Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par jugement n° 1906831 du 20 février 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 28 février 2020, Mme A... B..., représentée par la SCP d'avocats Dessalces, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 20 février 2020 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2019 du préfet de l'Hérault ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant mention "vie privée et familiale" dès la notification du présent arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé quant à sa réponse au moyen tiré de ce que le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée par son refus de titre de séjour pour prendre l'obligation de quitter le territoire français en litige.
Sur le refus de titre de séjour :
- la décision en litige est insuffisamment motivée ;
- la décision en litige méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- le préfet s'est cru à tort lié par son refus de titre de séjour pour prendre la mesure d'éloignement en litige ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 juin 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés en se rapportant à ses écritures en défense de première instance.
Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille par une décision du 4 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la Cour a décidé, par décision du 24 août 2021, de désigner M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-1 du code de justice administrative.
Le rapport de Mme Carassic a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B..., de nationalité marocaine, a demandé le 15 octobre 2019 au préfet de l'Hérault un titre de séjour au regard de sa vie privée et familiale. Par l'arrêté en litige du 26 novembre 2019, le préfet de l'Hérault a refusé de faire droit à sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français. La requérante a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de cet arrêté. Par le jugement dont Mme A... B... relève appel, les premiers juges ont rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Contrairement à ce que soutient la requérante, les premiers juges, en mentionnant que le préfet, qui a examiné les conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de la requérante, ne s'est pas cru à tort lié par son refus de titre de séjour pour prendre la mesure d'éloignement en litige, ont suffisamment motivé leur réponse à ce moyen et n'ont pas entaché d'irrégularité le jugement attaqué pour ce motif.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision en litige ne comporte en appel aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de Montpellier par Mme A... B.... Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 2 du jugement attaqué.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".
5. La requérante est entrée en France le 25 mars 2010 sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention "regroupement familial" à la suite de son mariage au Maroc le 28 août 2007 avec un compatriote vivant régulièrement en France. Elle a obtenu ainsi une carte de résident. A la suite de son divorce, cette carte lui a été retirée le 15 juin 2012 et il lui a été fait obligation de quitter le territoire français. Elle s'est toutefois maintenue irrégulièrement en France. Si elle soutient entretenir depuis le 8 janvier 2018 une relation sentimentale avec un compatriote titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle et qu'un enfant, que le père a reconnu, est né en France le 9 octobre 2018 de leur union, Mme A... B... ne produit aucune pièce de nature à établir, ni que le couple partagerait une vie commune, ni que le père contribuerait à l'entretien et à l'éducation de son enfant. En tout état de cause, cette relation est récente à la date de la décision en litige. La requérante n'est pas dépourvue d'attache au Maroc où elle a vécu selon ses propres dires jusqu'à l'âge de 28 ans et où résident ses cinq frères et sœurs. La seule circonstance qu'elle a exercé des fonctions d'agent de propreté ne permet pas par elle-même d'établir son intégration socio-professionnelle en France. Dans ces conditions, Mme A... B... n'établit pas avoir fixé en France le centre de ses intérêts privés et familiaux. Par suite, le préfet n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme A... B... au respect de sa vie privée et familiale. Ainsi, le refus litigieux du droit au séjour de la requérante en France ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
6. Il ressort des pièces du dossier que le préfet, qui a mentionné dans la décision en litige que les conséquences d'une obligation de quitter le territoire français à son encontre ne sont pas disproportionnées par rapport au droit au respect de sa vie privée et familiale et que l'intéressée ne démontrait pas son impossibilité de regagner son pays d'origine, ne s'est pas cru à tort lié par son refus de titre de séjour pour prendre la mesure d'éloignement en litige.
7. En l'absence d'une argumentation spécifique dirigée contre l'obligation de quitter le territoire français, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par les mêmes motifs que ceux indiqués au point 5 concernant le refus de titre de séjour.
8. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
9. La décision en litige n'a pas pour effet de séparer la requérante de son enfant. Rien ne s'oppose à ce que celui-ci, eu égard à son jeune âge, regagne avec sa mère son pays d'origine, dès lors que la requérante n'établit, ainsi qu'il a été dit au point 5, ni la réalité ni l'intensité des liens entre l'enfant et son père, ni qu'il exercerait conjointement l'autorité parentale sur cet enfant ainsi que le prétend la requérante. Dans ces conditions, Mme A... B... n'est pas fondée à soutenir que le préfet n'aurait pas pris en compte l'intérêt supérieur de son enfant en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent en tout état de cause être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me Marie-Pierre Dessalces.
Copie pour information sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 2 novembre 2021, où siégeaient :
- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Barthez, président assesseur,
- Mme Carassic, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 novembre 2021.
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N° 20MA01036