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28/10/2021 | FRANCE | N°20MA04685

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 28 octobre 2021, 20MA04685


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler, d'une part, l'arrêté du 28 septembre 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an et, d'autre part, l'arrêté du 16 novembre 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a assigné à résidence pour une durée de quaran

te-cinq jours.

Par l'article 1er du jugement n° 2003971, 2004645 du 20 novembre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler, d'une part, l'arrêté du 28 septembre 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an et, d'autre part, l'arrêté du 16 novembre 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par l'article 1er du jugement n° 2003971, 2004645 du 20 novembre 2020, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice a renvoyé à une formation collégiale les conclusions des demandes de M. B... tendant à l'annulation de la décision de refus d'admission au séjour, ainsi que les conclusions subséquentes à fin d'injonction de délivrance d'un titre de séjour, par l'article 2 a annulé la décision du préfet des Alpes-Maritimes du 28 septembre 2020 par laquelle il a interdit à M. B... de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an, et, par l'article 3, a rejeté le surplus des conclusions des demandes.

Par le jugement n° 2003971, 2004645 du 12 juillet 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté les conclusions des demandes de M. B... tendant à l'annulation de la décision de refus d'admission au séjour ainsi que les conclusions subséquentes.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2020 sous le n° 20MA04685, et un mémoire enregistré le 31 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Le Gars, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice du 20 novembre 2020 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes ;

2°) d'annuler les décisions du préfet des Alpes-Maritimes du 28 septembre 2020 l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination, ainsi que l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 16 novembre 2020 l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et, dans l'attente, de lui délivrer lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son conseil renonce à la part contributive de l'Etat versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le magistrat désigné a omis de statuer sur les moyens tirés de la méconnaissance des 2° et 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- son avocat n'a pas été convoqué à l'audience en ce qui concerne l'instance n° 2003971 ;

- le préfet, en l'obligeant à quitter le territoire français, a méconnu les 2° et le 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et l'assignant à résidence sont illégales dès lors que la décision de refus de titre de séjour est illégale.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 janvier 2021.

II. Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2021 sous le n° 21MA02846, M. B..., représenté par Me Le Gars, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 12 juillet 2021 ;

2°) d'annuler la décision du préfet des Alpes-Maritimes du 28 septembre 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son conseil renonce à la part contributive de l'Etat versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne la réalité de sa présence habituelle en France ;

- le tribunal administratif a procédé d'office à une substitution de motif en considérant qu'il n'établissait pas la réalité de sa résidence habituelle en France ;

- le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour ;

- la décision portant refus de séjour a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en lui refusant le droit au séjour, le préfet a méconnu le 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de séjour a été pris en méconnaissance du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a méconnu l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er octobre 2021.

III. Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2021 sous le n° 21MA02847, M. B..., représenté par Me Le Gars, demande à la Cour :

1°) de prononcer le sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nice du 12 juillet 2021 ;

2°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son conseil renonce à la part contributive de l'Etat versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner pour lui des conséquences difficilement réparables ;

- les moyens d'annulation sur lesquels est fondée sa requête au fond présentent un caractère sérieux.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er octobre 2021.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Mastrantuono a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 28 septembre 2020, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B..., ressortissant marocain né en 1989, l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an. Par un arrêté du 16 novembre 2020, il a assigné l'intéressé à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par une requête enregistrée sous le n° 20MA04685, M. B... relève appel du jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice du 20 novembre 2020 en tant qu'il a rejeté les conclusions de ses demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet des Alpes-Maritimes du 28 septembre 2020 l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination, ainsi que de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 16 novembre 2020 l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par une requête enregistrée sous le n° 21MA02846, M. B... relève appel du jugement du 12 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté les conclusions de ses demandes tendant à l'annulation de la décision du préfet des Alpes-Maritimes du 28 septembre 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour. Par une requête enregistrée sous le n° 21MA02847, il demande qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement.

Sur la jonction :

2. Les requêtes n° 20MA04685, 21MA02846 et 21MA02847 présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les requêtes n° 20MA04685 et 21MA02846 :

3. En premier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

4. Il résulte de l'instruction que M. B... est le père d'un enfant français, Ahmed, né le 11 juillet 2019 de son mariage célébré le 27 juin 2018, avec Mme A... D..., ressortissante française. Il n'est pas contesté qu'il réside de manière ininterrompue au même domicile que son épouse et que leur enfant français. Par suite, le préfet des Alpes-Maritimes, en refusant à M. B... la délivrance d'un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, a porté à l'intérêt supérieur du fils de ce dernier une atteinte méconnaissant les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) ".

6. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que M. B... doit être regardé, en raison de son mariage avec une ressortissante française, et de la communauté de vie avec celle-ci et leur fils, comme contribuant à l'entretien et à l'éducation de celui-ci. Dans ces conditions, la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît en outre les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des requêtes, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 20 novembre 2020, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice a rejeté les conclusions de ses demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet des Alpes-Maritimes du 28 septembre 2020 l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination, ainsi que de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 16 novembre 2020 l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours et que par le jugement du 12 juillet 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté les conclusions de ses demande tendant à l'annulation de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

8. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ".

9. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur la requête n° 21MA02847 :

10. La Cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête de M. B... n° 21MA02846 tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice n° 2003971, 2004645 du 12 juillet 2021, les conclusions de sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet. Il n'y a, par suite, plus lieu d'y statuer.

Sur les frais liés au litige :

11. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Le Gars, avocat de M. B..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve que Me Le Gars renonce à la perception de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 21MA02847 tendant au sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nice n° 2003971, 2004645 du 12 juillet 2021.

Article 2 : Les décisions du préfet des Alpes-Maritimes du 28 septembre 2020 refusant à M. B... la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination, ainsi que l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 16 novembre 2020 assignant M. B... à résidence pour une durée de quarante-cinq jours sont annulés.

Article 3 : Le jugement n° 2003971, 2004645 du tribunal administratif de Nice du 12 juillet 2021 est annulé et le jugement n° 2003971, 2004645 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nice du 20 novembre 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à Me Le Gars, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991

Article 6 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. B... est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Me Le Gars et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 14 octobre 2021, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- Mme Bernabeu, présidente assesseure,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 octobre 2021.

7

N° 20MA04685, 21MA02846, 21MA02847


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA04685
Date de la décision : 28/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : LE GARS;LE GARS;BARTHELEMY;GILBERT;GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-10-28;20ma04685 ?
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