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10/05/2022 | FRANCE | N°21MA01330

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 10 mai 2022, 21MA01330


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F..., Mme B... F... et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler le certificat d'urbanisme du 17 avril 2019 par lequel le maire de Salazac a déclaré que l'opération qu'ils envisageaient sur des parcelles cadastrées section AB nos 299, 394, 396 et 399, situées lieudit la Laubarède Nord, n'était pas réalisable et d'enjoindre au maire de réinstruire leur demande de certificat d'urbanisme.

Par le jugement n° 1902193 du 23 février 2021, le tribunal administratif d

e Nîmes a, dans l'article 1er de ce jugement, annulé l'arrêté du 17 avril 2019 dé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F..., Mme B... F... et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler le certificat d'urbanisme du 17 avril 2019 par lequel le maire de Salazac a déclaré que l'opération qu'ils envisageaient sur des parcelles cadastrées section AB nos 299, 394, 396 et 399, situées lieudit la Laubarède Nord, n'était pas réalisable et d'enjoindre au maire de réinstruire leur demande de certificat d'urbanisme.

Par le jugement n° 1902193 du 23 février 2021, le tribunal administratif de Nîmes a, dans l'article 1er de ce jugement, annulé l'arrêté du 17 avril 2019 délivré par le maire de Salazac en tant qu'il mentionne dans son article 4 que ce terrain se situe dans une zone de risque d'effondrement minier, et par l'article 2 du jugement, rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er avril 2021, M. F..., Mme F... et Mme A..., représentés par la SELARL d'avocats Favre de Thierrens-Barnouin-Vrignaud-Mazars-Drimaracci, demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement du 23 février 2021 du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;

2°) d'annuler dans son entier le certificat d'urbanisme du 17 avril 2019 du maire de Salazac ;

3°) d'enjoindre au maire de Salazac de réexaminer leur demande de certificat d'urbanisme dans le délai d'un mois à compter du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Salazac la somme de 3 000 euros à leur verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement a été rendu au terme d'une procédure irrégulière dès lors que les premiers juges étaient tenus de rouvrir l'instruction pour tenir compte de l'étude hydraulique qui a été réalisée à leur demande postérieurement à la clôture d'instruction ;

- le terrain d'assiette du projet n'est pas exposé à un aléa modéré de ruissellement au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- l'étude Excezo (extraction des zones de concentration des écoulements) réalisée en 2011 sur laquelle se fonde la commune est dépourvue de valeur normative et ne peut pas porter interdiction de créer des annexes supérieures à 20 m² d'emprise au sol, qui n'est pas prévue par le règlement du PLU de la zone ;

- le projet ne peut pas aggraver ce risque de ruissellement ;

- c'est la commune qui crée des ruissellements par un défaut d'entretien des caniveaux de la voie communale dans l'ensemble du quartier ;

- par l'effet dévolutif, la décision litigieuse, qui ne vise ni le courrier de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) du Languedoc-Roussillon, ni le rapport de la société Géodoris, méconnaît les dispositions de l'article A. 410-3 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 avril 2022, la commune de Salazac, représentée par la SELARL d'avocats Gil-Cros-Crespy, conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que la Cour prononce un non-lieu à statuer sur la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des requérants la somme de 1 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- à titre principal, les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, elle a délivré le 5 avril 2022 un certificat d'urbanisme déclarant réalisable l'opération projetée par les requérants ;

- la modestie du budget annuel communal fait obstacle au paiement de frais irrépétibles aux requérants, qui ont introduit plusieurs contentieux contre la commune.

Un mémoire a été enregistré le 22 avril 2022, présenté pour les requérants, et non communiqué en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la Cour a décidé, par décision du 24 août 2021, de désigner M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 11 février 2019, Mme B... F... a déposé en mairie de Salazac une demande de certificat d'urbanisme opérationnel portant sur la construction d'une piscine avec abri, d'un local chaufferie surmonté d'une chambre et d'un garage, sur des parcelles cadastrées section AB nos 299 et 399, situées lieudit la Laubarède Nord. Par la décision en litige du 17 avril 2019, le maire de Salazac a déclaré cette opération non réalisable. Les consorts F..., propriétaires du terrain d'assiette du projet, ont demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de cette décision. Par l'article 1er du jugement attaqué, les premiers juges ont annulé le certificat d'urbanisme divisible du 17 avril 2019 du maire de Salazac en tant seulement qu'il mentionne que ce terrain se situe dans une zone de risque d'effondrement minier et, par l'article 2, rejeté le surplus de leur demande. Les consorts F... relèvent appel de l'article 2 de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Les premiers juges, pour annuler l'article 4 de la décision divisible litigieuse, ont estimé que le terrain d'assiette du projet n'était pas situé dans une zone minière d'effondrement localisé d'aléa moyen, ce que la commune ne conteste pas en appel, mais ont accueilli la demande de substitution de motifs de la commune tirée de ce que le projet méconnaît les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, en raison de la situation du terrain en zone inondable par ruissellement d'aléa modéré.

3. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations " Les risques d'atteinte à la sécurité publique visés par ce texte sont aussi bien les risques auxquels peuvent être exposés les occupants de la construction pour laquelle le permis est sollicité que ceux que l'opération projetée peut engendrer pour des tiers. Pour apprécier si les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire ou d'un certificat d'urbanisme négatif sur le fondement des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, il appartient à l'autorité compétente en matière d'urbanisme, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.

4. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe sur le versant est du ruisseau du Broucaou, au bord de ce ruisseau qu'il surplombe d'une hauteur variant de 4 m à 7 m. Le secteur n'est pas classé en zone inondable par un plan de prévention des risques d'inondation. La commune de Salazac fait néanmoins valoir que le terrain d'assiette du projet est situé en zone inondable par ruissellement des eaux pluviales d'aléa modéré (M) selon la cartographie réalisée par le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) intitulée " étude Exzéco " réalisée à large échelle pour l'ensemble du département du Gard en 2011, qui, si elle ne présente pas de caractère réglementaire, peut servir d'élément d'information au maire pour apprécier le risque d'atteinte à la sécurité publique par le projet de construction litigieux. Toutefois, il ressort de l'étude hydraulique précise et détaillée réalisée par la société Hydrosol Ingenierie en janvier 2021 à la demande des requérants à l'échelle précise de leur propriété que, pour une crue de référence centennale, le terrain est hors zone inondable par débordement du cours d'eau du Broucaou en limite ouest du terrain des requérants et hors zone inondable par ruissellement sur le bassin versant est intercepté par la propriété, dès lors que les eaux de ruissellement amont sont en totalité captées par le caniveau à grille mis en place par les requérants à l'entrée de leur terrain et qu'aucun trop-plein ne déborde sur la propriété. Cette étude, produite par les requérants postérieurement à la clôture d'instruction ordonnée par les premiers juges et non contestée par la commune, est de nature à remettre en cause le classement par l'étude Exzéco du terrain en zone inondable par ruissellement des eaux pluviales d'aléa modéré et à établir que le terrain d'assiette n'est pas situé en zone inondable d'aléa modéré par ruissellement des eaux pluviales. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation du terrain d'assiette au regard du risque inondation a changé entre la décision en litige et cette étude. Dès lors, le projet de construction d'une piscine avec abri, d'un local chaufferie surmonté d'une chambre ainsi que d'un garage ne peuvent augmenter le risque d'inondation pour les occupants et pour les tiers et porter ainsi atteinte à la sécurité publique. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le maire de Salazac pouvait, sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R .111-2 du code de l'urbanisme, délivrer un certificat d'urbanisme négatif aux consorts F....

5. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît susceptible de fonder, en l'état du dossier, l'annulation de la décision en litige.

6. Par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer, ni sur l'exception de non-lieu opposée à titre subsidiaire par la commune de Salazac, ni sur la régularité du jugement attaqué, les consorts F... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté le surplus de leur demande tendant à l'annulation totale de la décision en litige. Il y a lieu d'annuler l'article 2 du jugement du 23 février 2021 du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande, ainsi que le certificat d'urbanisme négatif du 17 avril 2019 du maire de Salazac dans son intégralité.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".

8. Il résulte de l'instruction que le maire de Salazac a délivré le 5 avril 2022 un certificat d'urbanisme déclarant réalisable l'opération projetée par les consorts F.... Par suite, les conclusions des requérants aux fins d'enjoindre au maire de réexaminer leur demande de certificat d'urbanisme sous conditions de délai et d'astreinte sont devenues sans objet et doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge des consorts F..., qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par la commune de Salazac et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Salazac la somme de 1 000 euros à verser aux consorts F... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1 : L'article 2 du jugement du 23 février 2021 du tribunal administratif de Nîmes est annulé.

Article 2 : Le certificat d'urbanisme négatif du 17 avril 2019 du maire de Salazac est annulé dans son intégralité.

Article 3 : La commune de Salazac versera la somme de 1 000 euros aux consorts F... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... F..., à Mme B... F..., à Mme C... A... et à la commune de Salazac.

Copie en sera adressée au procureur de la République près du tribunal judiciaire de Nîmes.

Délibéré après l'audience du 3 mai 2022, où siégeaient :

- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Carassic, première conseillère,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 10 mai 2022.

2

N° 21MA01330


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01330
Date de la décision : 10/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025 Urbanisme et aménagement du territoire. - Certificat d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : ELEOM NIMES

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-05-10;21ma01330 ?
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