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29/03/2022 | FRANCE | N°20MA00510

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 29 mars 2022, 20MA00510


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Holding Imbert a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 14 février 2018 par lequel le maire de Castries s'est opposé à la déclaration préalable qu'elle avait déposée pour le changement de destination d'une partie du Mas de Rou.

Par un jugement n° 1801878 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 février 2020 et par un mémoire complém

entaire enregistré le 29 novembre 2021, la société Holding Imbert, représentée par la SCP d'avocats B...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Holding Imbert a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 14 février 2018 par lequel le maire de Castries s'est opposé à la déclaration préalable qu'elle avait déposée pour le changement de destination d'une partie du Mas de Rou.

Par un jugement n° 1801878 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 février 2020 et par un mémoire complémentaire enregistré le 29 novembre 2021, la société Holding Imbert, représentée par la SCP d'avocats Bedel de Buzareignes-Boillot et associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 décembre 2019 du tribunal administratif de Montpellier;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 février 2018 du maire de Castries ;

3°) d'enjoindre à la commune de Castries de prendre une décision de non-opposition à déclaration préalable ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Castries la somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision en litige méconnaît l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme, dès lors que seuls les locaux accessoires au bâtiment principal sont à usage d'habitation, qu'ils doivent être réputés avoir la même destination que le local principal anciennement à usage agricole et que la partie à usage d'habitation n'est en outre pas concernée par les travaux litigieux ;

- la destination agricole du bâtiment principal s'étant perdue par son non-usage par l'effet du temps, le maire ne pouvait se fonder sur l'usage initial agricole du Mas de Riou pour estimer que les travaux litigieux changeaient la destination agricole du bâtiment, en méconnaissance de l'article 2 du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme de la commune ;

- les travaux litigieux sont étrangers au règlement de la zone A applicable en secteur Ap, qui ne mentionne pas les activités commerciales, qui sont donc autorisées.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 avril 2020, la commune de Castries, représentée par la SELARL d'avocats Valette-Berthelsen, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société requérante la somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- elle demande une substitution de motifs de la décision en litige, dès lors que les travaux litigieux ne pouvaient, en tout état de cause, être autorisés au regard des articles 1 et 2 du règlement du plan local d'urbanisme, qui interdisent les constructions à destination d'activités commerciales dans cette zone.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la Cour a décidé, par décision du 24 août 2021, de désigner M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carassic,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me Boillot représentant la société Holding Imbert et Me Fürstenheim représentant la commune de Castries.

Considérant ce qui suit :

1. La société Holding Imbert, qui a acquis en décembre 2011 la propriété du Mas de Rou, composée d'une maison avec dépendances, de caves, bergerie, remises, cour, piscine et terrains attenants d'une superficie totale d'environ 32 000 m2, situé la plaine du mas de Rou sur le territoire de la commune de Castries, a déposé le 19 janvier 2018 auprès de la mairie de cette commune une déclaration préalable de travaux en vue d'aménager le site. Par l'arrêté en litige du 14 février 2018, le maire de Castries s'est opposé à cette déclaration préalable. La société requérante a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de cette décision. Par le jugement dont la société relève appel, les premiers juges ont rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Pour s'opposer à la déclaration préalable de travaux de la société requérante par la décision en litige, le maire de Castries a estimé que le projet d'aménagement du Mas de Rou, situé en zone Ap, constitue un changement de destination partiel d'un mas agricole et que l'article A2 du règlement de zone interdit les changements de destination d'un bâtiment existant.

3. D'une part, aux termes de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme : " Sont soumis à permis de construire les travaux suivants, exécutés sur des constructions existantes, à l'exception des travaux d'entretien ou de réparations ordinaires : (...)c) Les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s'accompagnent d'un changement de destination entre les différentes destinations et sous-destinations définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28 (...). Pour l'application du c du présent article, les locaux accessoires d'un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal. ". Aux termes de l'article R. 151-27 de ce code : " Les destinations de constructions sont :1° Exploitation agricole et forestière ;2° Habitation ;3° Commerce et activités de service ;4° Equipements d'intérêt collectif et services publics ;5° Autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire ".

4. D'autre part, le règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Castries définit la zone A comme une zone à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. Elle comprend un secteur Ap sur lequel toute construction nouvelle est interdite (hors constructions et installations nécessaires aux service public et d'intérêt collectif) en raison de la qualité agronomique des terres et de leur sensibilité paysagère. L'article A1 du règlement interdit notamment en zone A les constructions à destination d'activités commerciales et les constructions à usage d'entrepôts, exception faite des entrepôts agricoles. L'article A2 du règlement autorise notamment en secteur Ap les travaux d'entretien courant, de réhabilitation et de rénovation des bâtiments existants, sans extension ni changement de destination.

5. Si l'usage d'une construction résulte en principe de la destination figurant à son permis de construire, lorsqu'une construction, en raison de son ancienneté, a été édifiée sans permis de construire et que son usage initial a depuis longtemps cessé en raison de son abandon, l'administration, saisie d'une demande d'autorisation de construire, ne peut légalement fonder sa décision sur l'usage initial de la construction. Il lui incombe d'examiner si, compte tenu de l'usage qu'impliquent les travaux pour lesquels une autorisation est demandée, celle-ci peut être légalement accordée sur le fondement des règles d'urbanisme applicables.

6. Il ressort des pièces du dossier de la déclaration préalable déposée par la société requérante que les travaux en litige, qui consistent, sur une partie des bâtiments existants du Mas de Rou, en la création d'une salle polyvalente, de vestiaires, d'espaces détente et traiteur pour aménager une " salle polyvalente " permettant la réception du public pour des évènements, relèvent de la destination " commerce et activités de service " au sens du 3° de l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme, ce que la société requérante ne conteste d'ailleurs pas et que le Mas de Rou n'a jamais eu la nature d'une construction à destination commerciale, ce que la société requérante ne conteste plus en appel. Par suite, c'est à bon droit que le maire de la commune a estimé que les travaux litigieux s'accompagnaient d'un changement de destination d'une partie du bâtiment existant. Dès lors, l'article A2 du règlement s'oppose aux travaux litigieux d'aménagement du bâtiment existant, quelle que soit la destination initiale ou actuelle d'une aile du mas du Rou et quelle que soit la destination des locaux principaux et accessoires. Par suite, le maire de Castries a pu à bon droit estimer que le projet litigieux ne respecte pas l'article A2 du règlement du PLU de la commune et s'opposer pour ce motif à la déclaration préalable déposée par la société requérante.

7. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de procéder à la substitution de motif demandée par la commune, que la société Holding Imbert n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'enjoindre au maire de prendre une décision de non-opposition à sa déclaration préalable doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Castries, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par la société Holding Imbert et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Holding Imbert la somme de 2 000 euros à verser à la commune de Castries sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Holding Imbert est rejetée.

Article 2 : La société Holding Imbert versera la somme de 2 000 euros à la commune de Castries sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Holding Imbert et à la commune de Castries.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2022, où siégeaient :

- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Carassic, première conseillère,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.

2

N° 20MA00510


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA00510
Date de la décision : 29/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-045 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses. - Régimes de déclaration préalable.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP N. BEDEL DE BUZAREINGUES G. BOILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-03-29;20ma00510 ?
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