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18/02/2022 | FRANCE | N°21MA02668

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 18 février 2022, 21MA02668


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... et M. E... C... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler les arrêtés du 2 février 2021 par lesquels la préfète de la Lozère a pris à leur encontre une obligation de quitter sans délai le territoire français en direction de leur pays d'origine ou de tout autre pays dans lequel ils seraient légalement admissibles, avec interdiction de retour d'un an, ensemble l'arrêté les assignant à résidence et, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de leur délivrer un

titre de séjour à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... et M. E... C... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler les arrêtés du 2 février 2021 par lesquels la préfète de la Lozère a pris à leur encontre une obligation de quitter sans délai le territoire français en direction de leur pays d'origine ou de tout autre pays dans lequel ils seraient légalement admissibles, avec interdiction de retour d'un an, ensemble l'arrêté les assignant à résidence et, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de leur délivrer un titre de séjour à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard .

Par des jugements n° 2100646 et n° 2100647 du 2 mars 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté ces demandes.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2021, sous le n° 21MA02668, Mme D..., représentée par Me Ezzaïtab, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 2 mars 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 février 2021 par lequel la préfète de la Lozère a pris à son encontre une obligation de quitter sans délai le territoire français en direction de son pays d'origine ou de tout autre pays dans lequel elle serait légalement admissible, avec interdiction de retour d'un an, ensemble l'arrêté l'assignant à résidence ;

3°) d'enjoindre à la préfète de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 400 euros à verser à Me Ezzaïtab, en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- l'avis du collège de médecins de l'OFII est irrégulier au regard des exigences posées par les articles 6, 7 et 8 de l'arrêté du 27 décembre 2016.

- l'arrêté est insuffisamment motivé, comme le révèlent son caractère stéréotypé et le défaut d'examen particulier de sa situation ;

- il méconnaît les articles L. 313-12 et L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le taux d'invalidité et les troubles psychologiques de son fils A... impliquent un suivi et un accompagnement scolaire qui ne sont pas disponibles dans son pays d'origine ;

- il méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard de la situation particulière de leur fils, alors que leur second enfant est également scolarisé en grande section de maternelle ;

- il méconnaît pour les mêmes motifs l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la mesure d'éloignement est entachée d'un défaut de base légale ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

II. Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2021, sous le n° 21MA02669, M. C..., représenté par Me Ezzaïtab, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 2 mars 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 février 2021 par lequel la préfète de la Lozère a pris à son encontre une obligation de quitter sans délai le territoire français en direction de son pays d'origine ou de tout autre pays dans lequel il serait légalement admissible, avec interdiction de retour d'un an, ensemble l'arrêté l'assignant à résidence ;

3°) d'enjoindre à la préfète de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 400 euros à verser à Me Ezzaïtab, en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- l'avis du collège de médecins de l'OFII est irrégulier au regard des exigences posées par les articles 6, 7 et 8 de l'arrêté du 27 décembre 2016.

- l'arrêté est insuffisamment motivé, comme le révèlent son caractère stéréotypé et le défaut d'examen particulier de sa situation ;

- il méconnaît les articles L. 313-12 et L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le taux d'invalidité et les troubles psychologiques de son fils A... impliquent un suivi et un accompagnement scolaire qui ne sont pas disponibles dans son pays d'origine ;

- il méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard de la situation particulière de leur fils, alors que leur second enfant est également scolarisé en grande section de maternelle ;

- il méconnaît pour les mêmes motifs l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la mesure d'éloignement est entachée d'un défaut de base légale dans la mesure où le refus de titre est illégal ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Ces requêtes ont été communiquées à la préfète de la Lozère qui n'a pas produit de mémoire.

M. C... et Mme D... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décisions du 28 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Ciréfice a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes susvisées n° 21MA02668 et n° 21MA02669, présentées par Mme D... et M. C... présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. Mme D..., née le 22 juillet 1983, et son compagnon, M. C..., né le 31 octobre 1974, tous deux de nationalité serbe, seraient, selon leurs déclarations, entrés irrégulièrement en France, le 30 janvier 2017, accompagnés de leurs deux enfants nés respectivement le 3 juin 2007 en Serbie et le 8 avril 2014 en Italie. Ils ont présenté deux demandes d'asile qui ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 28 février 2018, rejets confirmés le 12 septembre 2018 par la Cour nationale du droit d'asile. Leurs recours contre des arrêtés du 17 octobre 2018 par lequel le préfet de la Lozère leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays de destination ont été rejetés par le tribunal administratif de Nîmes le 20 décembre 2018. Par un jugement du 2 juin 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté le recours de M. C... tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de la Lozère en date du 18 octobre 2019 rejetant sa demande de titre de séjour " parents d'enfant malade ", lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination. Par un jugement du même jour, le tribunal administratif de Nîmes a, d'une part, annulé l'arrêté de la préfète de la Lozère en date du 18 octobre 2019 rejetant la demande de titre de séjour de Mme D... au motif que la procédure suivie a été irrégulière faute d'avoir été précédée d'un avis de l'OFII émis dans des conditions régulières avec un rapport médical d'un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, enjoint à la préfecture de réexaminer la demande de Mme D.... De nouveau saisi, à la demande de la préfecture, le collège des médecins de l'OFII a rendu un nouvel avis le 2 décembre 2020. Par deux arrêtés du 2 février 2021, la préfète de la Lozère a pris à l'encontre de M. C... et de sa compagne Mme D... une obligation de quitter sans délai le territoire français et a assorti cette mesure d'éloignement d'une interdiction de retour sur le territoire national d'une durée d'un an. Par deux autres arrêtés du même jour, cette autorité les a assignés à résidence. Mme D... et M. C... relèvent appel des jugements du 2 mars 2021 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes qui a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés du 2 février 2021.

Sur le cadre juridique du litige :

3. Le dispositif des arrêtés en litige ne se prononce pas sur le droit au séjour des requérants, alors même qu'ils sont intitulés " arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire ". Ces arrêtés, pris sur le fondement des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prononcent uniquement une obligation de quitter sans délai le territoire français en direction du pays d'origine des requérants ou de tout autre pays dans lequel ils seraient légalement admissibles, avec interdiction de retour d'un an. Dès lors, ces arrêtés ne peuvent, comme l'a jugé le tribunal, être utilement contestés en tant qu'ils refusent une demande de titre de séjour.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, les décisions contestées comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent, au sens de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration et sont ainsi suffisamment motivées. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier et, en particulier, des mentions des décisions en litige, que la préfète de la Lozère a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle des requérants.

5. En deuxième lieu, il ressort de l'avis du collège de médecins de l'OFII versé au dossier par la préfète de la Lozère qu'il a été rendu par trois médecins, sur la base d'un rapport établi par un quatrième médecin, et qu'il a été communiqué à la préfète en temps utile. Les requérants ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que cet avis est irrégulier au regard des exigences posées par les articles 6, 7 et 8 de l'arrêté du 27 décembre 2016.

6. En troisième lieu, les appelants se bornent à reprendre, devant la Cour, l'argumentation qu'ils ont développée devant le tribunal tenant à ce que le taux d'invalidité et les troubles psychologiques de leur fils aîné, atteint d'un stress post traumatique et qui connaît un retard d'apprentissage pour lesquels il bénéficie d'un suivi en pédopsychiatrie et d'un accompagnement scolaire, impliquent un suivi et un accompagnement scolaire qui ne sont pas disponibles dans leur pays d'origine et tenant à ce que leur second enfant est également scolarisé en grande section de maternelle, sans critiquer le jugement attaqué ni apporter de nouvelles pièces ou de nouveaux arguments. Il y a lieu, dans ces conditions, d'écarter par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges les moyens tirés de ce que les arrêtés attaqués méconnaîtraient les dispositions des articles L. 313-12, L. 313-11-11° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Il ressort des pièces du dossier que le stress post traumatique et le retard scolaire dont est affecté le jeune A... C... ne sont pas de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa santé. La circonstance que la prise en charge en Serbie de son handicap et de son retard scolaire soit moins performante qu'en France et celle que leur second enfant est déjà scolarisé en grande section de maternelle ne sont pas suffisantes pour caractériser une violation des stipulations de l'article 3-1 sus-rappelé. Les requérants ne sont dès lors pas fondés à soutenir que la préfète de la Lozère aurait fait une inexacte application de ces stipulations.

8. En dernier lieu, les requérants n'assortissent pas leurs moyens tirés de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français prises à leur encontre serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales des précisions suffisantes permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... et M. C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés préfectoraux du 2 février 2021. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions des article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que le conseil de Mme D... et de M. C... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes n° 21MA02668 et n° 21MA02669 de Mme D... et de M. C... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., à M. E... C..., à Me Ezzaïtab et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Lozère.

Délibéré après l'audience du 4 février 2022, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- Mme Ciréfice, présidente assesseure,

- M. Prieto, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 février 2022.

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N° 21MA02668, 21MA02669

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA02668
Date de la décision : 18/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Virginie CIREFICE
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : EZZAÏTAB

Origine de la décision
Date de l'import : 01/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-02-18;21ma02668 ?
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