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15/03/2022 | FRANCE | N°21MA00223

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 15 mars 2022, 21MA00223


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association pour la protection du patrimoine et la qualité de vie à Aujargues , M. et Y... F... et U... A..., Y... B... W..., M. et Y... H... et N... P..., T... K..., V... E..., M. et Y... Q... et X..., S... R..., O... I... et M. J... D... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 3 décembre 2018 par laquelle le conseil municipal d'Aujargues a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, ensemble la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire sur

leur recours gracieux du 15 mars 2019 tendant au retrait de cette délibé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association pour la protection du patrimoine et la qualité de vie à Aujargues , M. et Y... F... et U... A..., Y... B... W..., M. et Y... H... et N... P..., T... K..., V... E..., M. et Y... Q... et X..., S... R..., O... I... et M. J... D... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 3 décembre 2018 par laquelle le conseil municipal d'Aujargues a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, ensemble la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire sur leur recours gracieux du 15 mars 2019 tendant au retrait de cette délibération.

Par un jugement n° 1901434 du 17 novembre 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 janvier 2021, l'association pour la protection du patrimoine et la qualité de vie à Aujargues, Y... B... W..., M. et Y... H... et N... P..., T... K..., V... E..., M. et Y... Q... et X..., S... R... et O... I..., représentés par la SCP d'avocats Bedel de Buzareingues-Boillot, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du17 novembre 2020 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler la délibération du 3 décembre 2018 du conseil municipal d'Aujargues, ensemble la décision implicite de rejet du maire de leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Aujargues la somme de 5 000 euros à leur verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les premiers juges ont omis de statuer ou ont analysé de manière erronée le moyen opérant tiré de ce que le classement en zone 2AU du secteur Grand Jardin par le plan local d'urbanisme de la commune est entaché d'erreur manifeste d'appréciation du fait de sa contradiction avec les orientations du SCOT Sud Gard ;

- ils ont insuffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de l'importance du pourcentage du secteur ouvert à l'urbanisation dans l'intérêt direct du maire, de ses proches ou d'un promoteur immobilier ;

- la délibération du 4 novembre 2015 prescrivant la révision du PLU révèle que le classement en zone naturelle du sous-secteur du Puech de Reboul a été approuvé sans concertation ni diagnostic préalables, en méconnaissance des article L. 103-2 et suivants du code de l'urbanisme ;

- le classement en zone naturelle du secteur du Puech de Reboul, classé par l'ancien PLU en zone 1AU, est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement en zone 2AU du secteur Grand Jardin par le plan local d'urbanisme approuvé le 3 décembre 2018 est incompatible avec les orientations du futur SCOT Sud Gard approuvé le 10 décembre 2019 ;

- le PLU devra dès lors faire l'objet d'une mise en compatibilité en application de l'article L. 153-49 du code de l'urbanisme ;

- en tout état de cause, ce classement est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la délibération litigieuse méconnaît l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales en raison de l'intéressement du maire et est entachée de détournement de pouvoir ;

- par l'effet dévolutif, ils renvoient à tous leurs moyens invoqués en première instance.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 mars 2021, la commune d'Aujargues, représentée par la SCP d'avocats CGCB et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge solidaire des requérants la somme de 5 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le jugement attaqué est régulier ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a décidé, par décision du 24 août 2021, de désigner M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Y... Carassic,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me Chavrier représentant l'association pour la protection du patrimoine et la qualité de vie d'Aujargues et autres et Me Djabali représentant la commune d'Aujargues.

Considérant ce qui suit :

1. Par la délibération en litige du 3 décembre 2018, le conseil municipal d'Aujargues a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. L'association pour la protection du patrimoine et la qualité de vie à Aujargues et d'autres requérants habitants de la commune ont demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de cette délibération, ensemble la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire sur leur recours gracieux du 15 mars 2019 tendant au retrait de cette délibération. Par le jugement dont les requérants relèvent appel, les premiers juges ont rejeté leur demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, les premiers juges ont répondu au point 6 du jugement attaqué au moyen des requérants tiré de ce que le classement du secteur du Grand Jardin en zone 2AU serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation du fait d'une contradiction avec les orientations du futur SCOT Sud Gard qui identifierait une coupure d'urbanisation dans ce secteur, en mentionnant notamment l'avis favorable à l'unanimité du conseil syndical du SCOT Sud Gard sur l'ouverture à l'urbanisation de ce secteur, en indiquant que la coupure paysagère cartographiée dans le document graphique du SCOT entendait préserver l'identité du vallon voisin du ruisseau de Corbières et que ce document graphique mentionnait le secteur du Grand Jardin comme un secteur urbanisable. La critique de la réponse des premiers juges à ce moyen relève du bien-fondé du jugement attaqué. Par suite, les premiers juges n'ont pas entaché pour ce motif d'irrégularité le jugement attaqué.

3. En outre, le tribunal qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments des parties, a suffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de ce que le maire serait une personne intéressée au sens de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales, alors même qu'il n'a pas indiqué l'importance du pourcentage du secteur ouvert à l'urbanisation dans l'intérêt direct, selon les requérants, du maire, de ses proches ou d'un promoteur immobilier, et n'a pas entaché d'irrégularité le jugement attaqué pour ce motif.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme applicable à la date de l'approbation de la délibération du 4 novembre 2015 ayant prescrit la révision du plan d'occupation des sols de la commune d'Aujargues : " Le plan local d'urbanisme est élaboré à l'initiative et sous la responsabilité de la commune. La délibération qui prescrit l'élaboration du plan local d'urbanisme et précise les objectifs poursuivis ainsi que les modalités de concertation, conformément à l'article L. 300-2, est notifiée (...). ". Aux termes de l'article L. 103-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur : " Font l'objet d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées :1° L'élaboration ou la révision (...) du plan local d'urbanisme (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions que l'adoption ou la révision du plan local d'urbanisme doit être précédée d'une concertation associant les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées. L'assemblée délibérante doit, avant que ne soit engagée la concertation, délibérer, d'une part, et au moins dans leurs grandes lignes, sur les objectifs poursuivis par la commune en projetant d'élaborer ou de réviser ce document d'urbanisme, et, d'autre part, sur les modalités de la concertation. Si cette délibération est susceptible de recours devant le juge de l'excès de pouvoir, son illégalité ne peut, en revanche, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoquée contre la délibération approuvant le plan local d'urbanisme. Ainsi que le prévoit l'article L. 103-2 du code de l'urbanisme, les irrégularités ayant affecté le déroulement de la concertation au regard des modalités définies par la délibération prescrivant la révision du document d'urbanisme demeurent par ailleurs invocables à l'occasion d'un recours contre le plan local d'urbanisme approuvé.

6. Pour soutenir que le classement en zone naturelle du sous-secteur du Puech de Reboul a été décidé par le nouveau conseil municipal dès le stade de la délibération du 4 novembre 2015 prescrivant la révision du PLU de la commune, avant toute procédure de concertation avec les habitants qui n'aurait été dès lors qu'une " parodie " de concertation, et en l'absence de tout " diagnostic " de ce secteur, les requérants invoquent les propos du maire rappelés dans cette délibération du 4 novembre 2015, selon lesquels " la zone 1AUa du Puech de Reboul définie lors de l'élaboration du PLU a été un des enjeux de la dernière élection municipale de mars 2014. Le résultat du scrutin a clairement exprimé un rejet de cette option et la nouvelle équipe municipale s'est engagée clairement à réviser ces orientations et à étudier de nouvelles orientations de développement urbain ". Cette délibération prescrit la révision du document d'urbanisme notamment pour préserver l'environnement écologique de la commune, en requalifiant le secteur du Puech de Reboul en zone naturelle. Ce faisant, le conseil municipal n'a pas décidé en l'absence de toute concertation la modification du zonage de ce secteur mais a fixé les objectifs poursuivis par la commune lors de cette révision, conformément aux exigences de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme. Les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de l'illégalité supposée de cet objectif. Ils ne contestent pas que les modalités de la concertation fixées par cette délibération du 4 novembre 2015 ont été respectées. Dès lors, le moyen tiré de ce que la délibération en litige approuvant le PLU de la commune serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière à défaut de concertation et d'un diagnostic préalable de ce secteur doit être écarté.

7. En deuxième lieu, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des divers secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

8. Aux termes de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues. ".

9. Le préambule du règlement de la zone N du PLU de la commune mentionne que peuvent être classés en zones naturelles et forestières les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit de l'existence d'une exploitation forestière, soit de leur caractères d'espaces naturels.

10. Il ressort du rapport de présentation du PLU en litige, accessible tant au juge qu'aux parties sur le site internet de la commune, que les auteurs du PLU en litige ont entendu redonner au secteur boisé du Puech de Reboul, d'une superficie de 4,4 hectares, classé en zone d'urbanisation future par l'ancien PLU, sa vocation naturelle en le préservant de toute urbanisation. Ils justifient ce choix en indiquant qu'il s'agit d'un secteur situé dans le prolongement est du village, couvert d'un espace boisé présentant une grande qualité paysagère, visible depuis la plaine de Coutelasse et la route départementale 40, axe de transit principal de la commune offrant un cône de vue intéressant sur le village, qu'il présente un intérêt écologique marqué au regard des continuités écologiques s'agissant d'un secteur compris dans l'espace naturel sensible (ENS) " Garrigues de Nîmes ", qu'il participe au bien-être de la population en raison de la présence d'un parcours de santé et d'un sentier botanique qu'ils veulent garder ouverts au public et qu'il est soumis au surplus au risque de feux de forêt. Cette analyse est d'ailleurs confirmée par l'avis du préfet du Gard du 1er octobre 2013, saisi pour avis sur le précédent projet de PLU arrêté de la commune, qui signalait que le secteur du Puech de Reboul, qui était alors la principale zone d'extension urbaine prévue de la commune, présente un intérêt biologique et paysager avéré, eu égard notamment à la présence d'espèces protégées présentes sur ce site. Les auteurs du plan local d'urbanisme, qui n'étaient pas liés pour déterminer l'affectation future de ce secteur par les modalités existantes d'utilisation des terrains, ont pu légalement modifier le classement de ce secteur, antérieurement classé en zone à urbaniser, en zone naturelle qui correspond selon le règlement du PLU en litige à un espace à protéger pour sauvegarder la qualité des paysages et des milieux naturels. En se bornant à invoquer la situation du Puech de Reboul en continuité du tissu urbain existant, hors d'une zone inondable et sur un site n'impactant pas selon eux d'espaces agricoles de grande qualité agronomique, les requérants n'établissent pas que ce classement en zone naturelle serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

11. En troisième lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation est subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme comportant notamment les orientations d'aménagement et de programmation de la zone ".

12. D'autre part, l'article L. 121-22 du code de l'urbanisme prévoit que : " Les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme doivent prévoir des espaces naturels présentant le caractère d'une coupure d'urbanisation ". L'article L. 131-4 du code de l'urbanisme dispose notamment que les plans locaux d'urbanisme doivent être compatibles avec les schémas de cohérence territoriale. Aux termes de l'article L. 153-49 de ce code dans sa rédaction applicable : " Lorsqu'un plan local d'urbanisme doit être rendu compatible avec un document mentionné aux articles L. 131-4 et L. 131-5 ou le prendre en compte, ou permettre la réalisation d'un projet d'intérêt général postérieur à son approbation, l'autorité administrative compétente de l'Etat en informe l'établissement public de coopération intercommunale ou la commune. ".

13. Le préambule du règlement de la zone 2AU définit cette zone comme une zone d'urbanisation immédiate à vocation principale d'habitation correspondant au secteur du Grand Jardin, qui fera l'objet d'une seule orientation d'aménagement d'ensemble pour maîtriser une cohérence dans l'aménagement du site et de maîtriser l'insertion dans l'environnement et d'une orientation d'aménagement et de programmation pour réduire les incidences sur l'environnement de cette urbanisation. Le projet d'aménagement et de développement durable (PADD) précise que, eu égard au faible potentiel de densification du tissu urbain existant, cette zone d'une superficie de 2 hectares, située à l'ouest du village, a été retenue en raison de sa continuité immédiate avec le tissu urbain existant classé en zone U, de sa facilité d'accès depuis le réseau viaire actuel, qu'elle est proche des commerces et de la zone d'activités au sud de la commune et située en dehors de la zone inondable. Cette zone, destinée à accueillir une densité satisfaisante de vingt-cinq logements par hectare, a été retenue de préférence sur le secteur du Puech de Reboul dont il convient de préserver la vocation naturelle pour des motifs écologiques et paysagers, ainsi qu'il a été dit au point 10. Si les requérants soutiennent que cette ouverture à l'urbanisation réduit nécessairement la superficie correspondante des terres agricoles dans ce secteur, cette ouverture de 2 hectares est très modérée au regard de la surface agricole utile de la commune de 107 hectares en 2010 selon le rapport de présentation. En se bornant à soutenir que ces terres ont été cultivées de 2000 à 2005 et qu'elles ne sont pas bâties, ils n'établissent pas que ces terres seraient pourvues d'une grande valeur agronomique au sens de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme. Le moyen tiré de ce que ce classement serait incompatible avec le document d'orientation générale du SCOT Sud Gard et qu'il nécessiterait sa mise en compatibilité avec ce schéma de cohérence territoriale en application de l 'article L. 153-49 du code de l'urbanisme est sans incidence sur la légalité de la délibération en litige du 3 décembre 2018, dès lors que ce schéma de cohérence territoriale a été approuvé par délibération du 10 décembre 2019, postérieurement à la délibération litigieuse. Eu égard au parti pris d'aménagement des auteurs du PLU, les premiers juges ont pu légalement estimer que le classement du secteur du Grand Jardin en zone 2AU n'était pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

14. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : " Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires ". Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l'adoption d'une délibération d'un conseiller municipal intéressé à l'affaire qui fait l'objet de cette délibération, c'est-à-dire y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune, est de nature à en entraîner l'illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l'adoption d'une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité, alors même que cette participation préalable ne serait pas suivie d'une participation à son vote, si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d'exercer une influence sur la délibération. Cependant, s'agissant d'une délibération déterminant des prévisions et règles d'urbanisme applicables dans l'ensemble d'une commune, la circonstance qu'un conseiller municipal intéressé au classement d'une parcelle ait participé aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption ou à son vote n'est de nature à entraîner son illégalité que s'il ressort des pièces du dossier que, du fait de l'influence que ce conseiller a exercée, la délibération prend en compte son intérêt personnel.

15. La circonstance que le maire a participé aux débats et a présidé la séance au cours de laquelle la délibération en litige a été adoptée n'est pas par elle-même de nature à entraîner l'illégalité de cette dernière dès lors que le classement des terrains en zone 2AU n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation, ainsi qu'il a été dit au point 13, et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la délibération en litige, qui a été adoptée à l'unanimité des membres du conseil, prend en compte son intérêt personnel, celui de sa sœur ou d'un aménageur privé. La circonstance que 25 % de la superficie des parcelles classées en zone 2AU d'ouverture à l'urbanisation, comme l'ensemble des parcelles voisines, appartient à la sœur et à d'autres membres de la famille du maire, n'établit pas que le maire aurait été intéressé à l'affaire, au sens de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales, s'agissant de ce classement. Par ailleurs, dès lors que le classement de ces terrains en zone 2AU répond à un intérêt communal, le moyen tiré de ce que la délibération en litige serait entachée de détournement de pouvoir pour ce motif doit être écarté.

16. En dernier lieu, il appartient au requérant, tant en première instance qu'en appel, d'assortir ses moyens des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé. Il suit de là que le juge d'appel n'est pas tenu d'examiner un moyen que l'appelant se borne à déclarer reprendre en appel, sans l'assortir des précisions nécessaires. En se bornant à déclarer reprendre les autres moyens de sa demande de première instance, mais sans joindre à leur requête d'appel copie de leurs mémoires de première instance, les requérants n'assortissent pas ces moyens de précisions permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé. Ces moyens doivent dès lors être écartés.

17. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

18. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Aujargues, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire des requérants la somme de 2 000 euros à verser à la commune d'Aujargues sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'association pour la protection du patrimoine et la qualité de vie à Aujargues et des autres requérants est rejetée.

Article 2 : L'association pour la protection du patrimoine et la qualité de vie à Aujargues et les autres requérants verseront solidairement la somme de 2 000 euros à la commune d'Aujargues sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association pour la protection du patrimoine et la qualité de vie à Aujargues, à Y... B... W..., à M. et Y... H... et N... P..., à Y... L... K..., à Y... M... E..., à M. et Y... Q... X..., à Y... G... R... et à Y... C... I... et à la commune d'Aujargues.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2022, où siégeaient :

- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Y... Carassic, première conseillère,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mars 2022.

2

N° 21MA00223


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA00223
Date de la décision : 15/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU). - Légalité des plans.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP N. BEDEL DE BUZAREINGUES G. BOILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-03-15;21ma00223 ?
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