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17/03/2022 | FRANCE | N°21MA01787

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 17 mars 2022, 21MA01787


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 10 mars 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être reconduit d'office et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2102208 du 16 avril 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Mars

eille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 10 mars 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être reconduit d'office et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2102208 du 16 avril 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 mai 2021, M. C..., représenté par Me Harutyunyan, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 avril 2021 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 mars 2021 du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer sa situation administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

- le jugement attaqué ne vise pas l'ensemble des productions des parties, en particulier le le mémoire en défense produit par le préfet et son propre mémoire en réplique ;

- le tribunal administratif a omis de répondre aux moyens tirés de ce qu'il n'était pas justifié de la compétence de l'auteur de l'acte, de l'erreur de fait, de l'erreur manifeste d'appréciation et de l'atteinte disproportionnée à son droit au respect à sa vie privée et familiale ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

- dès lors qu'il réside habituellement en France depuis plus de trois ans, qu'il exerce une activité salariée et qu'il a fixé en France le centre de ses intérêts privés et familiaux, il remplissait les conditions pour être admis au séjour sur le fondement des articles 6, 7 et 7 bis de l'accord franco-algérien et ne pouvait donc être éloigné ;

- elle méconnait l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision portant refus de délai de départ volontaire :

- le préfet, qui a mentionné à tort qu'il était entré en France irrégulièrement et qu'il ne disposait pas d'une adresse fixe, a entaché sa décision d'erreurs de fait ou à tout le moins d'erreurs d'appréciation ;

- cette décision méconnait l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnait l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête de M. C... a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur avant le 1er mai 2021 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sanson,

- et les observations de Me Harutyunyan, représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien né le 26 février 1985, relève appel du jugement du 16 avril 2021 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 10 mars 2021 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office et l'interdisant de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte de l'examen du jugement attaqué que le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a omis de viser le mémoire présenté par le préfet des Bouches-du-Rhône le 25 mars 2021 en réponse à la demande de M. C.... Il n'a pas davantage visé le mémoire en réplique de ce dernier, enregistré le 9 avril 2021, et n'a pas répondu au moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte que le requérant a repris dans ce mémoire. M. C... est donc fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen d'irrégularité qu'il soulève, à demander l'annulation du jugement attaqué.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer directement sur la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Marseille.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 10 mars 2021 :

En ce qui concerne les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. D... B..., signataire de l'arrêté contesté, bénéficiait en sa qualité de chef du bureau de l'éloignement, du contentieux et de l'asile à la préfecture des Bouches-du-Rhône, par un arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 11 février 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 13-20210-02-11-001 du même jour, d'une délégation à l'effet de signer les décisions en matière d'obligation de quitter le territoire français et celles relatives au délai de départ volontaire.

5. En deuxième lieu, il ressort de l'examen de l'arrêté contesté que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. C....

6. En troisième lieu, M. C..., célibataire et sans charges de famille, ne démontre pas, par les pièces qu'il produit, résider habituellement depuis une durée significative en France, où il ne peut se prévaloir d'aucune attache familiale ainsi qu'il l'a déclaré au cours de son audition devant les services de police. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien : " a) Les ressortissants algériens qui justifient de moyens d'existence suffisants et qui prennent l'engagement de n'exercer, en France, aucune activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent après le contrôle médical d'usage un certificat valable un an renouvelable et portant la mention " visiteur " (...) / Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent, s'ils justifient l'avoir obtenue, un certificat de résidence valable un an renouvelable et portant la mention de cette activité ; (...) e) Les ressortissants algériens autorisés à exercer à titre temporaire, en application de la législation française, une activité salariée chez un employeur déterminé, reçoivent un certificat de résidence portant la mention " travailleur temporaire ", faisant référence à l'autorisation provisoire de travail dont ils bénéficient et de même durée de validité ; ". L'article 9 de cet accord dispose : " Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des article (...) 7 (...), les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises (...) ". Enfin, aux termes de l'article 7 bis du même accord : " Les ressortissants algériens visés à l'article 7 peuvent obtenir un certificat de résidence de dix ans s'ils justifient d'une résidence ininterrompue en France de trois années. ".

8. M. C..., qui est entré sur le territoire français muni d'un visa Schengen trente jours, et non d'un visa long séjour, et ne justifie pas d'une autorisation de travail, n'entre dans les prévisions ni du a), ni du c), ni du e) de l'article 7 de l'accord franco-algérien. Il ne peut, dès lors, invoquer ni cet article, ni, par voie de conséquence, l'article 7 bis de ce même accord.

En ce qui concerne la décision portant refus de délai de départ volontaire :

9. En premier lieu, en vertu du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de la décision contestée, l'autorité administrative peut décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français, en particulier si cet étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, s'il s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa, s'il ne présente pas de garanties de représentation suffisantes,

notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité ou ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale, ou s'il a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français.

10. Si M. C... soutient être entré régulièrement sur le territoire national et justifier d'une adresse de résidence effective et permanente, il ressort de la motivation de l'arrêté du 10 mars 2021 que la décision litigieuse est également fondée sur les circonstances que l'intéressé n'a pas présenté de passeport en cours de validité, s'est maintenu en France au-delà de la durée de validité de son visa et a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français. Dans ces conditions, et alors qu'il ressort du mémoire en défense que le préfet aurait pris la même décision qu'il ne s'était fondé que sur ces motifs de fait, les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur d'appréciation doivent être écartés.

11. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 du présent arrêt, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

12. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 du présent arrêt, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

13. En second lieu, en se bornant à rappeler la durée de sa présence alléguée sur le territoire français et à faire état de l'absence de poursuite pénale à son encontre ou de précédente mesure d'éloignement, M. C... ne justifie d'aucune circonstance humanitaire, au sens du 2ème alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, justifiant que ne soit pas prononcée à son encontre d'interdiction de retour. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit, par suite, être écarté.

14. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 10 mars 2021. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2102208 du 16 avril 2021 du magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : La demande de M. C... devant le tribunal administratif de Marseille ainsi que le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 24 février 2022, où siégeaient :

- M. Alfonsi, président,

- Mme Massé-Degois, présidente assesseure,

- M. Sanson, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mars 2022.

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No 21MA01787

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01787
Date de la décision : 17/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Pierre SANSON
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : HARUTYUNYAN

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-03-17;21ma01787 ?
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