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28/04/2022 | FRANCE | N°21MA01295

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 28 avril 2022, 21MA01295


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 11 décembre 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Ventabren a approuvé le plan local d'urbanisme et à titre subsidiaire d'annuler ladite délibération en tant qu'elle classe la parcelle cadastrée BC 1 en zone agricole

Par un jugement n° 1802227 du 1er février 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémo

ires complémentaires enregistrés les 1er avril et 20 septembre 2021, 17 et 18 janvier 2022, la,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 11 décembre 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Ventabren a approuvé le plan local d'urbanisme et à titre subsidiaire d'annuler ladite délibération en tant qu'elle classe la parcelle cadastrée BC 1 en zone agricole

Par un jugement n° 1802227 du 1er février 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 1er avril et 20 septembre 2021, 17 et 18 janvier 2022, la, représentée par Me Samourcachian, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er février 2021 ;

2°) d'annuler la délibération du 11 décembre 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Ventabren a approuvé le plan local d'urbanisme, et à titre subsidiaire d'annuler ladite délibération en tant qu'elle classe la parcelle cadastrée BC 1 en zone agricole ;

3°) de mettre à la charge de tout succombant la somme de 1 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la note de synthèse est insuffisante au regard de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ;

- le classement de la parcelle BC 1 en zone agricole est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement de la parcelle BC 1 en zone agricole est incohérent avec le diagnostic " emploi-économie " du rapport de présentation ainsi qu'avec l'orientation 3.4 du projet d'aménagement et de développement durables ;

- le classement de la parcelle BC 1 en zone agricole porte atteinte au principe général de la liberté du commerce et de l'industrie, à la liberté d'entreprendre et démontre une rupture d'égalité.

Par des mémoires en défense enregistrés les 18 août et 30 décembre 2021, la Métropole Aix-Marseille-Provence, représentée par Me Passet, conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce qu'il soit sursis à statuer en application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme dans l'attente d'une régularisation, et à ce que soit mise à la charge de la SCI la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens d'appel sont infondés.

Par une lettre du 17 mars 2022 les parties ont été informées de ce que la Cour était susceptible de mettre en œuvre la procédure prévue par l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme et les invitait à présenter leurs observations sur ce point.

Des observations en réponse ont été présentées par la Métropole Aix-Marseille-Provence le 29 mars 2022 et par la SCI le 2 avril 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Gougot, rapporteure publique,

- et les observations de Me Samourcachian pour la SCI et de Me Beluch substituant Me Passet pour la Métropole Aix-Marseille-Provence.

Une note en délibéré présentée pour la Métropole Aix-Marseille-Provence a été enregistrée le 12 avril 2022.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI relève appel du jugement du 1er février 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 11 décembre 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Ventabren a approuvé le plan local d'urbanisme et, à titre subsidiaire, à l'annulation de ladite délibération en tant qu'elle classe la parcelle cadastrée BC 1 en zone agricole.

Sur la régularité du jugement :

2. Si la société appelante soutient que le tribunal administratif a omis d'examiner le moyen tiré de ce que le classement en zone A de la parcelle BC 1 n'était pas cohérent avec l'orientation n° 3.4 du projet d'aménagement et de développement durables et le diagnostic " emploi-économie ", un tel moyen manque en fait dès lors que les premiers juges ont répondu à ce moyen au point n° 8 du jugement en litige.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales dispose que : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. (...) ". Le défaut d'envoi, avec la convocation aux réunions du conseil municipal d'une commune de 3 500 habitants et plus, de la note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour prévue à l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.

4. Il ressort des pièces du dossier que, préalablement à la séance du conseil municipal de Ventabren du 11 décembre 2017 lors de laquelle le plan local d'urbanisme a été approuvé, les membres du conseil ont été destinataires d'un projet de délibération valant note de synthèse, ne comportant aucune information sur les objectifs poursuivis, les avis des personnes publiques associées, les résultats de l'enquête publique ou les principales modifications devant être apportées au projet. Toutefois ce projet de délibération était accompagné en annexe d'un tableau détaillant les modifications apportées à la suite des observations recueillies lors de l'enquête publique et des avis des personnes publiques associées. En outre, comme le fait valoir la métropole, qui est désormais l'autorité compétente en matière de plan local d'urbanisme, le conseil municipal de Ventabren avait, dans la même composition, délibéré moins d'un an auparavant, le 31 janvier 2017, sur le projet de plan local d'urbanisme arrêté. Préalablement à cette séance, les membres avaient reçu une information suffisante sur les étapes de la procédure, les objectifs poursuivis et les modalités de la concertation. Si aucune pièce du dossier n'établit que les membres du conseil municipal aient été informés des réserves et recommandations émises par le commissaire enquêteur, il ressort des pièces du dossier que ces réserves et recommandations étaient mineures et reprenaient les observations du public ou les avis des diverses personnes publiques associées, auxquels ont eu accès les conseillers. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu au demeurant de la taille limitée de la commune, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la délibération litigieuse a été approuvée à l'issue d'une procédure irrégulière.

5. En deuxième lieu et d'une part, aux termes du premier alinéa du VI de l'article 12 du décret du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre Ier du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme : " Les dispositions des articles R. 123-1 à R. 123-14 du code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2015 restent applicables aux plans locaux d'urbanisme dont l'élaboration, la révision, la modification ou la mise en compatibilité a été engagée avant le 1er janvier 2016. Toutefois, dans les cas d'une élaboration ou d'une révision prescrite sur le fondement du I de l'article L. 123-13 en vigueur avant le 31 décembre 2015, le conseil communautaire ou le conseil municipal peut décider que sera applicable au document l'ensemble des articles R. 151-1 à R. 151-55 du code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur à compter du 1er janvier 2016, par une délibération expresse qui intervient au plus tard lorsque le projet est arrêté (...) ". La révision du plan local d'urbanisme de la commune de Ventabren a été décidée par une délibération de son conseil municipal du 27 mars 2013. Dès lors, en application de ces dispositions et en l'absence au dossier de délibération expresse du conseil municipal optant pour l'application des articles R. 151-1 à R. 151-55 du code de l'urbanisme, les dispositions des articles R. 123-1 à R. 123-14 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2015, sont restées applicables au plan local d'urbanisme adopté par la délibération attaquée du 11 décembre 2017.

6. D'autre part, aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme dans sa version applicable au litige : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ". Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des divers secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, et ne sont pas non plus tenus, pour fixer le zonage, de respecter les limites des propriétés. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

7. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation et du projet d'aménagement et de développement durables (PADD), que les auteurs du plan local d'urbanisme ont prévu, notamment, une orientation n° 1 visant à " préserver l'environnement naturel et agricole garant du cadre de vie ", en proposant un zonage cohérent avec l'occupation du sol de manière à préserver les espaces naturels et en sanctuarisant les grandes unités paysagères notamment agricoles. L'objectif 1.3 visant à redynamiser l'activité agricole prévoit de préserver les espace agricoles en limitant l'extension urbaine. Egalement, l'orientation n° 2 visant à assurer un développent urbain équilibré, rappelle l'objectif de la commune de " maîtriser la tache urbaine ", en " confortant les polarités " et en " définissant des limites franches à l'urbanisation ". La parcelle cadastrée BC 1 appartenant à la SCI, précédemment classée en zone agricole, est située en plein cœur d'une vaste zone agricole que la commune s'est donnée pour objectif de protéger. Elle est nettement séparée et éloignée de l'urbanisation existante de la commune, située plus à l'ouest au-delà de l'autoroute A 8. Si la parcelle elle-même est artificialisée, supportant une activité industrielle, et ne présente aucun potentiel agricole ou agronomique, sa situation au cœur de la zone agricole correspond parfaitement au parti d'urbanisme de la commune et à la volonté de protection de la zone agricole et de maîtrise de l'étalement urbain. La circonstance qu'un tel classement empêcherait le développement des activités présentes sur la parcelle est sans incidence sur la légalité du classement opéré. Au vu des caractéristiques de la parcelle et du parti d'urbanisme, et quand bien même le commissaire enquêteur avait proposé de définir un zonage permettant l'extension mesurée des bâtiments existants, les auteurs du plan local d'urbanisme n'ont pas commis une erreur manifeste d'appréciation en classant la parcelle en zone agricole.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 123-3 du code de l'urbanisme dans sa version applicable : " Le projet d'aménagement et de développement durable définit, dans le respect des objectifs et des principes énoncés aux articles L. 110 et L. 121-1, les orientations d'urbanisme et d'aménagement retenues par la commune, notamment en vue de favoriser le renouvellement urbain et de préserver la qualité architecturale et l'environnement (...). ". Aux termes de l'article R. 123-4 du même code alors applicable : " Le règlement délimite les zones urbaines, les zones à urbaniser, les zones agricoles et les zones naturelles et forestières. Il fixe les règles applicables à l'intérieur de chacune de ces zones dans les conditions prévues à l'article R. 123-9. ". Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

9. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 7, le classement en zone agricole de la parcelle BC 1 correspond aux orientations 1 et 2 du projet d'aménagement et de développement durables, visant d'une part à préserver l'environnement naturel et agricole garant du cadre de vie, en proposant un zonage cohérent avec l'occupation du sol et en sanctuarisant les grandes unités paysagères notamment agricoles, et d'autre part à assurer un développement urbain équilibré en " maîtrisant la tache urbaine ", en " confortant les polarités " et en " définissant des limites franches à l'urbanisation ". Si le PADD comporte également une orientation 3.4 visant à soutenir l'économie locale, et si le rapport de présentation, qui constate un ralentissement du rythme des créations d'emploi, rappelle la volonté de conforter les activités existantes, le seul classement en zone agricole de la parcelle BC 1 supportant une activité industrielle n'est pas, au regard des autres objectifs précités, de nature à démontrer une incohérence avec les objectifs et orientations du document d'urbanisme.

10. En quatrième lieu, il est de la nature de toute réglementation d'urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes ainsi que des zones inconstructibles. Dès lors que le classement de la parcelle en litige en zone agricole n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et répond au parti d'urbanisme de la commune, il ne saurait constituer une rupture d'égalité ou entraîner une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l'industrie, à la liberté d'entreprendre ou au droit de propriété, nonobstant la circonstance que le classement contesté empêcherait la SCI Brin de Vent de se développer.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Brin de Vent n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement et de la délibération en litige.

Sur les frais liés au litige :

12. La Métropole Aix-Marseille-Provence n'étant pas partie perdante à la présente instance, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par la SCI sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la SCI la somme de 2 000 euros à verser à la Métropole Aix-Marseille-Provence sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI est rejetée.

Article 2 : La SCI versera la somme de 2 000 euros à la Métropole Aix-Marseille-Provence sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI et à la Métropole Aix-Marseille-Provence.

Copie en sera adressé pour information à la commune de Ventabren.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2022 où siégeaient :

- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- Mme Baizet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 avril 2022.

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N° 21MA01295

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