Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... a demandé au tribunal des pensions militaires de Marseille d'annuler la décision du 20 novembre 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité du fait de l'aggravation de l'infirmité " névrose anxieuse avec troubles fonctionnels. Insomnies très accusées. Troubles hypocondriaques " au titre de laquelle il percevait depuis le 5 juillet 2004 pension concédée à titre définitif à compter du 18 avril 2000.
Par jugement n° 17/00144 du 31 janvier 2019, le tribunal des pensions de Marseille a annulé la décision ministérielle du 20 novembre 2017 et reconnu le droit de l'intéressé à bénéficier d'une pension au titre de l'infirmité " état de stress post-traumatique, névrose anxieuse d'intensité sévère, associé à des troubles bipolaires " à un taux de 80%, dont 60% imputable au service, à compter du 20 juin 2015.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 1er avril 2019, sous le n° 19/12, par la Cour régionale des pensions militaires d'Aix-en Provence, et un mémoire, enregistré le 26 novembre 2019, la ministre des armées relève appel du jugement du tribunal des pensions militaires de Marseille du 31 janvier 2019 dont elle demande l'annulation.
Elle soutient que :
- aucune révision de la pension concédée à M. A... ne peut être accordée, dès lors qu'aucune aggravation du l'infirmité pensionnée n'est établie ;
- le taux de 40%, reconnu comme non imputable au service aux termes du jugement du tribunal des pensions du 25 mars 2004, devenu définitif, ne peut être remis en question sans que soit méconnue l'autorité de la chose jugée.
Par un mémoire, enregistré le 6 juin 2019 par la Cour régionale des pensions militaires d'Aix-en-Provence, M. A..., représenté par Me Tierny, conclut au rejet de la requête de la ministre des armées et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que les moyens invoqués par la ministre ne sont pas fondés.
Par décision du 24 mai 2019, M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle totale.
Par acte de transmission du dossier, enregistré le 1er novembre 2019, et en application des dispositions du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif, la cour administrative d'appel de Marseille est saisie de la présente affaire.
M. A..., représenté par l'association ANTIAM qui exerce la tutelle de M. A..., a produit un mémoire, enregistré le 12 novembre 2021, qui n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Renault,
- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,
- et les observations de Me Tierny, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 5 juillet 2004, le ministre de la défense a concédé à M. B... A..., né le 2 janvier 1965, une pension militaire d'invalidité au taux de 40% au titre de l'infirmité " névrose anxieuse avec troubles fonctionnels. Insomnies très accusées. Troubles hypocondriaques ". Il a demandé, le 20 janvier 2015, une révision de sa pension en raison de l'aggravation de son infirmité. Par décision du 20 novembre 2017, la ministre des armées a rejeté sa demande. Cette dernière relève appel du jugement du 31 janvier 2019 par lequel le tribunal des pensions de Marseille a annulé sa décision et reconnu à M. A... un droit à pension pour l'infirmité " état de stress post-traumatique, névrose anxieuse d'intensité sévère, associé à des troubles bipolaires " à un taux de 80%, dont 60% imputable au service.
Sur les droits à pension de M. A... :
2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en vigueur à la date de la demande de M. A... : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service. ". Il résulte de l'instruction que l'infirmité au titre de laquelle M. A... bénéficie d'une pension militaire d'invalidité résulte d'une aggravation, à l'occasion du service, d'une infirmité étrangère au service, en l'espèce un trouble bipolaire sous-jacent.
3. Aux termes de l'article L. 29 code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, en vigueur à la date de la demande de M. A... : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. Cette demande est recevable sans condition de délai. La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la révision d'une pension pour aggravation de l'infirmité est subordonnée à la constatation médicale d'une aggravation de cette infirmité postérieurement à la concession d'une pension d'invalidité à titre définitif, sans que puisse être remise en cause, à infirmité inchangée, la part imputable au service telle qu'elle a été fixée par une décision antérieure devenue définitive.
4. Il résulte de l'instruction qu'une pension militaire d'invalidité a été concédée à
M. A..., à compter du 3 juillet 1967, au titre de l'infirmité " névrose anxieuse avec troubles fonctionnels. Insomnies très accusées. Troubles hypocondriaques " au taux de 20%, le taux d'invalidité étant estimé à 30% mais imputable à un état antérieur à hauteur de 10%. A la suite d'une première demande de révision de sa pension pour aggravation de cette même infirmité, le tribunal départemental des pensions des Alpes-Maritimes, par jugement du 25 mars 2004, devenu définitif, rendu sur recours de M. A... contre une décision du 26 janvier 2001 de rejet de sa demande de révision de pension, a reconnu à l'intéressé un droit à pension au taux de 40% au titre de l'infirmité déjà pensionnée, après avoir évalué à 80% l'invalidité due à cette infirmité, dont 10% était due à un état antérieur, et 30% attribuée à une origine constitutionnelle. A la suite de ce jugement, l'administration a concédé à titre définitif à M. A..., à compter du
18 avril 2000, une pension au taux de 40%, correspondant à la part de l'invalidité, estimée à 80%, imputable au service. Cette décision, qui n'a fait l'objet d'aucun recours, est devenue définitive. Le docteur C..., expert mandaté par l'administration pour se prononcer sur la demande de nouvelle révision de la pension de M. A..., enregistrée le 20 janvier 2015, pour aggravation de l'infirmité pensionnée, a considéré que si le taux d'invalidité global causé par l'infirmité dont souffre M. A..., requalifiée en " état de stress post-traumatique, névrose anxieuse, d'intensité sévère, associé à des troubles bipolaires ", devait être évalué à 80%, le taux imputable au service devait être réévalué à 60%, analyse qui a été retenue par les premiers juges.
5. Si les certificats médicaux produits au soutien de la demande de révision de la pension militaire d'invalidité concédée à M. A... font état de la gravité de son infirmité, ils ne permettent pas de remettre en cause le taux d'invalidité de 80% retenu tant par l'expert que par l'administration. Dans ces conditions, l'infirmité dont souffre M. A... ne s'est pas aggravée, et cette circonstance ne permet pas de réviser, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre alors en vigueur, le taux de la pension concédée, quelle que soit la part que l'expert reconnaît comme imputable au service, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 2, seule l'aggravation du taux global de l'infirmité peut ouvrir droit à une révision à la hausse de la pension concédée, et que la part non imputable de l'invalidité aggravée par le service, telle qu'elle a été fixée par une décision antérieure devenue définitive, ne peut être remise en cause.
6. Il résulte de ce qui précède que la ministre des armées est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Marseille a annulé sa décision du 20 novembre 2017.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les sommes que M. A... demande au titre des frais qu'il a exposés soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal des pensions de Marseille du 31 janvier 2019 est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées, à M. B... A... et à Me Tierny.
Délibéré après l'audience du 23 novembre 2021, où siégeaient :
- M. Badie, président,
- M. Revert, président assesseur,
- Mme Renault, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition du greffe, le 7 décembre 2021.
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N° 19MA04858