La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/12/2021 | FRANCE | N°20MA03044

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 06 décembre 2021, 20MA03044


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Stilimmo a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 28 février 2018 par lequel le maire d'Ajaccio a opposé un sursis à statuer à sa demande de permis de construire un ensemble immobilier comportant 845 logements, un hôtel et une résidence pour personnes âgées sur un terrain cadastré section A n° 1156 au lieu-dit " Stiletto ", ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1800757 du 23 juin 2020, le tribunal administra

tif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Stilimmo a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 28 février 2018 par lequel le maire d'Ajaccio a opposé un sursis à statuer à sa demande de permis de construire un ensemble immobilier comportant 845 logements, un hôtel et une résidence pour personnes âgées sur un terrain cadastré section A n° 1156 au lieu-dit " Stiletto ", ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1800757 du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 août 2020 et 29 avril 2021, la société Stilimmo, représentée par Me Muscatelli, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 23 juin 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire d'Ajaccio du 28 février 2018 opposant un sursis à statuer à sa demande de permis de construire, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre à la commune d'Ajaccio de lui délivrer le permis sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jours de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Ajaccio la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation, en considérant que le projet d'éco-quartier pour lequel elle sollicitait un permis de construire était incompatible avec l'orientation d'aménagement et de programmation n°2 " promouvoir un développement équilibré et répondre aux besoins en logement " du plan d'aménagement et de développement durable de la commune d'Ajaccio ;

- ce projet d'éco-quartier s'implante majoritairement dans la zone d'extension urbaine prévue par la cartographie de cette orientation d'aménagement et de programmation ; par son caractère mixte d'éco-quartier constitué de logements et d'activités et situé à proximité du nouveau centre hospitalier, il répond aux objectifs de cette orientation, qui vise notamment à favoriser la mixité sociale et l'émergence d'éco-quartiers ;

- il n'impacte que très marginalement l'espace agricole situé en limite du terrain d'assiette du projet, lequel est ainsi compatible avec l'orientation de programmation n°3 " protéger et mettre en valeur les espaces naturels et agricoles " ; 65 % de la surface du projet sont d'ailleurs consacrés à la réalisation d'espaces verts ;

- le projet ne porte pas atteinte aux emplacements réservés pour des équipements publics.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 février et 5 mai 2021, la commune d'Ajaccio, représentée par la SELARL Parme Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Stilimmo une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Les parties ont été informées, par lettre du 7 avril 2021, qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire avant la fin du troisième trimestre 2021 et que l'instruction pourrait être close à partir du 7 mai 2021 sans information préalable.

Par une ordonnance du 13 septembre 2021, la clôture immédiate de l'instruction a été prononcée en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Balaresque,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me Santoni substituant Me Muscatelli, représentant la société Stilimmo.

Considérant ce qui suit :

1. La société Stilimmo relève appel du jugement du 23 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2018 par lequel le maire d'Ajaccio a opposé un sursis à statuer à sa demande de permis de construire un ensemble immobilier comportant 845 logements, un hôtel et une résidence pour personnes âgées, sur un terrain cadastré section A n° 1156 au lieu-dit " Stiletto ", ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente mentionnée à l'article L. 153-8 prescrit l'élaboration du plan local d'urbanisme et précise les objectifs poursuivis et les modalités de concertation, conformément à l'article L. 103-3. (...) / L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable ". Aux termes de l'article L. 424-1 de ce code : " (...) Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus aux articles L. 102-13, L. 153-11 et L. 311-2 du présent code et par l'article L. 331-6 du code de l'environnement. (...) Le sursis à statuer doit être motivé et ne peut excéder deux ans. (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 151-2 du même code : " Le plan local d'urbanisme comprend : / 1° Un rapport de présentation ; / 2° Un projet d'aménagement et de développement durables ; / 3° Des orientations d'aménagement et de programmation ; / 4° Un règlement ; / 5° Des annexes. / Chacun de ces éléments peut comprendre un ou plusieurs documents graphiques. Ces documents graphiques peuvent contenir des indications relatives au relief des espaces auxquels il s'applique. "

3. Il résulte de ces dispositions que si le projet d'aménagement et de développement durable n'est pas directement opposable aux demandes d'autorisation de construire, il appartient à l'autorité compétente de prendre en compte les orientations d'un tel projet, dès lors qu'elles traduisent un état suffisamment avancé du futur plan local d'urbanisme, pour apprécier si une construction serait de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l'exécution de ce plan.

4. Il ressort des pièces du dossier que le projet de plan d'aménagement et de développement durables (PADD), élaboré par la commune d'Ajaccio dans le cadre de la révision de son plan local d'urbanisme et présenté lors de la séance du conseil municipal du 21 mars 2016, prévoyait des orientations précises tenant notamment à la limitation de l'extension urbaine.

Comme l'a relevé le tribunal, la partie consacrée à la promotion d'un développement urbain équilibré était accompagnée en particulier d'une carte de synthèse traduisant la volonté de la commune de circonscrire l'extension urbaine. Sur cette carte de synthèse, le terrain d'assiette du projet litigieux est situé dans une zone tampon, matérialisée par un trait noir séparant, au Nord, une zone dans laquelle une " densification lente " et la coordination de projets urbains autour de l'hôpital du Stiletto sont envisagées et, au Sud, une zone consacrée aux espaces naturels et agricoles. Le projet litigieux, qui a pour objet un ensemble immobilier comportant 845 logements, un hôtel et une résidence pour personnes âgées, ne correspond ni à l'objectif de densification lente, ni à celui de développement urbain coordonné avec le centre hospitalier, pouvant s'accorder avec les orientations retenues par le projet d'aménagement et de développement durables pour la zone située au Nord du terrain d'assiette. Contrairement à ce que soutient la requérante, le fait que ce projet se présente comme un " éco-quartier " et que 65% de sa surface soient consacrés à des espaces verts ne saurait permettre de regarder que sa réalisation s'identifie à l'objectif de protection et de mise en valeur des espaces naturels et agricoles correspondant à l'orientation générale retenue pour la zone située au Sud du terrain d'assiette du projet, alors que ce terrain est constitué d'une parcelle non bâtie, majoritairement entouré d'espaces naturels ou agricoles. Dans ces conditions, le maire d'Ajaccio a pu, sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation, considérer que le projet litigieux, en flagrante contrariété avec les orientations précises retenues par le projet d'aménagement et de développement durables pour les zones à la limite desquelles se situe le terrain d'assiette du permis sollicité, était de nature à compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme au sens des dispositions précitées de l'article L. 153-11.

5. Il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation du sursis à statuer opposé par le maire d'Ajaccio à sa demande de permis de construire ainsi qu'à l'annulation du rejet de son recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Ajaccio, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par la société Stillimo. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de cette dernière la somme de 1 500 euros à verser à la commune d'Ajaccio sur le fondement de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Stilimmo est rejetée.

Article 2 : La société Stilimmo versera à la commune d'Ajaccio la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Stilimmo et à la commune d'Ajaccio.

Copie en sera adressée au préfet de Corse-du-Sud.

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2021, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme Balaresque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 décembre 2021.

3

N° 20MA03044


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03044
Date de la décision : 06/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Nature de la décision. - Sursis à statuer.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Claire BALARESQUE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SELARL PARME AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-12-06;20ma03044 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award