée sur le motif tiré de la menace pour l'ordre public que constitue la présence de M. C... sur le territoire national.

7. En l'espèce, M. C... a fait l'objet de plusieurs condamnations pénales A... le tribunal correctionnel de Gap, les 6 novembre et 20 novembre 2014 pour des faits de conduite sans permis et sous l'empire d'un état alcoolique, et A... la Cour d'appel de Grenoble le

27 juin 2016 pour usage de faux documents administratifs. M. C... fait valoir que la préfète des Hautes-Alpes a commis une erreur de fait en considérant qu'il a été écroué alors qu'il a bénéficié d'un aménagement de peine A... le juge d'application. Toutefois, il ne remet pas en cause le fait d'avoir été écroué à la maison d'arrêt de Gap pour conduite en état alcoolique, puis placé en détention à domicile sous surveillance électronique le 19 mai 2020 et libéré le

18 février 2021. Ainsi, il ne conteste pas avoir fait l'objet d'une peine de privation de liberté alors même que l'exécution de cette peine a été aménagée. A... suite, il n'établit pas l'erreur de fait dont il se prévaut, qui en tout état de cause était insusceptible d'entraîner, pour ce seul motif, l'annulation de l'arrêté attaqué. En outre, le requérant a fait l'objet de deux mesures d'éloignement du 5 novembre 2015 et du 23 novembre 2017, auxquelles il n'a pas déféré. Dans ces conditions, eu égard à la nature, à l'importance, et à la persistance de faits de récidives de délits routiers, et usage de faux document administratif, la préfète des Hautes-Alpes n'a commis aucune erreur de droit ou d'appréciation en retenant que M. C... représentait une menace à l'ordre public à la date du 1er avril 2021 de l'arrêté attaqué.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue A... la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

9. M. C... soutient avoir fixé le centre de ses intérêts personnels et familiaux auprès de son épouse, dont il ne justifie que d'un mariage religieux, qui réside régulièrement en France à la date de l'arrêté attaqué, et de ses trois enfants nés respectivement en 2010 aux

Pays-Bas, et en 2012 et 2014 en France. Cependant, alors que le droit au respect de la vie privée et familiale ne saurait s'interpréter comme comportant, pour un Etat, l'obligation générale de respecter le choix, pour un couple marié, d'établir sa résidence sur son territoire, l'intéressé ne fait état d'aucun obstacle majeur l'empêchant de reconstituer sa cellule familiale en Russie, pays dont l'ensemble de la famille a la nationalité. En outre, aucun élément du dossier ne fait obstacle à ce que ses enfants puissent poursuivre leur scolarité dans le pays dont ils ont la nationalité. A... ailleurs, comme il a été dit ci-dessus, M. C... n'a pas déféré à deux mesures d'éloignement et il a fait l'objet de plusieurs condamnations pénales. Enfin, l'intéressé ne démontre pas qu'il serait dépourvu de toute attache familiale en Russie, où il a vécu la plus grande partie de son existence. En produisant une promesse d'embauche et une lettre de recommandation d'une association qui œuvre pour le maintien et l'accès au logement des personnes défavorisées, fragiles et vulnérables, l'intéressé qui ne dispose d'aucune ressource, et dont l'avis de la commission du titre de séjour du 22 décembre 2020 précité indique qu'il ne justifie pas de la maîtrise élémentaire de la langue française, ne peut se prévaloir d'aucune insertion socio-économique. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

10. En cinquième lieu, comme l'ont indiqué les premiers juges, les stipulations des articles 7, 8 et 9 de la convention internationale des droits de l'enfant ne produisent pas d'effet direct à l'égard des particuliers, et ne peuvent, A... suite, être utilement invoqués A... M. C... à l'appui de son recours.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

11. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour pour contester la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

12. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9 s'agissant de la décision de refus de séjour, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'en édictant la mesure d'éloignement en litige, la préfète des Hautes-Alpes aurait commis une erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ :

13. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) ".

14. D'une part, en l'espèce, l'administration a accordé le délai de trente jours prévu A... les dispositions précitées. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... aurait présenté une demande de prolongation ou informé la préfète d'éléments suffisamment précis sur sa situation personnelle susceptibles de rendre nécessaire, au sens des dispositions précitées, une telle prolongation. La préfète n'avait donc pas à rechercher s'il y avait lieu de lui accorder un tel délai.

15. D'autre part, si M. C... invoque sa durée de présence en France et la scolarisation de ses enfants, il résulte de ce qui a été dit au point 9 qu'en n'accordant pas, au vu de ces éléments, un délai de départ supérieur à trente jours, la préfète des Hautes-Alpes n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

16. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins d'annulation présentées A... M. C... doivent être rejetées

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

17. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées A... M. C... n'appelle aucune mesure d'exécution. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent, A... suite, qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. C... de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète des Hautes-Alpes.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2022, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Ury, premier conseiller.

Rendu public A... mise à disposition au greffe le 21 juin 2022.

N° 21MA041672


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA04167
Date de la décision : 21/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Didier URY
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : AMAFROI-BROISAT;AMAFROI-BROISAT;CHARTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-06-21;21ma04167 ?
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