Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 10 février 2020 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2001488 du 16 juillet 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 1er février 2021, Mme B..., représentée par Me Lauren-Neyrat, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 6 juillet 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 février 2020 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;
3°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou subsidiairement d'enjoindre au réexamen de sa demande en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
S'agissant de la décision portant refus de séjour :
- la décision est entachée d'erreur de fait ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- la décision est illégale par voie d'exception de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 mai 2021, la préfète du Gard conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que les moyens d'appel sont infondés.
Mme B... a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 décembre 2020 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi du 10 juillet 1991.
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Baizet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... relève appel du jugement du 6 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 février 2020 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... n'est entrée en France qu'en septembre 2017, après avoir vécu en Italie. Si elle est mariée depuis 2013 avec un compatriote sénégalais titulaire d'une carte de résident, et si deux enfants sont nés de cette union en 2017 et 2019, Mme B... ne justifie pas de sa présence habituelle en France depuis 2017 ni de la vie commune avec son époux depuis son entrée en France. Alors que le préfet conteste l'ancienneté et l'intensité de la communauté de vie avec son époux, Mme B... ne produit aucune pièce établissant une vie commune avant l'année 2019. Mme B... ne justifie d'aucune insertion professionnelle et la circonstance qu'elle aurait obtenu un diplôme universitaire en santé publique ne lui permet pas de se prévaloir d'une quelconque insertion. En outre, Mme B... ne justifie pas être isolée dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-neuf ans. Dans ces conditions, l'arrêté du préfet du Gard n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Cette décision n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de l'intéressée.
4. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3 du présent arrêt, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu l'intérêt supérieur de ses enfants en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
5. En troisième lieu, si le préfet du Gard a invité Mme B... à déposer une demande d'admission exceptionnelle au séjour, Mme B... n'établit pas avoir été empêchée de déposer une demande de titre de séjour sur un autre fondement. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'erreur de fait ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français comporte l'énoncé suffisamment précis des considérations de faits et de droit qui la fondent. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.
7. En deuxième lieu, il ne ressort pas de la motivation de la décision attaquée et des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme B..., qui ne peut en tout état de cause se prévaloir directement de la méconnaissance de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 qui a été transposée en droit interne.
8. En troisième lieu, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés pour les motifs exposés au point 3 du présent arrêt.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de la décision de refus de séjour, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
11. Par voie de conséquence du rejet des conclusions aux fins d'annulation, les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme B... doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. L'Etat n'étant pas partie perdante à la présente instance, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par Mme B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à Me Lauren-Neyrat et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
Délibéré après l'audience du 3 février 2022 où siégeaient :
- M. Chazan, président,
- M. d'Izan de Villefort, président assesseur
- Mme Baizet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 février 2022.
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N° 21MA0773
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