Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de renouvellement de son certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2000088 du 10 mars 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 9 avril 2020, M. A..., représenté par Me Dumont, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 10 mars 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 décembre 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour mention
" vie privée et familiale " dans un délai de 30 jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à défaut, de réexaminer sa situation et de lui remettre une autorisation provisoire de séjour, dans le même délai, sous la même astreinte.
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquelles le préfet aurait dû se fonder pour statuer sur sa demande de titre de séjour dès lors que l'application des stipulations du 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien, entraine une discrimination au sens de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;
- le préfet n'a pas fait usage de son pouvoir de régularisation au vu de sa vie privée et familiale ;
- la décision attaquée méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au vu de sa vie privée et familiale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juillet 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de M. A... ne sont pas fondés.
Une ordonnance du 9 juillet 2021 a clos l'instruction au 9 août 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Ury.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien né en 1980, est entré régulièrement en France le 12 août 2018, muni d'un visa C " famille de français ", obtenu à la suite de son mariage avec une ressortissante française, célébré le 1er mars 2018 en Algérie. Il s'est vu délivrer le
17 septembre 2018 un certificat de résidence en qualité de conjoint de français, valable du
23 août 2018 au 22 août 2019. M. A... relève appel du jugement du 10 mars 2020 du tribunal administratif de Montpelier qui rejette sa requête contre l'arrêté du 10 décembre 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de renouvellement de son certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. D'une part, aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence portant la mention ''vie privée et familiale'' est délivré de plein droit : (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française (...) / Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre époux ".
3. D'autre part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
4. En premier lieu, les dispositions de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leur conjoint et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Dès lors, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance ne sont pas applicables aux ressortissants algériens.
5. Les stipulations de l'article 6 paragraphe 2 de l'accord franco-algérien soumettent le renouvellement du certificat de résidence pour les conjoints de français à une condition de communauté de vie sans prévoir d'exception en cas du décès du conjoint de français. Ces stipulations sont plus restrictives que les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, qui prévoient un droit au renouvellement du titre de séjour en cas de décès du conjoint français. Toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables aux ressortissants algériens qui sont régis par l'accord franco-algérien. La différence de traitement ainsi réservée à ces ressortissants, par rapport à d'autres catégories d'étrangers soumis au code précité, résulte ainsi de l'accord international lui-même.
6. En deuxième lieu, il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur la conformité d'un traité ou d'un accord international à la Constitution. Par suite, le moyen tiré de ce que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ne prévoit pas un droit au renouvellement du titre de séjour en cas de décès du conjoint français à l'identique de celui de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en violation des dispositions de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, est inopérant.
7. En troisième lieu, comme déjà dit, les stipulations de l'accord franco-algérien régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France. Si un ressortissant algérien ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au renouvellement du titre de séjour lorsque la communauté de vie a été rompue, notamment du fait du décès du conjoint français, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Il appartient alors seulement au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressé.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a vécu en Algérie jusqu'à son arrivée en France en 2018 à l'âge de 37 ans. Le préfet de l'Hérault a notamment refusé de procéder au renouvellement du certificat de résidence en qualité de conjoint de français dont
M. A... avait bénéficié, au motif du décès de son épouse le 5 octobre 2018 à Amiens. L'intéressé est donc veuf et sans charge de famille, et il ne démontre pas ne plus avoir d'attaches familiales dans son pays d'origine. S'il se prévaut de son insertion en faisant valoir une activité professionnelle exercée depuis son arrivée en France et la présence sur le territoire national de quatre sœurs dont une de nationalité française, compte tenu notamment du caractère récent de son séjour et en l'absence d'attaches stables et anciennes en France, il ne peut être regardé comme ayant ancré définitivement sa vie privée en France. Ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'est pas davantage fondé à soutenir que le préfet, en refusant la régularisation, a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte présentées par M. A... doivent, par suite, être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 9 novembre 2021, où siégeaient :
- M. Badie, président,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Ury, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2021.
N° 20MA016043