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08/11/2021 | FRANCE | N°20MA02198

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 08 novembre 2021, 20MA02198


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2019 par lequel le préfet du Gard l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1904140 du 14 janvier 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistr

e le 7 juillet 2020, M. A..., représenté par Me Viens, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugeme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2019 par lequel le préfet du Gard l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1904140 du 14 janvier 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juillet 2020, M. A..., représenté par Me Viens, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 14 janvier 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2019 du préfet du Gard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à Viens sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit, dès lors qu'il est réadmissible en Italie ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît également le premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale, dès lors qu'il est réadmissible en Italie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2021, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mai 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la cour a désigné M. Marcovici, président assesseur de la 5ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Merenne a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant nigérian, fait appel du jugement du 14 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet du Gard du 18 novembre 2019 l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office.

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 3, paragraphe 1, de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ".

3. M. A... est entré en France en décembre 2016. Il est le père d'un enfant né le 6 septembre 2017 de l'union avec une ressortissante nigériane titulaire d'une carte de résident. Celle-ci est également la mère de deux enfants, nés en 2010 et en 2012, dont le second est de nationalité française. Le concubinage allégué avant cette date est établi par les pièces du dossier. Ainsi, l'épouse de M. A..., qui a la charge exclusive d'un enfant de nationalité française du fait du désintérêt du père pour cet enfant, et est titulaire d'une carte de résident ainsi qu'il a été dit, a vocation à résider en France. L'exécution de l'arrêté attaqué conduirait à séparer M. A... de son enfant et de sa mère. Par suite, alors même que le mariage intervenu le 7 décembre 2019 entre M. A... la mère de son enfant, qui confirme la solidité des liens établis entre eux, est postérieur à la date de l'arrêté contesté et qu'une partie des familles de M. A... et de son épouse réside au Nigéria, l'arrêté contesté porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale, protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et méconnaît le premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

4. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande, et à demander l'annulation de l'arrêté du 18 novembre 2019 du préfet du Gard.

5. Il n'est dès lors pas nécessaire de se prononcer sur les autres moyens invoqués par M. A... à l'encontre de cet arrêté.

Sur les frais liés au litige :

6. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 200 euros à Me Viens, avocat de M. A..., sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 14 janvier 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes et l'arrêté du 18 novembre 2019 du préfet du Gard sont annulés.

Article 2 : L'État versera à Me Viens la somme de 1 200 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Viens et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 4 octobre 2021, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Merenne, premier conseiller,

- Mme Balaresque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 novembre 2021.

2

No 20MA02198


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02198
Date de la décision : 08/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS VIENS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-11-08;20ma02198 ?
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