Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité
de Marseille d'annuler la fiche descriptive du 10 novembre 2016 ainsi que l'arrêté du
7 novembre 2016 dont elle résulte par lesquels le ministre de la défense lui a concédé une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " Séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit traitée chirurgicalement par la méthode de Kenneth Jones avec excision d'une lésion méniscale externe en anse de seau : raideur légère en flexion (140°) et recurvatum de 2°. Origine par preuve. Blessure reçue à l'occasion du service ", au taux de 15 %, en tant que cette pension présente un caractère temporaire pour la période du 3 avril 2015 au 2 avril 2018.
Par un jugement n° 16/00110 du 17 janvier 2019, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille a rejeté la requête de M. A....
Procédure devant la Cour :
La cour régionale des pensions militaires d'Aix-en-Provence a transmis à la cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 relatif au contentieux des pensions militaires d'invalidité, la requête présentée par M. A..., enregistrée à son greffe le 15 mars 2019.
Par cette requête et des mémoires présentés les 14 avril, 21 juillet et 18 septembre 2020, M. A..., représenté par Me Mattler, dans le dernier état de ses écritures, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 janvier 2019 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille ;
2°) d'annuler la décision du 10 novembre 2016 ainsi que l'arrêté du 7 novembre 2016 par lesquels le ministre de la défense n'a fait droit à sa demande de pension militaire d'invalidité qu'à titre temporaire pour la période du 3 avril 2015 au 2 avril 2018 ;
3°) de reconnaître son droit à pension pour l'infirmité " Séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit traitée chirurgicalement par la méthode de Kenneth Jones avec excision d'une lésion méniscale externe en anse de seau : raideur légère en flexion (140°) et recurvatum de 2°. Origine par preuve. Blessure reçue à l'occasion du service ", au taux de 15 %, à titre définitif ;
4°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens de l'instance ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros en application de l'article
L. 761-1.
Il soutient que le signataire de la décision contestée n'est pas identifiable en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration et qu'il n'est pas compétent pour signer l'acte attaqué ; l'acte attaqué n'est pas motivé ; l'infirmité qu'il présente n'est pas curable contrairement aux conclusions de l'expert désigné par le tribunal, dont les conclusions doivent être écartées ; il est fondé à bénéficier d'une pension d'invalidité à titre définitif et par suite, c'est à tort qu'il a fait l'objet d'une procédure de renouvellement de pension.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 février, 19 juin et 3 septembre 2020 ainsi que le 15 mars 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Elle soutient :
- que les moyens tirés de l'illégalité externe de la décision attaquée qui n'ont pas été soulevé en première instance, sont irrecevables ;
- que s'agissant du moyen d'ordre public de la compétence du signataire de l'acte, celui-ci justifie d'une délégation régulière de signature ;
- que les autres moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 9 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 juillet 2021
à 12 heures.
Un moyen d'ordre public a été communiqué aux parties le 10 septembre 2021 tiré de l'irrecevabilité du moyen relatif à l'impossibilité d'identifier l'auteur et la qualité du signataire de la décision du 10 novembre 2016.
Vu la lettre en réponse au moyen d'ordre public, enregistrée le 17 septembre 2021, présentée par la ministre des armées.
Vu la lettre en réponse au moyen d'ordre public, enregistrée le 22 septembre 2021, présentée pour M. A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le code de la défense ;
- la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ;
- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement.
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Ury,
- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public
- et les observations de Me Mattler, pour M. A....
Une note en délibéré présentée par la ministre des armées a été enregistrée le
8 octobre 2021.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., né le 5 avril 1985, qui s'est engagé le 7 avril 2010 et a été rayé des contrôles le 7 avril 2015 en tant que soldat de première classe, a, le 3 avril 2015, demandé le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour " exérèse partielle du ménisque externe en anse de seau " à la suite d'un accident de course à pied survenu en service le 13 mars 2012. Par un arrêté du 7 novembre 2016, le ministre de la défense lui a concédé une pension pour l'infirmité " séquelles de rupture du ligament croisé antérieur du genou droit traitée chirurgicalement par la méthode de Kenneth Jones avec excision d'une lésion méniscale externe en anse de seau : raideur légère en flexion (140°) et recurvatum de 2°. Origine par preuve. Blessure reçue à l'occasion du service ", au taux de 15 %, à titre temporaire, pour la période du 3 avril 2015 au 2 avril 2018. Le requérant fait appel du jugement du 17 janvier 2019 par lequel le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la fiche descriptive du
10 novembre 2016 ainsi que de l'arrêté du 7 novembre 2016, en tant que la concession de sa pension présente un caractère temporaire pour la période du 3 avril 2015 au 2 avril 2018.
Sur la régularité des décisions en litige :
2. Lorsqu'il est saisi d'un litige en matière de pension militaire d'invalidité, il appartient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de se prononcer, s'il est saisi de moyens en ce sens, sur la régularité de la décision en litige. Toutefois, le requérant n'est pas recevable à invoquer pour la première fois en appel des moyens contestant la légalité externe de la décision en litige, sauf s'il s'agit de moyens d'ordre public.
3. En premier lieu, M. A... n'avait pas soulevé devant le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille de moyens contestant la légalité externe des décisions attaquées. Par suite, il n'est pas recevable à se prévaloir, pour la première fois, en appel ni de l'insuffisance de motivation de la décision du 10 novembre 2016, ni du non respect par cette décision des prescriptions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, et aujourd'hui codifié à l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, qui impose qu'une décision écrite prise par une des autorités administratives au sens de cette loi comporte la signature de son auteur et les mentions prévues par cet article. Au demeurant, il ressort des mentions de la décision attaquée que son auteur est M. C..., adjoint au sous-directeur des pensions.
4. En second lieu, M. C..., adjoint au sous-directeur des pensions, disposait, en vertu de la décision du ministre de la défense du 21 avril 2015, publiée au Journal Officiel de la République Française du 24 avril 2015, d'une délégation à l'effet de signer la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision ministérielle du
10 novembre 2016 doit être écarté comme manquant en fait.
Sur le bien-fondé des décisions en litige :
5. Il appartient au juge des pensions militaires d'invalidité saisi d'un litige en pleine juridiction, de se prononcer lui-même sur les droits des intéressés.
6. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors applicable, devenu l'article L. 121-1 : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 4 du même code, devenu l'article L. 121-4 : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. Il est concédé une pension : 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; (...) ". Aux termes de l'article L. 6, devenu l'article
L. 151-2 : " La pension militaire d'invalidité prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande (...) ".
Aux termes de l'article L. 7 devenu l'article L. 121-8 : " Il y a droit à pension définitive quand l'infirmité causée par la blessure ou la maladie est reconnue incurable. Il y a droit à pension temporaire si elle n'est pas reconnue incurable. (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 8 devenu les alinéas 1 et 5 de l'article L. 121-8 : " La pension temporaire est concédée pour trois années. Elle est renouvelable par périodes triennales après examens médicaux. / Au cas où la ou les infirmités résultent uniquement de blessures, la situation du pensionné doit, dans un délai de trois ans, à compter du point de départ légal défini à l'article L. 6, être définitivement fixée soit par la conversion à un taux supérieur, égal ou inférieur au taux primitif, de la pension temporaire en pension définitive, sous réserve toutefois de l'application de l'article L. 29, soit, si l'invalidité a disparu ou est devenue inférieure au degré indemnisable par la suppression de toute pension. (...) ".
7. M. A... a été victime le 13 mars 2012 d'un accident de service ayant provoqué une rupture du ligament croisé antérieur au genou droit pour lequel il a été opéré le 10 octobre 2012 puis une seconde fois le 17 novembre 2016. Il résulte des conclusions du médecin désigné par un jugement avant dire droit du 9 novembre 2017 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, que l'infirmité de M. A... entraîne un taux d'invalidité de 15 % imputable à l'accident de service du 13 mars 2012 et une instabilité ligamentaire curable. Si le caractère curable de l'infirmité dont M. A... est atteint doit être apprécié à la date de la demande de sa pension, soit au 3 avril 2015, l'expert pouvait légitimement éclairer cette appréciation au vu des soins dont l'intéressé a bénéficié ultérieurement et notamment de l'opération de ligamentoplastie intervenue le 17 novembre 2016. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que cette expertise doit être écartée des débats en ce que le médecin expert a conclu au caractère curable de son infirmité, en se fondant notamment sur des circonstances postérieures au 3 avril 2015. Contrairement à ce que soutient le requérant, cette appréciation n'est pas démentie par les autres pièces du dossier, ni l'expert médical mandaté par l'administration, ni le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité ne s'étant prononcé sur le caractère ou non curable de sa blessure, et l'intéressé ne pouvant, en tout état de cause, se prévaloir de l'expertise médicale du
15 mai 2018 laquelle a été diligentée dans le cadre de la procédure consécutive à sa demande de renouvellement de sa pension. Il est, en outre, constant qu'à la date de sa demande initiale, les séquelles de la lésion ligamentaire et méniscale de son genou étaient évolutives. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin de procéder à un complément d'expertise, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille a rejeté sa requête tendant à ce que la pension qui lui a été accordée le soit à titre définitif.
8. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux dépens et au versement des frais d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 5 octobre 2020, où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Ury, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 octobre 2021.
N° 19MA050925