Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme G... B..., veuve E..., a demandé au tribunal des pensions militaires de Montpellier d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande du 23 janvier 2017, réitérée les 11 et 31 décembre 2017, tendant à l'attribution de la totalité du montant de la pension qu'elle percevait, à concurrence de la moitié de ce total, en qualité de conjointe survivante de son époux décédé M. D... E..., après le décès de l'autre épouse de ce dernier, survenu le 13 janvier 2017.
Par un jugement n° 18/00029 du 8 octobre 2019, le tribunal des pensions de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 18 février 2020, Mme B... veuve E..., représentée par Me Badji Ouali, demande à la Cour :
1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions de Montpellier du 8 octobre 2019 ;
3°) d'enjoindre au ministre de la défense de procéder au réexamen de sa demande, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir.
Elle soutient que :
- elle a droit à l'obtention de la totalité du montant de la pension de conjointe survivante de son époux décédé M. D... E..., après le décès de l'autre épouse de ce dernier, survenu le 13 janvier 2017, étant désormais la seule conjointe survivante de ce dernier et dès lors que l'autre veuve de M. E... n'a pas eu d'enfant de son union avec ce dernier ;
- elle peut se prévaloir des dispositions du 4ème alinéa de l'article L. 141-7 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et du 2° de l'article L. 43 du même code.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que le décès de l'autre veuve de M. E... n'ouvre pas à l'intéressée le droit à bénéficier de la totalité du montant de la pension de conjoint survivant de M. E....
Par décision du bureau d'aide juridictionnelle en date 4 septembre 2020, Mme B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- la loi du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Badie,
- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme G... B..., de nationalité algérienne, née le 15 janvier 1948, est veuve de M. D... E..., né le 25 janvier 1915 et décédé le 13 mars 1986, titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive en tant que victime civile de guerre, pour mutilation de la main gauche, perte de deux phalanges du pouce, perte de l'annulaire et de l'auriculaire avec un métacarpien, au taux de 100 %, assortie d'une majoration au titre de l'article 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, à compter du 10 janvier 1958. Elle a épousé M. E... le 27 mars 1967, alors qu'il était déjà l'époux de Mme H... C..., épousée le 1er juin 1957 et de Mme A... F..., dont il a divorcé le 26 juin 1982. Par jugement du tribunal départemental des pensions de l'Hérault du 25 mai 2010, confirmé, en cette part, par un arrêt de la cour régionale des pensions de Montpellier du 7 décembre 2011, elle a obtenu le bénéfice d'une pension de conjoint survivant, en partage, à part égales, avec
Mme C..., à compter du 1er janvier 2007. Elle relève appel du jugement du 8 octobre 2019 par lequel le tribunal des pensions de Montpellier a rejeté sa demande, tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande, formée la première fois le 23 janvier 2017, de bénéficier du versement de la totalité du montant de la pension de conjoint survivant de son défunt époux, compte tenu du décès de l'autre épouse de ce dernier.
Sur les conclusions tendant à l'attribution de l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Mme B... a obtenu, par décision du 4 septembre 2020, le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Sa demande est, par suite, devenue sans objet.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 141-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Au décès du militaire, le conjoint survivant ou le partenaire d'un pacte civil de solidarité bénéficie d'un droit à pension dans les conditions prévues au présent titre. " Aux termes de l'article L. 141-5 du même code : " La pension des ayants cause des originaires d'un territoire dont le ressortissant était habilité à servir dans l'armée française et non mariés sous le régime du code civil, est partagée par parts égales entre les conjoints survivants dont le mariage, conforme, à la date de l'acte, au droit du pays concerné, réunit les conditions fixées au présent chapitre. Ces parts de pension sont éventuellement majorées pour les enfants à charge de chaque lit dans les conditions fixées par l'article L. 141-23. / En cas de décès d'un conjoint survivant, les enfants âgés de moins de vingt-et-un ans issus de son mariage avec le défunt bénéficient de la pension ou de la part de pension à laquelle il aurait pu prétendre. En cas de remariage, ils peuvent exercer ces droits dans les conditions fixées par l'article L. 141-7. Il en est de même en cas de divorce. / Lorsqu'il existe plusieurs orphelins issus de mariages différents, la part correspondant à chaque conjoint survivant inhabile à exercer ses droits est répartie de façon à ce que chaque orphelin perçoive une part égale de pension. Lorsque l'un des orphelins cesse d'ouvrir droit à pension, sa part est reversée aux autres orphelins. / Sauf l'exception mentionnée à l'alinéa précédent, il n'y a pas de réversibilité entre les groupes qui représentent des lits différents. (...) ". Il résulte de ces dispositions, qui sont d'application stricte, qu'en cas de décès de l'un des conjoints survivants du militaire pensionné, le bénéfice des droits à pension du conjoint survivant dont bénéficiait ce dernier ne peut être transféré à l'autre conjoint survivant, y compris si le conjoint survivant à son tour décédé n'a lui-même pas d'enfants. Par suite, Mme B... ne saurait se prévaloir du décès de l'autre veuve de M. E... pour demander, sur le fondement de ces dispositions, à bénéficier du versement de la part de la pension de conjoint survivant dont bénéficiait, avant son décès, Mme C....
4. En second lieu, Mme B..., ne saurait se prévaloir des dispositions de l'article L. 43 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, qui n'étaient plus en vigueur à la date de sa demande. Elle ne saurait davantage se prévaloir des dispositions de l'article L. 141-7 de ce même code, permettant au conjoint survivant recouvrant ses droits à pension de conjoint survivant d'un militaire décédé, après décès de son nouveau conjoint ou partenaire, de choisir la pension la plus avantageuse, dans un délai d'un an à compter de la date de ce second décès, situation qui ne la concerne pas davantage.
5. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Montpellier a rejeté ses demandes. Ses conclusions à fin d'annulation et celles à fin d'injonction ne peuvent dès lors qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... B... veuve E..., à Me Badji Ouali et à la ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 18 janvier 2022, où siégeaient :
- M. Badie, président,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Ury, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition du greffe, le 1er février 2022.
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N° 20MA00742