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28/02/2022 | FRANCE | N°21MA01135

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 28 février 2022, 21MA01135


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 27 mai 2019 par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de regroupement familial au profit de son épouse.

Par un jugement n°1904886 du 1er décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 mars 2021, M. A... B..., représenté par Me Mazas, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er

décembre 2020 ;

2°) d'annuler la décision du 27 mai 2019 par laquelle le préfet de l'Hérault a rejet...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 27 mai 2019 par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de regroupement familial au profit de son épouse.

Par un jugement n°1904886 du 1er décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 mars 2021, M. A... B..., représenté par Me Mazas, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er décembre 2020 ;

2°) d'annuler la décision du 27 mai 2019 par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de regroupement familial au profit de son épouse ;

3°) d'enjoindre au préfet de faire droit à sa demande de regroupement familial ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me Mazas au titre des articles 35 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision est insuffisamment motivée ; elle ne mentionne pas sa précédente demande de regroupement familial ; elle vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non celles applicables de l'accord franco-algérien ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux ;

- elle méconnaît le principe de non-discrimination du fait de son handicap dès lors qu'il n'a pas pu accumuler suffisamment de trimestres eu égard à sa qualité de travailleur handicapé pour le calcul de sa retraite ;

- le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée ;

- la décision méconnaît son droit à mener une vie privée et familiale normale tel que garantie par l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'ensemble de sa situation personnelle et familiale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

Par une décision du 22 janvier 2021, M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Laurent Marcovici, président assesseur de la 5ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Balaresque,

- et les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 27 mai 2019, le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de regroupement familial présentée par M. B... au profit de son épouse. M. B... relève appel du jugement du 1er décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, la décision contestée, qui vise l'accord franco-algérien, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et précise les faits relatifs à la situation personnelle de l'intéressé, notamment le montant de ses ressources et la date de son mariage, mentionne les circonstances de droit et de fait sur lesquelles elle est fondée. Elle est, par suite, suffisamment motivée.

3. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort des termes de cette décision, d'une part, que le préfet a bien fait application des stipulations de l'accord franco-algérien relatives au regroupement familial afin notamment de déterminer le montant des ressources du demandeur et, d'autre part, que sans se sentir lié par ce seul élément, le préfet a également examiné l'ensemble de la situation individuelle de l'intéressé, notamment l'atteinte portée à sa vie privée et familiale. Par suite, l'autorité préfectorale n'ayant pas méconnu l'étendue de sa compétence, les moyens tirés du défaut d'examen réel et sérieux et de l'erreur de droit doivent être écartés.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 4 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 : " Les membres de la famille qui s'établissent en France sont mis en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent. / Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente. / Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1 - le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont pris en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales. L'insuffisance des ressources ne peut motiver un refus si celles-ci sont égales ou supérieures au salaire minimum interprofessionnel de croissance (...) ".

5. Il est constant que M. B..., qui justifie disposer de ressources d'un montant mensuel de 936 euros net, composées pour l'essentiel de l'allocation de solidarité aux personnes âgées pour un montant de 868,20 euros et de sa retraite personnelle d'un montant de 59 euros, soit un montant total inférieur au taux requis de 1 161 euros net par mois, ne remplit pas la condition de ressources prévue par les stipulations précitées de l'accord franco-algérien. M. B... soutient que le préfet ne pouvait, sans entacher sa décision d'une discrimination en raison de son handicap, lui opposer l'insuffisance de ses ressources, alors qu'il s'est vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé en octobre 1997 puis le bénéfice de l'allocation d'aide aux adultes handicapés en 2002. Toutefois, l'intéressé, qui, entré en France en 1979, n'a cotisé que 26 trimestres au régime général avant d'être admis à la retraite pour inaptitude au travail à compter du 1er février 2011, ne perçoit plus l'allocation d'aide aux adultes handicapés et n'établit pas, compte tenu des revenus qu'il a perçus durant ses années de cotisations au régime général, que l'insuffisance de ses ressources actuelles résulterait de son handicap. Dès lors, M. B..., qui ne peut par ailleurs utilement se prévaloir de délibérations de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, dépourvues de force contraignante, n'est pas fondé à soutenir que le préfet, en se fondant sur l'insuffisance de ses ressources pour rejeter sa demande de regroupement familial, aurait introduit dans l'appréciation de son droit à une vie privée et familiale normale une discrimination à raison de son handicap ou de son âge prohibée par les stipulations combinées des articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a présenté le 4 juillet 2018 une demande de regroupement familial en faveur de son épouse, à la suite de leur mariage célébré le 22 mars 2018 en Algérie. Leur mariage était ainsi récent, à la date de la décision en litige. Si le requérant soutient que son état de santé nécessite l'aide de son épouse pour les besoins de la vie quotidienne, le certificat médical qu'il produit en ce sens, au demeurant postérieur à la décision litigieuse, n'établit pas que son épouse, avec laquelle le requérant ne fait état d'aucune vie commune, serait la personne la plus adéquate pour lui apporter l'aide dont il a besoin. Il n'apporte en outre aucun élément de nature à justifier l'impossibilité qu'il allègue, à raison de ses problèmes de santé, de poursuivre sa vie privée et familiale en Algérie, où son épouse, qui a la même nationalité, réside. Dans ces conditions, en dépit de l'ancienneté de son séjour en France, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale doit être écarté. Il en va de même, pour les mêmes motifs, du moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 27 mai 2019.

9. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions présentées en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent être accueillies.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Mazas et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 7 février 2022, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Mérenne, premier conseiller,

- Mme Balaresque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 février 2022.

2

No 21MA01135


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01135
Date de la décision : 28/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: Mme Claire BALARESQUE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : CABINET MAZAS - ETCHEVERRIGARAY

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-02-28;21ma01135 ?
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