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20/01/2022 | FRANCE | N°21MA01074

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 20 janvier 2022, 21MA01074


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts A... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le maire de la commune de Saint-Rémy-de-Provence a délivré un permis de construire à la SARL Infinim Provence.

Par un jugement n° 1801710 du 14 janvier 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 15 mars, 6 avril, 29 septembre et 6 octobre 2021, MM.

Ambroise et Emmanuel A..., représentés par Me Gonand, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts A... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le maire de la commune de Saint-Rémy-de-Provence a délivré un permis de construire à la SARL Infinim Provence.

Par un jugement n° 1801710 du 14 janvier 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 15 mars, 6 avril, 29 septembre et 6 octobre 2021, MM. Ambroise et Emmanuel A..., représentés par Me Gonand, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 14 janvier 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le maire de la commune de Saint-Rémy-de-Provence a délivré un permis de construire à la SARL Infinim Provence ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Rémy-de-Provence la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le maire a entaché sa décision d'incompétence dès lors que le permis de construire a été délivré sans avis conforme préalable du préfet ; ce moyen n'est pas irrecevable ;

- le projet méconnait les dispositions de l'article R. 111-28 du code de l'urbanisme ;

- leur requête n'est pas abusive.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 août 2021, la commune de Saint-Rémy-de-Provence, représentée par Me Petit, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des appelants la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les appelants n'ont pas d'intérêt pour agir contre le permis de construire ;

- les moyens d'appel sont infondés.

Par un mémoire enregistré le 14 septembre 2021, la SARL Infinim Provence, représentée par Me Delban, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des appelants la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les appelants n'ont pas d'intérêt pour agir contre le permis de construire ;

- les moyens d'appel sont infondés.

Par un mémoire enregistré le 15 juin 2021, la SARL Infinim Provence, représentée par Me Delran, demande à la cour de condamner les consorts A... à lui verser la somme de 2 438 546,15 euros en application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.

Elle soutient que :

- la requête des consorts A... excède la défense de leurs intérêts légitimes ;

- la requête lui cause un préjudice excessif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. d'Izarn de Villefort pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Baizet,

- les conclusions de Mme Gougot, rapporteure publique,

- les observations de Me Gonand représentant les consorts A... et de Me Alcade substituant Me Delran, représentant la SARL Infinim Provence.

Considérant ce qui suit :

1. Les consorts A... relèvent appel du jugement du 14 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le maire de la commune de Saint-Rémy-de-Provence a délivré un permis de construire à la SARL Infinim Provence pour la construction d'un immeuble comportant 28 logements et d'un immeuble de bureau.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'une décision de non-opposition à déclaration préalable, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Il ressort des pièces du dossier que les consorts A... sont propriétaires du Mas de la Sousto situé sur la parcelle cadastrée EH 32 qui n'est pas mitoyenne du projet de construction, mais est séparée du terrain d'assiette par une grande parcelle cadastrée 366, laquelle présente des rangées d'arbres, une maison et des hangars agricoles. La propriété des consorts A... n'est pas située à proximité immédiate de l'emplacement du futur projet qui doit être implanté au Sud/Sud-Ouest du terrain d'assiette. Les consorts A... n'ont donc pas la qualité de voisin immédiat du projet.

5. Les consorts A... soutiennent qu'ils ont intérêt pour agir eu égard à l'importance du projet de vingt-huit logements en R+2 qui va augmenter le trafic routier, modifier l'aspect des alentours et le cadre de vie en rompant l'harmonie existante de l'habitat du quartier composé de petits mas ou maisons individuelles, et aux circonstances que le projet va entraîner l'abattage massif d'arbres, qu'ils subiront un préjudice de vue en raison de la hauteur de l'immeuble, que le nouveau mur de clôture va rompre avec les clôtures naturelles du quartier, que l'éclairage nocturne de l'immeuble va constituer une pollution visuelle et une nuisance rompant avec l'ambiance semi rurale du quartier, que l'éclairage va constituer une nuisance pour les oiseaux nichant dans les haies de cyprès à proximité du projet et conduire à leur exode, et que le choix des couleurs et des matériaux du projet ne s'inscrit pas dans les traditions de ce quartier historique et " choque leur sentiment esthétique ".

6. Toutefois, d'une part, ainsi que le font valoir la commune et le pétitionnaire, il existe, au nord de la parcelle cadastrée 366, une importante haie de cyprès qui constitue un écran visuel entre la propriété des requérants et les terrains situés au sud. Or il ne ressort pas des pièces du dossier que cette haie sera supprimée. Les défendeurs établissent donc que l'atteinte visuelle alléguée est dépourvue de réalité. Il en est de même pour l'atteinte visuelle par " l'éclairage nocturne du projet " qui est également dépourvue de réalité. Sont également dépourvues de réalité les atteintes alléguées sur la modification de l'aspect du cadre de vie qui romprait " l'harmonie existante de l'habitat du quartier composé de petits mas ou d'habitations individuelles ", ou la pollution visuelle et la nuisance engendrée par l'éclairage " rompant avec l'ambiance semi rurale du quartier ", dès lors que, tels que le font valoir les défendeurs, le quartier comporte, à proximité immédiate du projet, un collège de huit cents élèves, un stade et d'importants parkings, et ne comporte pas d'harmonie particulière ou " d'ambiance semi rurale ". En outre, comme le font valoir la commune et le pétitionnaire, le projet limité à vingt-huit logements et un bureau ne sera pas de nature à modifier sensiblement la circulation du quartier, lequel comporte déjà comme il a été dit un collège de huit cents élèves et des parkings pour le stade. En outre, les circonstances que le nouveau mur de clôture viendrait rompre avec les clôtures naturelles du quartier, que l'éclairage constituerait une nuisance pour les oiseaux nichant dans les haies de cyprès à proximité du projet et conduirait à leur exode, ou que le choix des couleurs et des matériaux du projet ne s'inscrirait pas, selon les requérants, dans les traditions de ce quartier historique et choquerait leur " sentiment esthétique " ne constituent pas des atteintes directes aux conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de leur mas. Enfin, la circonstance qu'il existerait un projet sur la parcelle 366 séparant le terrain d'assiette du projet de la propriété A... est sans incidence dès lors qu'il s'agit d'un projet distinct. Dans ces conditions, les consorts A... n'ont pas d'intérêt pour agir contre le permis en litige.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement en litige, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur requête.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :

8. Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en œuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel. ".

9. Il ne résulte pas de l'instruction que le recours des consorts A... aurait été mis en œuvre dans des conditions traduisant un comportement abusif de leur part. Dans ces conditions, les conclusions indemnitaires présentées par la SARL Infinim Provence doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. D'une part, la commune de Saint-Rémy-de-Provence n'étant pas partie perdante à la présente instance, les conclusions présentées par les consorts A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. D'autre part, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge des consorts A... la somme de 1 000 euros à verser à la SARL Infinim Provence et la somme de 1 000 euros à verser à la commune de Saint-Rémy-de-Provence sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête des consorts A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la SARL Infinim Provence sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme sont rejetées.

Article 3 : Les consorts A... verseront la somme de 1 000 euros à la SARL Infinim Provence et la somme de 1 000 euros à la commune de Saint-Rémy-de-Provence sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à M. C... A..., à la commune de Saint-Rémy-de-Provence et à la SARL Infinim Provence.

Délibéré après l'audience du 6 janvier 2022 où siégeaient :

- M. d'Izarn de Villefort, président-assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Quenette, premier conseiller,

- Mme Baizet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 janvier 2022.

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N° 21MA01074

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01074
Date de la décision : 20/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-06-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Règles de procédure contentieuse spéciales. - Introduction de l'instance. - Intérêt à agir.


Composition du Tribunal
Président : M. D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth BAIZET
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS DELRAN BARGETON-DYENS SERGENT ALCALDE

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-01-20;21ma01074 ?
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