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13/12/2021 | FRANCE | N°20MA04822

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 13 décembre 2021, 20MA04822


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par ordonnance n° 2001282 du 25 novembre 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Bastia a rejeté la requête de M. F... A... D..., de nationalité marocaine, tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 septembre 2020 par lequel le préfet de la Corse-du-Sud lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Procédure devant la Cour :

Par une requête

enregistrée le 28 décembre 2020 M. A... D..., représenté par Me Seddaiu, demande à la Cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par ordonnance n° 2001282 du 25 novembre 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Bastia a rejeté la requête de M. F... A... D..., de nationalité marocaine, tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 septembre 2020 par lequel le préfet de la Corse-du-Sud lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 28 décembre 2020 M. A... D..., représenté par Me Seddaiu, demande à la Cour :

1°) de l'admettre à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle pour l'instance devant le tribunal adminsitratif ;

2°) d'annuler cette ordonnance ;

3°) d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2020 pris à son encontre par le préfet de la Corse-du-Sud ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Corse-du-Sud de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation au titre de l'asile ;

5°) en tout état de cause, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif de Bastia a déclaré sa requête irrecevable comme tardive, alors que le délai de recours de 48 heures n'a pu courir à son égard, du fait du caractère ambigu de l'indication dans la notification de la décision querellée, des voies et délais de recours, laissant penser qu'il disposait d'un délai de deux mois ;

- s'agissant de la légalité externe, que l'arrêté querellé a été signé par M. E... qui dispose d'une délégation de signature en cas d'empêchement de M. C... qui disposait lui-même d'une délégation de pouvoir, or l'empêchement de ce dernier n'est pas justifié ;

- s'agissant de la légalité interne, ayant été blessé au Maroc au cours d'une manifestation, il craint pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine.

Par ordonnance du 28 juillet 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 septembre 2021 à 12 h 00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... Taormina, rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... D... relève appel de l'ordonnance du 25 novembre 2020 par laquelle le magistrat désigné du tribunal administratif de Bastia a rejeté sa requête comme tardive.

Sur la régularité de l'ordonnance :

2. Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

3. S'il résulte de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur, et du II de l'article R. 776-2 du code de justice administrative que l'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai dispose d'un délai de quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, pour en demander au président du tribunal administratif l'annulation, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté préfectoral du 22 septembre 2020 dont M. A... D... demande l'annulation, et qui lui a été notifié le même jour à 14 h 50, mentionnait que l'intéressé pouvait, " ...dans un délai de deux mois... " contester " ...la présente décision administrative... soit conformément aux dispositions des articles R. 421-1 à R. 421-5 du code de justice administrative, en saisissant le tribunal administratif de Bastia par l'application "Télérecours citoyens"... " avant de mentionner que, pour " ...contester la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et des décisions notifiées simultanément..., vous pouvez, dans un délai de 48 heures, former un recours devant la juridiction administrative... ".

4. Compte tenu de l'ambiguïté qui en résulte, le magistrat désigné du tribunal administratif de Bastia ne pouvait, comme il l'a fait, opposer à M. A... D... le délai de recours de 48 heures et rejeter comme tardive sa demande. Par suite, il y a lieu d'annuler l'ordonnance attaquée et de statuer sur la requête de M. A... D... par la voie de l'évocation.

Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :

5. Aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle : " L'aide juridictionnelle peut être demandée avant ou pendant l'instance ". Aux termes de l'article 20 de cette loi : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. (...) ".

6. M. A... D..., déjà représenté par un avocat, ne justifie pas du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau d'aide juridictionnelle compétent et n'a pas joint à son appel une telle demande. Aucune situation d'urgence ne justifie qu'il soit fait application, en appel, quand bien même l'intéressé demande le bénéfice de l'aide juridictionnelle au titre de la première instance, des dispositions de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991. Sa demande d'aide juridictionnelle provisoire ne peut, dans ces conditions, qu'être rejetée.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

7. En premier lieu, M. A... D... ne conteste pas que M. E..., directeur de cabinet du sous-préfet, disposait d'une délégation de signature pour signer l'arrêté attaqué. En se bornant à soutenir, sans autre précision, qu'il n'est pas justifié de l'empêchement des autorités qui disposait également d'une délégation de signature, et, en particulier, de M. C..., M. A... D... ne met pas sérieusement en doute la compétence de l'auteur de l'acte. Par suite, le moyen formulé à ce titre doit être écarté.

8. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

9. En l'espèce, les pièces produites par le requérant, soit deux témoignages non circonstanciés faisant état d'une agression lors d'une manifestation dont ni le lieu, ni la date ne sont même précisés, et un certificat médical en date du 4 juin 2012 faisant état d'une incapacité de 90 jours, ne sauraient, à elles seules, établir la réalité des risques qu'il soutient encourir en cas de retour dans son pays d'origine, alors qu'il n'explicite pas les raisons pour lesquelles il n'a pas demandé le bénéfice de l'asile ni en Espagne où il aurait résidé depuis 2017, ni en France où il soutient qu'il était, à la date de l'arrêté attaqué, présent depuis quatre mois. Dès lors, le moyen formulé à ce titre n'est pas fondé et doit, par suite, être écarté.

10. Compte tenu de ce qui précède, les conclusions de M. A... D... tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 septembre 2020 pris à son encontre par le préfet de la Corse-du-Sud doivent être rejetées, ensemble ses conclusions formulées à fin d'injonction et au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 2001282 du 25 novembre 2020 rendue par le magistrat désigné du tribunal administratif de Bastia est annulée.

Article 2 : La demande formulée par M. A... D... devant le tribunal administratif de Bastia est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Corse-du-Sud.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2021, où siégeaient :

- Mme Laurence Helmlinger, présidente de la Cour,

- M. B... Taormina, président assesseur,

- M. Olivier Guillaumont, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 décembre 2021.

N° 20MA04822 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA04822
Date de la décision : 13/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: M. Gilles TAORMINA
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : SEDDAIU

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-12-13;20ma04822 ?
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