Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2020 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de sa destination.
Par un jugement n° 2003394 du 30 septembre 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrée le 14 janvier et le 13 mars 2021,
Mme C..., représentée par Me Ciccolini, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 30 septembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 27 juillet 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour dans le délai des trente jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le préfet s'est considéré lié par l'avis des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;
- contrairement à l'appréciation des premiers juges, elle apporte la preuve que son enfant ne peut pas bénéficier de soins appropriés en Tunisie ;
- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision préfectorale contestée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant au motif que l'intérêt supérieur de son enfant exige qu'il demeure en France.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Ury.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante tunisienne, née le 30 décembre 1984, est entrée en France le 8 juin 2019 avec son fils né le 7 décembre 2010, munie d'un visa pour un séjour de
90 jours, et a déposé une demande de titre de séjour pour soins médicaux le 1er août 2019 en qualité d'accompagnateur d'un enfant malade. Elle relève appel du jugement du
30 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête contre l'arrêté du 27 juillet 2020 du préfet des Alpes-Maritimes rejetant sa demande, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de sa destination.
2. Aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 de ce code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".
3. En premier lieu, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, la seule circonstance que le préfet ait reproduit, aux termes de l'arrêté attaqué, l'avis émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, ne saurait établir qu'il s'est cru tenu par cet avis pour rejeter la demande présentée par l'intéressée, dès lors qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet a procédé à l'examen de la situation administrative et personnelle de Mme C... et a notamment recherché si les conséquences d'un refus de séjour n'étaient pas disproportionnées par rapport à son droit au respect de sa vie privée et familiale, et si son retour dans son pays d'origine n'était pas de nature à l'exposer à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Au demeurant, le préfet ne pouvait connaître des éléments relatifs à l'état de santé de son fils qui sont couverts par le secret médical.
4. En deuxième lieu, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, eu égard à son offre de soins et aux caractéristiques de son système de santé. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
5. Mme C... produit le certificat d'un pédopsychiatre tunisien, un article de journal ainsi que les mentions du rapport de l'UNICEF 2020 pour soutenir que les structures adaptées sont rares dans ce pays. Elle fait également valoir que l'état de santé de son fils autiste ne connaissait pas d'amélioration malgré un suivi médical en Tunisie, qu'elle rencontrerait des difficultés financières pour assumer le traitement de son enfant en Tunisie, sans d'ailleurs les établir, et que la France dispose de structures d'accueil adaptées pour enfants d'une qualité supérieure à celles disponibles en Tunisie, et notamment que son fils bénéficie d'un accompagnement médico-social par décision du 5 mai 2020 pour un suivi médical pluridisciplinaire, d'un service d'éducation et de soins à domicile et d'une scolarisation en unité localisée pour l'inclusion scolaire (ULIS) avec une aide individuelle. Cependant, ces éléments ne permettent pas de remettre en cause l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur l'existence d'un traitement approprié à l'état de santé de son enfant dans son pays d'origine. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées de l'article L. 311-12 et du 11° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
7. Il ressort des pièces du dossier que le fils A... la requérante bénéficiait, antérieurement à son arrivée en France, d'un suivi pédopsychiatrique pour enfants inadaptés mentaux. L'arrêté préfectoral contesté n'implique pas que le fils de B... C... devrait être séparé de cette dernière. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 5 et 7, en faisant obligation à Mme C... de quitter le territoire français, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas entaché son arrêté d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation de l'intéressée et de son fils.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais d'instance.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 5 octobre 2021, où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Ury, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 octobre 2021.
N° 21MA001973