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02/05/2022 | FRANCE | N°20MA01783

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 02 mai 2022, 20MA01783


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal de Nice d'annuler la décision du 23 octobre 2017 le plaçant en cellule disciplinaire à titre préventif et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1704777 du 19 mars 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 mai 202

0, M. B..., représenté par Me Lendom, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal de Nice d'annuler la décision du 23 octobre 2017 le plaçant en cellule disciplinaire à titre préventif et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1704777 du 19 mars 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 mai 2020, M. B..., représenté par Me Lendom, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 mars 2020 du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler la décision du 23 octobre 2017 le plaçant en cellule disciplinaire à titre préventif ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision est signée d'une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

²

La requête a été communiquée au garde des sceaux, ministre de la justice qui n'a pas produit d'observations.

M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par décision du 10 juillet 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de procédure pénale ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marcovici,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.

Une note en délibéré a été enregistrée le 22 avril 2022 pour le garde des sceaux, ministre de la justice.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., incarcéré à la maison d'arrêt de Grasse, a fait l'objet d'un compte-rendu d'incident pour avoir, le 23 octobre 2017, refusé de se soumettre à la fouille de retour d'extraction judiciaire et avoir eu à cette occasion une altercation avec le surveillant, à l'encontre duquel il a tenu des propos outrageants. Afin de mettre un terme à l'incident, M. B... a été immédiatement placé à titre préventif en cellule disciplinaire. Il relève appel du jugement du 19 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.

2. Aux termes de l'article R. 57-7-18 du code de procédure pénale, dans sa rédaction alors applicable : " Le chef d'établissement ou son délégataire peut, à titre préventif et sans attendre la réunion de la commission de discipline, décider le confinement en cellule individuelle ordinaire ou le placement en cellule disciplinaire d'une personne détenue, si les faits constituent une faute du premier ou du deuxième degré et si la mesure est l'unique moyen de mettre fin à la faute ou de préserver l'ordre à l'intérieur de l'établissement (...) ". Aux termes de l'article R. 57-7-2 du même code : " Constitue une faute disciplinaire du deuxième degré le fait, pour une personne détenue : 1° De formuler des insultes, des menaces ou des outrages à l'encontre d'un membre du personnel de l'établissement, d'une personne en mission ou en visite au sein de l'établissement pénitentiaire ou des autorités administratives ou judiciaires ".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'occasion d'un retour d'extraction judiciaire, le 23 octobre 2017, M. B... a fait l'objet d'une fouille intégrale motivée par le risque qu'il dissimule un objet illicite. M. B..., à cette occasion, a proféré des menaces à l'égard du surveillant chargé de la fouille et tenu à son encontre des propos outrageants accompagnés d'un geste obscène. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport d'expertise psychiatrique du 4 novembre 2017 établi pour des faits de vol et d'outrage commis le 27 septembre 2017 à la demande du juge pénal par un médecin psychiatre, expert près la cour d'appel d'Aix-en-Provence que M. B... souffre d'un trouble bipolaire depuis une vingtaine d'années, qui a conduit à des hospitalisations d'office dans le passé et à des rechutes, que le risque de comportements asociaux est avéré et que la détention est inadaptée à son cas. L'expert ajoute que l'intéressé n'étant plus suivi et ne prenant plus aucun traitement était sous l'influence d'un état hypomaniaque d'excitation psychique et présentait une pathologie psychiatrique actuelle de nature à pouvoir comporter un risque imminent de troubles à l'ordre public par des comportements asociaux éventuellement agressifs. En conséquence, le tribunal correctionnel de Grasse a, le 6 novembre 2017, déclaré M. B... " irresponsable pénalement " et a ordonné son admission en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète. Dans ces conditions, si les faits que lui reproche l'administration pénitentiaire, contemporains de l'examen réalisé par l'expert judiciaire, étaient susceptibles de constituer une faute disciplinaire du deuxième degré, l'état de santé psychiatrique de M. B... le rendait inaccessible à la punition qui lui a été infligée, qui en conséquence ne peut qu'être annulée.

4. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Sur les frais du litige :

5. Dans les circonstances de l'espèce, M. B... étant admis à l'aide juridictionnelle totale, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros, à verser à Me Lendom, le versement de cette somme valant renonciation à l'aide juridictionnelle sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 19 mars 2020 et la décision du 23 octobre 2017 plaçant M. B... en cellule disciplinaire à titre préventif sont annulés.

Article 2 : Il est mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à Me Lendom, ce versement valant renonciation à l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Lendom et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2022, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- M. Merenne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 mai 2022.

2

N° 20MA01783


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA01783
Date de la décision : 02/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Juridictions administratives et judiciaires - Exécution des jugements - Exécution des peines.

Juridictions administratives et judiciaires - Exécution des jugements - Exécution des peines - Service public pénitentiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : LENDOM ROSANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-05-02;20ma01783 ?
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