La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/03/2022 | FRANCE | N°20MA02881

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 21 mars 2022, 20MA02881


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 5 septembre 2019 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé d'admettre son époux au bénéfice du regroupement familial.

Par un jugement n° 1904612 du 24 juin 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et trois mémoires, enregistrés les 10 août, 15 novembre et 16 novembre 2020 et le 15 mai 2021, Mme C..., représentée

par Me Le Gars, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 juin 2020 du tribunal admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 5 septembre 2019 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé d'admettre son époux au bénéfice du regroupement familial.

Par un jugement n° 1904612 du 24 juin 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et trois mémoires, enregistrés les 10 août, 15 novembre et 16 novembre 2020 et le 15 mai 2021, Mme C..., représentée par Me Le Gars, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 juin 2020 du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler la décision du 5 septembre 2019 du préfet des Alpes-Maritimes ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de lui délivrer l'autorisation demandée, ou, à défaut de réexaminer sa demande et de délivrer dans l'attente à M. D... une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de trente jours à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à Me Le Gars sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

A... soutient que :

- la décision contestée est entachée d'erreur de droit, dès lors qu'elle se réfère à tort à une ordonnance du 2 mai 2019 ;

- A... méconnaît l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du 2 mai 2019 ayant annulé une précédente décision de refus de regroupement familial ;

- A... n'a pas reçu le courrier du 23 mai 2019 l'invitant à produire des pièces justifiant de sa situation ;

- le préfet a cru à tort être tenu de rejeter la demande de regroupement familial au profit d'un membre de famille résidant sur le territoire français ;

- A... est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- A... méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- A... méconnaît le premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- A... méconnaît la circulaire du 28 novembre 2012 sur les critères d'admission exceptionnelle au séjour.

La clôture de l'instruction a été fixée au 18 juin 2021 par une ordonnance du 19 avril 2021.

Un mémoire en défense a été enregistré pour le préfet des Alpes-Maritimes le 10 février 2022.

Mme C... épouse D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Mérenne a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante tunisienne, fait appel du jugement du 24 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 septembre 2019 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé d'admettre son époux au bénéfice du regroupement familial.

2. Par un jugement n° 1804707 du 2 mai 2019, le même tribunal avait annulé le précédent refus de regroupement familial opposé à Mme C... par le même préfet, et lui avait enjoint de procéder au réexamen de la demande de l'intéressée. En indiquant maintenir sa décision et en refusant, par suite, de faire droit à sa demande, le préfet a exécuté cette injonction sans méconnaître l'autorité de la chose jugée. Par ailleurs, la circonstance que le préfet ait mentionné à tort ce jugement comme une ordonnance du juge des référés, par une phrase qui ne procède pas des motifs de la décision contestée, est sans incidence sur sa légalité.

3. L'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. (...) / 2° Le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique ". L'article L. 411-6 du même code prévoit en outre que " Peut être exclu du regroupement familial : (...) 3° Un membre de la famille résidant en France. "

4. Contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Nice, le préfet des Alpes-Maritimes, par la décision du 5 septembre 2019, ne s'est pas fondé sur le fait que l'époux de Mme C... résidait en France, mais sur le fait qu'elle ne justifiait pas de ressources stables et suffisantes et d'un logement décent, sur le fondement des 1° et 2° des articles L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit en s'estimant à tort être tenu de rejeter la demande de regroupement familial au profit d'un membre de famille résidant sur le territoire français est inopérant.

5. Si Mme C... fait valoir qu'elle n'a pas reçu le courrier du 23 mai 2019 du préfet l'invitant à produire les pièces mentionnées au paragraphe ci-dessus, le préfet ne s'est pas fondé sur le fait que la demande était incomplète, mais sur le fait que l'intéressée ne justifiait pas répondre aux conditions posées aux 1° et 2° de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il est constant que Mme C... ne répond pas à ces conditions. Par suite, le préfet des Alpes-Maritimes pouvait légalement lui opposer le fait qu'elle ne disposait pas de ressources suffisantes et d'un logement décent conformément à ces dispositions, et, compte tenu du fait que son époux résidait en France, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de l'admettre au bénéfice du regroupement familial.

6. Mme C... a épousé M. D..., également ressortissant tunisien, le 21 janvier 2017. De leur union sont nés deux enfants le 17 janvier 2018 et le 23 mars 2019. La décision préfectorale contestée est relative au seul regroupement familial de l'époux, et non des enfants. A... n'a pas pour objet ou pour effet de séparer la cellule familiale. La seule circonstance qu'elle fasse obstacle à l'accès de leur père au marché de l'emploi ne suffit pas pour la regarder comme méconnaissant le droit au respect de la vie privée et familiale de la demandeuse, ou l'intérêt supérieur de l'enfant. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.

7. Enfin et en tout état de cause, la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 concerne, comme son intitulé l'indique, les conditions d'admission au séjour, et non celles du regroupement familial.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

9. L'Etat, qui n'est pas tenu aux dépens, n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font en conséquence obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par Mme C... sur leur fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... épouse D..., à Me Le Gars et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 28 février 2022, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- M. Mérenne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2022.

2

No 20MA02881


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02881
Date de la décision : 21/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : LE GARS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-03-21;20ma02881 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award