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22/03/2022 | FRANCE | N°21MA04403

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 22 mars 2022, 21MA04403


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 15 avril 2021 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de sa destination, et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2103372 du 12 juillet 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enre

gistrée le 16 novembre 2021, M. B..., représenté par

Me Boustelitane, demande à la Cour :

1°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 15 avril 2021 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de sa destination, et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2103372 du 12 juillet 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 novembre 2021, M. B..., représenté par

Me Boustelitane, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 12 juillet 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 15 avril 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, un récépissé l'autorisant à travailler, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué méconnait les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle en ce qu'il n'a pas pris en compte sa durée de résidence sur le territoire français depuis plus de dix ans ;

- il méconnait les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en portant à son droit au respect de la vie privée une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris et méconnait les termes de la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'elle prescrit que l'admission exceptionnelle au séjour est ouverte aux parents résidant en France depuis plus de 5 ans et ayant au moins un enfant scolarisé depuis 3 ans ;

- la décision portant refus de délai de départ volontaire est illégale car fondée sur une obligation de quitter le territoire français elle-même illégale ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en le privant de la possibilité de bénéficier d'un délai de départ volontaire et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle en ce qu'elle ne tient pas compte des circonstances de fait propres à sa situation ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de

deux ans est illégale car fondée sur une obligation de quitter le territoire français elle-même illégale ;

- elle méconnait les termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du

1er octobre 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M.Badie.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant turc, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 15 avril 2021 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de sa destination, et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

2. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date où l'arrêté attaqué a été pris : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention étudiant ".

3. Si M. B..., entré clandestinement sur le territoire, soutient qu'il réside en France depuis 2002, soit depuis dix-neuf ans, et qu'il ne peut, dès lors, faire l'objet d'une mesure d'éloignement, il ne rapporte, au mieux, la preuve de sa présence en France que depuis 2009.

Il démontre, toutefois, depuis au moins cette date, une présence continue sur le territoire français, en produisant l'ensemble de ses avis d'imposition, quittances de loyer et factures EDF et en fournissant divers bulletins de salaires, des attestations destinées à Pôle emploi, et des documents émanant d'organismes publics tels que la caisse d'assurance maladie ou la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône. Dans ces conditions, l'intéressé, qui doit être regardé comme résidant, à la date de l'arrêté attaqué, en France depuis plus de dix ans, est fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet des Bouches-du-Rhône a pris, à son encontre, une obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 4° de

l'article L. 511-4 de code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être accueilli à l'encontre de la mesure d'éloignement dont le requérant a fait l'objet. Il y a lieu, dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille et l'arrêté du 15 avril 2021 du préfet des Bouches-du-Rhône.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

4. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique que le préfet des Bouches-du-Rhône procède au réexamen de la situation de M. B..., dans un délai de

deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et qu'il le munisse, dans l'attente d'une nouvelle décision, dans le délai d'un mois, d'une autorisation provisoire de séjour. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

4. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à Me Boustelitane, conseil de M. B... sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 12 juillet 2021 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 15 avril 2021 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder au réexamen de la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de le munir, dans l'attente d'une nouvelle décision, d'une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Boustelitane, conseil de M. B... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Boustelitane, au préfet des Bouches-du-Rhône et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2022, où siégeaient :

- M. Badie, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Ury, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 22 mars 2022.

2

N° 21MA04403


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA04403
Date de la décision : 22/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Alexandre BADIE
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : BOUSTELITANE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-03-22;21ma04403 ?
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