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28/10/2021 | FRANCE | N°21MA01846

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 28 octobre 2021, 21MA01846


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2021 du préfet de l'Hérault portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2100963 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 21MA01846 le 14 mai 2021, M. A..., représenté par Me Mazas, demande à la Cour

:

1°) d'annuler ce jugement du 15 avril 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 26 janvi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2021 du préfet de l'Hérault portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2100963 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 21MA01846 le 14 mai 2021, M. A..., représenté par Me Mazas, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 avril 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 26 janvier 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour " salarié " et, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- il convient de relever le moyen d'ordre public tiré de la méconnaissance du champ d'application de la loi dès lors que le tribunal administratif a appliqué à tort à sa situation les dispositions du 2° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'elle relève du 1° du même article, lequel comporte, de surcroît, des dispositions spécifiques en cas de perte involontaire d'emploi ;

- la motivation du point 4 du jugement est contradictoire avec celle du point 6 en violation de l'article L. 9 du code de justice administrative ;

- la motivation du point 6 de ce jugement est entachée d'une dénaturation des faits ;

- les premiers juges ont mentionné un mémoire en intervention volontaire sans toutefois statuer sur la recevabilité de ce dernier eu égard à la clôture d'instruction ;

- ils ont méconnu le principe du contradictoire, les dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative et celles de l'alinéa 2 de l'article R. 741-2 du même code ;

Sur l'arrêté préfectoral contesté :

- la décision de refus de séjour et celle portant obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées en droit ;

- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions de l'alinéa 2 du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'avis de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) est illégal en ce que l'employeur n'avait pas à déposer une offre d'emploi ni à effectuer des diligences afin de s'assurer de la possibilité de recruter le requérant au regard des articles L. 5221-8 et L. 5312-1 du code du travail ;

- la décision viole les dispositions de l'article R. 5221-3 du code du travail et de l'article R. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2021, le préfet de l'Hérault demande à la Cour de rejeter la requête de M. A....

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées par un courrier du 6 octobre 2021, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la solution du litige était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que la Cour est susceptible de substituer à l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 3 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987, s'agissant de la base légale de la décision refusant de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention " salarié ".

Le 12 octobre 2021, M. A... a produit, en réponse à ce moyen d'ordre public, un mémoire qui a été communiqué.

II. Par une requête, enregistrée sous le n° 21MA01847 le 14 mai 2021, M. A..., représenté par Me Mazas, demande à la Cour :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du 15 avril 2021 ;

2°) de suspendre l'exécution de l'arrêté préfectoral du 26 janvier 2021 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour " salarié " et, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- eu égard en particulier à sa situation financière, l'exécution du jugement attaqué aura des conséquences difficilement réparables pour lui-même ; il en est de même pour son employeur qui a dû mettre un terme à son engagement sous peine de sanction pénale ;

- les moyens précités de la requête au fond, articulés à l'encontre de l'arrêté préfectoral contesté, présentent un caractère sérieux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les conditions du sursis à exécution du jugement attaqué et de la suspension de l'arrêté préfectoral contesté ne sont pas remplies et que les moyens soulevés ne sont pas sérieux.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bernabeu a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 26 janvier 2021, le préfet de l'Hérault a refusé de renouveler le titre de séjour " salarié " dont était titulaire M. A..., ressortissant marocain né le 20 novembre 1989, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. L'intéressé relève appel du jugement du 15 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité.

2. Les affaires enregistrées sous les n° 21MA01846 et 20MA01847 sont dirigées contre le même jugement et le même arrêté préfectoral, et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

Sur la régularité du jugement :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. (...) ".

4. Contrairement à ce que soutient M. A..., les premiers juges ont visé le moyen tiré de la violation des dispositions des articles R. 5221-3 du code du travail et R. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et y ont répondu au point 5 du jugement attaqué. Si l'intéressé critique la teneur de la réponse apportée à ce moyen, une telle contestation relève du bien-fondé du jugement et non de sa régularité.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...) Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". L'absence de communication à une partie, en temps utile pour y répondre, d'un mémoire ou de pièces jointes à un mémoire, sur lesquels le tribunal administratif a fondé son jugement, entache la procédure suivie d'irrégularité.

6. Si M. A... fait valoir qu'il s'est vu communiquer par le tribunal administratif de Montpellier le mémoire en défense du préfet de l'Hérault sans disposer, eu égard à sa teneur, de la possibilité d'y répondre en temps utile, il ressort cependant du dossier de première instance que ce mémoire a été enregistré au greffe du tribunal administratif le 25 mars 2021 et communiqué au conseil du requérant le jour même, par mise à disposition sur l'application Télérecours. Ainsi, la date de l'audience ayant été fixée le 1er avril 2021 et la clôture de l'instruction étant intervenue trois jours francs avant cette dernière, en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, l'intéressé a disposé d'un délai suffisant pour présenter une éventuelle réplique à ce mémoire qui ne comportait qu'une brève argumentation. En outre, la seule circonstance que le tribunal a jugé son affaire dans un délai d'un mois et trois jours suivant l'enregistrement de sa requête alors qu'habituellement, les affaires du même type sont jugées dans un délai de trois mois ne saurait révéler par elle-même une quelconque atteinte au caractère contradictoire de la procédure. Le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le tribunal administratif n'aurait respecté ni le principe du contradictoire ni les dispositions précitées au point 5.

7. En troisième lieu, si M. A... soutient que les premiers juges ont mentionné un mémoire en intervention volontaire sans toutefois statuer sur la recevabilité de ce dernier, il résulte de l'instruction que ce mémoire en intervention est toutefois parvenu au greffe du tribunal administratif, le 30 mars 2021, soit postérieurement à la clôture automatique de l'instruction intervenue trois jours francs avant la date d'audience fixée au 1er avril 2021. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges n'ont pas statué explicitement dans les motifs du jugement sur la recevabilité d'une telle intervention parvenue après clôture de l'instruction.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Montpellier, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments des parties, a répondu aux moyens dont il était saisi. Par suite, le jugement dont M. A... relève appel est suffisamment motivé.

9. En dernier lieu, si le requérant soutient que le jugement attaqué est entaché d'une méconnaissance du champ d'application de la loi, d'une contradiction de motifs ainsi que d'une dénaturation des pièces du dossier, ces moyens se rattachent au bien-fondé du jugement et non à sa régularité.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

10. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a bénéficié d'un titre de séjour " salarié " valable du 12 décembre 2018 au 11 décembre 2019 en se prévalant d'un contrat à durée indéterminée conclu le 1er février 2018 avec la société AMS et visé par les autorités compétentes. L'intéressé, licencié le 31 mars 2019, a sollicité auprès du préfet le renouvellement de son titre de séjour en se prévalant d'un nouveau contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la société OHM Plac et joint. Avant que ne soit prise la décision en litige, M. A... a bénéficié de récépissés de demande de carte de séjour l'autorisant à travailler le 2 décembre 2019 valable jusqu'au 11 juin 2020, le 23 juin 2020 valable jusqu'au 22 septembre 2020 et le 17 décembre 2020 valable jusqu'au 16 mars 2021.

En ce qui concerne la substitution de base légale :

11. Aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum et qui ne relèvent pas de l'article 1er du présent accord, reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention salarié éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. / Après trois ans de séjour régulier en France, les ressortissants marocains visés à l'alinéa précédent peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans. Il est statué sur leur demande en tenant compte des conditions d'exercice de leurs activités professionnelles et de leurs moyens d'existence. Les dispositions du deuxième alinéa de l'article 1er sont applicables pour le renouvellement du titre de séjour après dix ans (...) ". L'article 9 du même accord stipule en outre que : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) ". Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : (...) 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". / La carte de séjour est prolongée d'un an si l'étranger se trouve involontairement privé d'emploi. Lors du renouvellement suivant, s'il est toujours privé d'emploi, il est statué sur son droit au séjour pour une durée équivalente à celle des droits qu'il a acquis à l'allocation d'assurance mentionnée à l'article L. 5422-1 du code du travail ".

12. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'arrêté préfectoral contesté, que le préfet de l'Hérault, alors même que la situation des ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France est régie par les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, a fondé sa décision sur les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ainsi méconnu le champ d'application de la loi. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Le refus de titre de séjour opposé à M. A... trouve son fondement dans les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, qui peuvent être substituées aux dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que cette substitution de base légale, sur laquelle l'intéressé a pu présenter des observations, ne prive celui-ci d'aucune garantie.

En ce qui concerne les moyens soulevés par M. A... :

13. En premier lieu, l'arrêté préfectoral contesté vise les articles de l'accord franco-marocain relatifs aux travailleurs, les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il a fait application ainsi que les articles " L. 5222-1 et suivants et R. 5221-1 et suivants du code du travail " qui correspondent au titre II de ce code intitulé " travailleurs étrangers ". Par ailleurs, le préfet a mentionné le fondement légal de la demande de titre de séjour de M. A... ainsi que les dispositions du code du travail qui justifient sa décision de refus compte tenu du changement d'employeur avant la deuxième année de validité de son titre de séjour sans que ne soient respectées par l'employeur les formalités préalables à l'embauche d'un salarié étranger. L'erreur de plume, quant à l'article visé qui est le R. 5221-5, abrogé, au lieu du R. 5221-3 du code du travail, n'a pu induire en erreur le requérant sur la motivation de la décision contestée. En outre, l'arrêté litigieux vise les dispositions des articles R. 311-1 à R. 317-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce qui inclut nécessairement l'article R. 311-6, tandis qu'il n'avait pas à viser l'alinéa 2 du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne lui était pas applicable en qualité de ressortissant marocain. Enfin, la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, ainsi qu'il a été dit, et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation en droit doit être écarté.

14. En deuxième lieu, M. A... soutient que la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'alinéa 2 du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'ayant été privé involontairement d'emploi, il aurait dû bénéficier d'un prolongement de la durée de validité de son titre de séjour en qualité de salarié d'une durée d'un an. Toutefois, ainsi qu'il a été exposé au point 12 du présent arrêt, l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée et, traitant de ce point au sens de l'article 9 de cet accord, il fait obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, M. A... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-10 précité qui ne sont pas applicables aux ressortissants marocains.

15. En troisième lieu, et d'une part, aux termes de l'article L. 5221-5 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / (...) / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ". Aux termes de l'article R. 5221-1 de ce code, dans sa version alors applicable : " Pour exercer une activité professionnelle salariée en France, les personnes suivantes doivent détenir une autorisation de travail (...) : / 1° Etranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ; (...) ". Les dispositions de l'article R. 5221-2 du même code, dans leur version applicable, prévoient en outre les catégories de personnes dispensées de l'autorisation de travail prévue à l'article R. 5221-1 précité, au titre desquelles ne figurent pas les étrangers inscrits sur la liste des demandeurs d'emploi tenue par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 du même code. En outre, aux termes de l'article R. 5221-11 dudit code, alors en vigueur : " La demande d'autorisation de travail relevant des 4°, 8°, 9°, 13° et 14° de l'article R. 5221-3 est faite par l'employeur (...) ". Aux termes de cet article R. 5221-3, dans sa version applicable : " L'autorisation de travail peut être constituée par l'un des documents suivants : (...) / 8° La carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", délivrée en application du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou le visa de long séjour valant titre de séjour mentionné au 7° de l'article R. 311-3 du même code, accompagné du contrat de travail visé. Elle autorise à exercer une activité professionnelle salariée dans le respect des termes de l'autorisation de travail accordée. A l'issue de la deuxième année de validité, elle autorise à exercer toute activité professionnelle salariée ". Aux termes de l'article R. 5221-20 du même code, dans sa version applicable : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; (...) ".

16. D'autre part, aux termes de l'article L. 5221-8 du code du travail : " L'employeur s'assure auprès des administrations territorialement compétentes de l'existence du titre autorisant l'étranger à exercer une activité salariée en France, sauf si cet étranger est inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi tenue par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1. ".

17. M. A... doit être regardé comme excipant de l'illégalité de l'avis défavorable émis par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) au motif que la SARL OHM Plac et joint, son employeur, ne justifiait pas, conformément aux dispositions précitées du 1° de l'article R. 5221-20 du code du travail, avoir déposé une annonce auprès des organismes concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail. Si M. A... soutient que son employeur n'avait pas à justifier d'une telle recherche dès lors qu'il était inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi auprès de Pôle emploi, il résulte cependant des dispositions précitées au point 15 que l'étranger désireux d'exercer une activité professionnelle en France doit être titulaire d'une autorisation de travail demandée par son employeur. Ni les dispositions précitées au même point, de l'article R. 5221-2 du même code, dans sa version applicable, prévoyant les catégories de personnes dispensées de l'autorisation de travail prévue à l'article R. 5221-1 précité, ni celles de l'article L. 5221-8 du code du travail, invoquées par le requérant et qui décrivent les obligations à la charge de l'employeur qui doit vérifier l'existence du titre autorisant l'étranger à exercer une activité salariée en France, n'ont pour objet ou pour effet de dispenser l'employeur de procéder à une recherche d'emploi en cas d'embauche d'un étranger figurant sur la liste des demandeurs d'emploi. Un tel moyen doit donc être écarté.

18. En quatrième lieu, il résulte des dispositions, précitées au point 15, de l'article R. 5221-3 du code du travail qu'à l'issue de la deuxième année de validité de la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", son titulaire est autorisé à exercer toute activité professionnelle salariée. Aux termes de l'article R. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droits d'asile : " Le récépissé de la demande de renouvellement d'une carte de séjour permettant l'exercice d'une activité professionnelle autorise son titulaire à travailler ". Il ressort des pièces du dossier que le changement d'employeur de M. A... est intervenu avant l'échéance de deux ans suivant la délivrance de son titre de séjour " salarié ", la circonstance qu'il a pu bénéficier d'autorisations provisoires de travail renouvelées successivement, comme il a été rappelé au point 10 du présent arrêt, étant sans incidence. Dès lors, c'est sans commettre d'erreur de droit que le préfet a estimé que la condition prévue à l'article R. 5221-3 du code du travail pour exercer toute activité professionnelle n'était pas remplie et que les dispositions, citées au point 15, de l'article R. 5221-20 du même code lui étaient applicables. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées et de celles de l'article R. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.

19. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... a bénéficié, depuis son entrée en France, d'un titre de séjour pluriannuel de travailleur saisonnier valable du 15 mars 2017 au 14 mars 2020, un titre de séjour travailleur temporaire valable du 9 février 2017 au 8 août 2017, puis d'une carte de séjour temporaire " salarié " valable du 12 décembre 2018 au 11 décembre 2019. Toutefois, alors que le premier titre de séjour l'autorise à occuper un ou plusieurs emplois saisonniers dont la durée cumulée ne peut excéder six mois par an, en vertu des dispositions de l'article R. 5221-23 du code du travail, M. A... ne peut se prévaloir d'une présence régulièrement autorisée en France depuis quatre ans. Les pièces produites ne permettent d'ailleurs pas d'attester de la présence en France de M. A... sur l'ensemble des années concernées. Si l'intéressé bénéficie d'un logement stable, d'opportunités professionnelles et de relations amicales, et s'il a effectué, dans le cadre d'un contrat d'intégration républicaine avec l'office français de l'immigration et de l'intégration, une formation civique de quatre jours et suivi des cours de français pour la même durée, il est célibataire et sans charge de famille alors qu'il a vécu la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine dans lequel il n'allègue pas être dénué d'attaches familiales et personnelles. Dans ces conditions, l'arrêté contesté n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....

Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution et de suspension :

20. Le présent arrêt statuant au fond, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué et à la suspension de l'exécution de l'arrêté préfectoral litigieux, qui ont été présentées par M. A..., dans sa requête enregistrée sous le n° 21MA01847, sont devenues sans objet. Il n'y a, par suite, pas lieu de statuer sur ces conclusions.

21. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution du jugement attaqué ainsi que celles tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté préfectoral litigieux, présentées par M. A..., dans sa requête n° 21MA01847.

Article 2 : La requête n° 21MA01846 et le surplus des conclusions de la requête n° 21MA01847 de M. A... sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 14 octobre 2021 où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- Mme Bernabeu, présidente assesseure,

- Mme Carotenuto, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 octobre 2021.

7

N° 21MA01846, 21MA01847

nc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01846
Date de la décision : 28/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Mylène BERNABEU
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : CABINET MAZAS - ETCHEVERRIGARAY;CABINET MAZAS - ETCHEVERRIGARAY;CABINET MAZAS - ETCHEVERRIGARAY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-10-28;21ma01846 ?
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